Paradoxe de la flèche
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Le paradoxe de la flèche est un paradoxe formulé par Zénon d'Élée.
- Nous imaginons une flèche en vol. À chaque instant, la flèche se trouve à une position précise. Si l'instant est trop court, alors la flèche n'a pas le temps de se déplacer et reste au repos pendant cet instant. Maintenant, pendant les instants suivants, elle va rester immobile pour la même raison. La flèche est toujours immobile et ne peut pas se déplacer : le mouvement est impossible.
Ce paradoxe est résolu mathématiquement comme suit : étant donné que la vitesse de la flèche n'est pas nulle, la limite du taux de variation en un instant n'est pas nulle et donc le taux de variation entre deux instants très courts ne sera pas nul. Autrement dit, même si l'instant est très court, la flèche parcourra une certaine distance.
Il existe aussi une solution physique à ce paradoxe : après tout, suivant le même raisonnement, un objet initialement au repos ne pourrait jamais démarrer, puisqu'immobile ! En réalité, la capacité d'un objet à se déplacer à un instant t n'est pas liée au fait qu'il soit mobile ou non à cet instant t, mais à son énergie cinétique à cet instant. Un objet « immobile », mais doté d'une certaine énergie cinétique, se déplacera à l'instant suivant. Maintenant, comme, en translation, l'énergie cinétique est proportionnelle au carré de la vitesse, les solutions physique et mathématique ne sont pas si éloignées l'une de l'autre qu'il pourrait le paraître au premier regard...
Par ailleurs, dans la formulation du paradoxe ci-dessus, il y a confusion entre instant et moment. Certes à un instant donné, la flèche est immobile, mais un moment n'est jamais trop court pour qu'une flèche ait le temps de se déplacer ! Si la flèche peut être considérée comme « immobile » à un instant donné, par contre, entre deux instants successifs, séparés par un moment même infinitésimal, elle se déplace.
Enfin, si on va au fond des choses, même à un instant donné, la flèche n'est pas vraiment « immobile » : n'importe quel photographe sait qu'un objet en mouvement apparait sur une photo avec un certain flou dans la direction du mouvement, ce qui le distingue des objets véritablement immobiles. De même, la mécanique quantique nous dit qu'un objet en mouvement présente une certaine incertitude sur sa position (certes, cette incertitude est infinitésimale pour un objet d'une taille aussi grande et une vitesse aussi faible que celles d'une flèche, mais elle n'en existe pas moins), ce qui le distingue radicalement d'un objet au repos, et permet la poursuite du mouvement.
[modifier] Remarque
Il serait naïf de croire que Zénon contestait qu'une flèche puisse frapper un arbre. Les paradoxes qu'il utilisait avaient bien entendu pour but de mettre en lumière des zones sombres dans le processus de certains types de raisonnement faisant intervenir l'infini. Il ne remettait pas en cause le fond, mais l'outil qui nous sert à penser le monde, c’est-à-dire notre cerveau. La difficulté principale mise en évidence par ses paradoxes vient du fait que le temps et le mouvement sont des notions par essence continues, qui ne se laissent pas appréhender de façon adéquate par le truchement d'un séquencement. Découper le temps sans précaution, comme on découpe un gâteau, mène à des absurdités. L'esprit a du mal à raisonner sur le temps, l'écoulement, la continuité, le mouvement ou l'infini. Nos intuitions sur ces sujets sont souvent fautives. Cela vient de ce qu'à la base, le cerveau humain fonctionne par associations d'idées, non par déduction logique. Ainsi, nous ne sommes pas naturellement rationnels, et nous avons une conception préconçue du continu par exemple, qui vient interférer avec tout raisonnement à ce sujet. En conclusion, nous devons nous montrer particulièrement prudents quand nous nous mêlons de manipuler de telles notions.
[modifier] Voir aussi
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