Hippophagie
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L'hippophagie est un terme venant du grec hippo, « le cheval », et de phagie, « la nourriture », et décrit la consommation de viande de cheval.
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[modifier] Origines
La consommation de la viande de cheval remonte à l'âge de pierre. La découverte d'ossements de chevaux sur des sites archéologiques ainsi que de peintures rupestres, comme par exemple à Lascaux, indiquent que le cheval fut probablement très apprécié comme gibier de chasse par les hommes de l'ére glaciaire.
Même avec la domestication du cheval comme monture ou bête d'attelage, sa viande a toujours été utilisée.
Tous les grands peuples cavaliers, comme les Mongols, les Indiens et les Huns furent hippophages. Pline l'Ancien[1] avait également mentionné la coutume des Sarmates, peuple de cavaliers, de prélever du sang de leur cheval pour se nourrir.
[modifier] Une consommation inégale en Occident
[modifier] Interdiction
C'est le pape Grégoire III qui interdit la consommation de la viande de cheval en 732, dénonçant l'hippophagie comme une « pratique abominable ». Les historiens ne sont pas unanimes quand à l'explication du motif de cette interdiction, certains y voyant surtout un effort dans la lutte contre les pratiques païennes dans la Germanie en voie de christianisation : cela expliquerait le fait que la consommation de viande équine restât tolérée dans d'autres régions. D'autres justifient le verdict papal par le souci de Grégoire de voir trop de précieux destriers de guerre finir dans les marmites. Quoiqu'il en soit, l'interdiction sera renouvelée par le successeur de Grégoire, Zacharie, à partir d'une liste confiée par Boniface, évangélisateur de la Germanie.
[modifier] Réapparition
Malgré l'interdiction papale, il ne semble pas pour autant que le Moyen Âge eût été privé entièrement de viande équine : certains documents rapportent que des moines de Westphalie auraient dégusté la viande de chevaux sauvages de la région. L'équarrisseur chargé d'abattre les chevaux âgés vendait souvent clandestinement la viande aux pauvres.
Pratiquement toutes les guerres furent accompagnées de famines, qui firent que la viande de cheval y fut toujours mangée sans retenue. Que ce soit pendant les guerres napoléoniennes ou lors du siège de Paris durant la guerre de 1870. La viande de cheval était même devenue un luxe, car à défaut d'elle il fallait avoir recours aux chiens, aux chats ou aux rats.
Au XIXe siècle, lors de la montée du rationalisme, les voix demandant la légalisation de l'hippophagie se firent de plus en plus nombreuses. En France, le plus virulent fut sans doute Emile Decroix, ancien vétérinaire militaire et ardent défenseur de l'hippophagie. Ses deux arguments de base furent d'une part la population démunie, souvent à la limite de la famine, et les chevaux usés dans les rues de Paris. Si les propriétaires de chevaux âgés pouvaient vendre leurs bêtes à l'abattoir, cela éviterait aux chevaux d'être exploités jusqu'au dernier souffle, tout en créant une source d'alimentation pour les masses ouvrières.
Decroix, en sa qualité de membre du Comité des hippophages, organisa un banquet « d'utilité publique », dont l'objectif était de prouver les avantages culinaires de la viande de cheval. Le 6 février 1856, Decroix convia 132 personnalités au Grand Hôtel, afin de leur faire déguster des spécialités concoctées avec ladite viande.
Malgré la forte opposition de divers groupes d'intérêt, notamment des bouchers bovins et porcins traditionnels ainsi que des cavaliers indignés que l'on puisse manger leur animal de statut, l'hippophagie finit par s'établir, surtout en France. Elle connut son apogée dans les années 1950 et 60, pour ensuite baisser régulièrement. Aujourd'hui, et même en France, l'hippophagie est minoritaire et se situe aux environs de 2% de la consommation globale de viande. Ces vingt dernières années, la diminution de la consommation est notable. En 1990, il était en moyenne d'un kg par habitant. En 2003, il n'est plus que de 0,4 kg par habitant[2].
[modifier] Controverse
L'hippophagie reste une pratique très controversée : jadis sous le coup d'une interdiction papale, ce sont aujourd'hui surtout des motifs émotionnels qui opposent un nombre croissant de consommateurs à l'idée de manger du cheval. Dans la perception des hommes, le cheval tient une position d'intermédiaire entre une bête utilitaire et un animal de compagnie. « Non, un cheval ça ne se mange pas » est un slogan populaire du mouvement anti-hippophage et peut se lire sur bon nombre de sites internet, autocollants et T-shirts. Les membres de ce mouvement dénoncent souvent les conditions de l'abattage et du transport des chevaux.
De l'autre côté, nombre d'éleveurs de chevaux font remarquer que sans le marché hippophagique, certaines races de trait auraient tout simplement disparu, ne correspondant pas au type de cheval recherché par la jeune génération de cavaliers. Les professionnels de la santé et de l'alimentation, quant à eux, affirment la valeur nutritionnelle de la viande chevaline, qui est en effet particulièrement maigre et riche en fer.
Paradoxe : en Amérique du Nord, certains états comme la Californie ont interdit la consommation de viande chevaline et l'abattage de chevaux pour la consommation humaine. Toutefois, l'abattage de chevaux pour la nourriture animalière est toujours légale. De la même manière, tous les pays anglo-saxons exportent de la viande chevaline vers les marchés étrangers.
[modifier] Dans le monde
La répartition de l'hippophagie dans le monde est tout à fait inégale, les plus grands producteurs de viande chevaline n'en étant pas toujours les plus grands consommateurs.
En Occident, on remarquera la différence entre les pays latins, tous plus ou moins hippophages, et les pays Anglo-Saxons, considérés comme non-hippophages. Le sacrifice chevalin fut pourtant longtemps pratiqué dans les temps anciens sur les îles britanniques, en Irlande même plus longtemps qu'ailleurs.
L'Allemagne fut longtemps connue pour le dégoût prononcé des habitants pour la viande de cheval. Pourtant, dans les régions avec une tradition cavalière très prononcée, comme la Prusse orientale, des boucheries chevalines firent leur apparition bien plus tôt qu'en France. La Suisse est un autre exemple intéressant pour les différences de consommation entre les regions latines et germaniques: En Suisse romande, l'hippophagie a toujours eu la même importance qu'en France, alors que la Suisse alémanique connu plutôt la retenue allemande. Depuis quelques années cependant, la consommation de viande de cheval se développe en Suisse alémanique.
Si la consommation de viande chevaline est un tabou fort chez les Roms, Israël est pour sa part l'un des seuls pays qui refuse la viande de cheval pour des raisons avant tout religieuses.
La viande de cheval est pour sa part considérée en Islam comme propre mais non halal : il est donc permis d'en consommer, mais ce n'est pas une situation idéale.
[modifier] Notes
- ↑ Pline l'Ancien, H.N., XVIII, 24 (100)
- ↑ Institut de l'élevage