Église orthodoxe turque
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Patriarcat orthodoxe turc (Türk Ortodoks Patrikhanesi) |
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Fondateur(s) | Pavli Eftim Erenerol |
Autocéphalie/Autonomie déclarée | 1922 |
Autocéphalie/Autonomie reconnue | non reconnue |
Primat actuel | vacant |
Siège | Istanbul, Turquie |
Territoire primaire | Turquie |
Extension territoriale | - |
Rite | byzantin |
Langue(s) liturgique(s) | turc |
Tradition musicale | byzantine |
Calendrier | liturgique orthodoxe |
Population estimée | moins de 100 |
L'Église orthodoxe turque, Église orthodoxe turque karamanli ou Église orthodoxe de Turquie est une Église orthodoxe non canonique. Le chef de l’Église porte le titre de Patriarche (Patrik en turc) et réside à İstanbul (sans titulaire aujourd'hui).
Sommaire |
[modifier] Fondation
Au beau milieu de la "guerre de libération nationale" (1919-1922) menée par Mustafa Kemal Atatürk contre les puissances alliées et principalement contre la Grèce, un Patriarcat turc orthodoxe fut mis sur pied. Le gouvernement d'Ankara a placé à sa tête un pope grec orthodoxe (turcophone karamanli ou cappadocien) de Kayseri, Pavlos Karahisarithis (1884-14 mars 1968). Il est membre d'une famille connue de la région Karahisaroglu, qui a turquifié son nom en Pavli Eftim Erenerol. Le but de l'instauration de cette église était de turquifier les chrétiens orthodoxes de Turquie en les soustrayant à l'influence du Patriarche œcuménique de Constantinople, considéré comme une cinquième colonne au service de l'ennemi grec. Notons qu'à l'époque, l'Asie mineure comptait 1.5 millions d'orthodoxes. En plein guerre avec la Grèce, les kémalistes avaient toutes les raisons pour vouloir diviser cette communauté.
Après avoir rassemblé un conseil de 72 religieux en novembre 1921 à Kayseri, l’établissement de cette Église fut déclaré le 21 septembre 1922 sous le nom officiel de Patriarcat indépendant turc orthodoxe. La nouvelle Église prétendit représenter plus de 400.000 orthodoxes turcophones vivant dans la région de Cappadoce.
Le métropolite Prokopios fut nommé “vicaire patriarcal” et un Saint-Synode composé de 12 évêques fut instauré. Le turc a été adopté comme langue liturgique. En janvier 1923, avec l'appui du gouvernement d'Ankara, Pavli Eftim est intronisé patriarche sous le nom de Baba Eftim ou Papa Eftim (en grec: Papa Efthimiou), ce alors que les prêtres mariés ne peuvent normalement pas devenir prélats dans les églises orthodoxes.
La communauté publia un journal intitulé Anadolu’da Ortodoksluk Sadasi (La voix de l’orthodoxie en Anatolie), dont seulement 16 numéros furent édités entre juillet 1922 et février 1923.
Lors des négociations qui aboutirent au traité de Lausanne du 24 juillet 1923, le gouvernement turc utilisa l’Église orthodoxe turque pour démontrer aux délégations étrangères que le Patriarcat œcuménique de Constantinople (considéré trop sous l'influence de la Grèce) n’était plus nécessaire et qu’il pouvait être transféré en Grèce, car les orthodoxes de nationalité turque avaient maintenant leur patriarcat national.
Mais suite à l’acceptation par le gouvernement turc de préserver le Patriarcat œcuménique (grec) à Istanbul, les efforts pour constituer une Église turque “nationale” cessèrent, et l’échange de population qui a mis fin à la présence orthodoxe dans la région de Cappadoce porta un coup fatal à cette nouvelle Église.
Le chef de l’Église, Pavli Eftim, s’installa à Istanbul grâce à une autorisation spéciale du gouvernement turc qui le sauva de l’échange de population. Il fournit une liste de 65 personnes qui, à leur tour, s’installèrent à Istanbul. Plusieurs immeubles leur ont été octroyés dans le quartier de Péra (Beyoglu) après leur abandon par des propriétaires grecs fuyant en Grèce suite à la victoire turque de septembre 1922.
[modifier] Sous la République
Pavli Eftim tenta d'occuper le siège du Patriarcat œcuménique dans le quartier de Phanar, mais il fut évacué par la police au 17ème jour de l'occupation. Il déclara vouloir protester contre le Patriarche Grégorios VII, jugé pro-athénien, mais en fait il avait l'intention de s'emparer du titre de Patriarche œcuménique.
Afin de posséder un lieu de culte pour poursuivre ses activités, il occupa l’église grecque-orthodoxe Panaghia Kaphatiani dans le quartier Galata, sur la rive européenne d'Istanbul. Alors, le Patriarcat œcuménique l’excommunia le 19 février 1924. Le deuxième conseil de l’Église orthodoxe turque a eu lieu en juin 1924 dans cette église occupée.
D'abord accueilli favorablement par certains chrétiens orthodoxes de Turquie, qui craignaient les conséquences néfastes de l'implication des phanariotes dans la guerre gréco-turque et espéraient ainsi échapper aux échanges de population, le Patriarcat de Baba Eftim ne fut rapidement plus considéré que comme une institution fantoche, sans aucun fondement réel, sortie de la naphtaline à chaque crise turco-grecque pour les besoins de la propagande. Mustafa Kemal lui-même ne se faisait pas d'illusion à ce sujet, qualifiant Baba Eftim de "général sans soldats".
Une deuxième église dans le même quartier, Sotiros Christos, fut occupée le 31 mars 1926. Cette église fut rendue au Patriarcat œcuménique par l’intervention du gouvernement turc en 1948.
Un quotidien intitulé Metarithmisis fut publié entre 1926 et 1932, en turc mais en caractères grecs, pour défendre la cause de l'Église orthodoxe turque et pour appeler les grecs orthodoxes d'Istanbul (à peu près 100.000 individus en 1927) à abandonner le Patriarcat œcuménique et à rejoindre cette Église, sans grand succès.
Faute d’hommes religieux, Pavli Eftim commença à ordonner ses proches, comme ses neveux Ermis et Doran, et son fils Turgut en 1937. Ce dernier fut nommé évêque le 15 octobre 1961. Suite au retrait de son père pour cause de santé, il devint le deuxième patriarche de l'Église orthodoxe turque le 28 février 1964 sous le nom de Eftim II. Son frère, Selçuk, est ordonné diacre en 1956.
Les partisans de l’Église orthodoxe turque occupèrent les églises Aghios Nicolaos et Aghios Ioannis Prodromos, toujours dans le quartier Galata, en août 1965.
Le fondateur de l’Église, Pavli Eftim mourut le 14 mars 1968, mais le Patriarcat œcuménique s’opposa à son inhumation dans un cimetière orthodoxe, puis qu'il avait été excommunié auparavant. Ce n'est qu'après l’intervention personnelle du Président de la République, Cevdet Sunay, que l’autorisation fut accordée et qu'il fut enterré au cimetière grec de Sisli. Le même problème resurgit après la mort de Eftim II le 9 mai 1991. Son frère Selçuk Erenerol devint alors patriarche sous le nom de Eftim III.
L’Église a attiré l’attention des Gagaouzes après la dissolution de l’Union soviétique et le président de la région autonome des Gagaouzes, Stéphan Topal, visita Eftim III en 1994. Ce dernier a demandé l'envoi de 100 familles gagaouzes et de 4 prêtres à Istanbul afin de constituer une vraie communauté. Mais ces efforts n’ont pas donné de résultat concret même si le rattachement au patriarcat des Gagaouzes, un groupe ethnique turcophone et chrétien orthodoxe des Balkans, a été à plusieurs reprises évoqué par la presse nationaliste turque.
[modifier] L'état actuel
Eftim III ordonna diacre son fils Pasa et son neveu Erkin en août 2000 et mourut en décembre 2002. Il ne fut pas remplacé. D'ailleurs, il avait déclaré son retrait quelques semaines avant sa mort pour protester contre l'attitude, trop laxiste à son goût, du gouvernement turc vis-à-vis du Patriarcat œcuménique, prélude à ses yeux d'une entrée de la Turquie dans l'Union européenne à laquelle il s'opposait.
Sa fille, Sevgi Erenerol, assumait déjà la fonction de porte-parole et reste actuellement l'unique figure connue d'un patriarcat aujourd'hui sans patriarche. Elle intervient de temps en temps dans des meetings ultranationalistes pour dénoncer les activités des missionnaires évangéliques étrangers en Turquie. Elle proteste également contre les efforts de la Turquie à rejoindre l'Union européenne, jugeant que les réformes entreprises à cette fin finiront par nuire au pays.
Ce "patriarcat" n'a jamais eu d'autre prêtre que Baba Eftim car ses successeurs n'avaient jamais reçu la moindre formation théologique. La communauté de cette Église est limitée à la famille élargie des Erenerol qui compte près de 40 membres actuellement (2007). La famille gère à son profit les biens ecclésiastiques[1] qui lui assurent des revenus considérables en échappant à tout contrôle fiscal, puisque appartenant à une fondation religieuse.
Actuellement deux de leurs églises restent complètement fermées, tandis que la troisième (Aghios Ioannis Prodromos) est louée à la communauté assyrienne depuis le début des années 1990.
A la fin des années 1960, une branche américaine fut créée par un médecin africain-américain converti, Civet Kristof (Christopher M. Cragg), qui ne voulait pas dépendre de l'archevêque grec des États-Unis et par conséquent du Patriarcat oecuménique. Elle aurait compté jusqu'à 20 églises et 14.800 membres en 1971[2], mais dans les années 1980 son archevêque alla s'installer à Chicago et la rebaptisa "American Orthodox Church, Diocese of Chicago and North America". Il n'y avait plus qu'une seule église dépendant de cette branche en 1991. Cette Église n'a jamais entretenu de relations concrètes avec l'Église orthodoxe turque.
[modifier] Églises
Le Patriarcat possède trois églises, Panaghia Kaphatiani (Notre-Dame de Caffa), Aghios Nicolaos (Saint-Nicolas) et Aghios Ioannis Prodromos (Saint Jean-Baptiste), toutes trois situées dans un même petit périmètre dans le quartier de Karakoy, sur la rive européenne d'Istanbul. Seule celle d'Aghios Ioannis Prodromos (Saint Jean-Baptiste) [2] accueille encore des offices religieux, puisqu'elle a été louée à la communauté assyrienne sous la direction d'Ibrahim Asil. Elle a été endommagée légèrement par une bombe le 29 avril 2000. Le Patriarcat œcuménique n'a jamais reconnu ces occupations et a toujours réclamé la restitution de ces églises.
[modifier] Patriarches
- Papa Eftim I (1923-1964)
- Eftim II (1964-1991)
- Eftim III (1991-2002); poste vacant depuis.
[modifier] Voir aussi
[modifier] Articles connexes
[modifier] Liens externes
- Informations sur l’Église orthodoxe turque
- Photographies
- Jan Pacal, The secret heroes of Turkish history -- Christian Turkish Nationalists, Turkish Daily News, Saturday, August 10, 1996
- Associated Press, Leader of Turkish Nationalist Church Dies, Turkish Times December 15-31, 2002
- Richard Clogg, The empty spaces where Greeks once were, The Times, November 30, 2005
[modifier] Bibliographie
- Xavier Luffin, Le long voyage d’Ashik Garip (traduit du karamanlica), Paris, L’Harmattan, 2005 (73 p.)
- Xavier Luffin, Une version karamanlı d’Âşık Garip Hikâyesi : héros musulmans et public chrétien, in Talon, Ph. (ed), Recueil d’articles en hommage au Professeur Finet, Louvain, Peeters, 2005 : 107-114
- Xavier Luffin, A Comparison between the English Bible Society’s Translations of the New Testament in Karamanlica (1892) and in Ottoman Turkish (1899) : the Choice of the Religious Vocabulary. First soundings, The Journal of Eastern Christian Studies, 54, Nimègue, 2002 : 149-162
- Xavier Luffin, Le Patriarcat orthodoxe turc, Het Christelijk Oosten, 52, Nimègue, 2000 : 73-96
- Xavier Luffin, Une version karamanli de l’épopée de Köroglu, Archivum Ottomanicum, 16, Wiesbaden, 1998 (éd. G. Hazai) : 5-99
- Xavier Luffin, Baba Eftim et l'Église orthodoxe turque - De l'usage politique d'une institution religieuse, Journal of Eastern Christian Studies, Volume 52, issue 1-2, 2000 (recension)
- Dr. Bestami Sadi Bilgic, The Greek Orthodox Patriarchate and the Turkish-Greek Relations, 1923-1940, Turkish Week, June 15, 2005 (pour l'épisode de l'occupation du Phanar)
- Foti Benlisoy, “Papa Eftim and the Foundation of the Turkish Orthodox Church”, Thesis, Boğaziçi University, Department of History, Istanbul-Turkey, 2002
- Melton, J. Gordon (ed.). The Encyclopedia of American Religions: Vol. 1. Tarrytown, NY: Triumph Books (1991); pg. 135. (à propos de la branche américaine)
- Xavier, J. (1970/1971). "An Autocephalus Turkish Orthodox Church." Eastern Church Review 3.
- Harry J. Psomiades, The Ecumenical Patriarchate Under the Turkish Republic: The First Ten Years, Balkan Studies (ΘΕΣΣΑΛΟΝΙΚΗ ) 2, 1961, pp. 47-70
[modifier] Notes
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Églises autocéphales : |
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* Église dont l'autocéphalie ou l'autonomie n'est pas universellement reconnue. | |
Voir aussi : Églises des deux conciles - Églises des trois conciles - Églises catholiques orientales |
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