Félix Dzerjinski
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Feliks Dzierżyński ou Felix Edmundovitch Dzerjinski (Феликс Эдмундович Дзержинский), surnommé Felix de Fer, (11 septembre 1877 près de Vilnius, Pologne - 20 juillet 1926) était un révolutionnaire communiste d'origine polonaise, qui devint un des dirigeants de l'Union soviétique. Il fonda et dirigea la Tchéka, l'organisme de police politique devenu plus tard le KGB.
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[modifier] Un « agitateur » régulièrement emprisonné
Dzerjinski est issu d'une famille de l'aristocratie polonaise installée près de Minsk, qui faisait alors partie de l'Empire Russe. Il fut exclu de l'école pour « activité révolutionnaire ». A Vilno, il adhéra en 1895 à un groupement marxiste, le SDKPiL, Parti social-démocrate du Royaume de Pologne et de Lituanie fondé depuis peu.
Il passe une grande partie de sa vie en prison. Arrêté pour ses activités subversives en 1897 et 1900, il fut déporté en Sibérie, et s'en échappa les deux fois. Emigré en 1902, il devient un des lieutenants de Rosa Luxembourg et de Leo Jogiches tous les deux placés à la tête du SDKPiL. Il retourne en Russie pour prendre part à la révolution de 1905 mais fut à nouveau arrêté par l'Okhrana et emprisonné.
Au Congrès de Stockholm du POSDR en 1906, il est élu au Comité Central. Ses sympathies pour les Bolcheviks datent de cette époque. Après 1911, lorsque la scission au sein du Parti polonais envenime les rapports entre Rosa Luxembourg et Lénine,il est divisé entre sa loyauté au Parti et son amitié pour la dirigeante. Relâché en 1912, il reprend aussitôt ses activités politiques pour être à nouveau jeté en prison à Moscou. A la veille de la Révolution, Dzerjinski a passé onze années en prison, en exil ou au bagne.
[modifier] Un des dirigeants de la Révolution d'Octobre
Il fut libéré (ou peut-être s'évada-t-il ?) en mars 1917. Aussitôt, il rejoignit les rangs des bolcheviks. Avec Staline, Sverdlov, Boubnov et Ouritsky, il fut l'un des cinq membres du Comité Militaire Révolutionnaire chargé de diriger l'insurrection (couronnée de succès) et l'un des plus fermes soutiens de Lénine dans ces événements.
Son caractère considéré comme honnête et incorruptible par certains, joint à son dévouement sans limites à la cause lui valut une rapide reconnaissance et le surnom de « Félix de fer ». Victor Serge le décrit ainsi: "idéaliste probe, implacable et chevaleresque, au profil émacié d'inquisiteur, grand front, nez osseux, barbiche rêche, une mine de fatigue et de dureté. Mais le parti avait peu d'hommes de cette trempe et beaucoup de Tchékas". Ces responsabilités et le zèle dont il fait preuve pour les assumer lui donneront aussi plus tard dans la presse occidentale le visage du bolchevik brutal assoiffé de sang.
[modifier] La mise en place de la police secrète
Lénine considérait Dzerjinski comme un héros de la Révolution d'Octobre et le pressentit pour organiser le combat contre les ennemis de l'intérieur. Le 20 décembre 1917, le Soviet des Commissaires du Peuple fonda la Vétchéka, sigle russe pour Commission panrusse extraordinaire pour combattre la contre-révolution et le sabotage (plus connue sous le nom de Tchéka). Celle-ci fut dotée de moyens importants et devint rapidement célèbre pour son combat inlassable contre « les forces contre-révolutionnaires ». Quand la Guerre Civile affecta tout le pays, Dzerjinsky commença aussi à organiser des troupes de sécurité intérieure afin de renforcer l'autorité de sa police. Lénine lui accorda un pouvoir absolu dans la lutte contre les oppositions. Il accomplira sa tâche avec intégrité et une foi aveugle dans le parti.
Pendant la guerre civile, si cet homme énergique est envoyé dans les endroits difficiles, il participe aussi aux débats qui secouent la direction Bolchévique. Hostile à Brest-Litovsk, il s'oppose avec violence à Lénine. Proche de Trotski, il se rapproche de Staline à partir de 1921 lors de l'Affaire Géorgienne où Lénine les considère tous deux comme responsables de la brutalité de la politique de russification. Il soutient Staline dans la lutte contre l'opposition quand celui-ci devient secrétaire-général en 1922, persuadé que la démocratie ne peut exister à l'intérieur du Parti sans risque pour sa survie.
Les bolcheviks prirent le contrôle et développèrent le système des camp de travail de la Katorga, déjà établi et important du temps des tzars. En 1930, soit 13 ans après la révolution russe, alors qu'une caste bureaucratique monopolise le pouvoir, Staline créera une administration séparée, le Goulag, pour le gérer. le Goulag servira notamment à la répression des anciens dirigeants de la révolution et des militants communistes, déportés par milliers, accusés de toutes les déviations politiques possibles.
La Tchéka et les organisations qui lui succédèrent continuèrent à envoyer dans ces camps de nombreux « ennemis du peuple », dont la définition était suffisamment vague pour concerner toute personne à l'opinion potentiellement dangereuse pour le régime et beaucoup d'entre eux y moururent.
[modifier] Une influence grandissante, une disparition subite
Après la fin de la guerre civile en 1922, la Tchéka devint le Guépéou, une section du NKVD, mais ceci ne réduisit pas pour autant les pouvoirs de Dzerjinski : de 1921 à 1924 il fut en outre Ministre de l'Intérieur, Ministre des Communications et à la tête du Soviet Suprême de l'Économie Nationale et à ce titre sera un des artisans de la Nouvelle Economie Politique (NEP) décidée par Lénine pour restaurer l'économie dans le pays exsangue après la Guerre Civile.
Dzerjinski mourut d'une attaque cardiaque en juillet 1926 après avoir participé à une réunion très agitée au Comité Central dans laquelle il s'était violemment emporté contre Kamenev et Piatakov. Certaines sources indiqueraient qu'il aurait été empoisonné par Staline à la suite à la découverte d'un dossier concernant le passé d'agent double de Staline au sein de l'Okhrana mais il est plus probable que le surmenage, la violence des relations existantes entre les dirigeants, les risques quotidiens courus par le chef de la Guépéou se sont cumulés pour le mener, à 49 ans, à cette mort brutale.
[modifier] Un symbole de la logique du pouvoir bolchévique
Curieuse destinée que celle du fondateur de la police politique du régime bolchévique. Archétype du militant désintéressé tout entier dévoué à sa mission, Dzerjinski a été particulièrement utile pour affermir le nouveau régime. Le paradoxe, si on en juge par les témoignages de ses camarades et le soulagement que certains d'entre eux ont exprimé lors de sa disparition impromptue, c'est qu'en dépit de ses qualités, ce "vieux bolchévique" portait en lui toutes les dérives d'une dictature basée sur l'élimination efficace, car menée sans états d'âme dans la violence la plus extrême[1], de tous les adversaires du Parti. Ces derniers se trouvaient à l'extérieur mais aussi, avec la fin de la Guerre Civile et les conflits de pouvoir qui ont surgi à la mort de Lénine(21 janvier 1924), dans les rangs de l'appareil d'Etat. La logique stalinienne découle logiquement des pratiques inflexibles du vertueux Félix de fer.
La statue du maître de la Tchéka fut érigée sur la place de la Loubyanka près du siège du KGB où il avait tant travaillé. Elle fut enlevée en août 1991, lors de la chute du PCUS.
[modifier] Notes
- ↑ Une phrase de Dzerjinski citée par l'Humanité du 1er novembre 2001 : " Pour ceux qui ne sont pas de notre avis, quatre murs, c’est trois de trop. "