Plan-séquence
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Au cinéma, un plan-séquence est une séquence (ou éventuellement un morceau important de séquence) filmée en un seul plan, et restituée telle quelle dans le film final, c'est-à-dire sans montage ou interruption de point de vue (sans plan de coupe, fondu, volet ni champ-contrechamp). Le plan-séquence a une unité sur le plan narratif (c'est une séquence) et sur le plan technique (c'est un plan), d'où son nom.
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[modifier] Durée
Un plan-séquence peut durer de quelques dizaines de secondes à plusieurs minutes, la limite technique au cinéma (avant l'ère numérique) étant celle de la durée d'une bobine de pellicule (environ 12 minutes). Aujourd'hui, les différents supports numériques offrent cependant beaucoup plus de possibilités puisque certaines caméras peuvent tourner jusqu'à deux heures sans arrêt. La notion de « longue durée » est cependant très subjective.
[modifier] Maîtrise
Le plan-séquence est souvent difficile à maîtriser, notamment en cas de mouvements de caméra et d'acteurs, car il faut étudier le champ de la caméra (moment où les acteurs entrent et sortent du champ, les accessoires comme les micros et projecteurs ne devant pas être vus…). D'où la nécessité de le répéter avant, pour que tous les intervenants (acteurs et techniciens) s'accordent.
[modifier] Plans-séquences célèbres ou remarquables au cinéma
- Dans L'Aurore (1927, Murnau), lorsque le mari s'avance à la rencontre de la femme de la nuit. Il s'agit là d'un des tout premiers plans-séquences du cinéma.
- Dans Les Amants du Capricorne (Under Capricorne, 1949) et surtout La Corde (The Rope, 1948), d'Alfred Hitchcock, le film — on devrait dire le théâtre filmé — se déroule quasiment sans interruption avec cependant un trucage pour passer d'une bobine à l'autre.
- Dans Soy Cuba (1964, Mikhaïl Kalatozov), qui raconte la révolution castriste à Cuba dans les années 60, des plans-séquences sont filmés dans un grand souci d'esthétique, en particulier la scène du groupe de jazz sur l'immeuble, que la caméra quitte pour aller se noyer plus bas dans l'eau agitée d'une piscine.
- Dans Requiem pour un massacre (Idi i smotri, 1984, Elem Klimov), où l'on suit les mésaventures d'un jeune partisan dans la campagne biélorusse ravagée par les massacres nazis, on trouve de longs plans-séquences, notamment dans la scène où le village est brûlé avec ses habitants, ou encore un plan-séquence particulièrement visuel sur la traversée d'un marécage par le jeune partisan.
- Dans Othello (The Tragedy of Othello: The Moor of Venice, 1952, Orson Welles), un plan-séquence tourné sur une plage avec simplement une jeep comme tout accessoire (pour porter la caméra).
- Au début de Les Sentiers de la gloire (Paths of glory, 1957, Stanley Kubrick) un travelling arrière montre un officier qui avance dans la tranchée et passe ses soldats en revue avant l'attaque.
- Le début de La Soif du mal (Touch of Evil, 1958, Orson Welles), avec notamment son mouvement de grue (la caméra passe au-dessus du poste frontière de Tijuana pour suivre le trajet de la voiture), interrompu soudainement par l'explosion d'une bombe.
- Le meurtre de David Locke (interprété par Jack Nicholson) dans Profession : reporter (Professione: reporter, 1974, Michelangelo Antonioni) : on voit David Locke allongé sur son lit, vivant ; la caméra se tourne vers la fenêtre grillagée, traverse celle-ci pour suivre une auto-école dans une cour, on entend un bruit de détonation, et on suit la voiture pour contourner la maison et retourner dans la pièce par la porte où l'on redécouvre Locke sur le même lit, désormais mort.
- Le début de The Player (1992, Robert Altman) est un clin d'œil et une référence directe à La Soif du mal.
- La fin de Principio y fin (1993, Arturo Ripstein) : une montée d'escalier dans un hôtel de passe avec comme fond musical La Valse des nuls des Tambours du Bronx.
- Dans 71 Fragments d'une chronologie du hasard (71 Fragmente einer Chronologie des Zufalls, 1994, Michael Haneke) filme pendant plusieurs minutes, en plan fixe, un des protagonistes en train de renvoyer des balles de ping-pong expédiées par un robot d'entraînement ; cette scène insupportablement longue met en avant la relation conflictuelle du personnage avec les machines (un des ressorts du film).
- Paul Thomas Anderson est un réalisateur qui utilise beaucoup les plans-séquences, notamment dans Boogie Nights (1997) où la caméra plonge même sous l'eau.
- Le début de Snake Eyes (1998, Brian De Palma), qui est en fait un « faux » plan-séquence, tourné en plusieurs fois et raccordé par traitement numérique.
- Timecode (2000, Mike Figgis) est composé de quatre plan-séquences couvrant chacun la totalité du film (environ 90 minutes), car les quatre plan-séquences apparaissent simultanément à l'écran grâce à l'écran divisé en quatre parties de même taille.
- Dans Panic Room (2002) David Fincher utilise le plan-séquence avec des mouvements de caméra improbables (par exemple passant à travers l'anse d'une tasse).
- Le film L'Arche russe (Russkij kovcheg, 2002, Alexandre Sokourov) consiste en un unique plan-séquence de 96 minutes. Pour effectuer ce tour de force, le réalisateur a utilisé du matériel vidéo qui offre une capacité d'enregistrement plus longue.
- Old Boy (2003) de Park Chan-Wook comporte une scène de combat en plan-séquence, où l'anti-héros se bat à mains nues, seul contre 20 assaillants.
- Breaking News (2004, Johnnie To) s'ouvre sur un plan-séquence très fluide de plus de six minutes.
- Lord of War (2006, Andrew Niccol) s'ouvre sur un plan-séquence retraçant, en vue subjective, la fabrication, le transport et la fin de la vie d'une balle de kalachnikov.
- Les Fils de l'homme (Children of men, 2006, Alfonso Cuaron) est rempli de plans-séquences dans une ambiance de chaos, dans un Londres soumis à la guerre civile.
[modifier] Vidéo-clips
Le plan-séquence a également été beaucoup utilisé dans l'univers du vidéo-clip. L'intérêt (et le défi) est alors de pouvoir tourner l'intégralité du clip en un seul plan. Citons par exemple les clips réalisés par Michel Gondry, notamment pour Kylie Minogue (Come Into my World), Lucas (Lucas With the Lid Off) ou encore Cibo Matto (Sugar Water).
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