Histoire de Cuba
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Sommaire |
[modifier] L'époque pré-colombienne
Lorsque Christophe Colomb découvre l'île, Cuba est déjà peuplée par 16 000 à 60 000 autochtones (Las Casas estimaient qu'il y avaient 200 000 autochtones). Ils appartiennent à différentes tribus, mais les Taïnos et les Karibs (Caribes) dominent en nombre. Les plus anciens seraient arrivés vers le IIe millénaire av. J.-C., les plus récents, les Tainos seraient arrivés vers l'an 500.
Les Taïnos appartiennent à une culture plus large celle des Arawaks dont les populations s'étendaient jusqu'en Amérique du Sud.
[modifier] La colonie espagnole
L'île de Cuba est découverte, par le monde occidental, lors du premier voyage de Christophe Colomb, le 28 octobre 1492. Christophe Colomb la baptise Juana en l'honneur de la fille des rois catholiques. En découvrant Cuba, Colomb pense découvrir le Japon. Par la suite, Sebastián de Ocampo sera le premier européen à en faire le tour complet en 1508 confirmant que Cuba est une île et Juan de la Cosa fera les relevés cartographiques de l'île[1].
En 1511, débute l’occupation de Cuba par l'empire colonial espagnol, qui se terminera par la signature du Traité de Paris de 1898. Sous la direction du gouverneur Diego Velázquez de Cuéllar plusieurs villes voient le jour dont Santiago de Cuba (1514) et La Havane (1515[2]).
Diego Velázquez de Cuéllar et ses hommes se lancent dans la conquête et le pillage du territoire. Ils s’approprient les terres, soumettent les Amérindiens à l’esclavage et s’accaparent l’or de ces derniers. Les premières localités espagnoles, Las Villas, s’établissent près des foyers de populations indigènes et des mines d’or. Les réserves d’or sont cependant rapidement épuisées, l’administration locale est donc forcée de trouver des alternatives économiques.
Les plantations de canne à sucre, de tabac et de café deviennent alors les principales activités économiques de Cuba. Le développement de la culture de canne à sucre, qui est très intensive en travail, contribue au développement de l'esclavage. La disparition de la population autochtone de l'île, décimée en quelques années du fait de sa faible résistance aux maladies importées d'Europe et au travail imposé par les Conquistador espagnols, aggrave les besoins en main d'œuvre. En 1513 arrivent à Cuba les premiers esclaves africains. Entre 1600 et 1880, date de l’abolition de l’esclavage à Cuba, il en arrivera approximativement 760 000, principalement des Yorubas de l'Ouest du Nigéria, (appelés Lucumí à Cuba, ce qui veut dire "Mon ami" en yoruba, et aussi Nago ou Anango), Bantous du Kongo ou bakongo du Congo et de République démocratique du Congo, Arará, groupe kwa : Fon de Dahomey (actuel Benin) et Nigéria, Ewé ou Eoué du Ghana et du Togo, Abakuá (ou abakwa, surnommés à Cuba nañigos) : Carabalí de Calabar (Sud du Nigéria), Mandingues du Ghana, Efik de Dahomey, Bríkamo, Ejagham, Ibibio, et autres ethnies du Sénégal, Angola, Libéria...
L’importation d’esclaves noirs africains permet un essor considérable de l'île ainsi que l’occupation de La Havane par les Britanniques en 1762 qui, en l’espace de neuf mois, importent près de 10 000 esclaves et ouvrent le port de la capitale au commerce international. Les Britanniques rendent Cuba aux Espagnols au bout de neuf mois contre la Floride. Les années qui suivent permettent à l’île de se développer. La population s’accroît de manière significative, passant de 273 000 en 1791 à plus d’un million en 1840. En 1825, l’île dénombre 46% de blancs, 18% de non-Européens libres (métis) et 36% d’esclaves, alors qu’aujourd’hui elle est peuplée de 51% de métis, 37% de blancs et de 11% de noirs.
[modifier] L'indépendance
Le 10 octobre 1868, Carlos Manuel de Cespedes (1819-1874), riche propriétaire terrien, libère ses esclaves et fonde une armée, déclenchant la Guerre des Dix Ans (1868-1878). Malgré le soutien des États-Unis d'Amérique - plusieurs bateaux américains débarquent à Cuba avec des armes et des volontaires, dont de nombreux vétérans de la Guerre de Sécession – les Espagnols remportent une victoire sanglante face aux insurgés. Toutefois, il s’agit tout de même d’une demi-victoire pour le peuple cubain, car il obtient par le pacte de Zanjón (10 février 1878) une certaine autonomie, l’abolition de l’esclavage en 1880 - mise en pratique uniquement en 1886 - et l’égalité des droits entre les Blancs et les Noirs, proclamée en 1893. Le pacte a aussi des répercussions politiques, puisqu’il engendre l’apparition des premiers partis politiques.
Les réformes mises en place à la suite de la Guerre des Dix Ans ne sont pas réalisées, ce qui occasionne un nouveau soulèvement du peuple. José Martí, écrivain et patriote, fonde le Parti révolutionnaire cubain en 1891 avec les futurs généraux, Máximo Gómez et Antonio Maceo. La guerre révolutionnaire d’indépendance devient réalité le 29 janvier 1895. L’Espagne veut mettre fin à cette lutte une bonne fois pour toute et décide d’envoyer 280 000 soldats en renfort aux 21 777 déjà sur place. On compte alors sur l’île un soldat pour six habitants. 2 ans de guerre firent 200 000 vicimes soit 1/8 de la population.
La fin de la guerre d’indépendance face à l’Espagne semble imminente au début de l’an 1898. Le président Américain de l’époque, William McKinley (1897-1901), décide alors d'envoyer à La Havane un navire de guerre, le Maine, afin d’y protéger les intérêts de Washington. Dans la nuit du 15 février 1898, le croiseur américain explose dans le port de La Havane, il aurait été heurté par une torpille (la véritable cause est toujours incertaine), 250 marins meurent sur le coup. Reçu comme une provocation par le gouvernement américain, cet incident précipite l'intervention militaire en faveur des insurgés, lancée le 11 avril 1898 par le président William McKinley, contre le gouvernement espagnol. La reddition de l'armée espagnole est rapide, le traité de Paris (1898) du 10 décembre met fin au conflit ; un gouvernement militaire d'occupation est mis en place par les États-Unis jusqu'en 1902.
[modifier] La République de Cuba sous la constitution de 1901
Le 20 mai 1902, les forces armées des États-Unis évacuent pour l'essentiel le territoire cubain et la République de Cuba est officiellement créée. Pour la première fois de leur histoire, l’indépendance des Cubains est reconnue formellement, mais aux termes de L'amendement Platt, du sénateur américain Hitchcock Platt, les États-Unis conservent des bases navales – Guantanamo et Bahía Honda – et sont garants de la constitution, avec le droit d’intervenir dans les affaires du pays en cas d'effondrement constitutionnel.
Officiellement les Américains se retirent de l’île, mais leurs investissements y sont considérables, le commerce de Cuba est largement tourné vers les États Unis avec des exportations de canne à sucre et des importations industrielles, et l'amendement Platt complète ce dispositif jusqu'en 1933. L'influence états-unienne restera forte jusqu'en 1959.
La démocratie cubaine est encore balbutiante. À la demande des dirigeants cubains, quatre interventions militaires américaines auront lieu en 1906, 1909, 1917 et 1919. Ces interventions répondent à de réelles crises constitutionnelles cubaines. En 1906 le premier président de Cuba Tomás Estrada Palma souhaitait se représenter alors que la constitution ne prévoyait pas explicitement ce cas, engendrant une vive contestation de l'opposition. En 1917 les États Unis ont restauré dans ses fonctions le président élu face au soulèvement des partisans du précédent président.
La monoculture du sucre, bénéficiant de tarifs préférentiels de la part des États-Unis, engendre une prospérité rapide mais aussi une dépendance grandissante à l’égard de la puissance voisine. L'immigration haïtienne se développe, encouragée par des entrepreneurs avides de main d'œuvre bon marché. La première guerre mondiale draine d'immense capitaux aux Amériques et rend inutilisable une part importante des champs de betterave sucrière européens. Les cours du sucre s'envolent de façon fabuleuse : c'est la "danse des millions". Des fortunes immenses se créent, mais aussi de nombreux entrepreneurs s’endettent et se lancent dans des investissements considérables.
Avec la fin de la première guerre mondiale, la production européenne reprend un cours normal, engendrant un effondrement des cours du sucre. Les faillites sont nombreuses à Cuba. Les États Unis sont tentés par un retour à une politique protectionniste. La situation s'aggrave encore avec la crise de 1929. Un chômage massif fait son apparition. Durant une décennie, Cuba plonge dans une situation sociale explosive, une situation économique problématique, une situation politique dangereuse. Le banditisme se répand dans les campagnes. Les grèves se multiplient, les manifestations sociales tournent à l'émeute et sont réprimées souvent dans le sang. Durant cette période les organisations syndicales gagnent une influence considérable. À partir de 1933, les protections sociales seront multipliées, avec pour aboutissement la constitution démocratique sociale et nationaliste de 1940.
Durant sa présidence, le général Gerardo Machado, président élu (1925-1929), réprime durement les émeutes. Pour plusieurs d'entre elles, de nombreux cadavres jonchent le sol. Devant la situation qui menace la stabilité de la république cubaine, il demande et obtient du parlement une prolongation exceptionnelle sans élection (1929-1933 de son mandat présidentiel. Des opposants, notamment au sein des mouvements sociaux, parlent de dictature. Des mouvements clandestins se créent et se lancent dans la lutte armée avec notamment l'assassinat de proches de Gerardo Machado. Les dirigeants anarcho-syndicalistes qui dominent le paysage cubain des mouvements sociaux et se lancent dans la lutte armée ou les émeutes récurrentes sont décimés. Les anarcho-syndicalistes perdent peu à peu leur influence au bénéfice de leurs adversaires acharnés les communistes qui affichent des dispositions respectueuses de la constitution. L'escalade de la violence, sur fond de crise sociale et économique achève de faire s'effondrer le régime. À la suite de plusieurs grèves générales, certaines d’entre elles réprimées dans le sang avec des centaines de morts, Gerardo Machado est contraint à la fuite le 12 août 1933, laissant un vide politique vertigineux.
L’ambassade états-unienne, conformément à la constitution cubaine et son amendement Platt, nomme un président et choisit Carlos Miguel de Cespedes, fils du "père de la patrie" cubaine. en dépit de sa légitimité historique, celui-ci ne dispose pas de l'assise politique nécessaire notamment au sein des mouvements d'opposition qui se sont développés face à Gerardo Machado, et d'autre part le nationalisme cubain et l'anti-états-unisme se sont exacerbés durant la crise sociale, déconsidérant l'initiative états-unienne qui repose sur l'amendement Platt qui leur est odieux.
Des rumeurs courent faisant état d'un coup d'état en préparation par les officiers de l'armée cubaine. Au milieu de cette situation très confuse, le 3 septembre 1933 les sous-officiers prennent le pouvoir avec un coup d'état lancé pour des motifs corporatistes (solde, avancement, relations avec les officiers), avec à leur tête deux hommes, Pablo Rodrigez et Fulgencio Batista, sergent auto-proclamé colonel. Celui-ci est contacté par les opposants à Gerardo Machado, notamment les organisations syndicales ou étudiantes et négocie avec eux un accord. Il devient l'homme fort du pays, nommé chef des armées et il remet le pouvoir politique à cinq civils, dont Grau San Martín, tout en procédant de temps à autre à des purges au sein de l'armée affermissant ainsi son pouvoir.
Le général Gerardo Machado était despotique, pro-américain, et honnête. La jeune génération des opposants sera démocrate, anti-américaine, et sans passion particulière pour l’honnêteté ; ceux-là viendront au pouvoir dans les années 1940.
De 1933 à 1940, Fulgencio Batista fait et défait une demi-douzaine de présidents cubains. Face aux insurrections éparses, aux émeutes sociales, à la violence dans les campagnes, aux difficultés économiques, Fulgencio Batista utilise la force armée pour rétablir l'ordre, parfois durement, négocie avec les communistes disciplinés qu'il promeut contre les anarcho-syndicalistes qu'il juge trop souvent lancés dans la violence erratique, et utilise son influence en faveur de la multiplication des protections sociales et nationalistes dans le but de restaurer la paix sociale et la solidarité nationale cubaine, allant jusqu'à exercer des pressions contre les responsables politiques qui voudraient s'opposer à cette politique sociale et nationaliste. Cette politique trouva sa consécration avec la constitution démocratique sociale et nationaliste de 1940, et l'élection démocratique de Fulgencio Batista à la présidence.
Grau San Martín, inconnu du grand public avant les événements de septembre 1933, sera président de septembre 1933 à janvier 1934. Grau San Martín lance avec son bras droit Antonio Guiteras d'importantes réformes : droit de vote des femmes, autonomie universitaire, limitation du travail hebdomadaire à 48 heures, début de réforme agraire, création d’un ministère du travail, nationalisation de l’électricité, et nationalisme selon le slogan "Cuba au cubains". Un quota d'emploi fut réservé aux cubains. De nombreux immigrés notamment espagnols ou haïtiens perdirent ainsi soudainement leur emploi, certains d'entre eux après plusieurs décennies de présence à Cuba. Il suspendit le paiement de la dette du pays. Il abrogea unilatéralement l'amendement Platt le 10 septembre 1933. Son gouvernement ne fut pas reconnu par Washington. Ses relations avec Fulgencio Batista se dégradèrent notamment à l'issue de certaines insurections que Fulgencio Batista réprima. Celui-ci fit pression et Grau San Martín démissionna, sans réaction politique majeure du pays. Son gouvernement n'avait duré que quatre mois. Il reste en politique et fonde le Parti Authentique.
Le colonel Carlos Mendieta lui succède. Il négocie avec les États-Unis leur accord pour la révocation de l’amendement Platt promulguée unilatéralement par le gouvernement Grau San Martín. Les États Unis conservent toutefois leur base navale de Guantanamo.
Les élections de 1936 portent à la présidence Miguel Mariano Gómez (1936). Celui-ci cherche à restaurer le pouvoir civil face à Fulgencio Batista. Il oppose son droit de veto à un projet de réforme sociale de celui-ci. Quelques mois plus tard, le congrès estime qu'il s'est opposé au libre fonctionnement du pouvoir législatif et vote sa destitution. Miguel Mariano Gómez proteste et souligne que cette décision revient à abdiquer face à l'influence du pouvoir militaire.
Le vice-président Laredo Brú (1936-1940) lui succède. Il ne s'opposera pas aux visées de Fulgencio Batista qui poursuit ses visées sociales.
En 1938, le PSP, parti communiste cubain, affichant officiellement une renonciation au totalitarisme, à la violence révolutionnaire et à toute inféodation à l'URSS, est légalisé. Les dirigeants communistes avaient déjà pris une influence dominante au sein des organismes sociaux, notamment avec l'aide de Fulgencio Batista dont le PSP louera très officiellement les qualités jusqu'à la prise de pouvoir de Fidel Castro aux derniers jours de 1959, alors que les réseaux communistes liés aux KGB, dont quelques dirigeants du PSP triés sur le volet, soutiendront et structureront parallèlement la guérilla de celui-ci.
[modifier] La République de Cuba sous la constitution de 1940
En 1940, la politique de Fulgencio Batista trouve sa consécration avec une nouvelle constitution protégeant les libertés publiques, prévoyant des garanties constitutionnelles ainsi que la possibilités de les suspendre en cas de menace sur la sécutié de l'état, dotée de nombreuses protections sociales dont salaire minimum, durée du travail, congés payés, réglementation du licenciement, assurances maladie et chômage, financement des retraites.
En 1940 Fulgencio Batista est démocratiquement élu président de la république de Cuba.
Les élections de 1944 verront le retour de Grau San Martín (1944-1948) avec son Parti Authentique.
En 1948, Prío Socarras (1948-1952) est élu.
Ces présidences seront placées sous le signe d'une économie florissante, d'accusations de corruption, du développement de bandes rivales d'étudiants armés liées aux deux partis Authentique et Orthodoxe, profitant du statut d'autonomie de l'Université et de l'indulgence apparente du pouvoir politique.
A cette époque, Cuba est devenu un pays relativement riche, au PIB par habitant comparable à celui de l'Espagne et de l’Italie. L'ouest de Cuba, et particulièrement l'agglomération de La Havane ont un niveau de vie qui rappelle celui des États Unis d'Amérique. L'est de Cuba est plus pauvre avec un peuple de paysans pauvres souvent illettrés, dont de nombreux immigrés haïtiens.
[modifier] Le régime de Batista
Le 10 mars 1952, l’ancien président Fulgencio Batista s’empare une nouvelle fois du pouvoir avec l’appui de l’armée. Son coup d’État met fin à la constitution, les partis politiques sont proscrits, la corruption est portée à son degré le plus élevé, la répression et le pillage atteignent un paroxysme. La population souffre, notamment les noirs et les habitants de la campagne. Il y a deux cent mille familles de paysans qui n’ont pas un centimètre de terrain où semer quelque chose pour nourrir leurs enfants sous-alimentés alors que plus de la moitié des meilleures terres productives sont aux mains des étrangers. Le pays compte, par ailleurs, 500 000 paysans, surexploités quatre mois par an et chômeurs le reste de l’année. De plus, 85% des petits agriculteurs cubains paient un loyer et vivent sous la menace constante de se voir expulser de leurs parcelles et 45% de la population est analphabète. Les écoles et les hôpitaux sont souvent absents des campagnes.
Les entreprises américaines dominent tout le spectre de l’activité économique dans l’île, faisant de Cuba un appendice des États-Unis. Ils contrôlent 90% de l’industrie du sucre, 80% des services publics, 50% des chemins de fer et la totalité des ressources pétrolières. Près de 44% des terres appartiennent à des Américains. Cuba est alors une véritable République bananière, influencée par les intérêts étrangers et commerciaux de plusieurs grandes entreprises dont la United Fruit Company.
À La Havane l’industrie du vice se développe ; maisons de loteries et de prostitution, night-clubs et casinos abondent. La ville devient la capitale latino-américaine de la prostitution et les touristes américains y affluent, d’où son surnom de « bordel de l’Amérique ».
[modifier] La révolution castriste
Fidel Castro, un jeune avocat d'une famille riche, qui était alors candidat à la Chambre des Représentants pour le Partido Ortodoxo, fait circuler une pétition pour destituer le gouvernement de Batista à cause de l'annulation illégitime du processus électoral. Le 26 juillet 1953, Castro mène une attaque historique contre une caserne (Moncada Barracks) près de Santiago de Cuba, mais l'attaque échoue et Castro, après un procès en huis clos au cours duquel il se défend seul, est emprisonné jusqu'en 1955, date à laquelle une amnistie est accordée à beaucoup de prisonniers politiques, incluant ceux qui avaient mené l'assaut de 1953.
Par la suite, Castro s'exile au Mexique où il rencontre un jeune médecin argentin, Ernesto Che Guevara. De là-bas, il organise le mouvement du 26 juillet dont le but est de renverser Batista. Un groupe d'environ 80 hommes prend la mer à bord du bateau "Granma" pour Cuba et débarque sur la partie orientale de l'île en décembre 1956. La plus grande partie des membres du commando (les barbudos) sont tués, ou faits prisonniers par l'armée de Batista dès leur débarquement. Castro trouve refuge dans les montagnes de la Sierra Maestra avec le restant du commando, soit entre 12 et 17 membres dont Che Guevara. Les barbudos mènent une guerilla contre le pouvoir pendant deux ans. Peu de temps avant l'entrée des insurgés dans La Havane, Batista s'enfuit le 1er janvier 1959. Le nouveau régime doit combler un vide politique et organise les premières exécutions sommaires (partisans de Batista)[3]. En avril 1959, Castro se rend aux États-Unis pour assurer qu'il ne choisira par le communisme : à ce moment-là, il n’est ni un communiste ni partisan d’une rupture avec Washington[4].
En juillet 1961, l'organisation intégrée révolutionnaire (ORI) voit le jour, née de la fusion du mouvement du 26 juillet de Castro, du Parti socialiste du peuple (l'ancien parti communiste) mené par Blas Roca et de directoire révolutionnaire du 13 mars de Faure Chomon. Le 26 mars 1962, l'ORI devient le Parti unique de la révolution socialiste cubaine (PURSC), puis le Parti communiste de Cuba le 3 octobre 1965 avec Castro comme premier secrétaire.
[modifier] L'ère communiste
Les relations entre les États-Unis et Cuba se détériorent rapidement à la suite de l'expropriation des compagnies américaines, notamment de l'International Telephone and Telegraph Company et de l'United Fruit Company en réaction au refus américain de raffiner le pétrole soviétique dans les raffineries situées dans l'île. Le 17 mai 1959, une réforme agraire redistribue les terres aux paysans pauvres cubains. En compensation, le gouvernement cubain offre de dédommager les propriétaires terriens mais en réalité, peu ou aucune de ces compensations ne sont payée. En octobre 1959, Castro fait arrêter Huberto Matos, commandant de l'armée de l'air, parce que ce dernier critique l'influence croissante des communistes à Cuba. Durant l'automne 1960, Castro crée des Comités de Défense de la Révolution (C.D.R.) qui lui permettent d'encadrer et de surveiller la population. Des mesures autoritaires furent rapidement prises : censure de la presse, mise au pas de la justice et des syndicats, etc.
En réponse à la saisie des entreprises américaines, de la répression croissante du gouvernement castriste vis-à-vis de la population et du rapprochement avec l'URSS, les États-Unis rompent les relations diplomatiques le 3 janvier 1961 et imposent un embargo contre Cuba le 3 février 1962. L'embargo est toujours en place en 2006, bien que l'importation à but humanitaire de nourriture et de médicaments soit désormais autorisée. Au départ, l'embargo ne s'étendait pas à d'autres pays et permettait ainsi à l'île de commercer avec l'Europe, l'Asie et l'Amérique latine et particulièrement le Canada. Mais les États-Unis ont par la suite fait pression sur les autres pays pour restreindre le commerce vers Cuba à l'aide de subventions. La loi Helms-Burton de 1996 rendit très difficile le commerce des entreprises américaines ou non de commercer avec les États-Unis et avec Cuba, forçant les entreprises à choisir entre ces deux destinations.
L'établissement d'un système marxiste dans l'île se traduit par l'émigration de plusieurs centaines de milliers de Cubains vers les États-Unis et d'autres pays. Une exception à l'embargo fut faite par la mise en place le 6 novembre 1965 d'un pont aérien entre les deux pays permettant aux Cubains qui le souhaitaient de quitter le pays. En 1971, date de la fin du pont aérien, ces « Freedom flights » ont transporté 250 000 Cubains. De nos jours, une loterie à l'immigration est organisée permettant à 20 000 Cubains demandant l'asile politique de s'installer aux États-Unis chaque année.
[modifier] Le débarquement de la baie des Cochons

Une nouvelle étape est franchie à la suite d'une attaque de dissidents contre le régime castriste soutenue par les États-Unis. L'attaque débute le 15 avril 1961 avec le bombardement, de la part d'exilés cubains à bord de B-26 de l'US Air Force camouflés aux couleurs cubaines, des bases aériennes de La Havane et de Santiago. Cette attaque ne permet pas de détruire l'ensemble des forces aériennes de l'île. En réponse, Castro déclare le socialisme à Cuba dans un discours tenu au lendemain de l'attaque. Le 17 avril, environ 1500 exilés cubains, financés et entraînés par la CIA, débarquent au sud de l'île, dans la baie des Cochons. Le plan de la CIA était que l'invasion profiterait du soutien de la population contre le régime castriste. Les forces castristes averties de l'attaque avaient arrêté préventivement plusieurs centaines de milliers de personnes suspectes[5]. Il n'y eut pas le soulèvement populaire escompté par les stratèges américains. Le refus du président Kennedy de permettre aux forces navales américaines d'apporter un soutien aérien signa la fin des opérations. De nombreuses personnes pensent, qu'au lieu d'avoir affaiblit le régime castriste, cet échec de tentative d'invasion a consolidé le pouvoir en place.
Pendant les trente années qui suivent, Castro poursuit le rapprochement vers l'URSS jusqu'à l'effondrement de l'Union soviétique en 1991.
L'organisation des états américains (OEA), sous la pression des États-Unis, suspend l'adhésion de Cuba le 22 janvier 1962 et le gouvernement américain interdit tout commerce avec Cuba le 7 février. L'administration de Kennedy rend illégales le 8 février 1963 les transactions commerciales et financières ainsi que tous déplacements d'Américains à Cuba [6].
[modifier] La crise des missiles

Les tensions entre les deux pays atteignent leur paroxysme lors de la crise des missiles d'octobre 1962. Cuba accepte secrètement que les soviétiques installent des missiles balistiques à moyenne portée sur son territoire. Dès que les États-Unis découvrent ce qui se trame, ils mettent en place un blocus naval autour de l'île en empêchant physiquement les navires soviétiques d'apporter de nouveaux missiles. Au dernier moment Moscou décide de rappeler les navires et d'enlever les missiles qui étaient déjà en place, en échange de la promesse que les États-Unis n'envahissent pas Cuba. Les négociations durent plusieurs jours au cours desquels une guerre nucléaire semble imminente. Après la chûte de l'Union soviétique, on découvre qu'une autre partie de l'accord prévoyait le démantèlement des missiles américains installés en Turquie. Les archives révèlent également que certains sous-marins bloqués par les navires américains étaient dotés de missiles nucléaires dont la décision de lancer les armes était laissée à la discrétion des capitaines des sous-marins. Les États-unis ont honoré cet accord en n'attaquant plus directement Cuba, mais la CIA a continué à soutenir des groupes anti-castristes et plusieurs assassinats au cours des années 60.
[modifier] Exportation de la révolution
Dès les années 1960, Cuba soutient de façon plus ou moins discrète des mouvements de guérillas communistes en Amérique Latine (Venezuela, Guatemala, Bolivie) et en Afrique comme par exemple, l'envoi d'un bataillon de vingt-deux char T-55 et de plusieurs centaines de soldats en Algérie en 1963 dans le cadre d'un conflit frontalier avec le Maroc. À partir de 1975, l'armée Cubaine intervient de façon directe et massive dans des conflits sur ce dernier continent. Cuba envoie en été 1975 des conseillers militaires au MPLA (Mouvement populaire de libération de l'Angola) qui ont pris le pouvoir en Angola à la suite de l'indépendance. En novembre, cela sera des unités régulières. Il y a jusqu'à 50 000 hommes en permanence, et 300 000 soldats cubains auront été présents en treize ans. L'armée cubaine dispose de son propre état-major et constitue de fait la principale force militaire du MPLA avec des régiments d'artillerie et des blindés engagés, tandis que les forces du MPLA constituent l'infanterie chargée des ratissages, etc. L'URSS se charge du pont aérien, et fournit également des avions MiG-21 avec des pilotes à l'armée cubaine. Cuba prétexte que l'Angola est menacée par l'Afrique du Sud. Mais Cuba envoie également des troupes en Éthiopie en 1977, à partir du moment où la junte militaire qui a pris le pouvoir a décidé de se mettre sous la coupe de l'URSS. Au cours d'une de ces campagnes, Ernesto Che Guevara est fait prisonnier en Bolivie en 1967 et exécuté sans procès.
[modifier] Cuba après la chute de l'Union soviétique
Après la chute de l'URSS, le pays connaît une grave crise économique du fait de la forte concentration de la production cubaine centrée sur quelques produits et quelques acheteurs, dont l'URSS représente le principal partenaire commercial. 80% du commerce est perdu ce qui entraîne une dégradation des conditions de vie. Une "période spéciale" est mise en place qui se traduit par un rationnement des transports, de l'électricité et de la nourriture. Les États-Unis renforcent l'embargo pensant accélèrer la chute du régime castriste.
Castro ouvre le pays au tourisme en permettant des joint ventures avec des compagnies étrangères dans les domaines de l'hotellerie, de l'agriculture et de l'industrie. Le dollar est même légalisé en 1994 avec des magasins spéciaux acceptant uniquement cette devise. Dès lors, deux économies coexistent, l'économie en dollar et l'économie en péso, créant une rupture sociale entre, les riches ou les personnes ayant la chance de travailler dans le tourisme qui ont des dollars et le reste de la population. En octobre 2004, le gouvernement cubain annonce la fin de cette politique. Le dollar n'a plus cours dès novembre 2004, et sont échangés contre des pesos convertibles avec une commission de 10%.
Les pénuries de nourritures et les coupures d'électricité conduisent à des manifestations et à une augmentation des crimes. En réponse, le gouvernement forme des centaines de brigades d'action rapide.
En 1997, un groupe mené par Vladimiro Roca, vétéran de la guerre d'Angola, décoré à cette occasion et fils du fondateur du Parti communiste cubain, envoie une pétition, intitulée La Patria es de Todos à l'assemblée générale cubaine réclamant des réformes démocratiques et le respect des droits de l'Homme. Roca et trois de ses associés, appelés "groupe des quatre", sont mis en prison.
En 2001, un groupe appuyé par l'église catholique collecte des milliers de signatures pour le projet Varela. La pétition réclame l'organisation d'un référendum sur le système politique de l'île. Cette action est ouvertement soutenue par l'ancien président des États-Unis Jimmy Carter au cours de sa visite dans l'île en 2002. La pétition est finalement rejetée pour des raisons techniques. En réponse, Castro organise un plébicite qui proclame que le socialisme à Cuba sera éternel.
En 2003, 75 activistes anti-castriste sont arrêtés, sommairement jugés et condamnés à de lourdes peines de prison. Les officiels cubains déclarent que c'est une réponse aux provocations américaines qui sont accusés d'avoir organisés des réunions et des conférences de presse avec les dissidents. La répression est très critiquée par les organisations de droits de l'Homme et même par certains défenseurs américains du régime cubain.
[modifier] Les cinq de Miami
De nombreux attentats furent commis contre Cuba, parmi lesquels des hôtels furent victimes d'attentats à la bombe et un avion de ligne cubain explosât en plein vol le 6 octobre 1976. Ses 73 passagers moururent. Derrière ces attentats se trouvent deux terroristes formés par la CIA: Orlando Bosch et Luis Posada Carriles. Cuba envoyât cinq cubains pour infiltrer l'extrême droite cubaine à Miami.
Un de ceux-ci, Fernando González, avait pour mission de surveiller Orlando Bosch. Leur mission était de réunir des informations sur de futures attaques terroristes. Le 16 juin 1998, le gouvernement cubain a remis à une délégation du FBI qui s'était déplacée à la Havane des renseignements précis, avec des films, des enregistrements et même des preuves matérielles, des échantillons d’explosifs au sujet des activités de 40 terroristes cubano-américains notoires, présents en territoire nord-américain et impliqués dans des plans criminels dirigés contre l’île.
Les 12 et 13 juillet 1998, le quotidien The New York Times publiait une interview de Luis Posada Carriles, interview dans laquelle celui-ci reconnaît être l'auteur des attentats de la Havane et que la Fondation nationale cubano-américaine (FNCA) de Miami avait décidé et financé l’opération.[7] Le 12 septembre 1998, le chef du FBI de Miami, Hector Pesquera, fait arrêter et enfermer les cinq cubains. Ils passèrent 17 mois en isolement dans des cellules spéciales et ils furent condamnés en décembre 2001 par un tribunal de Miami à des peines allant de 15 ans de prison à deux fois la prison à vie. Ils furent déplacés dans 5 prisons différentes.[8]
Le procès a été annulé par la Cour d’appel d’Atlanta, mais les cinq sont toujours en prison car le procureur à demandé au même tribunal une révision de son jugement. Le Vénézuéla et Cuba ont chacun demandé l'extradition d'Orlando Bosch et Luis Posada Carriles. Les USA refusent de les extrader.
[modifier] Références
- ↑ Source:Encarta
- ↑ Le conquistador Diego Velázquez de Cuéllar fonde la première ville de La Havane sur la côte sud de l'île de Cuba en 1515, mais la déplacera à sa position actuelle en 1519.
- ↑ Olivier Dabène, L'Amérique latine à l'époque contemporaine, Paris, Armand Colin, 2003, page 117 ; lire aussi Marita Lorenz, Cher Fidel, Paris, L'Archipel, 2001, page 62
- ↑ S. Bernstein, P. Milza, Histoire du XXe siècle, Paris, Hatier, 1996, p.245
- ↑ Priestland, 2003
- ↑ Source: Priestland, Jane (editor) 2003 British Archives on Cuba: Cuba under Castro 1959-1962. Archival Publications International Limited, 2003, London ISBN 1903008204
- ↑ Quand Bush sauve un terroriste et séquestre ceux qui le poursuivent, Allard Jean-Guy
- ↑ http://vdedaj.club.fr/spip/article.php3?id_article=336
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article en anglais : « History of Cuba. »
[modifier] Voir aussi
[modifier] Bibliographie
- Pierre Rigoulot, Coucher de soleil sur La Havane : La Cuba de Castro 1959-2007, Flammarion, 2007 (ISBN 2080684078)
- Serge Raffy, "Castro l'infidèle", éd. Livre de Poche, 2006, 699 p., ISBN 978-2-253-09946-8