Histoire du sabre japonais
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[modifier] Le jôkotô (上古刀) : ancêtre du sabre japonais
En japonais, le terme jôkotô désigne toute forme de sabre ou d'épée antérieure au milieu de l'ère Heian (平安時代, Heian-jidai, 794-1185). On retrouve dans cette catégorie le tsurugi, le tachi, le warabite-no-tachi et le tosu.
D'après les archéologues japonais, les jôkotô firent leur apparition pendant l'ère Yayoi (弥生時代, Yayoi jidai), ère où les techniques du travail des métaux sont importées du continent (essentiellement la Chine). On retrouve les premières références sur les sabres japonais dans le Kojiki (古事記, 712) et le Nihon Shoki (日本書紀, 720), œuvres littéraires majeures de l'archipel.
Bien que quelques lames soient intéressantes du point de vue historique puisqu'elles représentent les prototypes de ce que l'on appellera nihontô, mot servant à désigner ce que l'on appelle aujourd'hui sabres japonais, elles sont le plus souvent de faibles qualités artistique et technique. La forme des sabres n'est pas encore fixée, mais en général, les jôkotô sont des lames droites à double tranchant, forgées dans un seul type de métal. Il arrive que certaines soient courbes, mais cela reste accidentel. Les trempes ne sont pas encore partielles et sont souvent chaotiques, ce qui rend les lames particulièrement fragiles.
Toutefois, nombre de pièces retrouvées sont restées dans un état remarquable et parmi celles-ci, quelques-unes correspondant aux critères de sélection pour la dénomination de "sabre japonais" sont considérées aujourd'hui comme des pièces maîtresses.
L'évolution des techniques permettant de passer du jôkotô au véritable sabre se produit seulement pendant la période de Nara (奈良時代, Nara-jidai). Ces techniques comprennent principalement :
- la forge basée sur le tri sélectif du métal employé ;
- la trempe partielle ;
- le pliage du métal en fines lamelles superposées.
[modifier] Les sabres koto (古刀)
Le terme désigne tous les sabres forgés pendant la période allant de la deuxième moitié l'ère Heian jusqu'à l'ère Muromachi. Traditionnellement, on classe les œuvres de cette période selon cinq grandes traditions (géographiques et techniques) appelées Mino, Yamato, Yamashiro, Bizen et Sôchu.
L'évolution des sabres koto se divise selon quatre périodes :
- fin Heian – début Kamakura ;
- milieu – fin Kamakura ;
- ère Nambokuchô ;
- ère Muromachi
[modifier] Fin Heian – début Kamakura
la période Heian marque une perte de pouvoir du gouvernement central envers les clans. Cette perte va se traduire par des guerres sporadiques, sources d'observations utiles à l'amélioration des techniques de forge. En même temps, ces guerres incitent les nobles à développer leur pouvoir militaire, ce qui contribue à l'émergence d'une nouvelle classe de guerriers (bushi), mais aussi à l'augmentation du nombre de forgerons.
De plus, l'évolution des techniques militaires, et particulièrement l'adoption du combat monté, apporte de grandes modifications dans la forme des sabres qui deviennent plus courbés (ce qui constitue un avantage pour des raisons pratiques de maniement). Les autres conséquences de cette forte courbure intentionnelle est qu'elle renforce la résistance aux chocs et donne une meilleure capacité de coupe.
Ce n'est qu'au début de l'ère Kamakura qu'apparaîtra la première « école », forme initiale des traditions. Elle sera située dans la province de Yamashiro. Les avantages de cette organisation spécialisée vont très vite représenter la source de la création des autres écoles, situées principalement dans les provinces de Bizen, Bitchū, Hoki, Chikugo, Bungo, Satsuma et Yamato.
[modifier] Milieu – Fin Kamakura
En règle générale, le sabre de l'ère Kamakura se distingue des sabres de Heian de par un aspect général plus imposant et moins raffiné. Cela peut s'expliquer, premièrement par l'arrivée au pouvoir d'une classe guerrière plus rude, esthétiquement moins développée, et deuxièmement par l'impact des invasions mongoles (1274 et 1281). Les lames deviennent plus longues et plus larges près de la soie. De même, la pointe (kissaki) a tendance à s'allonger, ce qui rend l'ensemble beaucoup plus agressif. Les trempes complexes, qui confèrent plus de solidité à la lame, ont tendance à devenir beaucoup plus spectaculaires : ko-choji midare, koshi- no-hiraita-midare etc.
D'un autre côté, les traditions se forment autour des maîtres forgerons. Il en découle une uniformisation des styles, propre à chaque région. Parmi les traditions, les principales sont Bizen, Yamashiro, Yamato, Sôshu et Mino.
De façon parallèle, la production de tantô, souvent courbes, se développe. Ils sont généralement d'une longueur d'environ 25 cm.
[modifier] Ère Nambokuchô
Stylistiquement, le sabre de Nambokuchô est très proche du style de la fin Kamakura, si ce n'est qu'il en constitue le point culminant. Ainsi, les lames deviennent disproportionnées en taille et en largeur. C'est dans cette tendance qu'apparaissent les nodachi dont la taille varie entre 1,20 m et 1,50 m (dont la plupart seront souvent raccourcies par la suite), les sunnobi (tantô étendus allant de 30 à 43 cm).
Cette époque marquera également l'avènement de la tradition Sôchu.
[modifier] Ère Muromachi
Fin de la période koto. Les guerres de la fin Nambokuchô prennent fin, laissant place à une paix générale. L'installation du shogunat à Muromachi semble avoir pour effet de ramener le style de vie de l'ancien shogunat de Kamakura. Cela n'est pas sans impact pour le sabre puisqu'il perd son caractère agressif de Nambokuchô, puis reprend les caractéristiques du sabre de Kamakura. Ainsi, les katanas du début de Muromachi sont environ de 70 à 73 cm et les katanas des ères Buniki (1501-1504) et Tenbun (1532–1555) varient aux alentours de 60 cm.
L'uchigatana semble faire son apparition pendant l'ère Eikyo (1429–) mais prend sa forme définitive pendant l'ère Ônin (1558–1591). Par extension, ceux d'une longueur supérieure à 60 cm sont appelés katanas dans l'usage moderne japonais alors que ceux dont la longueur en est inférieure sont appelés wakizashi. Originellement, le terme uchigatana était employé pendant la période de Kamakura pour désigner les sabres utilisés par les personnes de basse classe sociale. Mais on ne sait pas exactement quand cette appellation a été remplacée dans le langage courant par les deux termes actuels.
Du point de vue qualité, d'une part les grands forgerons sont moins nombreux que dans les périodes précédentes et d'autre part, la production artisanale se transforme sous l'ère Ônin en production de masse, d'où généralement une période qualitativement assez pauvre. Les sabres produits à cette époque sont appelés kazuuchi-mono (数打物).
Plus tard, suite aux changements stratégiques apportés par Nobunaga Oda pendant les guerres civiles de la fin de l'ère, les lances (yari) deviennent plus utiles et sont désormais utilisées par les nobles montés aussi bien que par l'infanterie.
[modifier] Les sabres shintô (新刀)
Azuchi Momoyama est une période très importante dans l'histoire du Japon. En effet, au début de l'ère Momoyama, de grands changements sociaux et économiques sont lancés par Hideyoshi Toyotomi. Parallèlement, les sabres japonais subissent une transformation impressionnante, d'où le terme shintô (新刀) qui signifie littéralement nouveau (新) sabre (刀).
[modifier] Ère Momoyama
L'accession au pouvoir de Hideyoshi Toyotomi va être marquée par une vague de réformes militaires et administratives qui vont favoriser l'établissement et le développement de châteaux favorisants l'installation de zones commerciales et artisanales prospères. Parallèlement, de grandes voies de communication apparaissent reliant ces places économiques, ce qui facilite l'échange des techniques entre artisans, mais aussi le transport des matières premières comme les minerais. La conséquence sera la disparition des styles propres aux écoles.
L'empire réunifié ne signifie pas pour autant relâchement militaire et la production de lames s'accentue. Par contre, l'impérative rapidité des temps de guerre fait place à une production plus soignée favorisant rapidement l'apparition de grands maîtres çà et là.
Pour ce qui est du style, la mode revient aux sabres de la période Kamakura et de Nambokuchô. Les lames mesurent entre 73 et 76 cm et sont très légèrement courbées. Malheureusement, la qualité esthétique du grain de la lame des sabres shintô reste inférieure à celle des sabres koto. La première explication de ce phénomène réside dans l'importation massive du fer des Portugais et Hollandais débutant à la fin de Muromachi, or ce fer est de moins bonne qualité. La deuxième cause de cette perte de qualité tient de l'utilisation d'un fer provenant de l'ouest du Japon, fer qui est de mauvaise qualité en raison d'une saturation de phosphore qui rend les lames cassantes. La dernière cause, mais non la moindre, est la perte de techniques de forge provoquée par les grandes productions de la fin Muromachi.
Autre phénomène important, c'est à cette période que le célèbre daisho (port simultané du katana et du wakizashi glissés dans l'obi) devient à la mode. La raison en est sans doute la nouvelle technique de combat appelée kenjutsu.
[modifier] Ère Edo
Cette période marque une époque de paix où la recherche de l'esthétisme redevient un style de vie parmi les nobles. Cette tendance profite aux sabres qui reprennent les formes raffinées du koto tout en innovant de nouvelles trempes à la fois plus spectaculaires et évocatrices. Le horimono perd son sens religieux pour faire place à des figures plus ornementales. Fait remarquable, les forgerons commencent à rajouter des titres à leurs noms dévoilant leurs désirs d'appartenir à une classe plus élevée.
[modifier] Les sabres shin-shintô (新々刀)
[modifier] Fin Edo
La fin de l'ère Edo marque la perte de pouvoir de la famille Tokugawa au profit d'une nouvelle classe de marchands. De grandes oppositions sur les problèmes de l'ouverture du Japon apparaissent à Satsuma et Hizen. Cette opposition oblige le shogunat à rendre le pouvoir à l'Empereur marquant le début de l'ère Meiji. Les sabres produits pendant cette période tentent de reprendre les modes de Kamakura et Nambokuchô. Après une longue absence le tachi est réintroduit.
Du point de vue du style, les sabres shin-shintô marquent le retour des 5 grandes traditions (Gokaden). Toutefois, ces styles sont mélangés entre eux ce qui donne une période de grande créativité. Les sabres de cette époque sont, par conséquent, d'une diversité jusque-là inconnue.
[modifier] Milieu Meiji à nos jours
Si la période de Meiji marque le retour au pouvoir de l'empereur, elle marque de même la disparition de la caste des samouraïs. L'interdiction de port du sabre implique un changement d'attitude : le sabre devient plus un symbole ou une œuvre artistique. Des organismes organisent la reconnaissance et la préservation des œuvres majeures. En 1897, la nomination de sabres comme trésors nationaux est autorisée (sous une autre appellation). Peu après (1890), sous le patronage de la famille impériale, le titre de « trésor national vivant » est adopté en vu de promouvoir un savoir ancestral partagé par les meilleurs artisans du Japon.
La Seconde Guerre mondiale sera la dernière période de fabrication de sabres dans un but militaire. Ces sabres appelés showatō. Cependant, les lames de cette période ne sont pas forgées selon les traditions ancestrales et sont de médiocre qualité.
[modifier] Le gendaitô (現代刀) : le sabre contemporain
Bien que les forgerons se fassent rares de nos jours, le sabre conserve une position importante dans les traditions artistiques du Japon. Depuis quelques années, certains forgerons font preuve d'une créativité extraordinaire, créant de nouvelles formes étonnantes, d'autres s'emploient à mélanger la technique japonaise aux formes étrangères (couteaux de chasse, etc.).
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