Philon d'Alexandrie
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[modifier] Présentation
Philon d’Alexandrie (vers -12 - vers +54) est un philosophe juif hellénisé né à Alexandrie. Les rares détails biographiques le concernant se trouvent dans ses propres œuvres, en particulier Legatio ad Caium (Ambassade chez Caligula) et chez Flavius Josèphe (Antiquités xviii. 8, § 1; xix. 5, § 1; xx. 5, § 2). Le seul événement dont la date est sûre est d'ailleurs cette participation à l'ambassade que les Juifs d'Alexandrie envoyèrent à l'Empereur Caligula en l'an 40 pour demander sa protection à la suite des émeutes dont ils avaient été victimes de la part des Grecs. Eusèbe le cite abdondamment dans son histoire ecclesiastique sections XVIII et XIX dans laquelle il décrit la vie des thérapeutes d'Alexandrie.
Il symbolise le judaïsme d’Alexandrie, étape vers le christianisme, dans la mesure où celui-ci est à la fois issu du judaïsme et de l'hellénisme. Pour les chrétiens, Philon est juif. Mais pour les juifs orthodoxes, lui et sa communauté d'Alexandrie sont les prototypes des "juifs assimilés". Comme pour d'autres transfuges ultérieurs, Flavius Josèphe, Spinoza ou Freud, sa culture biblique, son attachement au peuple juif alimentent sa pensée universaliste. Il est convaincu que le monothéisme de Moïse est universel et il veut en convaincre ses lecteurs grecs.
Connaissant parfaitement les systèmes philosophiques grecs, Philon est à ce point influencé par Platon qu'il en épouse même le style, avec toutefois les hellénismes des Juifs d'Alexandrie. On cite souvent ce jeu de mots d'un contemporain : "Philon platonise, Platon philonise". Ses textes sont intéressants pour l'étude de la philosophie néo-platonicienne, mais surtout pour sa lecture de la Bible, qu'il lisait dans la traduction des Septante. Il fait notamment des personnages bibliques des allégories. Il est bien possible qu'il ignorât l'hébreu, mais la question est controversée.
[modifier] Système philosophique et religieux
Son système philosophique se résume en trois thèses fondamentalement bibliques :
- La transcendance de Dieu, et l’inconnaissabilité de Dieu. L’homme ne peut saisir l’essence de Dieu ni par le sens ni par l’intelligence. Philon pose ici une limite nette au pouvoir de la philosophie et de la théologie. Cette thèse de l’inconnaissabilité de Dieu ne sera reprise que par Maïmonide et Kant.
- La vacuité de l’homme. La terre n’appartient pas à l’homme. Le dialogue entre Dieu et l’homme que présuppose la Loi révélée est opaque et sourd, comme celui du maître et de l’esclave. De plus, renversant la célèbre maxime de Socrate, Philon affirme que l’homme ne se connaît même pas lui-même.
- La médiation prophétique entre Dieu et l’homme.
Le Cosmos et l’homme ont capté quelque chose de divin, qui permet à ce dernier de s’y refléter. C’est pourquoi ils sont tous deux des images de Dieu.
Dieu se porte vers ce qui n’est pas lui par le principe d’Amour, c’est un don. Le mécanisme de cette transmission repose sur la théorie confuse (et relativement accessoire dans la pensée de Philon, mais qui aura un grand succès) des Puissances, des Anges, et surtout du logos.
[modifier] Les Puissances divines
Les Puissances divines sont les attributs de Dieu, le Logos est sa Sagesse même, son pouvoir créateur. Les Anges sont des émanations de Dieu, des hypostases dénommées « Fils de Dieu », « Ancien des Anges », etc. Il y a ensuite des archétypes de la Création, sortes de Verbes-idées, lieux et images de tout ordre créé. Enfin, l’esprit humain, l’âme et l’intelligence, sont eux-mêmes logos et susceptibles de s’ouvrir aux autres puissances dont l’enchevêtrement, la hiérarchie, l’harmonie forment la structure du monde.
Cette théorie est une sorte de synthèse autour des termes employés par la Bible grecque pour parler de Dieu, de la création et de la prophétie. Alliant la terminologie de la Bible à la mystique de Platon et au mystérisme de l’Orient, elle inspira (étant bien déformée au passage) la gnose, la christologie de Paul et deJean l’Evangéliste, la philosophie de Plotin...
[modifier] Œuvres de Philon
- De Aeternitate Mundi
- De Abrahamo
- De Migratione Abrahami
- De Mutatione Nominum
- De Plantatione
- De Agricultura
- De Confusione Linguarim
- De Congressu Eruditiones Gratia
- De Decalogo
- De Sacrificius Abelis et Cainis
- De Posteritate Caini
- De Ebrietate
- De Escrecationibus
- De Fuga et Inventione
- De Gigantibus
- De Josepho
- De Opificio Mundi
- De Vita Contemplativa
- De Vita Mosis
- De Sobrietate
- De Somniis
- De Specialibus Legibus
- De Virtutibus
- De Praemiis et Poenis
- Legum Allegoriae
- Legatio ad Gaium
- In Flaccum
- Quaestiones in Genesim
- Quaestiones in Exodum
- Quis Serem Divinarum Heres Sit
- Quod Deterius Potiori Insidari Soleat
- Quod Deus Sit Immutabilis
- Quod Omnis Probus Líber Sit
[modifier] Bibliographie
- FILWNOS IOUDAIOU SUGGRAMMATA.* Philonis Iudaei omnia qua extant opera. Partim ab Adriano Turnebo . partim a Davide Hoeschelio. Huic novissimae editioni accessere variae lectiones et elegantissimus eiusdem Philonis de Septenario libellus, et de Providentia Dei fragmenta. Lutetiae Parisiorum. 1640. Cum Regis privilegio. Compagnie des Libraires Paris 1640. La première édition grecque de quelques parties de Philon furent publiées en 1553 par Odet de Turnèbe. Fédéric Morel en donna en 1616 une édition complétée de quelques ouvrages inédits qui manquaient à Turnèbe, et en y plaçant les traductions de Budé, Gelenius, et les siennes propres. David Hoeschel ayant publié à son tour divers traités inédits, sept savants imprimeurs français (Sébastien et Gabriel Cramoisy, Denis Moreau, Claude Sonnius, Jean Branchu, Denis Thierry et Denis Bechet) donnérent en 1640 cette édition "complète", rééditée, ou contrefaite en 1691 à Wittemberg.
- Valentin Nikiprowetzky, Le commentaire de l'Ecriture chez Philon d'Alexandrie, Brill, 1977
- Mireille Hadas-Lebel, Philon d'Alexandrie. Un penseur en diaspora, Fayard, 2003