Histoire d'Annecy-le-Vieux
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[modifier] Origines
Des populations occupaient déjà les rives du lac d'Annecy depuis le début du néolithique. Dès -5600 des chasseurs-cueilleurs sont présents, puis entre -4000 et -900 av. J.-C. et il s’agissait de cultivateurs et de pêcheurs. Cette occupation est attestée par les restes de cabanes trouvées dans le petit port, dans une zone aujourd'hui immergée mais qui se trouvait alors en bordure du lac.
Vers le début du IVe siècle av. J.-C., les Celtes Allobroges occupèrent à leur tour les territoires des pré-alpes, des montagnes de Savoie et des rives des grands lacs. Ces guerriers ont laissé assez peu de témoignages de leur présence, cependant, ils eurent très vite des contacts commerciaux avec les territoires du Piémont. Occupés dès -121, les Allobroges sont définitivement battus par les légions romaines en -62 av. J.-C. et leur territoire s’ouvre à la colonisation romaine.
[modifier] Époque romaine
Les romains s’installèrent à partir de -50 sur la rive nord du lac d’Annecy, dans la plaine des Fins, au pied du site d’Annecy-le-Vieux, et fondèrent le Vicus de Boutae (la « cité des bœufs », future Annecy), qui regroupa près de 2 000 habitants entre le IIe et le Ve siècle; elle occupait une position stratégique au carrefour de trois grandes voies romaines de communication (Italie, Genève, Vienne cisalpine).
À cette même époque, un propriétaire romain du nom d’Annicius — peut-être de la célèbre et puissante famille de patriciens romains, les Annici — avait une importante villa baptisée Anniciaca, située sur le coteau en contrebas du mont Veyrier, à l’emplacement actuel du chef-lieu d’Annecy-le-Vieux, d’où il dominait la plaine des Fins et le lac. Les villas romaines étaient en fait de puissantes exploitations agricoles qui pouvaient regrouper plus d’une centaine de personnes et vivaient souvent en complète autarcie.
Avec l’affaiblissement de l’empire romain, de nombreuses tribus barbares, déferlent à travers la Gaule. En 259, le vicus subit une importante attaque, il est rasé et la population est massacrée. Les survivants se réfugient dans les grottes du Mont-Veyrier, la paix revenue, certains s'installent définitivement sur le site de la villa Anniciaca. Les Burgondes occupèrent aussi un certain temps la région et laissèrent de nombreux témoignages archéologiques, mais les trop nombreuses attaques, incendies, pillages et tueries, sonnèrent le glas pour la cité romaine du Vicus de Boutae, et au VIe siècle la population finit par complètement abandonner la ville pour se réfugier sur les collines avoisinantes.
[modifier] Le Moyen Âge
Après l'abandon du Vicus de Boutae, le site de l'ancienne villa Anniciaca accueillit de nouveaux habitants et se fortifia pour protéger sa population, tout en continuant de vivre essentiellement de l’exploitation agricole. Des populations Burgondes s'installent dans le secteur au Ve siècle, mais peu de traces subsistent de leur présence sur la commune, à l'exception d'une tombe monolithique, transformée en abreuvoir, et d'un anneau de verre blanc veiné de jaune pâle.
Après la conversion au catholicisme du roi des Burgondes, Sigismond de Bourgogne, les populations organisent leurs communautés en paroisses. Celle d'Anniciaca se place sous le patronage de Saint Laurent. À partir du VIe siècle, des populations franques s'installent aussi et du VIe au XIIe siècle, Anniciaca connut son heure de gloire, en devenant une véritable capitale rurale.
Au IXe siècle, après la mort de Charlemagne, lors du démembrement de l'empire, elle fait partie des territoires de la Lotharingie. On trouve mention de la villa Anniciaca, dénommée « Anesciacum » dans un document de 867 concernant le don de la commune, ainsi celui d'autres communes, par Lothaire II (825-869), arrière petit-fils de Charlemagne (742-814) à son épouse Thieberge. De fait, il désirait la répudier pour épouser sa maîtresse Bertrade et légitimer les enfants qu'il avait eu avec cette dernière. Le pape Nicolas le Grand (858-867) fera échouer ce projet de répudiation de la reine.
La commune passe ensuite aux mains des rois de Bourgogne; elle figure dans la liste de leur patrimoine datant de 888. En 1011, Le roi Rodolphe III de Bourgogne (970-1032) fait don du fiscus (domaine royal) d'Anesciacum à son épouse Hermengarde de Savoie, le domaine faisait partie d'une ensemble beaucoup plus vaste qui s’étendait en particulier autour d’Aix-les-Bains et de la Combe de Savoie. En 1032, à la mort du roi, la commune passe dans le domaine des Comtes de Genève.
À partir de l’an 1107, date à laquelle apparaît pour la première fois le nom d'Annecy-le-Vieux, la nouvelle ville fortifiée d’Annecy-le-Neuf commence à prendre de l’importance, l’ancienne Anniciaca, devenue Annecy-le-Vieux perd sa position hégémonique, et retourne à ses occupations agricoles (vigne, céréales, élevage), mais garde un certain caractère résidentiel, avec de nombreux manoirs et relais de chasse, appartenant aux nobles et aux bourgeois d’Annecy-le-Neuf.
En 1342, au hameau de Brogny, né le futur Cardinal Jean Allarmet de Brogny qui fut un des plus importants hommes d'église de son époque, voir #Personnalités liées à la commune. Il embellit l'ancienne église Notre-Dame et fonda en 1422, le couvent des Dominicains à Annecy.
Il est attesté qu'existait au moyen-âge — et certainement depuis des temps immémoriaux — sur les monts Rampon, Rampignon et Veyrier, une importante activité de charbon de bois grâce aux forêts dont sont couverts ces espaces naturels. Cette activité a perduré jusqu'après la Seconde Guerre mondiale. Les dernières charbonnières ont été exploitées par des républicains espagnols qui rejoignirent le maquis en juin 1943.
[modifier] Le XVIIIe siècle
La mappe sarde de 1730, indique la présence de vignes cultivées sur les versants ensoleillés et protégés sur une surface de 93 hectares. La vigne était cultivées dans des enclos de pierres sèches. Cinq cépages étaient alors cultivés et nommés : blancs, gros noirs, servagins, douces et rouges.
En 1756, la commune compte 470 habitants appartenant à 126 foyers, 230 vaches laitières, 116 bœufs, 100 veaux, 157 moutons, 16 cochons et 12 chevaux. Territoire de collines avec des versants ensoleillés et protégés par la douceur venue du lac, la vigne était largement cultivée depuis le moyen-âge, et fournissait des quantités en excédent, pouvant être vendues sur les marchés environnants. Les céréales sont aussi cultivées mais en quantités insuffisantes pour les besoins des familles de la commune.
Dans la nuit du 21 au 22 septembre 1792, les troupes françaises du général Moutesquiou envahissent pas surprise le duché de Savoie, obligeant l'armée savoyarde, le roi et de nombreux fonctionnaires et membres du clergé à se réfugier au Piémont. Fin octobre, l'Assemblée des Allobroges, réunie dans la cathédrale de Chambéry déclare la fin du despotisme, la suppression des corvées et de la gabelle, la fin de la milice et la création du département du Mont-Blanc. Les ancileviens deviennent français pour 23 ans.
Après l'arrêté du 21 janvier 1794, mettant fin à l'exercice de la religion dans le département, Annecy-le-Vieux connaît quelques destructions, même si elles sont moins importantes qu'ailleurs. Le clocher qui n'a pas de « flèche pointue pouvant offenser l'œil révolutionnaire » est épargné mais les cloches sont descendues, brisées et envoyées pour être refondus en canon. Les deux églises furent saccagées ainsi que les tombeaux où reposaient des religieux ou des nobles. La chapelle de Provins fut détruite mais sa statue de la vierge « Notre-Dame de Provins » fut sauvée durand la nuit par Nicolarde Salomon, une jeune fille pieuse qui lui vouait un véritable culte. La statue, cachée jusqu'en 1804, fut réinstallée dans la chapelle de Provins au terme d'une procession.
En 1796 (An V de la Révolution française), la commune récupére la fonte de ses anciennes cloches et charge le saintier Jean-Baptiste Pitton, d'effectuer la fonte d'une importante cloche républicaine (700 kilos, 109 cm de diamètre et 90 cn de hauteur) pour être installée dans le clocher, voir #Patrimoine historique.
[modifier] Le XIXe siècle
Avec le Consulat, en 1801, la paix religieuse est rétablie. De nombreux ancileviens vont travailler dans les usines d'Annecy, en particulier à la fabrique d'étoffes de coton imprimées, dites « indiennes » qui emploit 360 ouvriers.
À la fin de l'empire napoléonnien, le Traité de Paris du 30 mai 1814 redécoupe les États de Savoie entre la France et le Royaume Sarde. La région d'Annecy reste française et son territoire s'enfonce dans les États sardes. La frontière passe à 20 km au nord et à 30 km à l'est de la commune. La population est politiquement divisée entre ceux qui veulent être rattachés à la France (cocardes blanches, couleur du roi de France) et ceux qui veulent rester savoyards (cocardes bleues).
Le maire d'alors, Jean-Louis Ruphy, fils d'un architecte annécien très important et riche acheteur de biens nationaux, commet quelques maladresses politiques et des indélicatesses de gestion. En juillet 1814, après quelques jours de tension et d'échauffourées, avec une partie de la population pro-sarde, et l'auto-proclamation de l'état de siège, des négociations sont ouvertes. Entre temps, François Ruphy, oncle du maire, se fait nommer sous-préfet d'Annecy. Les négociations se termineront en janvier 1815 avec la démission du maire. Cependant, après la restauration sarde, qui a lieu le 28 novembre 1815, la famille Ruphy continuera à jouer un rôle important.
Après la restauration sarde, le caractère résidentiel de la commune va se confirmer tout au long du XIXe siècle et jusqu'au début du XXe siècle, lorsque de nombreux artistes viennent séjourner ou se retirer à Annecy-le-Vieux, pour créer, s’y reposer, et profiter des magnifiques vues sur le lac et les montagnes : Eugène Sue (entre 1851 et 1857), Astolphe de Custine, John Ruskin et Gabriel Fauré (entre 1919 et 1924), entre autres, devinrent des fidèles de la commune.
Eugène Sue, auteur des fameux Mystères de Paris, vécu ses dernières années à Annecy-le-Vieux, de 1851, après le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte, jusqu'à sa mort le 3 août 1857. Voici comme il décrit la villa de la Tour où il résida et son environnement :
La maisonnette est blanche et ses volets sont verts,
Au pied du Veyrier elle est assise et plane
Sur le lac d'Annecy, dont les bords sont couverts
De noyers jaunissants : son onde diaphane,
Frais miroir transparent,
Reflète la beauté
D'un paysage alpestre et ses rochers noirâtres,
Ses prés, ses grands sapins, leur sombre majesté,
Puis, la lueur des feux allumés par les pâtres
Lorsque la nuit descend sur leurs monts sourcilleux ...
Au milieu du XIXe siècle, sur les terrains du bas de la commune, s’installent quelques industries, dont les deux fleurons furent la minoterie Cléchet et la fonderie de cloches Paccard, qui a porté le renom d’Annecy-le-Vieux dans le monde entier.
Le fondeur Georges Paccard, décide d'installer sa nouvelle fonderie de cloches dans la commune en 1857. Originellement, installé sur un terrain derrière la ferme de l'Abbaye, la fonderie sera déplacée sur un terrain plus grand, chemin de l'Abbaye. C'est dans les nouveaux locaux, en 1891, que la cloche « La Savoyarde » du Sacré-Cœur à Paris fut coulée. Ce bourdon, toujours un des plus gros du monde, pèse 18 835 kg, mesure 3,06 m de hauteur pour 9,60 m de circonférence extérieure, avec une épaisseur à la base de 22 cm, et un battant de 850 kg. L'installation a un poids total de 25 765 kg. La ruelle par où est sortie le bourdon porte le nom de "rue de la Savoyarde".
En 1860, après le traité de Turin, signé par le roi Victor-Emmanuel II de Savoie et le rattachement de la Savoie à la France, Annecy-le-Vieux devient une commune française dans le nouveau département de Haute-Savoie.
[modifier] Le XXe siècle
Avec le rattachement de la Savoie à la France et l'arrivée du chemin de fer, les vins français viennent concurrencer dangereusement les vins d'Annecy-le-Vieux, mais c'est surtout les attaques du mildiou, puis du phylloxéra, qui aboutissent à la diminution, puis à la disparition complète de la production vinicole, au début du XXe siècle. En fait, passant de 75 hectares en 1848 à 20 hectares en 1900, la production laitière a définitivement remplacé la vigne en 1910, et le 24 octobre est créée la première fruitière réunissant la production laitière de 24 agriculteurs. De toute façon, selon des anciens, le vin rouge produit pendant plusieurs siècles sur les adrets de la commune, n’était pas réellement d’une très grande qualité et ne possédait pas un taux d’alcool très élevé. Cependant Annecy-le-Vieux garde un souvenir de cette production vinicole, qui a aussi marqué son paysage, à travers la grappe de raisins que l’on peut voir sur son logo officiel, mais aussi à travers plusieurs noms de lieux-dits attestant de ce passé vinicole : Vignières, Provins (qui signifie multiplication par marcottage), impasse des Vignes, allée de la Vigneraie (nom d’une ancienne parcelle). De fait, un peu partout sur la commune on rencontre encore de nombreux pieds de vignes gardés dans les jardins et des vignes sauvages se remarquent souvent dans les haies et contre les murets.
Le compositeur Gabriel Fauré, tombé sous le charme alpestre de la commune, vint s'installer à Annecy-le-Vieux dans la villa Dunand, que la famille Maillot, lui loua de 1919 à sa mort en 1924. Il y reçut de nombreux artistes comme les compositeurs Alfred Cortot et Arthur Honneger, le violoncelliste Pablo Casals et la meneuse de revue Joséphine Baker.
En 1972, les habitants d’Annecy-le-Vieux choisissent de rester indépendants et refusent la fusion-absorption proposée par Annecy, sa voisine et sœur.
En 1989, l'urbanisation et la valorisation foncière des terrains de la commune, pousse la fonderie Paccard à quitter le territoire de la commune, après 132 années de labeur pour aller s'installer dans de nouveaux locaux à Sévrier.
En avril 2006, la municipalité a reçu la visite de Philippe Bas, le Ministre délégué à la Sécurité sociale, aux Personnes âgées et à la Famille.
[modifier] Patrimoine historique
- Le clocher du chef-lieu, de type roman, date du début du XIIe siècle. L’église Notre-Dame, à laquelle il appartenait, fut dévastée sous la Révolution française. Il est classé monument historique depuis le 7 mai 1908. Il s'agit d'un remarquable beffroi avec deux étages de fenêtres géminées. L'église originelle a été bâtie sur les fondations d'un temple gallo-romain dédié à Jupiter. La cloche de bronze a été fondue en 1796 par le saintier Jean-Baptiste Pitton. Originellement, il s'agissait d'une cloche républicaine, faisant 90 cm de haut, 1 mètre de diamètre et pesant 700 kg. Elle a été classée monument historique en 1937.
- L'église Saint-Laurent actuelle, de type néo-classique sarde, fut construite après 1849. Sa façade comprend un tympan triangulaire et deux niches abritent les statues de Saint Laurent et de saint François de Sales. À l'intérieur, deux bénitiers de pierre, placés dans le narthex proviennent de la première église. On y trouve aussi un beau Christ en bois du XVIe siècle. En 1986, la commune a fait refaire la toiture et la façade, et en 1995, l'intérieur fut lui aussi rénové.
- Les deux chapelles de Frontenex et de Provins.
- Le château de la Pesse est une belle demeure du XIVe siècle et fut un rendez-vous de chasse des ducs de Nemours.
- Le manoir de la Cour vit naître Anne de Guigné (25 avril 1911 - 14 janvier 1922), déclarée Vénérable en 1990.
- La villa de la Tour, où vécut l’écrivain Eugène Sue.
- La villa Dunand et son parc, où vécut le compositeur Gabriel Fauré de 1919 à sa mort en 1924, appartiennent aujourd’hui à la commune. La villa abrite quelques services municipaux. Situé au chef-lieu, le parc "Gabriel-Fauré" a été restauré en 2005 dans le style de l'époque. Il est un lieu d'animations et de rencontres festives durant l'été.
- Le café Brunet, classé « Café historique d’Europe », et connu pour ses soirées philosophiques, ses soirées débats et ses soirées spectacles.
- L'Abbaye, situé en contrebas du chef-lieu, est un quartier de la commune. De fait il n'y a jamais eu d'abbaye sur le territoire d'Annecy-le-Vieux, ni de moines, seulement des terrains appartenant à des congrégations religieuses. Ces terres agricoles avaient été originellement cédées au XIIIe siècle, par le comte Guillaume de Genève, aux Dames de l'abbaye cistercienne de Sainte-Catherine du Semnoz. La commune a restauré l'ancien corps de ferme et l'a dévolu aux arts graphiques avec l'école municipale de dessin et une salle d'expositions d'Art contemporain.
[modifier] Personnalités liées à la commune
- Jean Allarmet de Brogny, (1380-1394), cardinal, juriste, vice-chancelier de l'Église catholique, légat du pape, président du concile de Constance. Nommé vice-chancelier de l'Église par l'anti-pape Benoît XIII, il mit fin au grand schisme d'occident, puis pris une part essentielle dans le rétablissement de l'autorité unique de Rome, en prenant une part active à la déchéance des anti-papes Benoît XIII, Jean XXIII et Grégoire XII dont il reçu l'abdication. Président du Concile de Constance de 1417, il couronne le pape Martin.
- Astolphe de Custine (1790-1857), écrivain
- Eugène Sue (1804-1867), écrivain. Il est l'auteur des fameux Mystères de Paris. Condamné à l'exil par Napoléon III, il s'installe à Annecy-le-Vieux en 1852 jusqu'à sa mort le 3 août 1857. Il est enterré au cimetière de Loverchy à Annecy.
- John Ruskin (1819-1900), écrivain et poète
- Gabriel Fauré (1845-1924), compositeur
- Joseph Baud (avril 1864-24 décembre 1904), capitaine de l'armée française et colonisateur du Dahomey.
- Anne de Guigné (1911-1922), "Vénérable"
- Bernard Accoyer (1945), homme politique
- Edgar Grospiron (1969), skieur émérite, champion du monde et médaillé d’or aux Jeux Olympiques.
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