Direction générale de la Sécurité extérieure
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
La Direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE), anciennement SDECE (avant 1982), est le service d'espionnage à l'extérieur des frontières de la France.
Sommaire |
[modifier] Fonctionnement
Sous l’autorité du ministre français de la Défense, elle est chargée, selon les termes du décret n° 82-306 du 2 avril 1982, qui a procédé à sa refondation, « de rechercher et d’exploiter les renseignements intéressant la sécurité de la France, ainsi que de détecter et d'entraver, hors du territoire national, les activités d'espionnage dirigées contre les intérêts français afin d’en prévenir les conséquences ». Avant ce décret, ce service s’appelait le Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE).
[modifier] Organisation
La DGSE comprend les services suivants :
- la direction de l’administration ;
- la direction des opérations (dont le service action ou SA est une composante), chargée des opérations clandestines ;
- la direction du renseignement ;
- la direction de la stratégie ;
- la direction technique, qui recherche et exploite les renseignements d’origine technique, propose et met en œuvre les orientations de la DGSE dans les domaines techniques ;
- Alliance Base, service de contre-terrorisme mis en place par Jacques Chirac au lendemain du 11 septembre 2001, qui s’occupe d’opérations conjointes avec la CIA et d’autres services étrangers. Financé par le volet CTIC de la CIA, révélé d’abord par la journaliste Dana Priest du Washington Post [1]. Alliance Base va au-delà de simples échanges d'information : elle aurait participé à une soixantaine d’opérations actives, aboutissant à des emprisonnements à Fresnes. En outre, il semblerait que la CIA finance le transport de personnes suspectées par l’État français de crimes en rapport avec le terrorisme jusqu’au territoire français — si cela diffère bien entendu des renditions extraordinaires de la CIA, il s’agit bien d’opérations illégales, puisque ces personnes ne sont pas arrêtées de manière légale, mais bien emmenées en France clandestinement, avant d’être arrêtées à l'aéroport (Washington Post, 2 juillet 2005).
[modifier] La Division Action
La Division Action est chargée de la planification et de la mise en œuvre des opérations clandestines.
La Division Action remplit aussi des missions d’évaluation de la sécurité de divers bâtiments comme les centrales nucléaires d’EDF (comme l'a dévoilé Le Canard enchaîné dans son article « Quand la DGSE posait de fausses bombes à Bugey » du 25 avril 1990), ainsi que des bâtiments militaires comme des installations de réparations des sous-marins nucléaires de Brest.
Son QG est au fort de Noisy-le-Sec.
Les chefs du Service Action et de la Division Action :
- 1971-1976 : colonel André Devigny
- 1976-1980 : colonel Gaigneron de Marolles
- 1980-1982 : colonel (puis général) Georges Grillot
- 1982 – novembre 1984 : colonel Jean-Pol Desgrees du Lou
- novembre 1984 - 1986 : colonel Jean-Claude Lesquier
- 1986 – septembre 1987 : colonel (puis général de brigade) Jean Heinrich
- septembre 1987 – décembre 1989 : colonel Pierre-Jacques Costedoat
- décembre 1989 - ? : Christian Vie
L’actuelle Division Action de la DGSE est issue du Service Action du SDECE. Le bras armé du Service Action était le 11e bataillon parachutiste de choc (11e BPC) ou « 11e Choc », créé le 1er septembre 1946 et basé au fort de Montlouis, commandé par le capitaine Paul Aussaresses.
Il fusionne avec le 12e BPC de Calvi en octobre 1955 pour donner naissance à la 11e demi-brigade parachutiste de choc (11e DBPC), qui mènera un grand nombre d’opérations pendant la guerre d'Algérie. Le 16 avril 1956 est créé le Centre d’instruction des nageurs de combat (CINC), intégré à la 11e DBPC. Le 26 octobre 1960, le CINC est transféré à Aspretto (Corse).
En réalité, le CINC est l’unité des nageurs de combat de la DGSE, et la formation de ceux-ci est assurée par l’école de plongée (CNC ?) de Saint-Mandrier.
La 11e DBPC est dissoute le 31 décembre 1963 suite à la fin de la guerre d'Algérie, et ses missions sont en partie reprises par les soldats du 13e régiment de dragons parachutistes (13e RDP) et du GO (groupement opérationnel) du 1er régiment parachutiste d'infanterie de marine (1er RPIMa), généralement pour des opérations contre des guérillas d’idéologie plus ou moins marxistes en Afrique.
Le Service Action, très réduit depuis la dissolution de la 11e DBPC, est reformé et redynamisé à partir de 1971 sous la direction d’Alexandre de Marenches.
En 1981, le Service Action est renommé Division Action, même si le nom de Service Action perdure.
Le 4 avril 1982, le SDECE est remplacé par la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure). La Division Action se fait rapidement mal voir du nouveau gouvernement socialiste, avec ses échecs au Liban en riposte à l’attentat du Drakkar en 1983, et surtout le sabotage du Rainbow Warrior de Greenpeace le 10 juillet 1985 et l’affaire des « époux Turenge ».
Cette affaire a deux conséquences majeures. D’abord, le CINC est dissous et sa mission est reprise par le CPEOM à Quelern (Bretagne), mais cette restructuration hâtive dégrade les capacités des nageurs de combat de la DGSE, car des cadres expérimentés ne veulent pas déménager vers le CPEOM, et les conditions de sécurité entourant la base de l’Île Longue (base des SNLE de la Force océanique stratégique) réduisent largement les occasions d’entraînement à la plongée sous-marine.
Ensuite, le 1er novembre 1985, le 11e BPC est recréé sous le nom de 11e régiment parachutiste de choc (11e RPC), basé à Cercottes (Loiret) au CIRP (Centre d’instruction des réserves parachutistes) et ayant repris les traditions de la 11e DBPC.
Le « 11e choc » n’est ni confondu ni intégré à la Division Action, mais sert plutôt de réservoir de spécialistes qui sont prélevés individuellement à chaque opération. Jusqu’en 1988 les hommes du 11e RPC utilisaient comme couverture le 89e bataillon des services.
Le « 11e choc » participera notamment à l’assaut de la grotte d'Ouvéa le 5 mai 1988, au cours duquel deux de ses hommes, l’adjudant Pedrazza et le soldat Veron, seront tués.
En 1992, le 11e RPC est conservé malgré les réformes des services de renseignement et des forces spéciales consécutives à la fin de la guerre froide, qui se traduisent notamment par la création du Commandement des opérations spéciales (COS), dans lequel le « 11e choc » n'est pas intégré.
Il est finalement dissout le 30 juin 1993, dans une grande discrétion. Ses fonctions sont reprises par trois « centres d’entraînement », le CPES, le CPIS et le CPEOM.
[modifier] Installations
Le siège de la DGSE, officiellement désigné CAT (Centre administratif des Tourelles), se trouve en partie dans le XXe arrondissement de Paris. Le grand public l’a surnommé « la Piscine » en raison de sa proximité avec la piscine des Tourelles.
Le QG de la division action est au fort de Romainville à Noisy-le-Sec.
Le projet « Fort 2000 », lancé en 1992, devait permettre de déménager le siège de la DGSE à Noisy-le-Sec, où se trouvait déjà le QG de la division action.
Ce projet a été perturbé par le manque de budget : les crédits d’études n’ont été débloqués dans le budget de la défense qu’en 1994, suivis des crédits des premiers travaux en 1995.
Le financement du projet a été revu à la baisse, passant de deux milliards de francs à un milliard, et a subi l'opposition des riverains du fort qui craignaient l’augmentation des survols d’hélicoptères, ainsi que de mouvements écologiques car la zone du fort abrite une espèce rare de crapauds.
Le projet a été abandonné en mai 1996. À la place, la DGSE a reçu des locaux supplémentaires, ceux occupés auparavant par une unité du train en face de la « piscine ».
[modifier] Effectifs
- En 2007 la DGSE a un effectif total de 4 620 agents[2]. (En 1999, la DGSE employait 2 700 civils et 1 300 officiers et sous-officiers.)
- Elle bénéficie également d’un réseau de correspondants bénévoles, basés en France ou à l’étranger, appelés des honorables correspondants.
- la DGSE est directement gérée par le ministère de la défense.
[modifier] Budget
Il se compose d’un budget officiel (voté par le Parlement) qui se chiffre aux environs de 270 millions d’euros et de crédits provenant des fonds spéciaux des services du Premier ministre (et dont l’objet est de financer certaines activités opérationnelles de la Division action) dont le montant n’est connu que globalement (son usage est secret).
Quelques budgets ont été connus :
- 1991 : 0,9 milliard de francs
- 1992 : 1 milliard de francs
- 1997 : 1,36 milliard de francs
- 1998 : 1,29 milliard de francs
- 2007 : 450 millions d'euros plus 36 millions de fonds spéciaux[3]
Selon Claude Silberzahn, un des anciens directeurs, le budget se répartirait comme suit : 25 % renseignement militaire, 25 % renseignement économique et 50 % renseignement diplomatique.
[modifier] Activités
Les activités de la DGSE sont diverses :
- Acquisition de renseignements :
- renseignement humain (« honorables correspondants »),
- espionnage des télécommunications (Frenchelon),
- interprétation des images spatiales (Satellite Spot, Satellite Helios).
- Appui au renseignement humain.
- Opérations militaires. Anciennement nommé 11e régiment de choc des parachutistes ou « 11e choc », ou plus simplement encore « 11 choc », le service des opérations militaires de la DGSE s’appelle actuellement « Service action ».
Le contre-espionnage sur le territoire français n’est pas assuré par la DGSE mais par la direction de la Surveillance du territoire (DST) placée sous l’autorité du ministre de l’Intérieur. Par conséquent la DGSE n’est pas censée agir sur le territoire français (de même que la DST n’est pas censée intervenir à l’étranger).
[modifier] Opérations connues
- Exploitation du réseau « Nicobar » qui permit à la France de vendre 43 Mirage 2000 à l'Inde et de connaître la composition du blindage du char T-72 soviétique ;
- Le 10 juillet 1985, Affaire du Rainbow Warrior : opération « Satanic », une équipe de la DGSE fait exploser dans le port d’Auckland le Rainbow Warrior, bateau de l'organisation Greenpeace, faisant une victime, le photographe néerlandais Fernando Pereira ;
- Le 12 juin 2005, la DGSE libère Florence Aubenas en Irak.
- Selon le journal L'Est Républicain, la DGSE aurait rapporté au président français Jacques Chirac le 21 septembre 2006 qu'Oussama Ben Laden serait mort le 23 août 2006 au Pakistan après avoir contracté la fièvre typhoïde.
[modifier] Directeurs généraux du SDECE (1944-1981)
- Jacques Soustelle du 6 novembre 1944 au 18 avril 1945 ;
- André Dewavrin (le « colonel Passy ») du 19 avril 1945 à avril 1946 ;
- Henri-Alexis Ribière d'avril 1946 à janvier 1951 ;
- Pierre Boursicot de janvier 1951 à septembre 1957 ;
- Paul Grossin (général de division) de 1957 à 1962 ;
- Paul Jacquier (général) de 1962 à 1966 ;
- Eugène Guibaud (général) de 1966 à 1970 ;
- Alexandre de Marenches du 6 novembre 1970 au 12 juin 1981 ;
[modifier] Directeurs généraux de la DGSE (1981-aujourd'hui)
Le directeur général de la DGSE peut être un haut fonctionnaire civil ou militaire.
- Pierre Marion (préfet), du 17 juin 1981 au 10 novembre 1982 ;
- Pierre Lacoste (amiral), 10 novembre 1982 au 19 septembre 1985 ;
- René Imbot (général), 20 septembre 1985 au 1er décembre 1987 ;
- François Mermet (général), du 2 décembre 1987 au 23 mars 1989 ;
- Claude Silberzahn (préfet), du 23 mars 1989 au 7 juin 1993 ;
- Jacques Dewatre (préfet), du 7 juin 1993 au 19 décembre 1999 ;
- Jean-Claude Cousseran (diplomate), du 19 décembre 1999 au 24 juillet 2002 ;
- Pierre Brochand (diplomate), depuis le 24 juillet 2002
[modifier] Agents connus ou supposés
En raison des activités secrètes des agents de la DGSE (et avant du SDECE), il n'est pas toujours facile d'établir l'appartenance de certaines personnes à ce service.
- Pierre Martinet dit Florent (alias Vincent Cassard et Vincent Seyriès) (cf. bibliographie) ;
- Philippe de Dieuleveult agent supposé, disparaît en 1985 lors de l’expédition Africa-Raft au Zaïre. Les conditions de sa disparition n’ont toujours pas été élucidées. On évoque que le fait d’être un agent de la DGSE serait le motif de son assassinat ;
- Colonel Alain Mafart (alias Alain Turenge) ; nageur de combat ayant aidé à poser les charges explosives sous le Rainbow Warrior, aujourd’hui photographe animalier (cf. bibliographie) ;
- Boillin Alexandre dit Don Boillini, agent supposé, disparait au large de la sicile en 1994;
- Lieutenant-colonel Dominique Prieur (alias Sophie Turenge) : les faux époux Turenge sont impliqués dans l’affaire du Rainbow Warrior (cf. bibliographie) ;
- Jamet Stanislas dit Staz Never, agent supposé depuis 1950, disparait en 1970. Les conditions de sa disparition n’ont toujours pas été élucidées.
- Gérard Royal, frère de Ségolène Royal. Il aurait participé à l’opération « Satanic » contre le Rainbow Warrior.
- Lieutenant-colonel Bernard Nut, chef de mission, mort en service à Rigaud, le 15 février 1983.
[modifier] Références
- ↑ Help From France Key In Covert Operations, Washington Post, 2 juillet 2005
- ↑ www.senat.fr
- ↑ www.senat.fr
[modifier] Bibliographie
- Roger Faligot, La Piscine : les services secrets français, Paris, éd. du Seuil, 1985
- Patrick du Morne Vert Mission oxygene, Paris, Filipacchi, 1987
- Mornevert, " Passerelle Bankovski", Paris, JM Laffont, 2005
- Constantin Melnik, Des services « très » secrets, Paris, éd. du Fallois, 1989
- Pierre Marion, La Mission impossible. À la tête des services secrets, Paris, éd. Calmann-Lévy, 1991
- Herve Jaubert. Il n'y a plus de secrets dans les services, Odilon-Media, 1995.
- Claude Silberzahn, Au cœur du secret : 1 500 jours aux commandes de la DGSE (1989-1993), Paris, Fayard, 1995
- Dominique Prieur, Agent secrète, Paris, éd. Fayard, 1995
- Pierre Lacoste, Alain-Gilles Minella, Un amiral au secret, Paris, Flammarion, 1998
- Pierre Marion, Mémoires de l’ombre. Un homme dans les secrets de l’État, Paris, éd. Flammarion, 1999
- Alain Mafart, Carnets secrets d'un nageur de combat : du « Rainbow Warrior » aux glaces de l’Arctique, Paris, éd. Albin Michel, 1999
- Dominique Fontvielle, Jérome Marchand, Mémoires d’un agent secret, Paris, éd. Flammarion, 2002
- Claude Faure, Aux services de la République : du BCRA à la DGSE, Paris, Fayard, 2004
- Pierre Martinet, Philippe Lobjois, Un agent sort de l’ombre, DGSE service action, Paris, éd. Privé, 2005
- JM Albert, La Riposte, La Table Ronde, 2004, (suite) L'Infiltration, Paris, Des Idées & Des Hommes, 2007
- Pascal Junghans, Les services de renseignements français, Paris, Éditions Edmond Dantès, 2006, (ISBN 978-2-35372-003-3)