Pons de Marignane
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Pons de Marignane et l’évêché d’Arles
En 513, le pape Symmaque donne à Césaire (502 – 26 août 543) le droit de porter le pallium. C’est sur l’ordre de Charlemagne et avec son aide que le concile d’Arles de 813 met en marche la restauration du temporel des églises d’Arles et de Marseille et l’empereur associe les évêques à l’administration avec leur participation aux assemblées des grands, tant et si bien, qu’à la fin du IXème siècle l’archevêque d’Arles a une prépondérance écrasante sur l’Eglise provençale. A partir de la seconde moitié du Xe siècle les grandes familles comtales et vicomtales essayent de faire entrer la mense ecclésiastique dans leur patrimoine familial et l'Eglise d'Arles doit commencer à composer avec elles. Ainsi, une notice d’un concile d’Avignon :
« Alors vinrent des évêques qui n’en étaient pas, mais bien des loups rapaces, envahisseurs simoniaques, publiquement mariés … c’était là non des pasteurs, mais des mercenaires ; ils ne gardaient pas les brebis, mais tondaient la laine et suçaient le lait ».
Maurice de La Chârtre (1854) écrit : « A l’ouverture du synode, Benoît [pape Benoît VIII, lui-même vivant de concussions, dans la débauche et le crime, ndlr] lut un long discours dans lequel il censurait fortement la vie licencieuse du clergé ; il accusait les prêtres de dissiper en orgies les biens qu’ils avaient reçus de la libéralité des rois, et d’employer les trésors des églises, soit pour entretenir des prostituées, soit pour enrichir leurs bâtards. Il invoquait contre eux les canons de Nicée, qui recommandaient aux ecclésiastiques d’observer la continence, et leur défendaient de vivre avec des concubines ».
La main mise par les familles de la région sur les sièges épiscopaux et sur les chapitres explique peut être cette façon excessive de voir les choses car en effet, Pons de Marignane (1005-1029), archevêque de 1022 à 1029, visé aussi par cette notice, a une réputation qui n’est pas aussi dure que celle faite aux évêques par le concile d’Avignon et dans le tome VII de l’« histoire littéraire de la France » par des religieux bénédictins de la Congrégation de Saint-Maur qui rapporte Vilpon, l’auteur, qui écrit et que nous citons largement pour mieux comprendre l’« ambiance raffinée» qui régnait à l’époque :
« La Provence, qui depuis la première décadence des Letres, comme on l’a observé par ailleurs, étoit demeurée dans une entière inaction à cet égard, reprit en ce siècle du goût pour la Litérature. Non seulement elle cultive la Poésie qu’on nomme Provençale ; elle donna aussi de l’application à l’étude des sciences supérieures. On en a pour l’abbaïe de S. Victor de Marseille en particulier, les mêmes preuves qu’on vient d’apporter en faveur de la Chaise-Dieu. Il sortit effectivement de cette autre abbaïe plusieurs personages, qui devinrent célebres par leur doctrine et leur sainteté de vie. Tel fut Wifroi, qui en releva les ruines, et la gouverna en qualité d’Abbé jusqu’en après y avoir rétabli la discipline regulière, et les Etudes qui en étoient une suite. Tel fut le B. Isarne, son successeur mort en 1048, qui aïant été d’abord instruit de la Grammaire et du chant ecclesiastique à Fredeleze près de Toulouse sa patrie, dont il avait été Chanoine, passa pour un des meilleurs Musiciens de son temps. Tel furent Ponce (Pons de Marignane), Rayambald et Aycard, tous trois l’un après l’autre Archevêques d’Arles, Pierre qui le fut d’Aix en 1103, et Raimond II Evêque de Marseille en 1110 ».
Pons fait partie de ces familles qui possèdent des terres et ont accédé à la noblesse puisqu’il est le fils du très riche Francon de Marignane et le frère de Profecta qui par son mariage fera la fortune des Baux. Le château de la famille se trouvait à l’ouest de la ville actuelle, quelque part dans le quart sud-est de l’étang du Bolmon, à Papia, le deuxième lieu de la commune, où étaient une église et le château de la famille qu’Hugues des Baux détruira pour le reconstruire sur le site actuel de Marignane. A Papia, le château vit en grande partie par les droits qu’il a attiré, provenant de l’ancien tonlieu de Léou . Les terres de la famille seigneuriale sont gardées par sept chevaliers, les premiers chevaliers connus dans le sud de la France, mentionnés en 1029 , au moment ou Pons quittera son sacerdoce pour rentrer comme moine à Saint-Victor. Au Xe siècle, l’Archevêque d’Arles est dans l’ordre ecclésiastique le pendant du comte dans l’ordre laïque. Duprat écrivit que : « le prestige politique d’Arles rejaillit sur le métropolitain. Il est dans l’ordre ecclésiastique ce que le comte est dans l’ordre féodal, aussi peut-on constater autour de lui comme une petite cour ». Les évêques ne prêtent plus fidélité au roi mais à l’Archevêque d’Arles ; ils sont à la fois fidèles à l’archevêque et au comte qui exerce un pouvoir solide sur les évêchés puisque maître de toutes les terres publiques de Provence avec le consentement du roi.
Pons de Marignane deviendra archevêque en 1022 sous le pape Benoit VIII et participera au synode de Pavie. Depuis la fin du Xe siècle, les évêques prennent le comte pour seigneur et lui prêtent donc fidélité, mais l’Archevêque d’Arles, lui, reçoit les fidélités de tous sans que l’on sache vraiment à qui lui-même l’offrait. Pourtant, quand Pons de Marignane deviendra archevêque, il ira chercher le pallium auprès du pape à Rome et fera le voyage à Genève pour aller voir le roi. Lui offre t-il fidélité directement ? En 1027, à la mort d’Henri II, son fils Conrad lui succéda et vint dans la ville pontificale dans l’église de Saint-Pierre pour se faire proclamer empereur par le pape Jean XIX ; sa femme, la reine Gisèle fut couronnée impératrice avec lui. Etaient présents Rodolphe, roi de Bourgogne, Pons, Canut, roi d’Angleterre et de Danemark. Il y eut quelques débats houleux lorsque Canut se plaint au pape des contributions énormes que le saint-siège prélevait sur les pèlerins de son royaume et les tributs que l’on faisait payer aux archevêques lorsqu’ils demandaient le pallium.
Pons de Marignane, en 1029 quittera ses fonctions d’archevêque pour se retirer comme simple moine à l’abbaye de Saint-Victor à Marseille, sous l’influence de saint Isarn, l’abbé du monastère.