Plan Marshall
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Le plan Marshall fut un des plans pour aider la reconstruction de l'Europe après la Seconde Guerre mondiale, connu officiellement après son élaboration comme Programme de rétablissement européen (European Recovery Program ou ERP). Le Plan Morgenthau qui prévoyait de faire payer les réparations par l'Allemagne fut écarté par l'administration Truman : on se souvenait des effets désastreux d'une telle politique après la Première Guerre mondiale (la question des réparations allemandes avait en partie déclenché une hyperinflation, entravé la reprise économique et facilité la prise du pouvoir par les régimes autoritaires). L'initiative fut baptisée, par les journalistes, du nom du secrétaire d'État américain, le général George Marshall, qui, lors d'un discours à l'université Harvard (5 juin 1947) exposa la volonté du gouvernement des États-Unis de contribuer au rétablissement de l'Europe.
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[modifier] Historique
Le Président Harry Truman signe le plan Marshall le 5 juin 1947.
Entre 1947 et 1951, les États-Unis consacrent plus de treize milliards de dollars de l'époque (dont onze milliards en dons) au rétablissement de 16 pays européens en réponse à l'organisation européenne de coopération économique (OECE, aujourd'hui l'OCDE). Le montant total de l'aide correspond à 100 milliards de dollars actuels, soit environ 4% du PNB pendant cinq ans.
Le Plan Marshall dont le lancement a été contemporain de l'ISO en 1945 a fortement encouragé la standardisation industrielle et la diffusion d'un modèle homogène de développement industriel et commercial.
Les États-Unis demandaient aux États acceptant l'aide plusieurs contreparties : d'abord que les pays européens coordonnent les dépenses de reconstruction au sein de l'OECE. Les Américains ont ainsi contribué à la coopération européenne, prélude à la construction européenne (voir l'article sur la CEE). Ensuite, les États-Unis exigèrent que l'argent serve à acheter des produits de l'industrie américaine. La reconstruction européenne, relativement rapide, fut largement stimulée par l'aide américaine.
Le plan Marshall a été rejeté par l'Union soviétique et les pays de l'Est. En effet, Staline craignait que le plan Marshall ne serve à conquérir le glacis de sécurité de l'URSS. L'insistance des États-Unis concernant la libéralisation économique des pays bénéficiant du plan a certainement joué un rôle aussi : comme le précise la doctrine Jdanov, chaque État était amené à choisir son camp. L'année 1947 est par cet aspect considérée comme le début de la guerre froide. En 1949 commence le Comecon liant les pays de l'Europe de l'Est.
[modifier] Contexte : le bilan de la Seconde Guerre mondiale
En 1945, une grande partie du continent européen est ravagé par la guerre : les nazis ont pillé les ressources de la France, de la Scandinavie et de l'Europe de l'Est. Les bombardements ont réduit en cendres de nombreuses villes allemandes (Dresde, Cologne, Berlin…) ou polonaises (Varsovie). Londres a subi la guerre aérienne à outrance et des centaines de milliers de logements ont été détruits. En France, on ne compte plus les villes martyres (Le Havre, Brest…). Une grande partie des canaux, des infrastructures portuaires, des ponts, des voies ferrées sont hors d'usage. De nombreux civils sont sans-abri.
La situation des États-Unis est différente : le territoire américain n'a pas subi de dommages (à part Pearl Harbor). L'agriculture, les réserves d'or et les infrastructures industrielles de ce pays ne sont pas affectées et ils avaient vendu du matériel militaire dans le cadre du cash and carry notamment à la France au début du conflit.
[modifier] L'endiguement (doctrine Truman) et la guerre froide
Selon le gouvernement américain de l'époque, la situation dramatique dans laquelle étaient les Européens, aggravée par les hivers froids, constituaient le terreau favorable à l'implantation du communisme. Les partis communistes italien et français remportaient en effet des succès électoraux. La doctrine du président Harry Truman est fondée sur l'endiguement (containment) du communisme déjà fortement implanté en Europe orientale.
Le Plan fut présenté une première fois par le secrétaire d'état James F. Byrnes au cours d'un discours tenu à Stuttgart le 6 septembre 1946. De plus, le général Lucius D. Clay avait demandé au patron d'industrie Lewis H. Brown de dresser un bilan de la situation économique en Allemagne et d'évaluer les besoins de la reconstruction.
Une première aide financière parvint en Grèce et en Turquie en janvier 1947. Le plan final fut annoncé par Marshall le 5 juin 1947 à Harvard.
Le même désir de vouloir aider les pays d'Europe de l'ouest.
[modifier] Dépenses générales du plan Marshall
Assistance économique, du 3 avril 1948 au 30 juin 1952 (en millions de dollars de l'époque).
Pays | Total | Dons | Prêts |
Total pour tous les pays | $13 325,8 | $11 820,7 | $1 505,1 |
Autriche | 677,8 | 677,8 | -- |
Belgique-Luxembourg | 559,3 | 491,3 | 68,0a |
Danemark | 273,0 | 239,7 | 33,3 |
France | 2 713,6 | 2 488,0 | 225,6 |
Allemagne, (RFA) | 1 390,6 | 1 173,7 | 216,9b |
Grèce | 706,7 | 706,7 | -- |
Islande | 29,3 | 24,0 | 5,3 |
Irlande | 147,5 | 19,3 | 128,2 |
Italie (incluant Trieste) | 1 508,8 | 1 413,2 | 95,6 |
Pays-Bas (*Indonésie)c | 1 083,5 | 916,8 | 166,7 |
Norvège | 255,3 | 216,1 | 39,2 |
Portugal | 51,2 | 15,1 | 36,1 |
Suède | 107,3 | 86,9 | 20,4 |
Turquie | 225,1 | 140,1 | 85,0 |
Royaume-Uni | 3 189,8 | 2 805 | 384,8 |
Régional | 407,0d | 407,0d | -- |
Notes :
- a. Le total du prêt inclut 65 millions pour la Belgique et 3 millions pour le Luxembourg : le détail de concession entre les deux pays ne peut pas être identifié.
- b. Inclut un prêt initial de 16,9 millions, plus 200 millions représentant une part partagée proportionnellement des concessions converties en prêts aux termes d'un accord signé le 27 février 1953.
- c. Aides du plan Marshall aux Indes néerlandaises (Indonésie) prolongées aux Pays-Bas avant le transfert de souveraineté du 30 décembre, 1949. Les aides totales pour les Indes néerlandaises sont de :
Total : 101,4 millions, concessions 84,2 millions, prêts 17,2 millions. - d. Inclut la contribution des États-Unis au fonds permanent social européen des syndicats (EPU), 361,4 millions; Compte de frêt général, 33,5 millions; autorisations européennes d'assistance technique (multi-pays ou régional), 12,1 millions.
En France, Jean Monnet, premier commissaire au Plan, avait commandé des produits américains (pétrole, nourriture, machines outils), réglés par les États-Unis, puis avait stocké la contre-valeur en francs, que l'inflation avait grignotés. Dans les années 60, 20 % de la somme prêtée a été remboursée et le solde considéré comme un don.
[modifier] Critique
Le plan Marshall a été souvent cité comme exemple de la façon dont l'aide économique massive peut produire la prospérité. Cependant, certains ont précisé que la reconstruction d'après-guerre de l'Europe était un problème moins ardu que le développement ou la reconstruction des secteurs actuels dans le tiers monde. L'Europe, en dépit d'avoir été dévastée par la guerre, gardait une infrastructure physique significative (canaux, ports et la partie restée en état du réseau ferré, par exemple) ainsi que la qualification technique de la population. Dans le cas du tiers monde, l'infrastructure et les qualifications techniques n'existent pas à même échelle, ce qui complique le problème.
Des critiques du plan Marshall ont été avancées par des historiens révisionnistes ou communistes pendant les années 1960 et les années 1970. Leurs affirmations étaient que le plan économique américain était impérialiste, et visait à satelliser l'Europe de l'Ouest en face de l'Europe de l'Est des Soviétiques. Il est cependant normal par définition qu'un pays place ses capitaux là où cela peut servir ses intérêts, et par ailleurs aucun pays européen n'a été mis en demeure d'accepter ce plan.
Les critiques des années 1980 précisent que la croissance de nombreux pays européens avait été rétablie bien avant l'arrivée à grande échelle de l'aide provenant des États-Unis, et était même rapide chez certains destinataires. Tandis que le plan Marshall soulagea les premières difficultés et le rétablissement des secteurs principaux, la croissance d'après-guerre était en grande partie un processus indépendant. La première personne a faire cet argument était l'historien économique Alan S. Milward. Les socialistes européens affirmèrent le fait qu'un montant équivalent d'argent de reconstruction pourrait avoir été obtenu en nationalisant les possessions de riches Européens qui ont déposé leur argent aux banques des États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale. Une telle spoliation aurait cependant été contraire à l'article 17-2 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui pose le principe du droit de propriété (celle-ci étant définie comme le droit d'user et d'abuser de la chose possédée, et n'aurait donc eu aucune base juridique ni morale).
[modifier] Anecdote
La Région wallonne a nommé son plan de redressement économique : « actions prioritaires pour l’avenir de la Wallonie », mais il est plus connu dans la presse sous le nom de plan Marshall pour le redressement de la Wallonie. Le terme journalistique est néanmoins inadéquat, car il ne vise pas l'injection d'argent extérieur mais traduit la volonté d'impulser de l'intérieur un rebond rapide par l'exécution de mesures fortes.
[modifier] Bibliographie
- Le Plan Marshall et le Relèvement économique de l'Europe. Colloque tenu à Bercy les 21, 22, 23, mars 1991 , Collectif, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 1993, ISBN 2110871636
- L'Europe Occidentale a l'heure américaine, Gerard Bossuat, Editeur Complexe, 1999, ISBN 2870274319
[modifier] Voir aussi
[modifier] Liens internes
[modifier] Liens externes
- (fr) Discours de George C. Marshall à Harvard European NAvigator
- (en) La Fondation George C. Marshall
- (fr) Marshall nostalgie par Ignacio Ramonet
- (fr) Le plan Marshall : une stratégie qui fit ses preuves, David Ellwood, eJournalUSA
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