Vol 2937 Bashkirian Airlines
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Le Vol 2937 de Bashkirian Airlines est un avion russe qui entra en collision avec un avion cargo de DHL, le 1er juillet 2002 à 21h35 (UTC), près de Ueberlingen (Allemagne) et du lac de Constance.
Sommaire |
[modifier] Les avions impliqués
L'avion de Bashkirian Airlines était un Tupolev Tu-154, en provenance de Moscou, à destination de Barcelone, avec à son bord 57 passagers et 12 membres d'équipage. Parmi les passagers voyageaient 52 enfants russes ayant gagné à l'école un voyage en Espagne.
L'avion cargo de DHL était un Boeing 757, en provenance de Bergame (Italie), à destination Bruxelles, avec deux membres d'équipage à bord.
[modifier] L'accident
Les deux avions volaient à 36 000 pieds (environ 11 000 mètres), leurs trajectoires étant concourantes. L'espace aérien, bien qu'étant physiquement au dessus du sol allemand, était controlé depuis Zurich par Skyguide, la société privée en charge du contrôle du trafic aérien pour la Suisse.
Le contrôleur aérien travaillait sur deux postes de contrôle à la fois, et ne prit que tardivement conscience du danger qui menaçait les deux appareils. De plus l'équipe de maintenance technique avait désactivé le système d'alertes de collision, qui s'active lorsque deux appareils sont trop proches et ne respectent donc plus les règles de séparation, c'est-à-dire 1000 pieds, soit 300 mètres environ, verticalement et 5 milles nautiques horizontalement.
Cependant, moins d'une minute avant le crash, il contacta le pilote russe et lui demanda de descendre de 1000 pieds afin d'éviter la collision avec l'avion allemand. Plusieurs secondes après le début de la descente, le pilote russe reçut du TCAS (système anti-collision) l'instruction inverse (monter), alors que le pilote allemand recevait de son TCAS l'instruction de descendre. Si les deux pilotes avaient suivi ces dernières instructions, la collision n'aurait jamais eu lieu. Hélas, le pilote allemand suivit l'instruction de son TCAS, contrairement au pilote russe qui continua d'obéir aux instructions du contrôle aérien, chacun conformément a la procédure en vigeur dans son pays.
N'ayant pas conscience des instructions données par le TCAS, le contrôleur aérien répéta à l'équipage russe sa consigne de descente. De plus, il donna une information de position erronée, et l'équipage du Tupolev perdit de précieuses secondes à essayer de localiser visuellement le Boeing dans l'obscurité. Les deux avions descendaient.
Et la catastrophe arriva, les deux avions entrèrent en collision. Le Tupolev 154 accrocha la queue du Boeing 757, explosa et se brisa en deux immédiatement. Le 757 lutta pendant 7 kilomètres avant de s'écraser à flanc de montagne, juste après l'explosion d'un moteur. Aucune des 71 personnes à bord des 2 appareils ne survécut.
[modifier] Les causes
Un seul contrôleur, Peter Nielsen, du centre de contrôle de Zurich, contrôlait le secteur dans lequel naviguaient les deux appareils. Il n'était apparemment pas surchargé (5 avions seulement), et son collègue avait pris une pause (autorisée à l'époque). Nielsen travaillait sur deux postes de contrôle à la fois et ne prit conscience du risque de collision qu'une minute avant celle-ci. Une des raisons de ce retard était un autre conflit, dont Nielsen s'occupait à la place de son collègue absent. Or, ces minutes se sont avérées cruciales : si l'avion Russe avait débuté sa descente plus tôt, les TCAS n'auraient jamais donné la moindre instruction.
De plus, un système anti-collision au sol était arrêté pour maintenance. Opérationnel, il aurait alerté le contrôleur de l'imminente collision suffisamment tôt. Deux des trois lignes téléphoniques du centre de contrôle étaient également arrêtées pour maintenance. La troisième était occupée. Les contrôleurs allemands de Karlsruhe, conscients du danger, n'ont donc pas pu prévenir Nielsen. Et ce dernier, lorsqu'il réalisa la difficulté de la situation ne put appeler pour demander de l'aide.
Enfin, l'équipage du Tupolev reçut des instructions vitales en retard, car la fréquence était occupée par Nielsen qui parlait à l'équipage allemand. Les premières demandes d'aide de l'équipage russe ne furent donc pas reçues par le contrôleur. La réponse de ce dernier fut retardée de 23 secondes, secondes qui auraient également pu permettre d'éviter la collision.
On peut donc considérer que l'accident résulte de la conjonction des trois irrégularités suivantes :
- absence d'harmonisation des procédures allemande et russe (suivre l'instruction du TCAS ou du contôleur)
- mauvaise gestion du trafic dûe à la présence d'un seul contrôleur pour deux fréquences
- maintenances simultanées du système anti-collision au sol et de deux des trois lignes téléphoniques
[modifier] Évènements liés
Un an avant l'accident, un incident similaire se produisit au dessus du Japon. Deux avions de lignes Japonais (dont un de Japan Air) se frôlèrent, alors qu'ils avaient reçu du TCAS et du contrôle aérien des instructions contraires. La catastrophe fut évitée car les deux pilotes prirent la même décision d'ignorer l'instruction du contrôleur et de suivre celle du TCAS. Ils passèrent à 100 mètres l'un de l'autre, au prix de très brusques manœuvres et d'une centaine de passagers blessés au cours de celles-ci. Les autorités Japonaises réclamèrent que des mesures soient prises pour éviter que des incidents similaires se produisent, mais leurs demandes restèrent sans réponse.
Peter Nielsen est mort poignardé devant sa maison à Zurich le 24 février 2004. Son assassin, Vitaly Kaloyev, fut arrété quelques jours plus tard. Kaloyev avait perdu sa femme et ses deux enfants dans la catastrophe, et souffrait d'une dépression nerveuse. Arrivé très vite sur les lieux du crash, il avait participé à la recherche des corps et avait retrouvé celui de l'une de ses filles, intact. Un an après le drame, il avait demandé à la direction de Skyguide de rencontrer le contrôleur responsable de la catastrophe. Sa demande était restée sans réponse. Après le meurtre, il fut retrouvé dans sa chambre d'hotel, en état apparent de choc. Il prétendit ne plus se souvenir de son acte, et fut examiné dans un hôpital psychiatrique. Il a été condammé en octobre 2005 à 8 ans de prison par un tribunal suisse et reste à ce jour détenu dans ce pays.
Ironie du sort, Nielsen n'était pas le seul responsable de la collision, mais Kaloyev n'avait pas conscience de la conjonction d'évènements qui conduisit à l'accident. Les experts conclurent même qu'au vu des faits, Nielsen n'aurait pas pû être sanctionné. Il avait arrêté de travailler suite à son inculpation. A Skyguide, ses anciens collègues laissent encore une rose blanche dans un vase sur son poste.
Le 19 mai 2004, le bureau enquêtes-accidents de l'aviation civile allemande (BFU) publia les résultats de son enquète. Skyguide, qui tenait initialement l'équipage russe pour responsable de l'accident, accepta sa responsabilité et paya une compensation à certaines des familles russes touchées par la catastrophe.
[modifier] Liens externes
- Rapport d'enquète du BFU (PDF), et :
- Rapport intermédiaire du BFU (PDF)
- article du Guardian sur le meurtre
- Skyguide accepts blame for the crash
- Photos du site du crash
- Peter Nielsen stabbed to death: http://www.theage.com.au/articles/2004/02/28/1077677014178.html
- A woman accompanying the air traffic controller?: http://english.pravda.ru/world/2002/07/13/32439.html
- Überlingen: une contre-enquête accablante, Collision en plein ciel d'Ariane Perret
- Collision en plein ciel Le livre sur la tragédie d'Überlingen