Claude Roy (écrivain)
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Claude Roy, de son vrai nom Claude Orland, est un journaliste et écrivain français né le 28 août 1915 à Paris et mort à Paris le 13 décembre 1997.
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[modifier] Biographie
Né à Paris le 28 août 1915, Claude Orland est le fils d'un artiste-peintre d'origine charentaise et d'une mère d'origine espagnole. Élevé à Jarnac, il se lie d’amitié avec François Mitterrand avec qui il fait une partie de ses études. D'abord étudiant à l’université de Bordeaux, il monte à Paris en 1935 pour s’inscrire à la faculté de droit.
Malgré la diversité de ses lectures d’étudiant (Nietzsche, Spengler, Baudelaire, Malraux, Gide, Proust, Lénine), il est séduit par l'énergie du projet contre-révolutionnaire des Camelots du Roi. La dimension provocatrice du mouvement maurrasien satisfait son mépris pour l'ordre bourgeois. Avec d’autres jeunes gens fous de littérature et d'action radicale (Philippe Ariès, Raoul Girardet ou Pierre Boutang), il écrit dans l’organe des étudiants de l'Action française, L'étudiant français. Avec Pierre Bénouville, André Bettencourt et François Mitterrand, il fait aussi partie de ces étudiants résidant à l’internat des pères maristes (situé au 104, rue de Vaugirard à Paris) qui fréquentent les chefs de La Cagoule sans adhérer forcément à la formation d'extrême-droite. Parallèlement, il publie quelques nouvelles dans La Nouvelle Revue française et la Revue du siècle, nouvelles d’où ressort l’influence de Giraudoux dont il se réclame comme de Supervielle, Gide, Mauriac, Bernanos, Malraux.
En relation avec Thierry Maulnier et Robert Brasillach, il amorce sa collaboration à Je suis partout en 1937.
Appelé par ses obligations militaires, il est déjà soldat lorsque la guerre éclate. Alors que son premier poème est publié par Pierre Seghers dans PC 40, il est fait prisonnier au mois de juin 1940. Dès octobre 1940, il s'évade et gagne la zone libre. En 1941, son expérience de la guerre et l'action d’un État français imprégné de maurrassisme l’amènent en 1941 à cesser sa collaboration à Je suis partout. Il s’engage alors dans la Résistance au sein des Étoiles, une organisation où il rencontre Gide, Giraudoux, Eluard, Aragon et Elsa Triolet.
Ces derniers le persuadent d’adhérer au parti communiste en 1943. Rallié aux FFI lors de la libération de Paris, il devient correspondant de guerre durant la campagne d'Allemagne où il suit des procès pour Combat. Chroniqueur au journal Libération, critique littéraire, d'art et de théâtre, il fréquente alors avec assiduité les réunions du groupe de la rue Saint-Benoît. Il y croise Marguerite Duras, Edgar Morin, Jorge Semprun, Maurice Merleau-Ponty et de temps à autre Georges Bataille et Simon Nora. Il se fait ainsi poète (Clair comme le jour, 1943 ; Élégie des lieux communs, 1952), traducteur et romancier avec La nuit est le manteau des pauvres (1949).
Il se montre aussi un analyste profond des réalités des pays qu’il découvre. Il publie des récits de voyages rendant compte de ses pérégrinations aux États-Unis (Clefs pour l’Amérique, 1949) et en Chine (Clefs pour la Chine, 1953). Mais, en 1956, l’intervention soviétique en Hongrie l’amène à rompre avec la ligne du PCF.
Signataire d’une pétition de protestation avec la mouvance sartrienne, il amorce sa collaboration à France Observateur à partir de 1957. S’il y exprime des positions plus anti-soviétiques, il s’engage contre la guerre d'Algérie et la torture pratiquée au centre du Landy (octobre 1957), proche de France Observateur et des mouvances sartrienne et chrétienne. Définitivement exclu du P.C.F. en juin 1958, il appelle à une mobilisation communiste lors de l’arrivée du général de Gaulle. Il est alors, comme d’autres anciens communistes (François Furet, Serge Mallet) devenu pigiste régulier de France Obs.
Mais cela ne l’empêche pas de s’y distinguer en signant le Manifeste des 121 pour le droit à l’insoumission (1961). Malgré sa fascination pour la gloire de Sartre et ses liens passés avec Albert Camus, il n’est pas de la nouvelle formule (novembre 1964) et attend juin 1966 pour y intervenir de nouveau. Collaborateur régulier à partir de février 1968, il y traite à la fois de littérature, de livres de sciences humaines et d’essais de tous genres. Faisant preuve d’ouverture à l’égard des penseurs antitotalitaires, il rend par exemple compte de La Révolution introuvable de Raymond Aron (19 septembre 1968) ou du Premier cercle de Soljenitsyne (18 novembre 1968).
Il effectue aussi un reportage aux États-Unis durant l’été 1969. Cette année là, il sort le premier tome de son autobiographie (Moi je) chez Gallimard, une maison d’édition dont il devient un des conseillers littéraires. Il salue même, en avril 1972, la collection « Bibliothèque des Histoires » que Pierre Nora y lance. Politiquement, il s’oppose à tous les régimes oppressifs, dénonçant par exemple la répression en Turquie. Mais c’est surtout la situation dans les pays de l’Est qui l’intéresse comme l’illustre son dossier sur Le Printemps aux oeillets rouges (1er juin 1974) ou sa défense de L’Archipel du Goulag en juillet 1974.
Critique virulent de la « maolatrie » en vigueur dans les milieux « germanopratins », il supporte mal le « hold-up » des Nouveaux Philosophes sur la question du goulag. Qualifiant ces derniers de disc jockeys de la pensée (18 juillet 1977), il s’engage aussi à dénoncer le mythe maoïste dans les colonnes de la revue Esprit.
De même, dans Le Nouvel Observateur de juillet 1979 , il fait longuement part de la Chine telle qu'elle est apparue lors d'un voyage récent. Et, à la rentrée, il tire de ses articles sur le sujet un recueil (Sur la Chine, Gallimard) où il ne cache ni sa tristesse sur un pays dont il aime profondément le peuple, ni ses illusions passées quant à la possibilité du maoïsme à corriger ses erreurs. Il s’en prend aussi avec plein de verve aux rapports de l'intelligentsia parisienne avec l'idéologie du grand timonier. S’il participe aussi au débat sur la Nouvelle Droite, son intérêt pour l’Extrême-Orient l’amène à ferrailler sur la question du Cambodge avec Noam Chomsky.
Dans son débat avec ce dernier en juin 1980, il critique sa position qui assimile les insuffisances et les tares des démocraties bourgeoises aux crimes des régimes totalitaires, voire nazie. Il tire de ses réflexions sur l’aveuglement qu’entraîne les idéologies un ouvrage, Les chercheurs de dieux : croyance et politique (Gallimard, 1981), où il analyse la propension à vouer foi à quelqu'un ou à quelque chose, appliquant particulièrement cette réflexion à l’ersatz de religion qu'est pour lui le communisme. Au début des années 1980, il enchaîne sur la Pologne où il effectue un voyage au printemps 1981 dont il publie le carnet de route.
Atteint d'un cancer du poumon en juin 1982, il collabore moins régulièrement au Nouvel Observateur. Véritable polygraphe, il ne cesse de publier des romans, des témoignages de ses nombreux voyages, des descriptions critiques, des essais sur l'art et les artistes — dont de nombreux amis —, des livres pour enfants et des poèmes car la poésie est au cœur de toute son écriture. Elle en est le fil conducteur et c'est à travers elle que la littérature prend toute sa place pour donner un sens à son existence inquiète et à des engagements souvent déçus. En 1985, il reçoit le premier Goncourt de poésie de l’Académie Goncourt.
En 1982, il est victime d'un cancer qu'il racontera dans Permis de séjour. Ses dernières années restent celle d'un homme d'une très grande culture, d'un sage qui n'est dupe de rien. Il écrit qu'il a conclu une paix honorable ou du moins un armistice acceptable avec le monde et lui-même, sans se résigner à l'iniquité de la vie, ni s'aveugler sur ses propres manques.
Il écrit un journal intime d'un genre unique qu’il publie au fur et à mesure. Il meurt d'un cancer le 13 décembre 1997, à 82 ans. Il aura été un intellectuel important de sa génération. Honnête homme, il avait des convictions qui n'empêchaient ni le respect tolérant des différences ni l'expression de l'amitié la plus fidèle.
[modifier] Citations
« Le poète n'est pas celui qui dit
Je n'y suis pour personne
Le poète dit J'y suis pour tout le monde. »
« Il faudrait essayer de ne pas accorder trop de réalité à la réalité. Le monde a grand besoin que nous doutions un peu de son existence. »
In Les rencontres des jours
« La littérature est parfaitement inutile. Sa seule utilité est qu'elle aide à vivre. »
« Et ce que ces histoires imaginaires nous apportent peut-être de surcroit, c'est la véritable histoire de la vie réelle, l'Histoire que n'ont jamais écrite les historiens. » (à propos du genre romanesque)
[modifier] Œuvre
[modifier] Mémoires et livres de bord
- Moi je, Gallimard,1969, Folio 1978
- Nous, 1972, Gallimard, Folio 1980
- Somme toute, Gallimard, 1976, Folio, 1982
- Permis de séjour 1977-1982, Gallimard, 1983, Folio, 1987
- La fleur du temps, 1983-1987, Gallimard, 1988, Folio, 1988
- L’étonnement du voyageur 1987-1989, Gallimard, 1990
- Le rivage des jours 1990-1991, Gallimard, 1992
[modifier] Documentaires
- Clefs pour l’Amérique, Gallimard, 1949
- Clefs pour la Chine, Gallimard, 1953
- Le journal des voyages, Gallimard, 1960
- Sur la Chine, Gallimard, 1979
- La France de Profil, La Guilde du Livre, 1952
- La Chine dans un miroir, La Guilde du Livre, 1952
[modifier] Descriptions critiques
- Aragon, Seghers, 1945
- Lire Marivaux, La Baconnière, 1947
- Descriptions critiques, Gallimard, 1950
- Stendhal par lui-même, Le Seuil, 1952
- Le Commerce des classiques, Gallimard, 1953
- L’amour du théâtre, Gallimard, 1956
- La main heureuse, Gallimard, 1957
- L’homme en question, Gallimard, 1960
- Supervielle, Seghers, 1964
- Les soleils du romantisme, Gallimard, 1974
- Jean Vilar, Calmann-Lévy, 1987
- L’amour de la peinture, Gallimard, 1955, Folio essais, 1987
[modifier] Essais
- Défense de la littérature, Gallimard, 1968
- Temps variable avec éclaircies, Gallimard, 1985
- Les chercheurs de Dieu, Gallimard, 1981
- L’ami qui venait de l’an mil, Su Dongpo 1037-1101, Gallimard, 1993
- Le travail du poète, Paroles d’Aube, 1993
[modifier] Romans
- La nuit est le manteau des pauvres, Gallimard, 1949
- Le soleil sur la terre, Gallimard, 1956
- Le malheur d’aimer, Gallimard, 1958, Folio, 1974
- Léone et les siens, Gallimard, 1963
- La dérobée, Gallimard, 1968
- La traversée du pont des arts, Gallimard, 1979, Folio, 1983
- L’ami lointain, Gallimard, 1987, Folio, 1990
[modifier] Théâtre
- Le chariot de terre cuite, Gallimard, 1969
- Gérard Philipe, en collaboration avec Anne Philippe, Gallimard, 1960
[modifier] Livres d’enfants
- La famille quatre cents coups, Club Français du livre, 1954
- C’est le Bouquet, Delpire, 1964, Folio Cadet, 1980
- La maison qui s’envole, Folio Junior, 1977
- Proverbes par tous les bouts, Gallimard Enfantimages, 1980
- Le Chat qui parlait malgré lui, Folio-Junior, 1982
- Les animaux très sagaces, Folio-Cadet, 1983
- Claude Roy un poète, Folio-Junior en poésie, 1985
- Les coups en dessous, Folio-Cadet, 1987
- Désiré Bienvenu, Folio-Junior, 1989.
[modifier] Poésie
- Un poète mineur, Gallimard, 1949
- Un seul poème, Gallimard, 1955
- Poésies, Poésie/Gallimard, 1970
- Enfantasques, poèmes et collages, Gallimard, 1974
- Nouvelles Enfantasques, poèmes et collages, Gallimard, 1978
- Sais-tu si nous sommes encore loin de la mer ? Gallimard, 1979, Poésie/Gallimard, 1983
- A la lisière du temps, Gallimard, 1984
- Le voyage d’automne, Gallimard, 1987
- Le noir de l’aube, Gallimard, 1990
- Le voleur de poèmes : Chine, 250 poèmes dérobés du chinois, Mercure de France, 1991
- Les pas du silence, suivi de Poèmes en amont, Gallimard, 1993
- L'enfant qui battait la campagne
- "Les cloches du sommeil" Gaillard, 1942
[modifier] Voir aussi
[modifier] Bibliographie
- Un dossier « Claude Roy » dans le numéro 545 de La Nouvelle Revue française de juin 1998