Principe de moindre action
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Dans Principe de la moindre quantité d'action pour la mécanique (1744), Maupertuis définit l'action comme suit :
« L'Action est proportionnelle au produit de la masse par la vitesse et par l'espace. Maintenant, voici ce principe, si sage, si digne de l'Être suprême : lorsqu'il arrive quelque changement dans la Nature, la quantité d'Action employée pour ce changement est toujours la plus petite qu'il soit possible. »
Fermat, König et Leibniz avaient avancé le même principe sous le nom de « principe d’économie naturelle »[1]; lequel deviendra le principe de conservation de l’énergie avec les travaux d’Euler, de Lagrange, de Jacobi et de Hermann von Helmholtz.
[modifier] Résumé anthropomorphique
Le Principe de moindre action dit qu'en mécanique un corps prend la direction qui lui permet de dépenser le moins d'énergie dans l'immédiat (ou d'acquérir le plus d'énergie dans l'immédiat), en tenant compte qu'il doit y avoir continuité du mouvement (positions et vitesses) s'il y a continuité des conditions physiques.
Il est à remarquer qu'en reliant deux points, la trajectoire prise par le corps n'est pas toujours celle qui lui fait dépenser globalement le moins d'énergie car c'est la dépense immédiate d'énergie qui est minimisée (comme si le corps ne percevait que les conditions de son environnement immédiat) et si le chemin parcouru est long, un chemin plus court avec une dépense d'énergie immédiate plus élevée peut permettre une dépense globale inférieure. Une analogie avec la consommation en carburant d'une voiture peut être faite.
Pour les connaisseurs: dans ce « résumé », énergie signifie énergie cinétique.
[modifier] En quelques mots
L'action se présente comme la sommation, le long du parcours du système, de la différence entre l'énergie potentielle et l'énergie cinétique. La minimisation se fait à points extremum fixés, temps de trajet fixé, et trajet variable: dans ces conditions, on cherche le trajet minimisant l'action. C'est équivalent aux deux conditions suivantes:
- La trajectoire que suit un corps est celle qui permet la transformation instantanée de l'énergie cinétique en énergie potentielle la plus petite possible (donc aussi la plus lente sur la trajectoire), ou la transformation immédiate dans le sens inverse la plus grande possible (donc la plus rapide possible sur la trajectoire).
- La transformation (et donc la trajectoire) est déterminée par les conditions initiales (position et vitesse) et les conditions de l'environnement physique : il doit y avoir continuité de la trajectoire s'il y a continuité du milieu physique.
Il y a parfois un échange cyclique entre ces deux énergies (balancier sans frottement, satellite à orbite elliptique,...) ou une stabilisation provisoire (bille immobile ou posée au fond d'un trou, satellite à orbite circulaire,...).
La chute libre d'un corps est l'exemple type de la transformation de l'énergie potentielle (gravitationnelle) en énergie cinétique. Le ralentissement et l'arrêt (avant sa chute) d'un corps lancé verticalement est un exemple de la transformation inverse.
Les frottements imposent une transformation plus compliquée car ils engendrent de la chaleur, qui est l'énergie cinétique des molécules des matériaux, mais en négligeant cette forme d'énergie, on peut utiliser le Principe de moindre action en considérant que de l'énergie cinétique se perd (sort du système étudié).
Suivant le système étudié, et le cadre théorique dans lequel on le considère, l'expression mathématique du principe de moindre action change légèrement de forme.
C'est un des rares principes ayant survécu aux multiples mutations de la physique, mais il a rarement été à l'origine d'une découverte : il est plutôt utilisé pour reformuler ou redémontrer des lois trouvées par d'autres biais. Sa plus grande contribution a sans doute été de mettre hamilton sur la voie de ses travaux théoriques (voir: Mécanique hamiltonienne).
[modifier] Un problème métaphysique ?
Le principe de moindre action utilise l'hypothèse de deux points fixes sur le parcours du mobile : un point de départ, mais aussi un point d'arrivée. Cela a souvent été critiqué comme étant l'utilisation dans le raisonnement d'une "cause finale", ce qui est contraire à la causalité qui suit la flèche du temps en physique.
En fait, si le point de départ est doté de conditions initiales (coordonnées et vitesse), le point d'arrivée n'a pas de coordonnées précises ni de vitesse imposée : il existe, c'est tout. L'existence du point final dans le raisonnement permet d'émettre l'hypothèse de l'existence d'un trajet à partir de l'état initial et de déterminer ses conditions (équations d'Euler-Lagrange), mais n'impose aucune autre condition en dehors de la continuité indiquée plus haut (ce travail peut même montrer que seul un trajet de longueur nulle est possible dans les cas de stabilité du mobile).
[modifier] En mécanique newtonienne
[modifier] Une alternative de présentation
- Soit on expose l'action et le lagrangien habituels de la physique classique (non relativiste), puis on détermine les équations d'Euler-Lagrange.
- Soit on définit abstraitement l'action et le lagrangien (à la manière de Landau et Lifchitz[2]), et on détermine leurs formes et leurs propriétés qu'imposent les principes de la physique, ainsi que les équations d'Euler-Lagrange.
Dans cet article, seule la première présentation sera donnée.
[modifier] Définition du lagrangien et de l'action classiques
Considérons pour simplifier un point matériel décrit, dans un repère galiléen, par un seul degré de liberté, noté q(t) à l'instant t [3]. Le lagrangien est la différence entre l'énergie cinétique (du point matérielle) et l'énergie potentielle (due à l'environnement physique):
où est l'énergie cinétique du système et est l'énergie potentielle, qui en général ne dépend pas de .
L'action de la trajectoire, étant la somme totale de la différence entre énergie potentielle et l'énergie cinétique durant la trajectoire, est définie par:
où ti et t désignent respectivement l'instant initial et l'instant final.
Le signe − n'intervenant pas dans les calculs (que ce soit un minimum n'intervient pas, il suffit que ce soit un extremum), on le supprime. On a donc:
où ti et t désignent respectivement l'instant initial et l'instant final.
[modifier] Les équations d'Euler-Lagrange
- Dire que le chemin "minimise localement l'action" signifie que pour tout autre chemin ayant les mêmes conditions initiales et finales, et suffisamment proche du chemin minimisant, la valeur de l'action est plus grande.
- Avec certaines conditions initiales et/ou finales, le chemin minimisant localement l'action peut ne pas exister, mais s'il existe, il est unique (à cause des conditions initiales et de la continuité du mouvement).
Le chemin q(t) effectivement suivi par le point matériel entre les instants ti et tf fixés est un extremum de l'action (car il lui fait atteindre sa valeur minimale), donc en faisant une variation du chemin, on a :
Les équations (d'Euler-Lagrange) que l'on en déduit sont:
[modifier] L'équation fondamentale de la dynamique newtonienne
Supposons que .
Avec l'expression du lagrangien classique, on obtient:
Les équations d'Euler-lagrange donnent:
Ce qui exprime les Lois du mouvement de Newton, avec:
SOMME DES FORCES EXTÉRIEURES = |
En fait, si toutes les forces en jeu dérivent d'un potentiel, le principe de moindre action peut être considéré comme une réécriture des lois du mouvement de Newton.
[modifier] Cas où il y a des forces de frottements
...
[modifier] Particule chargée dans un champ éléctromagnétique
Ici est la charge de la particule.
avec : ; la donnée est appelée "potentiel électromagnétique".
Donc :
En posant et
les équations d'Euler-Lagrange donnent:
Où est appelé force de Lorentz.
Il est à remarquer qu'historiquement, la force de Lorentz a été trouvée avant l'idée du potentiel électromagnétique.
À partir du potentiel électromagnétique, le premier groupe des équations de Maxwell se démontre sans difficulté : l'équation de Maxwell-Faraday et l'équation de conservation du flux magnétique.
[modifier] L'impulsion
L'impulsion est la variable conjuguée de la vitesse dans la transformée de Legendre du lagrangien.
Elle est définie par :
- Si alors
- Donc , d'où :
- Si est affine par rapport à (sinon il s'agit d'une force de frottement) alors
-
- où est indépendant de .
- L'impulsion est utilisable comme variable :
- En remarquant que: , on a
- En développant le carré, on obtient:
Dans le lagrangien , le potentiel est indépendant de .
Avec l'impulsion comme variable, les équations d'Euler-Lagrange ne changent pas de forme : y prend la place de .
[modifier] Invariances et constantes du mouvement
Le Théorème de Noether montre qu'une invariance du lagrangien par une transformation impose une grandeur invariante du système. On peut utiliser l'énergie du système pour arriver aux mêmes invariants (mis à part le premier cas).
[modifier] Indépendance par rapport au temps
Si les forces en présence sont indépendantes du temps ou si le système est fermé, alors le lagrangien ne dépend pas explicitement du temps : ou encore
En dérivant le lagrangien par rapport au temps, on démontre que l'énergie totale
est constante par rapport au temps. |
- C'est à dire :
Ceci peut se démontrer directement à partir de l'équation fondamentale de la dynamique.
L'énergie du système peut aussi être définie comme la transformée de Legendre du lagrangien.
[modifier] Translation dans l'espace
Pour un système fermé, et du fait de l'homogénéité (mêmes propriétés à des endroits différents) de l'espace, une translation du système de vecteur constant n'en change pas les propriétés, et donc ne change pas le lagrangien.
On en tire la conclusion de l'invariance de l'impulsion du système. Cette impulsion est la somme des impulsions des éléments du système.
[modifier] Rotation dans l'espace
Pour un système fermé, et du fait de l'isotropie de l'espace (mêmes propriétés dans des directions différentes) de l'espace, une rotation fixée du système n'en change pas les propriétés, et donc ne change pas le lagrangien.
On en tire la conclusion de l'invariance du moment cinétique du système. Ce moment cinétique est la somme des moments cinétiques des éléments du système.
[modifier] Changement de repère galiléen
Un changement de repère galiléen ne change pas les propriétés du système, par contre il permet de montrer qu'il existe un centre de masse (ou centre d'inertie) du système : particule virtuelle dont la masse est la masse totale du système, et animée d'un mouvement rectiligne uniforme en cas d'absence d'intéraction avec l'extérieur.
Dans ce dernier cas, en posant
- = masse totale
- = vitesse du centre de masse
- énergie interne :
- lagrangien interne :
- avec = vitesse relative du corps n°i par rapport au centre de masse
- et = énergie potentielle d'intéractions entre les corps du système.
le lagrangien du système peut s'écrire :
et l'énergie
Le référentiel à privilégier pour faciliter les calculs est le référentiel du centre de masse.
[modifier] Changement de jauge
La jauge est l'ensemble des unités de mesures utilisées pour mesurer les différentes caractéristiques du système. Un changement de jauge qui ne change le lagrangien que d'un facteur multiplicatif constant (ce qui n'en change aucune propriété) permet de montrer facilement certaines propriétés dans le cas où l'énergie potentielle est une fonction homogène des coordonnées (ce qui est souvent le cas).
[modifier] Démonstration des équations d'Euler-Lagrange
Soit q0(t) le chemin réellement suivi entre les instants ti et ti, vérifiant les conditions aux limites :
Soit alors un chemin quelconque q(t) vérifiant les mêmes conditions aux limites :
On peut toujours décomposer ce chemin quelconque q(t) sous la forme :
où ε est un nombre et f(t) une fonction continue qui doit vérifier les conditions aux limites :
Le principe de moindre action nous dit alors que, lorsque ε non nul tend vers zéro :
Calculons l'action S[q0 + εf] au premier ordre :
Un développement limité au premier ordre du lagrangien donne, en omettant la dépendance explicite en temps pour simplifier l'écriture :
La variation de l'action est donc égale à :
On peut réécrire le second terme en utilisant une intégration par partie :
Le terme entre crochets est nul en raison des conditions aux limites imposées à la fonction f(t). On en déduit que la variation de l'action s'écrit au premier ordre :
Cette variation doit être nulle d'après le principe de moindre action, ceci pour tout et toute fonction vérifiant les conditions aux limites, donc l'intégrand doit être nul, et on obtient les équations d'Euler-Lagrange :
QED
[modifier] En mécanique relativiste
.....
[modifier] Articles reliés
On pourra voir aussi un intéressant parallèle avec l'optique dans l'article :
[modifier] Bibliographie
- Lev Landau, Evguéni Lifchitz, Physique théorique, Éditions MIR, Moscou, [détail des éditions]
- Richard P. Feynman ; Le cours de physique de Feynman - Electromagnétisme (I), chapitre 19, InterEditions (1979), ISBN 2-7296-0028-0. Réédité par Dunod (2000), ISBN 2-1000-4861-9
- Jean-Claude Boudenot ; Électromagnétisme et gravitation relativistes, ellipse (1989), ISBN 2729889361
- Jean-Louis Basdevant ; Principes variationnels & dynamique, Vuibert (2005), ISBN 2711771725.
- Florence Martin-Robine ; Histoire du principe de moindre action, Vuibert (2006), ISBN 2711771512.
[modifier] Notes
- ↑ Voir par exemple le site http://serge.mehl.free.fr/chrono/Maupertuis.html
- ↑ L. Landau et E. Lifchitz, trad. Claude Ligny,Physique théorique, tome 1 « Mécanique », éditions MIR, Moscou, 1982, (ISBN 5-03-000198-0 et ISBN 5-03-000197-2)
- ↑ La généralisation à un nombre quelconque de degrés de liberté ne pose pas de problème de principe.
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