Gelugpa
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La tradition Gelug, Geluk, Guéloukpa ou Guélougpa, (Dge-lugs ; དགེ་ལུགས་པ་), encore appelée secte des Bonnets jaunes, est la plus récente et la mieux connue des grandes lignées du bouddhisme tibétain. Le Dalai Lama, qui en est issu, dirige la politique et l’administration tibétaine depuis le XVIIe siècle (gouvernement en exil depuis 1959) ; l’autorité spirituelle sur l'école est officiellement détenue par un Ganden Tripa (Dga'-ldan Khri-pa , « détenteur du trône de Ganden », premier monastère gelug) désigné pour sept ans par le Dalai Lama. Le Panchen Lama, régent, second et parfois rival du Dalai Lama, est un autre chef spirituel réincarné important de cette lignée.
La tradition gelug naquit avec la réforme de Tsongkhapa (1357-1419), à partir des traditions de l’époque, en particulier kadampa dont gelug a repris le nom (nouveau kadampa). Elle visait, en réaction aux dérives du clergé, à renforcer la discipline et la formation philosophique des moines, à encadrer la pratique bouddhique et à en clarifier les objectifs, subordonnant les pratiques tantriques à la formation textuelle de base (sutras et philosophie). Le nom de gelug est généralement interprété comme « vertueux », mais certains [1] y ont vu la contraction de Geden lug, « tradition de Geden » (ou Ganden), son premier monastère propre.
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[modifier] Historique
Tsongkhapa, initiateur de la réforme vertueuse, commença très jeune sa carrière religieuse : il fut reçu comme laïc engagé dans la voie (upasaka) par le karmapa à 3 ans et devint novice à 7. Selon la tradition, il reçut une éducation éclectique qui lui permit de connaître le meilleur de tous les courants. Il s’est principalement inspiré de la tradition kadampa, mettant l’emphase sur l’observance du vinaya (règles monastiques) ainsi que sur la connaissance des sutras et de la philosophie indienne, en particulier Nagarjuna et Chandrakirti, aussi bien que des tantras. Il s’efforça de contenir le vajrayana à l’intérieur du cadre mahayana et définit son idée du bouddhisme dans l’Ode aux réalisations où il mentionne les trois aspects principaux de la voie : compassion, sagesse et désir de libération.
La tradition orale tibétaine prétend que les coiffes des premiers panditas (érudits) bouddhistes étaient jaunes comme les robes des moines, couleur évoquant la terre et la stabilité. Devant le retour en force à partir du VIIe siècle des philosophes hindouistes qui avaient souvent la haute main dans les débats, pour manifester leur volonté de briller dans ce domaine, les orateurs bouddhistes auraient adopté des bonnets rouges, couleur du feu et de l’éloquence. C’est pourquoi le rouge fut considéré comme couleur monastique au Tibet, et souvent adopté pour les coiffes cérémonielles par divers courants, en particulier nyingmapa. En adoptant le bonnet jaune, Tsongkhapa prétendait revenir aux origines et souhaiter pour la communauté monastique avant tout la stabilité et des bases solides[2]. Tsongkhapa est aussi l’instigateur de la cérémonie annuelle de prières communes des moines, Mönlam Chenmo ; la première se déroula à Jokhang en 1409.
Gelug devient la lignée dominante à partir de la fin du XVIe siècle, lorsque Sonam Gyatso (1543-1588) convertit au boudhisme vajrayana Altan Khan, chef des Mongols qui viennent d’envahir le Tibet. C’est le khan qui lui décerne le titre de Dalai Lama, qu’il applique rétroacivement à ses deux incarnations précédentes, Gendün Drup (1391-1474) et Gendün Gyatso. Son successeur, le quatrième Dalai Lama, est un arrière-petit-fils d’Altan Khan ; il décède peu après son intronisation. En 1640, pour faire face à des troubles internes, le 5e Dalai Lama, Ngawang Lobsang Gyatso (1617-1682), rappelle les Mongols qui rétablisent l’ordre et lui donnent le contrôle politique et adminitratif total du pays. Lobsang Choekyi Gyaltsen, abbé de Tashilhunpo et son tuteur, est nommé Panchen Lama, titre dont il fait bénéficier rétroactivement ses trois prédecesseurs.
Dans les siècles suivants, les monastères gelug se multiplient par création, mais aussi par récupération d’établissements d’autres écoles, dont certaines sont absorbées entièrement (kadampa) ou presqu’entièrement (jonangpa). Au sein de gelug se constituent différentes lignées ; les principaux chefs de lignée sont le Dalai Lama (Gyalwa Rinpoche), le Panchen Lama, Chagkya Dorje Chang, Ngachen Könchok Gyaltsen, Kyishö Tulku Tenzin Thrinly, Jamyang Shepa, Phurchok Jampa Rinpoche, Jamyang Dewe Dorje, Takphu Rinpoche, Khachen Yeshe Gyaltsen.
[modifier] Monastères et séminaires
Tsongkhapa fonda en 1409 le monastère de Ganden. Ses disciples Gyaltsab Je (1364-1431), puis Gendrub Je (1385-1438), le remplacèrent à sa tête. Gyaltsab Je est considéré comme le premier Ganden Tripa (par la suite ils seront nommés par les Dalai Lama pour une période de sept ans ; Khensur Lungri Namgyal, détenteur actuel de la fonction, est le 101e). En 1416, Jamyang Choje fonde Drepung, et en 1419 Chöje Shakya Yeshe fonde Sera; Gyalwa Gendün Drup (1391-1474), premier Dalai Lama à titre posthume, fonde Tashi Lhunpo dans le Shigatse (1447). Ganden, Drepung, Sera, Tashilhunpo, Tar et Labrang sont les six principaux monastères gelug.
Parmi les lignées tibétaines, gelug et sakya sont considérées comme celles disposant des plus solides traditions académiques. Les centres d’enseignements gelug furent nombreux. On peut citer les deux collèges de Ganden, Ganden Shartse et Ganden Jangtse, dont dépendaient sept branches réduites ultérieurement à quatre : Loseling, Gomang, Deyang et Ngagpa. Drepung également était une université bouddhique, ainsi que Sera, qui comportait cinq branches réduites plus tard à deux : Sera-Je et Sera-Me. Deux collèges se consacraient à la spécialisation tantrique : Gyume (premier niveau), établi par Je Sherab Senge en 1440, et Gyutö (niveau supérieur), établi par Gyuchen Kunga Dhondup en 1474. Avant l'exil, plus de 5000 moines venus de différentes régions étudiaient à Ganden, Drepung and Sera [3] et près de 500 dans chaque collège tantrique. Après l’exil, Sera, Drepung, Ganden, Tashi Lhunpo et Gyume ont été recréés dans le Karnataka, et Gyutö à Bomdila dans l’Arunachal Pradesh.
Les matières principales enseignées dans les séminaires gelug sont la prajnaparamita, la philosophie madhyamika, la cognition valide (tsema ou tshad-ma), la phénoménologie et la discipline monastique. Le cursus va de quinze à vingt ans et chaque centre a ses propres manuels. Les élèves qui accomplissent l'intégralité des études deviennent Geshe (titulaire de la connaissance) ; il existe trois niveaux de ce titre : Dorampa, Tsogrampa et Lharampa. Après ces études de base, ils peuvent entrer dans les collèges tantriques.
[modifier] Pratique et textes fondateurs
Gelug a intégré des pratiques nées dans différents courants, mais la principale est le Lamrim « Voie progressive » développé dans Pratique selon le Lamrim (Lam-rim chen-mo) de Tsongkhapa à partir de La Lampe de la voie (Bodhipathapradipa) d'Atisha, inspirateur de la pensée kadampa. En ce qui concerne la pratique tantrique, les déités principales sont Guhyasamaja, Heruka-Cakrasamvara et Yamantaka (Vajrabhairava), auquelles se sont ajoutées Kalacakra et Vajrayogini, parèdre de Heruka. les trois tantras principaux sont le Guhyasamajatantra, le Vajrabhairavatantra et le Vajrayoginitantra.
Six ouvrages de Tsongkhapa sont particulièrement importants :
- Le Grand livre de la progression vers l'éveil (Lam-rim chen-mo)
- Le grand exposé des tantras (sNgag-rim chenmo)
- L’Essence de l’éloquence des enseignements interprétatifs et définitifs (Drnng-nges legs-bshad snying-po),
- Éloge de la relativité (rTen-'brel bstodpa),
- Les cinq stades du Guhyasamaja (gSang-'dus rim-lnga gsal-sgron) and
- Le Rosaire d’or (gSer-phreng)
[modifier] Notes
- ↑ Alexander Berzin
- ↑ Glenn H. Mullin Living in the Face of Death : The Tibetan Tradition. Ithaca, NY: Snow Lion, 1998
- ↑ Pema Gyaltsen, ancien abbé de Loseling, cité par le Dalai Lama lors de la Conférence Gelug de décembre 2000, en estimait l’effectif à au moins 5000, mais considérait que 1000 d’entre eux seulement étudiaient sérieusement.
[modifier] Voir aussi
- Bouddhisme tibétain
- Dalaï Lama | Panchen Lama
- Dordjé Shugden
- Dagpo Rimpotché
- Kadampa | Sakyapa | Kagyupa | Nyingmapa
- Écoles du bouddhisme
[modifier] Bibliographie
- Djé Tsongkhapa L'ode aux réalisations Arkana, (ISBN 2906588067) (ISBN 978-2906588066)
- Losang Drakpa Tsongkhapa, Michel Zaregradsky (dir), Georges Driessens (trad) Le Grand Livre de la progression vers l'éveil,
tome 1 Dharma; Édition : Gyatso, Yonten (3 septembre 1999) (ISBN 2864870142) (ISBN 978-2864870142)
tome 2 Dharma (1992) (ISBN 2864870185) (ISBN 978-2864870180)