Héliopolis (roman)
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Héliopolis est un roman de science-fiction rédigé en 1949 par Ernst Jünger.
Celui-ci refuse que cette œuvre soit cataloguée dans le domaine de la science-fiction ; il la conçoit plutôt comme un roman philosophique, « un de ces étranges cristaux qui ont la particularité de n'être transparents que d'un côté à la fois ».
[modifier] Résumé
Héliopolis raconte la vie du commandant Lucius de Geer, dont le séjour dans la ville éponyme est prétexte à une réflexion sur la destinée de notre civilisation. Une ville de nulle part (peut-être inspira-t-elle la principauté d'Orsenna dans le Rivage des Syrtes de Julien Gracq ?) où se retrouvent nombre d'éléments méditerranéens, qui se rattache sans doute possible à Rome, Athènes et Byzance, mais inclut aussi des objets qui réfèrent non pas tant à la modernité (par exemple, le « phonophore » sert de passeport, de téléphone portable, d'encyclopédie, etc.) qu'à un enchantement de la technique.
Héliopolis est une ville en crise, au cours d'une période d'anarchie qui voit s'affronter deux puissances internes, le bailli et le proconsul, au milieu d'un monde dévasté. Lucius, qui jouit d'une situation importante au sein de l'élite héliopolitaine, se laisse aller dans un épisode qui n'est pas sans rappeler deux autres grandes contre-utopies du XXe siècle : 1984 et le Meilleur des mondes, à sauver un vieux maroquinier érudit, Antonio Peri. Dès lors, il est irrésistiblement entraîné à rejoindre le Régent, qui loin d'Héliopolis prépare l'avènement d'un nouvel Empire…
[modifier] Essai
Il convient d'être prudent dans l'interprétation, en dépit des idées militaristes et autoritaires qui ont pu être celles d'Ernst Jünger au sortir de la Première Guerre mondiale. Ici, le Régent n'est en aucun cas une figure hitlérienne ou celle du dirigeant d'un quelconque régime autoritaire. On serait plutôt amené à penser, d'après l'état d'esprit de l'auteur en 1949 et les écrits qui entourent Héliopolis, que Jünger renvoie dos à dos dans ce roman vaincus et vainqueurs, face à leur incapacité à fournir du sens au nouveau monde qui se construit après la fin du conflit mondial.
Surtout ne nous arrêtons pas à des considérations sur l'« idéologie » d'Héliopolis ; ce roman doit être lu aussi et peut-être surtout pour la richesse formidable de la langue employée, l'extraordinaire diversité du monde inventé, et pour la saveur des descriptions jüngeriennes, dont on jugera d'après ce passage : « Je soupesais à deux mains la pierre de lune, nimbée d'une couleur laiteuse, comme l'œuf de Léda. Qui peut dire si son flamboiement était plus mystérieux que celui du jade, aux nuages gris et vert tendre, ou de l'opale irisée ? Je méditais sur leur runes, sur les fins branchages dont est veinée la turquoise azurée, sur les voiles d'étincelles pourpres de l'héliotrope, sur l'image de l'arbre de vie dans l'agate moussue, sur les faisceaux d'épieux dans le cristal de roche. » (trad. Henri Plard).
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