Match de rugby à XV Nouvelle-Zélande - France (1999)

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Le 31 octobre 1999 à Twickenham (Londres - Angleterre), devant 70 000 spectateurs, la demi-finale de la Coupe du monde de rugby 1999 oppose la France à la Nouvelle-Zélande.

Classique opposition de style entre la folie latine, le french flair, d'une part et le jeu technique et offensif, le rugby d'école d'autre part, ce match est devenu l'une des rencontres légendaires de l'histoire de la Coupe du monde de rugby.

Sommaire

1 Repères
- 1.1 La France
- 1.2 La Nouvelle-Zélande
2 Feuille du match
3 Récit du match
- 3.1 Première période équilibrée
- 3.2 Seconde période: le sursaut des Français
4 Articles connexes
5 Lien externe

[modifier] Repères

[modifier] La France

Auteur d'une entame de compétition poussive (marquée notamment par une victoire difficile contre les Fidji à Toulouse), la France a connu un début de compétition sans gloire contre des nations à sa portée ; le XV de France est brouillon, il est sifflé contre le Canada, quart-de-finaliste de l'édition 1995, les Fidji, la Namibie. Lors du match contre les Fidji, la France est menée 3-13 et les Fidjiens se voient refuser un essai valable...

Mais revenons sur la préparation de la Coupe du Monde :

défaite le 28 août 1999 contre le Pays de Galles, 34-23 à Cardiff
défaite le 26 juin 1999 contre la Nouvelle-Zélande, 54-7 à Wellington; c'est la plus lourde défaite de l'équipe de France.
défaite infamante le 16 juin 1999 contre le Tonga, 20-16 à Nuku A'lofa
victoire le 12 juin 1999 contre les Samoa, 22-39 à Apia
victoire le 3 juin 1999 contre les Roumains, 62-8 à Castres
défaite le 10 avril 1999 contre les Ecossais, 22-36 à Saint-Denis lors du Tournoi
défaite le 20 mars 1999 contre les Anglais, 21-10 à Londres lors du Tournoi
autre défaite à domicile le 6 mars 1999 contre le Pays de Galles, 33-34 à Saint-Denis lors du Tournoi
victoire le 6 février 1999 contre les Irlandais, 9-10 à Dublin lors du Tournoi
autre défaite à domicile le 21 novembre 1998 contre l'Australie, 21-32 à Saint-Denis

Autrement dit, le doute est présent avant la coupe du monde et ce n'est pas le premier tour qui rassure... On attend donc une élimination rapide... Mais impossible n'est pas français est la devise des Bleus, capable des plus grands exploits, puis de perdre le match suivant...

Donc, un miracle est-il possible ?

Les paris sont clairs : la Nouvelle-Zélande est favorite, la France est gagnante à 15/2.

Premier miracle : en quart de finale, la France doit affronter l'Irlande à Lansdowne Road, du moins c'est ce qui est prévu... Et, surprise ! L'Argentine affiche ses ambitions et l'emporte contre l'Irlande... Et la France l'emporte en quart de finale en Irlande contre l'Argentine.

[modifier] La Nouvelle-Zélande

[modifier] Feuille du match

France- Nouvelle-Zélande:43-31 (10-17)
Le 31 octobre 1999 à Twickenham - France bat Nouvelle-Zélande 43-31
70 000 spectateurs
Arbitre: J. M. Fleming (SCO)
Temps: doux
Terrain: bon

[modifier] Les équipes

France

Titulaires : Xavier Garbajosa - Philippe Bernat-Salles, Richard Dourthe, Émile N'Tamack, Christophe Dominici - Titou Lamaison (o) - Fabien Galthié (m) -Olivier Magne, Christophe Juillet, Marc Lièvremont -Fabien Pelous, Abdelatif Benazzi -Franck Tournaire,Raphael Ibanez (cap),Cédric Soulette.
Remplaçants (entrés en jeu) : Olivier Brouzet (30'), Pieter de Villiers (57'), Arnaud Costes (64'), Stéphane Castaignède (76'), Stéphane Glas (76'), Ugo Mola (76')
Sélectionneurs : Jean-Claude Skrela & Pierre Villepreux

Nouvelle-Zélande

Titulaires: Jeff Wilson - Jonah Lomu, Tana Umaga, Christian Cullen, Alama Ieremia - Andrew Mehrtens (o) - Byron Kelleher (m) - Taine Randell, Josh Kronfeld, Robin Brooke - Norm Maxwell, Reuben Thorne - Carl Hoeft, Anton Oliver, Craig Dowd
Remplaçants (entrés en jeu) : Kees Meeuws (57'), Daryl Gibson (57'), Royce Willis (71'), Justin Marshall (77')
Sélectionneur : John Hart

Avertissements:
France: Garbajosa (17'), Ibanez (35')
Remplacement temporaire:
Nouvelle-Zélande: Maxwell par Willis (7'-9')

[modifier] Evolution du score

Nouvelle-Zélande 0 - 3 France : Christophe Lamaison (2è) pénalité
Nouvelle-Zélande 3 - 3 France : Andrew Mehrtens (9è) pénalité
Nouvelle-Zélande 6 - 3 France : Andrew Mehrtens (18è) pénalité
Nouvelle-Zélande 6 - 8 France : Christophe Lamaison (20è) essai
Nouvelle-Zélande 6 - 10 France : Christophe Lamaison (20è) transformation
Nouvelle-Zélande 9 - 10 France : Andrew Mehrtens (22è) pénalité
Nouvelle-Zélande 14 - 10 France : Jonah Lomu (24è) essai
Nouvelle-Zélande 17 - 10 France : Andrew Mehrtens (39è) pénalité

Mi-temps

Nouvelle-Zélande 22 - 10 France : Jonah Lomu (45è) essai
Nouvelle-Zélande 24 - 10 France : Andrew Mehrtens (45è) transformation
Nouvelle-Zélande 24 - 13 France : Christophe Lamaison (47è) drop
Nouvelle-Zélande 24 - 16 France : Christophe Lamaison (49è) drop
Nouvelle-Zélande 24 - 19 France : Christophe Lamaison (50è) pénalité
Nouvelle-Zélande 24 - 22 France : Christophe Lamaison (54è) pénalité
Nouvelle-Zélande 24 - 27 France : Christophe Dominici (56è) essai
Nouvelle-Zélande 24 - 29 France : Christophe Lamaison (56è) transformation
Nouvelle-Zélande 24 - 34 France : Richard Dourthe (60è) essai
Nouvelle-Zélande 24 - 36 France : Christophe Lamaison (60è) transformation
Nouvelle-Zélande 24 - 41 France : Philippe Bernat-Salles (75è) essai
Nouvelle-Zélande 24 - 43 France : Christophe Lamaison (75è) transformation
Nouvelle-Zélande 29 - 43 France : Jeff Wilson (80è) essai
Nouvelle-Zélande 31 - 43 France : Andrew Mehrtens (80è) transformation

[modifier] Détail des points

France:

4 essais: Lamaison (20è), Dominici (56è), Dourthe (60è), Bernat-Salles (75è)
4 transformations: Lamaison
3 pénalités: Lamaison (2è, 50è, 54è)
2 drops: Lamaison (47è, 49è)

Nouvelle-Zélande:

3 essais: Lomu (24è, 45è), Wilson (80è)
2 transformations: Mehrtens (45è, 80è)
4 pénalités: Mehrtens (9è, 18è, 22è, 39è)

[modifier] Récit du match

[modifier] Première période équilibrée

Le début de rencontre est crispé. Les Français figurent bien et ouvrent la marque sur pénalité, mais ils sont trop sanctionnés. Et c'est logiquement Merthens qui va donner l'avantage 6-0 à son équipe au bout de 20 minutes de jeu. Les Français doivent même jouer à 14, car la dernière faute a valu un carton jaune à Garbajosa.

Après le renvoi, les Français usent du jeu au pied, lequel est trop long, et récupéré en arrêt de volée directement par Wilson, qui dégage d'un très long coup de pied en diagonale. Lamaison récupère et entre brièvement dans ses 22 mètres, avant d'en ressortir ballon en main pour amorcer la relance. A une dizaine de mètres de la ligne médiane, il sert Benazzi, qui d'une bonne charge fait avancer son équipe. Galthié sert immédiatement Dominici au près.

On ne l'a pas beaucoup vu depuis le début de ce match, Dominici. Mais le varois a le don de se faire remarquer. Sur son accélération, il prend le trou et laisse Umaga sur ses appuis. Il va ensuite semer la pagaille dans la défense des Blacks. Son adversaire direct en deuxième rideau est effacé par un cadrage-débordement d'école, et c'est au tour de Wilson d'être battu de la même façon. Dominici court seul vers les poteaux des Blacks. Essai ? Non, car le centre kiwi Cullen est revenu de nulle part pour plaquer l'ailier français au dernier moment.

Le soutien français est long à venir, mais les Blacks n'ont pas eu le temps de venir contester le ballon. Dourthe en position de demi de mêlée relève la tête, et reverse le jeu sur Lamaison. Les Blacks s'étaient mal placés et l'ouvreur français n'a personne pour l'empêcher de marquer. Il transforme son essai, et la France repasse en tête 10-6.

Mais l'indiscipline continue de plomber l'équipe de France. 2 minutes après avoir marqué leur essai, ils encaissent à nouveau une pénalité de Merthens, qui ramène son équipe à 1 point. 10-9 pour la France. Entre alors en jeu Gulliver au pays des Lilliputiens: Jonah Lomu. 1m96 pour 114kgs. Un ogre qui est déjà le meilleur marqueur d'essais de la compétition. Sur une action Black "quelconque", il récupère le ballon lancé à hauteur des 30 mètres. La scène qui va suivre à des allures de cauchemar. Lomu accélère, échappe à un, deux, trois placages, et termine dans l'enbut avec deux Bleus sur le râble. Image saisissante qui voit Benazzi, subir totalement l'impact de son placage sur l'ailier kiwi. Merthens rate la transformation. 14-10 pour les Blacks.

Les Français accusent le coup, et tentent alors de limiter un peu la casse, avant la mi-temps. Mais très surveillés par M. Flemming, ils sont à nouveau pénalisés dans leur camp, offrant à Merthens 3 points supplémentaires pour un score à la pause de 17-10.

Les Français ne sont alors pas largués, loin de là, mais paient cher leur indiscipline, et doivent absolument trouver une solution au problème Lomu. Mais un écart de 7 points "seulement" à la mi-temps, c'était plutôt imprévu pour les observateurs.

[modifier] Seconde période: le sursaut des Français

Sur un dégagement français qui ne trouve pas la touche, Lomu relance. Arrivé à hauteur de la défense française, il redouble avec Wilson et s'enfonce lancé vers les 22 mètres des Bleus. Le cauchemar de son premier essai se reproduit. En voulant le plaquer trop haut, les Français vont subir sa densité physique. Lomu percute, s'enroule après contact, joue de ses appuis en béton, et marque. Encore. Merthens transforme, et la Nouvelle-Zélande mène 24-10 à la 45ème minute.

A ce moment là, le début prometteur des Bleus semble oublié. Beaucoup doutent de leur capacité à revenir, surtout en étant autant pénalisés. Et le spectre Lomu rôde dans Twickenham... Mais les Français vont remettre les choses dans l'ordre. Et se reposer un peu sur la puissance de leurs avants. Enchaînant les temps de jeu en avançant, ils parviennent à faire craquer la défense des Kiwis. Par deux fois, M. Flemming annonce l'avantage. Par deux fois, Lamaison prend de la profondeur, alerte Galthié, et claque un drop plein axe. Les Bleus reviennent à 24-16, et entretiennent l'espoir.

Et plus encore. Continuant de prendre l'ascendant à l'impact, mais surtout en faisant preuve d'une excellente conservation du ballon, ils vont à nouveau mettre à mal le rideau noir. L'indiscipline a changé de camp, et les Blacks sont pénalisés par deux fois, et Lamaison continue son sans-faute. 24-22. Tout redevient alors possible dans cette rencontre, reste à faire la différence...

On joue la 56ème minute du match. Regroupement à l'initiative des Blacks dans leur camp, près de la ligne médiane. Ils gagnent sur le premier impact, mais le soutien immédiat est mauvais. Olivier Brouzet se remet sur ses appuis, et parvient à gratter le ballon qui avait été oublié en route. Galthié lève la tête, et remarque qu'il n'y a personne dans la profondeur, petit côté. Il tape au pied dans l'espace vide. Dominici part immédiatement.

Ils sont 3 joueurs à converger vers le point de chute du ballon. Randell d'abord, qui s'est tout de suite retourné pour couvrir le terrain. Puis Merthens, qui revient de sa position d'ouvreur. Et enfin Dominici, lancé plein gaz. En voyant le démarrage du 11 français, le public s'est réveillé. Mais à ce stade rien n'est fait. C'est un rebond favorable qui va contribuer à faire entrer cette équipe de France dans la légende.

D'un geste d'une pureté extraordinaire, Dominici se saisit du ballon à une main, tout en débordant Randell qui ne l'avait pas vu venir. Tout Twickenham explose d'un coup. Merthens dévie sa course et tente de cueillir le Toulonnais au vol, mais il échoue. Randell tentera bien de le suivre, mais Dominici avait un temps d'avance, et une pointe de vitesse exceptionnelle. L'essai est marqué entre les perches et transformé par Lamaison. La France prend le score, 29-24.

Mais il était écrit que les Bleus n'allaient pas en rester là. Et face à des Blacks qui se décomposaient de minute en minute, c'était au pack français de faire parler la poudre. Pénaltouche dans le camp All Black, les Français forment le maul. Un maul qui bouscule les Néo-Zélandais, et qui va carrément les emporter sur près de 20 mètres, jusque dans leurs 22m avant de s'écrouler. Galthié éjecte pour Lamaison qui tape immédiatement vers l'en-but, à destination de ses centes. Dourthe et N'Tamack prennent la ligne Black à contre-pied. Et c'est Dourthe qui sera le plus rapide et qui aplatit. C'est le troisième essai français, à la 60ème minute. Lamaison qui fait le match parfait, transforme facilement. 36-24 pour la France.

Les All Blacks vont alors jeter leurs dernières forces dans la bataille, en mettant à rude épreuve la défense française. Mais cette dernière reste agressive et bien en place. Le temps passe, et on sent que les Néo-Zélandais sont fébriles, et que la maîtrise du match leur échappe. Sur une nième attaque, trop à plat, Umaga échappe le ballon. Lamaison dégage, sans trop y croire, peut-être pense-t-il que ses coéquipiers étaient hors-jeu ? Mais M. Flemming laisse jouer.

Magne était près du point d'impact et il est le premier à partir. Sur sa première accélération, il retape au pied en orientant le ballon vers l'intérieur, pour éviter à tout prix qu'il sorte. Derrière lui, c'est un duel décisif qui se joue. Bernat-Salles, qu'on annonçait victime expiatoire du géant Lomu, fait parler ses cannes et son poids plume. Côté Black, c'est Wilson qui tente d'éviter le K.O. Alors que Magne est distancé, c'est Bernat-Salles qui tape le dernier coup de pied à suivre. Au coude à coude avec Wilson, il sera le premier à se jeter sur le ballon. Essai accordé. Les Blacks sont à terre, et ne se relèveront plus. Pierre Villepreux, dans les tribunes est en pleurs. Lamaison transforme. 43-24.

A l'orgueil, les Blacks mettront un ultime essai, anecdotique. Eux qui étaient l'épouvantail de cette compétition, sont tombés sur des Français méconnaissables. Bernard Laporte, alors consultant pour TF1, déclarera en cours de match: "Personne ne les attendait à ce niveau, même pas nous". Ces petits coqs, dont la seule incertitude devait être l'ampleur de la défaite, ont renversé une montagne. Plus encore, ils ont à tout jamais marqué les esprits, en inscrivant 33 points en 30 minutes à une équipe qu'on croyait invincible.

Ce match restera dans l'histoire comme l'un des plus aboutis de l'équipe de France.