Georg Trakl
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Cet article est une ébauche à compléter concernant la littérature, vous pouvez partager vos connaissances en le modifiant. |
Poète autrichien, né à Salzbourg en 1887 et décédé à Cracovie en 1914.
Sommaire |
[modifier] Biographie
Injustement méconnu en France, Georg Trakl laissa comme témoignage de sa vie tout aussi brève qu’intense, une œuvre sulfureuse composée de quelques poèmes qui sont au nombre des plus beaux de la poésie allemande. La poésie de Trakl, c’est la décadence, la ruine, le déclin de l’homme, la mort qui rôde dans la nuit d’hiver, ensanglantant les forêts brunes et le ciel azur. Bien que très souvent impersonnelle, son œuvre a un très proche rapport avec sa vie, c’est pourquoi il semble impossible de comprendre ses poèmes sans avoir au préalable, jeté un regard sur son existence.
« Qui pouvait-il bien être ? » se demandera Rilke juste après la mort de Trakl sans parvenir toute fois à y répondre. Né le 3 février 1887 à Salzbourg, l’enfance de Trakl se déroule dans cette ville musée de l’art baroque et l’influence culturelle qu’exerça sur lui « La ville obscure » fut profonde et se retrouve dans certains de ses poèmes, comme dans Le jardin de Mirabell. Après l’échec de ses études au lycée en 1905, Trakl se lance dans des études pharmaceutiques jusqu’à obtenir cinq ans plus tard le diplôme de magister pharmaciae. Sa jeunesse fut fortement marquée par ses attitudes anti-bourgeoises et provocatrices, ainsi que par la drogue, l’alcool, l’inceste et la poésie qui resteront comme les piliers de son existence. L’amour incestueux de Trakl pour sa sœur va profondément influencer son œuvre. L’image de « La sœur » s’y retrouve de façon obsédante, et c’est cette relation charnelle et amoureuse qui va devenir une source d’angoisse et de culpabilité profonde pour le poète. Trakl participa en 1906 au réunion d’un club de poésie nommé Apollon, puis Minerve. Il s’intéresse aux poètes maudits français, tels que Baudelaire, Verlaine et Rimbaud et admire la figure emblématique de Nietzsche. C’est cependant au théâtre qu’il va pour la première fois se manifester en faisant jouer au théâtre municipal deux pièces Totentag et Fata Morgana, textes qu’il détruisit par la suite. C’est en 1908 que paraît, toujours dans la presse Salzbourgeoise, un premier poème.
Son séjour à Vienne de 1908 à 1910 va se révéler être fondamental pour sa vocation poétique. Il fait en effet l’expérience de la solitude et du désarroi qu’éprouve tout jeune provincial perdu pour la première fois dans l’immensité de la capitale. Ce séjour lui donne un profond dégoût de la société moderne. Il parvient néanmoins à nouer quelques relations littéraires avec l’Académie de littérature et de musique. Pour lui une période d’une abondante création, et il compose en 1909 un premier recueil de poèmes, qui restera inédit de son vivant. ( Publié pour la première fois en 1939). Après son service militaire à Vienne, Trakl est engagé en 1911 à la pharmacie de l’ange blanc. Il fréquente un cercle littéraire ( Pan) et il rencontre et se lie d’amitié avec Karl Hauer, son « compagnon de débauche ». Il retourne néanmoins en avril 1912 à l’armée comme pharmacien militaire. Il fait la connaissance de Ludwig von Ficker propriétaire la revue Der Brenner, qui se révélera décisive pour son avenir. Il rencontre également Karl Kraus, rédacteur de la revue Die Fackel. Le poète quitte l’armée quelques temps après puis après un bref séjour dans les bureaux du ministère des Travaux publics, il est invité au château de Hohenburg à Innsbruck par le frère de Ludwig von Ficker. En 1913, Kurt Wolff, éditeur d’avant-garde accepte de publier dans sa collection « Der jüngste Tag » un recueil portant le titre simple de Gedichte (Poésies). Il voyage avec Ludwig von Ficker, Karl Kraus à Venise, puis il fréquente l’atelier de Kokoschka, à Vienne. Il se rend en mars 1913 au chevet de sa sœur Margarethe à Berlin qui perd son enfant, victime d’une fausse couche. Il rencontre alors la poétesse Else Lasker-Schüler. Le poète travaille toujours aussi intensément, si bien qu’en mars 1914, il envoie à Kurt Wolff, qui l’accepte, son recueil Sebastian im Traum (Sébastien en rêve).
Lorsque la guerre éclate, Georg Trakl est mobilisé dans les services sanitaires. Par la force des choses, il quitte Innsbruck pour le front de l'est, la nuit du 24 août. Le détachement sanitaire dont il fait partie participe du 6 au 11 septembre à la bataille de Grodeck. Trakl eut pour mission de prendre en charge, dans une grange, sans assistance médicale, pendant deux jours, les soins d’une centaine de blessés graves. Il fit quelques jours plus tard, à la suite de toute l’horreur qu’il vient de voir, une tentative de suicide. Il est transféré le 7 octobre à l’hôpital militaire de Cracovie. Ludwig von Ficker rend une ultime visite au poète dans la cellule de la section psychiatrique, le 24 et 25 octobre. Trakl exprime toute sa crainte, toute son angoisse. Il donne lecture à Ficker ses derniers poèmes, Klage( Plainte) et Grodeck. Dans une lettre du 27 octobre, il les lui envoie et fait de sa sœur son unique légataire. A l’âge de 27 ans, par la nuit glacée du 2 au 3 novembre Trakl décède d’une overdose de cocaïne. S’agit-t-il d’un suicide ? C’est ce que confirmèrent les autorités médicales de l’hôpital militaire, mais personne ne peut affirmer ce qui se passa véritablement tant cette action sembla ambiguë.
[modifier] Citations
- "Seul celui qui méprise le bonheur aura la connaissance" extrait de Aphorisme
- "Tous les chemins du monde mènent à des charognes", 1914
- "Je suis à moitié né, je suis complètement mort"
- "C'est l'heure où les yeux du voyant s'emplissent de l'ordre des étoiles"
- "Ô que ce monde est triste, que la tristesse est nulle, et que le nul est monde"
- "Juste une étincelle de joie pure, et l'on serait préservé - un peu d'amour, et l'on serait sauvé."
[modifier] Œuvres
Grodek (dernier poème, écrit en 1914, pendant la première guerre mondiale, sur le front) Vers le soir, les forêts d'automne retentissent/ des armes de la mort, les plaines dorées,/ les lacs bleus et par-dessus le soleil/ encore plus sombre roule ; la nuit enserre/ des guerriers mourants, la lamentation sauvage/ de leurs bouches en éclat./ Mais en silence s'amoncelle au fond du pâturage/ nuée rouge, là vit un dieu coléreux,/ le sang est vidé, froid de lune/ Toutes les routes débouchent dans la pourriture noire/ Sous les rameaux d'or de la nuit et des étoiles,/ Vacille l'ombre de la sœur au travers du bois muet/ Pour saluer les esprits des héros, les têtes en sang/ Et doucement sonnent dans les roseaux les flûtes/ obscures de l'automne/ Ô deuil plus fier autel d'airain/ La flamme chaude de l'esprit nourrit aujourd'hui/ une douleur violente,/ Les descendants qui ne verront pas le jour.
Plainte Sommeil et Mort, les sinistres aigles/ Des nuits qui cognent contre ma tête :/ de l’homme l’image d’or/ la vague glacée le noie/ dans l’éternité. Sur d’horribles rochers/ se brise le pourpre du corps/ et la sombre voix se lamente/ au-dessus de la mer/ sœur au cœur envahi de tempêtes, vois sombrer la barque des peurs/ sous les étoiles/ le visage silencieux de la nuit ;
Occident 3 Vous, les grandes villes/ de pierres dressées/ sur la plaine !/ Dans le silence s’en va/ celui qui n’a point de patrie/ Avec le front enténébré, avec le vent,/ les arbres nus sur la colline/ Vous les fleuves qui mourrez là-bas/ Immense peur/ de l’horrible crépuscule/ dans les nuées de la tempête/ vous les peuples mourants !/ Vague blême/ se brisant au bord de la nuit/ étoiles tombantes
rondeau Il s’est enfui l’or du jour,/ le brun du soir et aussi ses couleurs bleues :/ Les douces flûtes du berger se sont éteintes/ Il s’est enfui l’or du jour/
Délirium
La neige noire, celle qui s’écoule des toits ;/ Un doigt rouge plonge dans ton front/ Dans la chambre nue coulent au fond des névés bleus,/ ils sont les miroirs défunts des amants./ En morceaux lourds éclate la tête et cherche le sens/ des ombres dans le miroir des névés bleus./ Au sourire glacial d’une jeune fille morte./ Dans des parfums d’œillets pleure le vent du soir./
[modifier] Bibliographie
Editions originales:
- Gedichte. Kurt Wolff, 1913.
- Sebastian im Traum. Kurt Wolff, 1915.
Principales Editions françaises:
- Poèmes en prose. Présentation et traduction par Edmond Dune. Vodaine, Basse-Yutz, 1968.
- Poèmes. traduits et présentés par Guillevic. Edition bilingue. Obsidianne, Paris, 1986.
- Crépuscule et déclin suivi de Sébastien en rêve et autres poèmes. Préface de Marc Petit, traduction de Marc Petit et Jean-Claude Schneider.Gallimard Paris, 1990.
- Poèmes. traduits et présentés par Jacques Legrand. GF-Flammarion, édition bilingue, deux tomes, 2001.
[modifier] Sites web
http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/traklgeorg.html : Page consacrée à Georg Trakl, avec d'autres poèmes en ligne.