Walter Christaller

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Walter Christaller, 21 Avril 1893 : Berneck/Altensteig (Baden-Württemberg), 9 Mars 1969 : Königstein im Taunus (Hessen).

Son père, pasteur protestant à Wurtemberg mis prématurément à la retraite pour non conformisme, lui donne une solide formation religieuse et une bonne connaissance de la Bible. Sa mère descendante d’une famille dont un membre fut bibliothécaire du grand duc de Hesse à Darmstadt (Hesse) est une romancière à succès. Elle éduque elle-même ses enfants à la maison jusqu’à leur entrée dans une école secondaire. Pendant son enfance Walter Christaller est fasciné par les Atlas. Sur les cartes il trace des lignes entre les villes les plus proches et visualise ainsi des réseaux de triangles.

Avant 1914 Walter Christaller commence des études de philosophie et d’économie aux universités d’Heidelberg et de Munich. La première guerre mondiale commence alors qu’il atteint sa vingtième année. Il devient officier et il est blessé à plusieurs reprises. Après la fin du conflit, amer, il retourne à la vie civile avec des idées pacifistes et socialisantes.

Pendant les dix années suivantes, il exerce des métiers divers (mineur, maçon, journaliste) et fait un cours passage dans une université. De 1921 (année de son mariage) à 1924 il travaille dans une Coopérative de Construction à Berlin. Il adhère au Parti social démocrate (SPD) en 1922. De 1925 à 1928 il devient membre puis dirigeant d’une entreprise de construction spécialisée dans la préfabrication. En 1928 il perd son travail et divorce après avoir eu trois enfants.

A 37 ans (1928) il renoue avec la vie universitaire à Erlanger (Bavière) où il passe à la Faculté de philosophie un master en 1930, un doctorat en 1932. En 1932 il quitte brièvement l’Allemagne à la suite de l’arrivé au pouvoir de Hitler en raison de son appartenance au SPD. Sa thèse de doctorat « Die zentralen Orte in Süddeutschland Â» est éditée en 1933 après son retour en Allemagne. Pour participer à l’élaboration d’un « Atlas des Deutschen Lebensraumes Â» Walter Christaller reçoit des bourses de recherche et de déplacement de la Deutsche Forschungsgemeinschaft de la Reichsarbeitsgemeinschaft für Raumforschung fondée en 1936. Il est membre fondateur du Groupe d'étude sur les lieux centraux (Arbeitskreis Zentralen Orte). Dès 1937 il collabore à la branche universitaire de l'Association pour la recherche spatiale (Reichsarbeitsgemeinschaft für Raumforschung) à l'université de Fribourg en Brisgau. En 1937-38, il soutient une thèse d'habilitation sur « Le mode d'occupation rural dans le Reich allemand et ses rapports avec l'organisation des communes Â» (« Die ländliche Siedlungsweise im Deutschen Reich und ihre Beziehungen zur Gemeindeorganisation Â») qui l’introduit dans les milieux scientifiques universitaires s'occupant de planification spatiale et territoriale. En 1940, Walter Christaller adhère au Parti nazi. Il est engagé par Konrad Meyer qui dirige l’Office de planification du Commissariat du Reich pour le renforcement du peuple allemand (Reichskommisariat für die Festigung deutsches Volkstums) créé le 7 octobre 1939 sous l’autorité de Himmler qui dépend directement d’Hitler.

En tant que collaborateur de l’Office de planification Walter Christaller participe à deux opérations d’aménagement des territoires conquis à l’Est par le IIIe Reich. La première concerne le Warthegau, région anciennement prussienne reconquise en 1939. Cartes à l’appui, Walter Christaller prend acte des déportations en proposant de « ramener (abwerten) à la dimension typique Â» les lieux centraux qu’il estime trop peuplés de population non aryenne et organise le repeuplement par des allemands déplacés dans des lieux centraux « Ã  développer (entwickeln) jusqu'à la taille typique Â», tout en prévoyant la « création Â» (Neugründung) de nouveaux lieux centraux. Ces déportations-réinstallations commencent dès 1939 et sont menées à bien jusqu’en 1941. A cette occasion il publie à Leipzig en 1941 « Die Zentralen Orte in den Ostgebieten Â» volet aménagiste de ses idées théoriques exposées dans « Die zentralen Orte in Süddeutschland Â». La deuxième opération d’aménagement à laquelle participe Walter Christaller, le GeneralplanOst concerne les territoires conquis en URSS. La première version est de juillet 1941 et la seconde de juillet 1942. En raison des circonstances militaires, seul la phase extermination et déportation est mis en Å“uvre. La phase réinstallation est abandonnée au printemps 1943.

Suite à la défaite du IIIe Reich, Walter Christaller échappe à la dénazification après que les alliés occidentaux aient décidés en mars 1948 de clore les poursuites en dépit des protestations des autorités allemandes qui avaient constitué 600.000 dossiers dont 30.000 concernaient des individus contre lesquels pesaient des charges lourdes ou mineures. Walter Christaller adhère alors au parti communiste dans l’espoir qu'un gouvernement autoritaire « voudrait utiliser son pouvoir pour relocaliser les villes dévastées par la guerre conformément au schéma optimal exigé par la théorie des lieux centraux Â» (1949). Mais il continue à vivre en Allemagne occidentale dans la maison de sa mère à Darmstadt. Il est poursuivi pour espionnage au profit de l’Est et acquitté. Toujours pas intégré dans une université, Walter Christaller survit en effectuant des travaux statistiques et en publiant des articles dans la grande presse et dans différentes revues scientifiques. Après avoir quitté le parti communiste et rallié le SPD en 1953, sa thèse est partiellement traduite en anglais en 1966 avec une coupure de 69 pages sur 330. En 1964 il reçoit un prix de l’Association des géographes américains et en 1968 des doctorats honoris causa des universités de Lund (Suède) et de Bochum (Allemagne de l’ouest). Il termine sa vie en recevant des subsides du gouvernement du land de Hesse, de la présidence de la Bundesrepublik et des fonds recueilli par une collecte auprès de géographes.

Deux constantes se retrouvent dans tous ses travaux. La première constante est que, pour Walter Christaller, il existe un « ordre central Â» (eine zentralistische Anordnung), forme élémentaire de « l'ordre d'appartenance commune Â» (Ordnung von Zusammengehörigen), dans la nature inorganique et organique. « Cet ordre n'est pas seulement une forme de pensée qui n'existerait que dans le monde de la représentation humaine et qui serait née uniquement du besoin d'ordre de l'homme, mais il existe réellement à partir de lois internes à la matière Â». Walter Christaller utilise ce principe d'ordre afin de chercher « la loi de régularité du nombre, de la répartition [spatiale] et de la taille des lieux urbains représentés à partir de l'exemple de l'Allemagne du sud Â». Cette régularité se traduit dans le fait que les lieux centraux et leurs régions complémentaires sont de trois ordres : « supérieur Â» (zentrale Orte höherer Ordnung), « inférieur Â» (zentrale Orte niederer Ordnung) et « très inférieur Â» (zentrale Orte niederster Ordnung). L'ensemble des lieux centraux forme un « système hiérarchisé Â». La deuxième constante est que Walter Christaller a toujours essayé ou rêvé de modifier la réalité pour la rendre conforme à ce qu'il estimait être une « idéalité Â» justifiée : organique hiérarchique raciale d'abord (nazisme), sociale hiérarchique administrée ensuite (communisme) et enfin économique hiérarchique libérale. Le point commun à ces convictions successives est l'idée qu'il faut aménager la réalité quand elle n’est pas « normale Â», c'est-à-dire non conforme au système idéal des lieux centraux. Il se propose donc en 1950 « de rendre reconnaissable le désordonné et ce qui s'oppose à l'ordre, afin de faire des propositions pour remettre de l'ordre et créer un nouvel ordre Â» en Europe. A cette fin, il ne met pas au premier plan les éléments naturels mais « le système historique humain et social des lieux centraux [qui] sont répartis sur toute la Terre selon des règles précises et qui sont intégrés dans un système hiérarchique Â». Il propose de réorganiser les lieux centraux de l'Europe où il distingue les « métropoles réelles Â» (Tatsächliche gegenwärtige Metropolen), les centres géométriques « vrais Â» des pays (Eigentliche Mittelpunkte) et les « sites urbains idéaux Â» (Wunschbild-Metropolen). Il critique aussi bien la localisation réelle de Paris que celle de Londres, de Vienne ou de Berlin. Il écartèle la Suisse entre trois systèmes ayant comme capitales Paris, Rome, Berlin et propose de transférer sa capitale de Berne à Lucerne.

[modifier] Liens internes

Modèle christallérien

[modifier] Liens externes

• Le modèle de Christaller
• [1] Cyberato Forums, Bavardoire interdisciplinaire, Un autre criminel des idées : Walter Christaller]