Comte de Lautréamont
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Isidore Lucien Ducasse (4 avril 1846, Montevideo, Uruguay – 24 novembre 1870, Paris), plus connu par son pseudonyme de Comte de Lautréamont (qu'il emprunta très probablement au Latréaumont d’Eugène Sue), est un poète français, auteur des Chants de Maldoror et de deux fascicules, Poésies I et Poésies II.
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[modifier] Biographie
Fils d'un commis-chancelier au Consulat général de France à Montevideo, Isidore Ducasse est élève interne au Lycée impérial de Tarbes, puis du lycée Louis-Barthou à Pau. À cette époque, son tuteur est un avoué tarbais, Jean Dazet. On sait qu'après un voyage en Uruguay en 1867, il revient à Paris et s'installe dans un hôtel de la rue Notre-Dame-des-Victoires. Il doit entamer des études supérieures dont la nature reste inconnue (concours d'entrée à l'École Polytechnique, a-t-on souvent écrit). Il publie à ses frais le premier des Chants de Maldoror en 1868 (l'œuvre complète sera imprimée en Belgique un an plus tard). En 1870, il habite rue Vivienne et publie les Poésies dont une publicité paraîtra dans la Revue populaire de Paris. Mais le 24 novembre, alors que le Second Empire s'effondre, il meurt à son domicile au 7 rue Faubourg-Montmartre. Sur son acte de décès, il est écrit : "Sans autres renseignements".
[modifier] Succès posthume
En 1874, les exemplaires de l'édition originale des Chants sont rachetés par le libraire-éditeur tarbais J.-B. Rozez, installé en Belgique. Il faudra attendre 1885 pour que Max Waller, directeur de la Jeune Belgique, en publie un extrait et fasse découvrir les textes. Plus tard, Alfred Jarry rendra hommage à « cet univers pataphysique » et les surréalistes reconnaîtront le poète comme un de leurs plus éminents précurseurs.
[modifier] Œuvre
Maldoror incarne la révolte adolescente et la victoire de l'imaginaire sur le réel. Il est difficile de ne pas être pris de vertige à la lecture des Chants, dans ce monde en perpétuelle mouvance. On ne peut en dissocier le fond et la forme, le récit et le style et certaines pages font penser aux toiles les plus hallucinantes de Jérôme Bosch. Mais la révolte est dérisoire et Lautréamont use aussi de tous les procédés de distanciation pour se nier lui-même. Une veine bouffonne, qui contraste avec le « soleil noir » du satanisme apparent, traverse l'œuvre : parodie du naturalisme ou du romantisme le plus échevelé, lieux communs, apostrophes moqueuses au lecteur, ironie sarcastique... Toutes les formes d'humour sont réunies et marquent le mépris de l'auteur pour ce qu'il raconte. Capable des plus beaux poèmes, il en ricane et force le lecteur à en rire avec lui. C'est l'adolescent qui prend une revanche sur la misère humaine du siècle, en devenant le héros d'un conte où s'effacent les barrières qui emprisonnent l'homme. Dans le jeu, tout est permis : ardente ferveur, joyeuse férocité et métamorphose.
On ne sait quelle aurait pu être son œuvre s'il avait vécu mais le rire de Maldoror fait voler en éclats les grands sentiments et leur vaine expression, l'art.
Les spécialistes de Lautréamont, dans la seconde moitié du XXe siècle, ont présenté l'œuvre sous des éclairages divers. Les Poésies contiennent des options morales opposées à celles des Chants. On peut gloser sur les sens multiples ou sur les techniques narratives, il reste avant tout le plaisir d'entrer dans un univers d'une richesse et d'une originalité déroutantes.
« Lecteur, c'est peut-être la haine que tu veux que j'invoque dans le commencement de cet ouvrage ? Qui te dit que tu n'en renifleras pas, baigné dans d'innombrables voluptés, avec tes narines orgueilleuses, larges et maigres, en te renversant du ventre, pareil à un requin, dans l'air beau et noir, comme si tu comprenais l'importance de cet acte et l'importance non moindre de ton appétit légitime, lentement et majestueusement, les rouges émanations ? Je t'assure, elles réjouiront les deux trous informes de ton museau hideux, ô monstre, si toutefois tu t'appliques auparavant à respirer trois mille fois de suite la conscience maudite de l'Éternel ! »
(Les Chants de Maldoror, I, 2)
[modifier] Citations
« J'établirai dans quelques lignes comment Maldoror fut bon pendant ses premières années, où il vécut heureux ; c'est fait. »
(Maldoror, I, 2)
« Arithmétique ! Algèbre ! Géométrie ! Trinité grandiose ! Triangle lumineux ! Celui qui ne vous a pas connues est un insensé ! »
(Maldoror, II, 10)
« (...) beau comme la rétractilité des serres des oiseaux rapaces ; ou encore, comme l'incertitude des mouvements musculaires dans les plaies des parties molles de la région cervicale postérieure ; ou plutôt, comme ce piège à rats perpétuel, toujours retendu par l'animal pris, qui peut prendre seul des rongeurs indéfiniment, et fonctionner même caché sous la paille ; et surtout, comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie ! »
(Maldoror, VI, Roman (I))
« La poésie doit être faite par tous. Non par un. »
(Poésies II)
[modifier] Liens externes
- Catégorie Lautréamont de l'annuaire dmoz.
- Un travail de lecture illustrée par le dessin des Chant de Maldoror
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