Problème universel
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La notion de problème universel, l'une des plus fondamentales de la théorie des catégories, a été introduite par les mathématiciens Samuel Eilenberg et Saunders MacLane vers 1943. Elle a bouleversé la vision des mathématiques en introduisant une dimension « behavioriste », dont il faut entendre qu'on définit les objets mathématiques non pas par des constructions (comme on le fait en théorie des ensembles), mais par une caractérisation de leur comportement global vis-à-vis des autres objets mathématiques.
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[modifier] Objet initial et objet final.
Donnons-nous une catégorie . Un objet I de est dit initial si pour tout objet E de , il existe une et une seule flèche de I vers E. De même, un objet F est dit final si pour tout objet E, il existe une et une seule flèche de E vers F.
Cette définition pourrait paraître extrèmement naïve si elle n'entrainait la propriété suivante:
Deux objets initiaux (respectivement finals) dans une catégorie sont canoniquement isomorphes.
Autrement-dit si I et J sont tous deux initiaux dans , l'unique flèche f de I vers J est un isomorphisme. En effet, comme J est initial, il existe de même une unique flèche g de J vers I, et le composé ne peut être que la flèche identité de I, toujours parce que I est initial. Pour la même raison ne peut être que l'identité de J.
On voit donc que le simple fait de demander qu'un objet soit initial le définit parfaitement à isomorphisme canonique près (c'est-à-dire, comme diraient les informaticiens, aux détails d'implémentation près). En d'autre termes, de telles définitions permettent de se concentrer sur l'essentiel (le comportement de l'objet défini) sans se préoccuper des détails de sa construction.
Bien entendu, une telle définition ne prouve pas l'existence de l'objet, qui doit éventuellement être prouvée par une construction. Elle ne fait que débarrasser la définition de l'objet de tout ce qui est contingent. En contre partie, elle oblige à intégrer dans la définition les outils nécessaires et suffisant pour la manipulation de l'objet.
Quand un objet mathématique est défini de cette façon, on dit qu'il est défini par un problème universel.
[modifier] Exemples.
Chacune des phrases suivantes constitue une définition de ce qui y figure en gras.
- L'ensemble vide est un objet initial dans la catégorie des ensembles.
- Tout singleton (ensemble à un seul élément) est un objet final dans la catégorie des ensembles.
- L'anneau des entiers relatifs est initial dans la catégorie des anneaux unitaires (commutatifs ou non).
- Le quotient (muni de sa projection canonique) d'un espace vectoriel E par le sous-espace vectoriel F est initial dans la catégorie dont les objets sont les applications linéaires dont le noyau contient F. Les flèches de cette catégorie de l'objet vers l'objet sont les applications linéaires telles que .
- Le diagramme (où 1 est un singleton, 0 l'unique application d'image {0} et S la fonction successeur), est initial dans la catégorie des diagrammes de la forme . Les flèches de cette catégorie de l'objet vers l'objet , sont les applications , telle que et . (Définition de William Lawvere des entiers naturels).
- Le groupe libre sur l'ensemble E est initial dans la catégorie dont les objets sont les applications , où G un groupe. Les flèches de cette catégorie, de l'objet vers l'objet sont les morphismes de groupes tels que .
- Le produit tensoriel de deux modules M (module à droite) et N (module à gauche) sur l'anneau A est initial dans la catégorie des applications bilinéaires de source . Les flèches de cette catégorie de l'objet vers l'objet sont les applications linéaires , telles que .
- Le compactifié de Stone-Cech de l'espace topologique X est initial dans la catégorie dont les objets sont les applications continues , où Y est un espace compact. Les flèches de cette catégorie de l'objet vers l'objet sont les applications continues telles que .
On pourrait multiplier les exemples. Il est peu probable qu'il existe un concept mathématique échappant à une définition de ce type.
[modifier] Autres formulations
Cette notion de problème universel peut s'exprimer d'une façon plus sophistiquée (conduisant à l'obtention automatique de certains théorèmes) à travers celle de foncteur adjoint.
[modifier] Bibliographie
S. MacLane Categories for the Working Mathematician. Springer-verlag. Graduate Texts in Mathematics (1971).