Complot révolutionnaire nantais contre les modérés
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Le complot révolutionnaire nantais contre les modérés (15 brumaire an II- (5 novembre 1793) - 22 brumaire an II -(12 novembre 1793).
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[modifier] L'application de la loi des suspects avant le 5 novembre 1793
Jusqu'à Jean-Baptiste Carrier, l'application de la loi des suspects (17 septembre 1793) n'a pas été des plus féroces. En vertu de l'article 3 de ladite loi, le Comité nantais a dressé une liste des gens suspects, délivré contre eux des mandats d'arrêt et fait apposer des scellés sur leurs papiers. L'exécution de ses directives a été entachée de nombreuses irrégularités, les commissaires du Comité et La compagnie Marat ayant fâcheusement tendance à profiter des pleins pouvoirs qui leur ont été remis. Malgré tout, trois cents nantais "seulement" ont été interpellés et un certain nombre relâchés. La crise fédéraliste n'a fait qu'effleurer Nantes et, l'agitation de l'été 1793 passée, la persistance d'un complot effectif dans cette ville n'a jamais pu être démontrée, par plus par les policiers du temps que par les historiens de tous bords qui ont cherché à en retrouver les traces.
[modifier] Origine du complot contre les "modérés"
Il reste à Nantes un grand nombre de personnes qui ne se plient que de mauvaises grâces aux injonctions de la poignée de sans-culottes maîtres de la ville. Et pour ceux-là justement leur seule présence, à Nantes, en liberté, devient insupportable.L'idée d'attribuer à ces "modérés" un complot vient tout naturellement.
[modifier] Arrêté du 15 brumaire an II (5 novembre 1793)
L'affaire est rondement menée. D'abord le Comité s'efforce d'obtenir l'assentiment de Carrier. Il lui soumet donc des "lettres prises sur les "brigands", qui constatent qu'il y a eu complot à Nantes contre les autorités constituées et le représentant du peuple"... A sa séance du 15 brumaire an II (5 novembre 1793, le Comité prend un arrêté ordonnant l'incarcération de tous les négociants riches, et de tous les gens d'esprit que l'opinion désigne comme suspects.
[modifier] Arrestation des "suspects"
Il ne faut pas moins d'une semaine au Comité pour monter ensuite sa "tragi-comédie judiciaire" (Gaston Martin). Au petit matin du 22 brumaire an II (12 novembre 1793), le Comité fait battre la générale. Des pièces d'artillerie sont déployées, des piquets de soldats et de gardes nationaux mis en faction cependant que la compagnie Marat se saisissent de près de cent cinquante notables, arrachés à leur lit. Comme il s'en justifiera un peu plus tard, le Comité "n'a point attendu, pour agir, des preuves matérielles et des dénonciations". Il lui a suffi de constater que les "égoïstes, les modérés et tous les gens à grands moyens" ne se sont pas "fortement prononcés" en faveur de la Révolution jacobine. A ce titre seul ils deviennent suspects.
[modifier] Transfert des suspects à Paris
Détenus dans plusieurs prisons, les suspects se révèlent aussitôt bien encombrants. Sachant pertinemment qu'il n'y a rien de tangible à leur reprocher et que ni Carrier, ni le tribunal révolutionnaire, ni même la commission Lenoir ne voudront s'occuper d'eux ou alors se borneront à les frapper de peines légères, le Comité imagine de transférer les suspects à Paris. Là, ils n'échapperont pas au Tribunal révolutionnaire. (Procès des Nantais).L'arrêté de transfert est pris le 24 brumaire an II (14 novembre 1793) puis la liste des intéressés dressées. Jean-Baptiste Carrier ratifie le document le 26 brumaire an II (16 novembre 1793) et les détenus prennent aussitôt la route de Paris.
[modifier] L'odyssée pitoyable de ses "suspects" vers Paris
Cent trente-sept ou cent trente-six à l'origine, puis cent trente-deux, ces Nantais connaîtront une odyssée pitoyable avant d'échouer dans les geôles parisiennes. (voir Procès des Nantais). Leur procès sera un des enjeux politico-judiciaires les plus importants de l'immédiat après-Thermidor (8-14 septembre 1794). Mais qui sont-ils exactement ? Ils forment un échantillonnage assez complet de l'élite nantaise. On peut les répertorier de façon suivante:
- 47 négociants, armateurs, directeurs de fabrique ou de manufacture, courtiers, notaires,
- 42 hommes de loi et administrateurs de l'Ancien Régime et du nouveau,
- 19 gentilhommes,
- 6 ecclésiastiques,
- 5 officiers de la marine marchande,
- 4 médecins,
- 4 employés,
- 10 divers.