Procrastination
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La procrastination est un terme relatif à la psychologie qui désigne la tendance pathologique à remettre systématiquement au lendemain quelques actions, qu’elles soient limitées à un domaine précis de la vie quotidienne ou non. Le « retardataire chronique », appelé procrastinateur, n’arrive pas à se « mettre au travail », surtout lorsque ça ne lui procure pas de gratification immédiate.
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[modifier] Profil et comportements types
Cette tendance apparaît souvent au fil des études (cela peut débuter dès l’école primaire) et affecte en particulier des étudiants doués, habitués à réussir les épreuves avec aisance et à être reconnus pour leur talent. Devant soutenir un effort inhabituel face à une difficulté, ils perdent confiance en eux et ressentent une angoisse.
Comme beaucoup de problèmes psychologiques, la procrastination dépend du milieu familial. Une famille véhiculant l’idée selon laquelle la société est un espace très compétitif, des parents ayant des attentes démesurées, prédisposent à ce problème.
La majorité des personnes affectées par la procrastination l’est en général aussi par le « perfectionnisme », c’est-à-dire la tendance d’une personne à estimer inacceptable un travail qui ne s'approche pas de la perfection. Comme il est rare de pouvoir atteindre la perfection autrement que par essais et erreurs et que la personne n’accepte pas l’idée de faire une erreur, elle contourne le problème en ne faisant rien : par exemple la nécessité d’un rangement ou d’un classement est sempiternellement différée parce qu’on n’a pas le temps de faire quelque chose de parfait, et on ne fait donc rien du tout. Cependant, être un « retardataire » ne signifie pas ne rien faire. Au contraire, le sujet peut être pris d’une véritable frénésie d’activités (aller faire les courses, entamer un grand ménage de printemps, repeindre les volets, peindre la nouvelle clôture, prendre des nouvelles de la grand-mère, faire de la maintenance informatique…), tant que celles-ci ne possèdent aucun rapport avec LA tâche problématique (faire un rapport).
La procrastination peut se développer à différents niveaux, du bénin au malin. Si elle se concentre sur des choses sans conséquence (faire la vaisselle, remplir sa déclaration de revenus…), le sentiment de protection qu’elle apporte peut valoir au ‘retardataire’ tous les tracas qui s’ensuivent… Et même dans certains cas sévères, elle peut amener divorces, pertes d’emploi, voire problèmes juridiques.
On recense trois domaines privilégiés de la procrastination :
- dans les études (et plus tard la vie professionnelle)
- dans la vie quotidienne (procrastination routinière)
- dans les prises de décision (procrastination décisionnelle)
Les étapes qui mènent au report s'auto-entretiennent.
- Vous souhaitez faire quelque chose
- Vous décidez de le faire
- Vous reportez sans vraie bonne raison
- Vous constatez les désavantages de ce report
- Vous continuez cependant à reporter
- Soit vous vous en voulez, soit vous trouvez une excuse rationnelle, soit vous évacuez ce problème
- Vous continuez à reporter
- Vous réussissez à faire votre tâche juste à temps, avec un maximum de stress... ou bien vous terminez trop tard... ou bien vous ne le faites jamais
- Vous vous sentez coupable d'avoir ce comportement
- Vous jurez qu'on ne vous y reprendra plus
- Peu de temps après, vous recommencez...
[modifier] Raisons probables
On retrouve cette attitude dans la plupart des comportements dépressifs. Comme dans ces phases toute action est rendue encore plus difficile qu’à l’habitude, le sujet préfère reporter au lendemain… qui ne se révèle en général pas plus fructueux.
Tout le monde ne procrastine pas de la même façon et une même personne non plus selon les circonstances... mais en règle générale, on procrastine :
- pour échapper à la frustration (car la tâche qu'on reporte est moins agréable que ce qu'on fait à la place... et la sanction paraît trop lointaine par rapport au plaisir immédiat qu'on tire à faire autre chose) la solution est donc d'augmenter les conséquences positives à court terme de l'action reportée, et de se protéger des distractions.
- pour protéger son estime de soi : chez les procrastinateurs, l'échec est souvent perçu comme une remise en question globale de leur valeur. Alors, moins ils ont de chance de réussir, plus ils procrastinent. En plus, comme ils ont une tendance à être plus perfectionnistes que la moyenne, les chances de ne pas être à la hauteur de leurs exigences sont fortes. Du coup, souvent, la procrastination crée un handicap (on n'a pas assez travaillé pour son examen, par exemple) qui fournit des excuses au cas où les performances ne seraient pas à la hauteur de ce qui était attendu. (En gros, on peut toujours se dire que si on avait travaillé plus, on aurait réussi... alors que c'est peut-être faux, mais on ne le saura pas, et on protège son estime de soi). Malheureusement, à long terme, l'estime de soi est quand même abîmée, puisque les choses ne sont jamais faites complètement.
- pour résister aux autres : comportement passif-agressif. On dit « oui » aux demandes d'autrui... mais on ne le fait pas...
- pour vivre dans le stress dans une recherche de sensations fortes...
- parce qu'on a des croyances irrationnelles, par exemple, on pense qu'on sera plus motivé pour faire un travail pénible plus tard, ce qui est toujours faux, ou on pense qu'il faut que ce soit parfait...
Mais il s’agit surtout d'un comportement à part entière. Cinq peurs pouvant se mêler se retrouvent au cœur de cette attitude.
[modifier] Peur de l’échec
Le sujet préfère retarder le travail au maximum jusqu’à estimer qu’il est trop tard pour le faire. Il dispose alors d'un prétexte à l'échec. On retrouve ici par exemple l'une des raisons qui caractérise le syndrome de l'étudiant.
Cette attitude semble liée à une éducation exigeante, fondée sur une culture du résultat. Le sujet prend l’habitude de ne plus pouvoir engager une action sans penser à l’évaluation qui la suivra et cherche alors à éviter les conséquences fâcheuses. La procrastination peut se trouver chez des sujets très doués dans leur domaine et — paradoxalement — manquant de confiance en eux en profondeur.
Exemple : un étudiant qui stresse à l’idée de rendre un mémoire inintéressant.
[modifier] Peur de la réussite
Le sujet craint qu’en réussissant il s’attire la jalousie des autres et/ou qu’alors il soit chargé de nouvelles responsabilités, de nouvelles attentes plus élevées auxquelles il ne se sent pas capable de faire face. Il essaie alors de ne pas paraître parfait ni trop comblé. Cette peur peut provenir d'une jalousie fraternelle ressentie lors de l’enfance. Il peut aussi avoir la sensation qu’il menace ses parents ou mentor par sa réussite.
Exemple : un employé de bureau qui ne souhaite pas changer de poste.
[modifier] Peur de ne pas contrôler son environnement
Le sujet veut avoir le sentiment qu’il domine la situation. Cela peut venir d’un souhait de revanche, d’autonomie : des individus poussés à la performance dans des domaines ne relevant pas de leur ambition propre peuvent choisir la procrastination pour affirmer leur indépendance. Une personne voulant aussi se mesurer à son environnement par goût du risque peut aussi devenir une "retardataire".
Exemple : un employé qui lutte contre sa hiérarchie à la limite du renvoi ou encore un vendeur au téléphone qui le laisse sonner.
[modifier] Peur de l’isolement
Le sujet souhaite être protégé, conseillé, dirigé ; il est à l’aise en équipe ou lorsque quelqu’un d’autre prend les décisions importantes, comme un enfant dans le cadre familial. Il peut aussi chercher à attirer l’attention sur lui par une situation extrême ou encore savoir qu’il a toujours quelque chose à faire (crainte de la solitude).
Exemple : un élève qui attend que quelqu’un lui fasse ses devoirs.
[modifier] Peur de l’intimité
Le sujet a peur que les autres ne prennent trop de place dans sa vie (croyance qu’il va se faire voler ses réalisations, précédente relation sentimentale ratée, souvenir de personnes envahissantes…). Il peut aussi craindre de dévoiler ses « mauvais côtés » si les autres s’approchent trop de lui et qu’ainsi il se fasse rejeter.
Exemple : un homme qui arrive systématiquement en retard à ses rendez-vous galants.
[modifier] Comment (ré)agir
La confiance en soi est un bon moyen de lutter contre la procrastination. Elle peut s’acquérir en (ré)apprenant à réaliser et réussir, de petites choses, de plus en plus ambitieuses (voir les travaux de Rita Emmett ou les techniques proposées par MMmes Burka et Yuen).
Une autre approche consiste à se détacher du besoin d’être évalué, mais celle-ci peut nécessiter une thérapie plus lourde. Comme pour tout traitement d’un trouble psychologique, être soutenu de manière fiable est positif, surtout pour faire comprendre au retardataire qu’on peut l’apprécier pour lui et non pour ses seules performances.
Il est souvent aussi nécessaire d’apprendre à se fixer des objectifs réalistes, qui peuvent se subdiviser en plus petits facilement atteignables. Les retardataires ont en effet tendance à se fixer sur l’objectif le plus lointain et impressionnant en oubliant des objectifs plus simples avant. Il leur est également difficile d'estimer le temps dont ils disposent réellement, ce qui leur permet de se fixer des délais intenables (et d’autant plus stressants).
Une autre méthode consiste à définir des laps de temps réduits pour la tâche et les répéter jusqu'à la terminer, par exemple travailler 15 minutes sur une tâche, une fois le processus déclenché il est plus simple de continuer.
Pour l’entourage, face à un retardataire qui paraît être hermétique à chaque conseil, récrimination ou menace, il devient vite nécessaire pour chacun de savoir faire la part des choses, de rester détaché et de louvoyer entre ses intérêts propres et ceux de la relation. À défaut, le risque est d’être bloqué dans un cercle vicieux (encouragements répétés, déception de les voir sans effet, irritation de ne voir aucun changement, match nul et retour au début) qui peut mener à terme à la rupture de la relation. Trop de remarques, même proférées avec les meilleures intentions du monde, et le retardataire se sentira talonné ; il ressentira d’autant plus de pression pour l’exécution de cette tâche, qui devra être d’autant plus accomplie parfaitement. Résultat, il aura encore plus de mal à s’y mettre et esquivera la discussion.
Ces personnes ne sont ni paresseuses ni désorganisées, comme on le croit, elles souffrent « simplement » de procrastination, un comportement lié à l'estime de soi qui, dans ses formes plus ou moins graves, touche à peu près tout le monde, de l'enfant qui n'arrive pas à faire ses devoirs, à l'adulte qui, dans son couple ou au bureau, accumule les retards.
Un état que ces personnes ne choisissent pas délibérément, pour lesquelles ce n'est pas une volonté consciente.
Il faut préciser qu'en psychanalyse, le temps c'est l'ordre du père.
On associe ainsi les retardataires, pilotés par la colère, à une autorité parentale qui pendant l'enfance les a déstructurés. Des familles où l'on faisait des différences entre les enfants, un sentiment d'injustice vécue.
Les procrastinateurs repoussent essentiellement les tâches qui semblent ennuyeuses ou difficiles.
Pour vaincre cette tentation, habituez-vous à :
- commencer par accomplir les tâches qui vous déplaisent le plus, ou les choses que vous voudriez remettre à plus tard.
- s'il s'agit d'une tâche fastidieuse ou longue, scindez-la en plusieurs étapes (de 10 à 30 minutes par jour)
- vouloir atteindre la perfection du premier coup est une cause courante de procrastination, essayez donc de faire de votre mieux avec les moyens dont vous disposez, vous améliorerez vos performances la prochaine fois.
- fixez-vous des engagements, en y associant vos collaborateurs, pour vous y tenir.
Comment faut-il se comporter avec un retardataire ?
Il faut savoir que ce sont généralement des personnes très créatives, dynamiques, qui peuvent donc apporter beaucoup à l'entreprise ou à l’organisation.
Il s'agit donc de ne pas les brimer par rapport à leur retard, mais plutôt d'essayer d'identifier leur source de colère. Contrairement à ce que l'on a longtemps pensé, cette façon d'agir n'est pas liée à un manque de confiance en soi, mais plutôt à la motivation, à un manque de motivation.
Il est donc important de responsabiliser un retardataire, notamment dans la manière de l'aider à résoudre son état.
- Discuter avec lui des tâches à accomplir et échéances à respecter, en le laissant formuler ses objectifs et les conséquences d'un éventuel retard.
- Le laisser s'organiser seul pour respecter ses engagements, pour qu'il n'ait pas l'impression d'avoir un chien de garde derrière lui.
Enfin sachez apprécier une partie du travail déjà accomplie, même si l'objectif final n'est pas encore atteint. Tant qu'ils n'ont pas atteint leur but, les retardataires ont l'impression de n'avoir rien fait, et songent surtout à tout ce qu'il leur reste à faire, ce qui provoque souvent un sentiment de découragement.
Il est donc essentiel de les encourager.
Leur faire comprendre que ce ne sont pas que leurs résultats qui comptent à vos yeux.
[modifier] Remarques autour du sujet
- La tendance à la procrastination définit en caractérologie de Le Senne la différence entre les actifs (A) et les non actifs (nA) : un actif effectue ce qu’il a à faire dès qu’il peut le faire. Un non-actif n’agit que là où il est porté par l’émotion (il montera héroïquement à la charge, par exemple, mais laissera traîner longtemps la rédaction de ses notes de frais).
- Une chanson de Fernand Sardou constitue un véritable hymne à la procrastination : il s’agit d’Aujourd’hui peut-être… ou alors demain qui connut un grand succès dans l’entre-deux-guerres.
- Une citation de Marcel Jouhandeau: "C'est parce qu'on imagine simultanément tous les pas qu'on devra faire qu'on se décourage, alors qu'il s'agit de les aligner un à un."
- La version française de l'un des tomes des annales du Disque-monde de Terry Pratchett s'intitule Procrastination.
[modifier] Bibliographie
- Ces gens qui remettent tout à demain de Rita Emmett (les éditions de l’Homme) (ISBN 2761915895)
- Comment ne plus être en retard de Jane B. Burka/Leonora M. Yuen (Editions Pocket) (ISBN 2266107216)
- Comment ne pas tout remettre au lendemain de Dr Bruno Koeltz (Editions Odile Jacob) (ISBN 2738117104)
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