John Vanbrugh
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Sir John Vanbrugh (24 janvier 1664 - 26 mars 1726) est un architecte et un dramaturge britannique. On lui doit notamment l'édification de Blenheim Palace. Il rédigea également deux comédies engagées et argumentées : La Rechute ou la Vertu en danger (The Relapse) en 1696 et L'Épouse outragée (The Provoked Wife) en 1697. Toutes deux furent de grands succès de scène mais furent à l'origine de nombreuses controverses.
Vanbrugh fut aussi l'architecte de Castle Howard dans le Yorkshire et du Queen's Theatre à Londres: achevé en 1705, celui-ci sera détruit par le feu en 1789.
Toute sa vie Vanbrugh fut de bien des manières un démocrate aux idées avancées. Dans sa jeunesse, whig convaincu, il prit part au complot destiné à renverser Jacques II, à mettre sur le trône Guillaume III et à protéger la démocratie parlementaire anglaise, entreprises dangereuses qui le conduisirent à la Bastille à Paris comme prisonnier politique. Durant sa carrière de dramaturge il offensa bien des secteurs de la société de la Restauration anglaise et du XVIIIe siècle, non seulement par les références sexuelles explicites de ses pièces, mais aussi par leur contenu favorable au droits des femmes dans le mariage. Il fut attaqué sur l'un et l'autre chef, et fut l'une des cibles principales de Jeremy Collier dans son Short View of the Immorality and Profaneness of the English Stage (Coup d'œil sur l'immoralité du théâtre anglais) de 1698. Comme architecte il fut à l'origine de ce qu'on appela plus tard le Baroque anglais. Son œuvre architecturale, aussi audacieuse que l'activisme politique de ses débuts et que ses pièces sur le mariage, heurta l'opinion conservatrice.
Sommaire |
[modifier] Jeunesse
Vanbrugh naît à Londres et grandit à Chester, où la famille a été chassée par la grande peste de Londres en 1665.[1] Downes ne partage pas l'opinion des historiens qui l'ont précédé quant à l'appartenance de la famille à la classe moyenne, et il montre que la suggestion faite au XVIIIe siècle selon laquelle le père, Giles Vanbrugh, « aurait pu être sucrier » a été mal interprétée. « Sucrier » est en fait synonyme de richesse, le mot se rapportant non à la fabrication de confiseries mais au raffinage du sucre, dont la matière première venait de la Barbade. Le raffinage allait normalement de pair avec le commerce du sucre, fort lucratif. Downes donne l'exemple d'un raffineur de Liverpool dont l'affaire est estimée à 40 000 livres sterling par an, ce qui élève le milieu social des Vanbrugh bien au-dessus de celui du modeste confiseur de Chester dépeint par Leigh Hunt en 1840 et repris à sa suite.
Ce que fit Vanbrugh entre 18 et 22 ans, après la fin de ses études, resta longtemps un mystère. La suggestion parfois avancée (et présentée comme un fait dans le Dictionary of National Biography) qu'il étudia l'architecture en France semble sans fondement. Cependant Robert Williams a récemment établi dans un article qu'il a signé dans le Times Literary Supplement (« Vanbrugh's Lost Years » (« Les années perdues de Vanbrugh »), 3 septembre 1999) qu'en fait Vanbrugh avait passé une partie de cette période en Inde, employé par la Compagnie anglaise des Indes orientales (East India Company) au comptoir de Surat dans le Gujarat. Dans les années qui suivirent il semble que Vanbrugh n'ait jamais mentionné ce fait par écrit. Les spécialistes débattent de l'influence possible de ce séjour en Inde sur les bâtiments dessinés ultérieurement par Vanbrugh.
Cette image de jeune homme bien né est confirmée par le fait qu'en 1686 Vanbrugh reçut un commandement dans le régiment de son lointain parent, le comte de Huntingdon. Étant donné que l'attribution des grades d'officiers était à la discrétion du commandant du régiment, la nomination de Vanbrugh montre qu'il jouissait du réseau de relations familiales au haut niveau requis pour un jeune homme désireux de se lancer dans la vie.
Il faut noter toutefois qu'en dépit de ses lointaines relations aristocratiques et du commerce du sucre Vanbrugh ne disposa jamais par la suite des capitaux nécessaires à des entreprises telles que le théâtre de Haymarket, mais dut toujours s'appuyer sur des prêts et des commanditaires. Le fait que Giles Vanbrugh ait eu douze enfants à élever et à établir peut expliquer en partie les dettes qui poursuivirent John toute sa vie.
[modifier] Activisme politique et embastillement
À partir de 1686 Vanbrugh œuvra de façon clandestine à préparer l'invasion armée de Guillaume d'Orange, la déposition de Jacques II, et la Glorieuse Révolution de 1689. Il montrait ainsi son attachement précoce et intense à la cause whig de la démocratie parlementaire, cause à laquelle il resterait fidèle toute sa vie. Au retour d'une mission à La Haye où il devait remettre des messages à Guillaume, il fut arrêté à Calais sur une accusation d'espionnage (dont Downes conclut qu'elle avait été fabriquée) en septembre 1688, deux mois avant que Guillaume n'envahisse l'Angleterre. Vanbrugh resta emprisonné en France penadnt quatre ans et demi, dont une partie à la Bastille, avant d'être libéré en échange d'un prisonnier politique français. Sa vie fut clairement coupée en deux par l'expérience de la prison, où il entra à l'âge de 24 ans pour n'en sortir qu'à 29, ayant passé, comme le dit Downes, la moitié de sa vie d'adulte en captivité. Il semble que cet épisode lui ait laissé un dégoût durable pour le système politique français mais aussi une attirance pour les dramatuges comiques et l'architecture de la France.
L'affirmation souvent répétée selon laquelle Vanbrugh aurait écrit une partie de sa comédie L'Épouse outragée à la Bastille est basée sur des allusions dans deux mémoires très postérieurs et les spécialistes modernes la considèrent avec quelque réserve (voir McCormick). Après son élargissement Vanbrugh dut passer trois mois à Paris, libre de ses mouvements mais contraint de rester sur le territoire français, ce qui lui donna de multiples occasions de voir une architecture "sans égale en Angleterre pour son ampleur, son ostentation, sa richesse, son goût et son raffinement" (Downes 75). Il fut autorisé à rentrer en Angleterre en 1693, et il prit part à la bataille navale de Camaret contre les Français en 1694. Vers le milieu des années 1690, la date exacte n'éatnt pas connue, il abandonna la vie militaire pour Londres et le théâtre.
[modifier] Vie publique
[modifier] Londres
La carrière de Vanbrugh à Londres fut variée, touchant à la dramaturgie, à l'architecture, et à des tentatives pour combiner ces deux centres d'intérêt majeurs.
[modifier] Le Kit-Cat Club
Vanbrugh était un whig convaincu et fut membre du Kit-Cat Club whig, dont il était l'un des membres les plus appréciés, vus son charme naturel et sa facilité à nouer des amitiés, que ses contemporains mentionnent fréquemment. Le Club est perçu aujourd'hui comme un rassemblement de whigs du début du XVIIIe siècle, personnalités du monde des arts et de la politique parmi lesquelles William Congreve, Joseph Addison, Godfrey Kneller, John Churchill, premier duc de Marlborough, Charles Seymour, 6ème duc de Somerset, Charles Boyle, deuxième comte de Burlington, Thomas Pelham-Holles, Robert Walpole et Richard Temple, 1er vicomte de Cobham qui confia à Vanburgh plusieurs commissions à Stowe dans le Buckinghamshire.
En politique le Club défendait les objectifs whigs: un Parlement fort, une monarchie limitée, la résistance à la France, et la succession protestante au trône. Pourtant le Club se présentait plutôt comme un lieu de convivialité entre gourmets, réputation qui est passée à la postérité. Downes suggère cependant que les origines du club sont antérieures à la Glorieuse Révolution de 1689 et que son importance politique était bien plus grande avant qu'il ne devienne publique en 1700, à une époque plus calme et plus « whig ». Downes suggère qu'une première association Kit-Cat a pu jouer un rôle dans l'invasion armée de Guillaume d'Orange et la Glorieuse Révolution. Horace Walpole, le fils du membre Kit-Cat Sir Robert Walpole, affirme que les respectables membres du club que l'on considérait généralement comme « un rassemblement de beaux esprits » étaient « en réalité les patriotes qui avaient sauvé la Grande-Bretagne », ou en d'autres termes étaient la force vive à l'œuvre derrière la Glorieuse Révolution elle-même. Les renseignements sur les associations secrètes sont par nature rares, et cette esquisse de la préhistoire du club ne peut pas être établie avec certitude. Mais comme on l'a vu plus haut le jeune Vanbrugh était bien, en 1688, partie prenante d'un réseau clandestin travaillant à préparer l'invasion de Guillaume. Si les racines du club remontent jusqu'à cette époque, il est tentant de supposer que lorsque Vanbrugh rejoignit le club il ne devenait pas seulement l'un des « beaux esprits » londoniens mais retrouvait ses vieux amis conjurés. Un héros de la cause, qui avait passé pour elle des années dans les geôles françaises, était assuré à son retour d'un accueil chaleureux.
[modifier] Le théâtre de Haymarket
En 1703 Vanbrugh entreprit d'acheter du terrain et de rechercher des commanditaires pour la construction dans Haymarket d'un nouveau théâtre dont il avait dessiné les plans et qui était destiné à une coopérative de comédiens dirigée par Thomas Betterton. Vanbrugh et son associé William Congreve espéraient par cette entreprise renforcer la position du théâtre « légitime »[2]à Londres, menacé qu'il était par des formes de spectacles plus hautes en couleurs telles que l'opéra, les jongleries, la pantomime (introduite par le producteur John Rich), les spectacles d'animaux, les troupes de danse itinérantes, et les tournées de chanteurs italiens en vogue. Ils espéraient aussi en tirer un bénéfice, et Vanbrugh, optimiste, racheta la compagnie théâtrale, s'en rendant l'unique propriétaire. Il s'obligeait par là-même à verser des salaires aux acteurs et, ainsi qu'il s'avéra, à gérer le théâtre, difficile exercice d'équilibrisme dont il n'avait aucune expérience. L'opinion souvent répétée selon laquelle Vanbrugh avait conçu un bâtiment à l'acoustique médiocre est excessive (voir Milhous), mais Congreve, qui avait l'esprit plus pratique, chercha activement à se retirer de l'affaire, si bien que Vanbrugh se trouva à court de ressources, gérant un théâtre tout en supervisant la construction de Blenheim, projet qui à partir de juin 1705 l'amena à quitter Londres fréquemment.
Dans ces conditions il n'est pas étonnant que la direction du Queen's Theatre dans Haymarket ait montré des « signes nombreux de confusion, d'inefficacité, d'occasions ratées, et de jugements erronés ». (Milhous). S'étant brûlé les doigts dans la gestion d'un théâtre Vanbrugh s'en retira à son tour, à perte, en revendant l'affaire en 1708 sans jamais en obtenir le prix espéré. Il ne devait jamais récupérer les fonds, lui appartenant ou empruntés, qu'il avait placés dans cette compagnie théâtrale. Ses contemporains notèrent comme un fait remarquable qu'il continua à verser aux acteurs leurs pleins salaires et sans retard tant qu'ils travaillèrent pour lui, tout comme il paya toujours les ouvriers embauchés pour ses travaux de construction, alors qu'il était presque normal dans l'Angleterre du début XVIIIe siècle de tenter d'échapper à ce genre d'obligation. Vanbrugh ne semble pas pour sa part avoir jamais poursuivi ses créanciers, et toute sa vie ses finances restèrent dans un état qu'on peut qualifier de précaire.
[modifier] Le College of Arms
La présentation et l'avancement de Vanbrugh au sein du College of Arms restent sujets de controverses. Le 21 juin 1703 l'office tombé en désuétude de héraut de Carlisle fut réactivé pour Vanbrugh. Cette nomination fut suivie d'une promotion au poste de roi d'armes de Clarenceux en mars 1704. En 1725 il vendit cet office à Knox Ward et confia à un ami qu'il avait « obtenu la permission de se débarrasser pour de bon d'une place obtenue pour rire.» [3] L'opposition de ses collègues à cette nomination inappropriée aurait du être dirigée contre Lord Carlisle, qui en tant que Deputy Earl Marshal avait supervisé les deux nominations et contre la volonté duquel ils ne pouvaient aller. Toutefois par la suite Vanbrugh se fit plus d'amis que d'ennemis au College. La pompe des manifestations officielles plaisait à son sens de la mise en scène, ses devoirs étaient peu exigeants, et il semble qu'il s'en soit correctement acquitté. De l'avis d'un héraut et historien contemporain, bien que cette nomination ait été « incongrue », Vanbrugh fut peut-être « l'homme le plus distingué qui ait jamais porté le tabard de héraut.» [4] En mai 1706 Lord Halifax et Vanbrugh, qui représentaient le Roi d'Armes de la Jarretière (Garter King of Arms) octogénaire Sir Henry St George conduisirent une délégation à Hanovre pour conférer l'Ordre de la Jarretière au Prince George.
[modifier] Mariage et décès
En 1719, dans l'église Saint Lawrence de York, Vanbrugh épousa Henrietta Maria Yarborough de Heslington Hall, âgée de 26 ans alors qu'il en avait 55. Malgré cette différence d'âge le mariage fut heureux et produisit deux fils. Contrairement aux personnages libertins et aux dandies de ses pièces, la vie privée de Vanbrugh échappa au scandale.
Vanbrugh mourut d'une « crise d'asthme » en 1726 dans le modeste hôtel particulier dont il avait lui-même dessiné les plans en 1703 à partir des ruines du Palais de Whitehall et dont Swift s'était moqué en le qualifiant de « pâté d'oie ». Mais une fois marié il passa l'essentiel de sa vie à Greenwich (qui à cette époque n'était pas considéré comme faisant partie de Londres) dans la maison de Maze Hill connue aujourd'hui sous le nom de Vanbrugh Castle, tour écossaise en miniature dessinée par Vanbrugh au début de sa carrière.
[modifier] Le dramaturge
Vanbrugh arriva à Londres à une époque où la seule compagnie théâtrale de la ville était plongée dans le scandale et les dissensions internes, un vieux conflit qui opposait gestion sans ambition et acteurs mécontents ayant fini par éclater et les acteurs par partir. Une nouvelle comédie, mise en scène avec des moyens de fortune par ce qu'il restait de la compagnie en janvier 1696, Love's Last Shift de Colley Cibber, avait une dernière scène qui, pour l'esprit critique de Vanbrugh, appelait une suite, et il se jeta dans la mêlée en la fournissant.
[modifier] La Rechute
Love's Last Shift de Colley Cibber
Love's Last Shift, Or, Virtue Rewarded (Le Dernier Recours de l'Amour, ou la Vertu récompensée), célèbre mélodrame de Colley Cibber, fut écrit et mis en scène au cœur d'une tempête théâtrale. La United Company, seule compagnie théâtrale de Londres, mal gérée, s'était scindée en deux en mars 1695 quand ses acteurs principaux avaient mis sur pied leur propre coopérative, et la saison suivante vit les deux compagnies s'affronter sans merci.
Cibber, jeune acteur peu connu qui était resté dans la compagnie mère, saisit ce moment unique où on avait besoin de nouvelles pièces et lança sa carrière sur deux fronts en écrivant une pièce avec un grand rôle haut en couleur pour lui-même, celui du dandy francolâtre Sir Novelty Fashion (Nouveauté Mode). Porté par le jeu débridé de Cibber, Sir Novelty enchanta le public. Dans la partie sérieuse de Love's Last Shift, la patience de l'épouse est mise à l'épreuve par son mari livré à un libertinage sans frein, à la mode de la Restauration. La perfection de l'épouse est glorifiée et récompensée dans un grand finale qui voit le mari volage s'agenouiller devant elle pour exprimer son profond repentir.
Love's Last Shift n'est plus représenté depuis le début du XVIIIe siècle et n'est plus lu que par les érudits les plus convaincus, lesquels expriment parfois leur réticence devant la combinaison commerciale de quatre actes explicitement consacrés au sexe et au libertinage et d'un acte pompeusement réformateur (voir Hume). À supposer que Cibber ait effectivement essayé de plaire à la fois à la canaille et aux Londoniens respectables, il réussit: sa pièce connut un grand succès.
La suite: La Rechute
La suite pleine d'esprit écrite par Vanbrugh, La Rechute ou la Vertu en danger, proposée à la United Company six semaines plus tard, met en question la justice de la place des femmes dans le mariage à l'époque. Vanbrugh jette de nouvelles tentations sexuelles sous les pas, non seulement du mari réformé, mais aussi de sa patiente épouse, et les laisse réagir de manière plus crédible et moins convenue que dans la pièce originelle, prêtant ainsi aux personnages assez plats de Love's Last Shift une dimension que certains critiques au moins acceptent de qualifier de psychologique (voir Hume).
Dans une intrigue secondaire Vanbrugh introduit l'attrait plus traditionnel sous la Restauration d'un dandy excessivement élégant et filou aux manières exquises, Lord Foppington, brilliante reprise du Sir Novelty Fashion de Cibber dans Love's Last Shift (Sir Novelty dans La Rechute s'est simplement acheté le titre de « Lord Foppington » grâce au système corrompu de ventes de titres nobiliaires par le roi). Les spécialistes de la comédie de la Restauration sont unanimes à déclarer Lord Foppington « le plus grand des dandys de la Restauration » (Dobrée), ses manières étant non seulement ridiculement affectées mais le personnage également « brutal, mauvais et intelligent » (Hume).
La Rechute faillit toutefois ne jamais être jouée. La United Company avait perdu tous ses acteurs principaux, et eut de grandes difficultés à trouver et à conserver des acteurs assez talentueux pour la vaste distribution que réclamait La Rechute. Il fallut les empêcher de faire défection au profit de la compagnie coopérative rivale, les ramener par la « séduction » [5] (ainsi qu'il était dit en termes légaux) en cas de défection, et les cajôler pour qu'ils assistent à des répétitions qui se prolongèrent pendant dix mois et conduisirent la compagnie au bord de la banqueroute. « Ils n'ont pas la moindre compagnie », lit-on dans une lettre de l'époque datée du mois de novembre, « et à moins qu'une nouvelle pièce créée ce samedi ne ranime leur réputation, ils devront fermer ». Cette nouvelle pièce, La Rechute, connut un immense succès et sauva la compagnie, grâce notamment à Colley Cibber qui conquit le public par sa deuxième interprétation de Lord Foppington. « Cette pièce (La Rechute) », écrivit Cibber dans son autobiographie quarante ans plus tard, « de part son esprit nouveau et léger, rencontra un grand succès ».
[modifier] L'Épouse outragée
La deuxième comédie de Vanbrugh, L'Épouse outragée, suivit peu de temps après et fut jouée par la compagnie rebelle. Cette pièce diffère par son ton de La Rechute, qui tient largement de la farce, et convenait mieux aux talents plus grands des acteurs rebelles. Vanbrugh avait de bonnes raisons de proposer sa seconde pièce à la nouvelle compagnie, qui avait connu un début brilliant avec sa première de Amour pour amour de William Congreve, laquelle fut le plus grand succès théâtral de Londres pendant des années. La coopérative d'acteurs comptait dans ses rangs les « stars » reconnues de l'époque, et Vanbrugh adapta les rôles de L'Épouse outragée aux talents de chacun. Tandis que La Rechute était écrite dans le style robuste qui convenait à des amateurs et à des acteurs de second rang, il pouvait compter sur des professionnels aux talents multiples tels que Thomas Betterton, Elizabeth Barry, et la jeune étoile montante Anne Bracegirdle pour servir des personnages tout en profondeur et en nuances.
L'Épouse outragée est une comédie, mais Elizabeth Barry qui jouait le rôle de l'épouse était surtout connue comme tragédienne et pour sa capacité à « mouvoir les passions », c'est-à-dire à amener le public à la pitié et aux larmes. Barry et Bracegirdle avaient souvent travaillé ensemble comme couple tragicomique d'héroïnes pour entraîner leur public dans le va-et-vient entre rire et larmes caractéristique du théâtre de la Restauration. Vanbrugh tire avantage de ce modèle et de ses actrices pour accroître la sympathie du public envers l'épouse malheureuse, Lady Brute, alors même qu'elle décoche ses réparties pleines d'esprit. Dans la conversation intime entre Lady Brute et sa nièce Bellinda (Bracegirdle), et particulièrement dans le rôle-phare du mari brutal, Sir John Brute, qui fut acclamé comme l'un des sommets de la remarquable carrière de Thomas Betterton, L'Épouse outragée est aussi original qu'une « pièce à problème »[6] de la Restauration. Les prémisses sur lesquelles repose l'intrigue, c'est-à-dire qu'une femme prisonnière d'un mariage malheureux puisse envisager soit s'en échapper soit de prendre un amant, choquèrent certains segments de la société de l'époque.
[modifier] Évolution des goûts du public
En 1698 les pièces de Vanbrugh, polémiques et au contenu sexuel explicite, furent la cible des critiques de Jeremy Collier dans son Coup d'œil sur l'immoralité du théâtre anglais, singulièrement en raison du fait qu'elles ne se terminaient pas, dans le cinquième acte, par les punitions et les récompenses qui eussent été propres à imposer une moralité exemplaire. Vanbrugh rit de ces accusations et publia une réponse moqueuse dans laquelle il accusait l'ecclésiastique d'être plus sensible aux portraits peu flatteurs du clergé qu'à l'irréligion véritable. Cependant l'opinion publique changeait et elle était déjà du côté de Collier. Le style intellectuel et sexuellement explicite des comédies de la Restauration semblait de moins en moins acceptable au public et allait bientôt être remplacé par un théâtre sententieux et moralisateur. Le Dernier Recours de l'Amour, ou la Vertu récompensée de Colley Cibber, avec son libertin repenti et sa scène finale de réconciliation, donnait un avant-goût de cette nouvelle manière.
Bien que Vanbrugh ait continué par la suite à travailler pour la scène, il ne produisit plus de pièces originales. Le goût du public s'éloignant de la comédie de la Restauration, il détourna son énergie créatrice de l'écriture originale vers l'adaptation et la traduction, la direction théâtrale et l'architecture.
[modifier] L' architecte
Vanbrugh, pense-t-on, ne reçut aucune formation d'architecte, ou de géomètre (surveyor) comme on disait alors (voir Jeunesse ci-dessus). Son manque d'expérience était compensé par son sens aiguisé de la perspective et du détail et par les relations de travail étroites qu'il entretenait avec Nicholas Hawksmoor. Hawksmoor, précédemment au service de Sir Christopher Wren, devait être le collaborateur de Vanbrugh dans nombre de ses projets les plus ambitieux, parmi lesquels Castle Howard et Blenheim. Pendant les trente années ou presque qu'il pratiqua l'architecture Vanbrugh dessina et travailla à de nombreux bâtiments. Le plus souvent son travail consistait à reconstruire ou remanier, ainsi à Kimbolton Castle où il dut se plier aux instructions de son client. En conséquence ces demeures, souvent attribuées à Vanbrugh, ne sont pas réellement représentatives de ses conceptions architecturales.
Bien que Vanbrugh soit surtout connu pour ses manoirs, l'état alarmant des rues de Londres au XVIIIe siècle ne lui avait pas échappé. Dans le London Journal du 16 mars 1722–23, James Boswell fait le commentaire suivant:
- « On nous informe que Sir John Vanbrugh, pour son projet de repavage des rues de Londres et de Westminster, propose entre autres choses de lever un impôt sur toutes les voitures des gentilhommes, afin de combler toutes les rigoles dans les rues, et d'emporter toutes les eaux par des canalisations et des égouts collectifs souterrains. »
Le style élu par Vanbrugh était le baroque, qui s'était répandu en Europe au cours du XVIIe siècle grâce notamment à l'exemple de Bernini et de Le Vau. Le premier manoir baroque construit en Angleterre fut Chatsworth House, dont les plans furent dessinés par William Talman trois ans avant ceux de Castle Howard. Dans la course qui l'opposait à Talman pour obtenir la commande de Castle Howard, Vanbrugh, qui n'avait ni formation ni expérience, l'emporta pourtant de façon surprenante contre son rival, plus professionnel mais moins introduit dans le monde, et réussit à persuader le 3ème comte de Carlisle, Charles Howard de lui accorder cette chance (cf Downes, 193–204). Il s'en empara et fut à l'origine de la naissance d'une version du baroque européen délicate, presque retenue, qui fut baptisée « baroque anglais ». Trois des créations de Vanbrugh marquent cette évolution:
- Castle Howard, commandé en 1699;
- Blenheim Palace, commandé en 1704;
- Seaton Delaval Hall, dont les travaux commencèrent en 1718.
Les travaux en cours sur chacun de ces projets se chauvauchèrent, dessinant ainsi une progression naturelle dans les conceptions et le style de leur auteur.
(traduction en cours)
[modifier] Notes et références
- ↑ Le milieu familial et la jeunesse de Vanbrugh, avant qu'il n'atteigne la notoriété, ne sont connus que par l'anecdote et l'ouïe-dire. Kerry Downes montre dans sa biographie moderne bien documentée (1987) que même l'Encyclopædia Britannica et le Dictionary of National Biography reprennent des traditions des XVIIIe siècle et XIXe siècle qui à l'origine n'étaient que des suppositions mais ont atteint le statut de "faits" à force d'être retransmises. Ceci explique un certain nombre d'incohérences entre ces encyclopédies et le récit qui suit, basé sur les recherches de Downes (1987) et de McCormick (1991).
- ↑ legitimate theatre ?? (NdT)
- ↑ The Complete Works of Sir John Vanbrugh, ed. G. Webb, Volume 4: The letters (1928), 170.
- ↑ A. R. Wagner, Heralds of England. 1967, 326.
- ↑ "had to be seduced back"
- ↑ Voir l'article en anglais : en:Problem play
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