René-Guy Cadou
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René Guy Cadou est un poète français, né le 15 février 1920 à Sainte-Reine-de-Bretagne en Loire-Atlantique et décédé le 20 mars 1951 à Louisfert également en Loire-Atlantique.
Né au cœur du marais de Grande Brière il est fils d’instituteurs laïques et vit une enfance heureuse. C'est dans cette ambiance de préau d’écoles, de rentrée des classes, de beauté des automnes, de scènes de chasse et de vie paysane qui seront une des sources de son inspiration poétique : « Mon père s’y plaisait en costume de chasse, Nous y avions de tendres rendez-vous… » Puis viendra à l’adolescence, le départ à Nantes pour le lycée, la mort de sa mère Anna, qui plongera l’adolescent dans une mélancolie profonde. La nostalgie de Sainte Reine et de cette enfance terrienne, végétale et heureuse hantera plus tard sa poésie lyrique.
En 1936, Cadou fait la rencontre de Michel Manoll, qui l'introduit dans les milieux poétiques et lui fait connaître notamment Max Jacob et Pierre Reverdy. La première publication ne tardera guère : Brancardiers de l'Aube, en 1937, et ce seront désormais des années de poésie ardente, où l'ivresse de la création viendra se heurter à de nouvelles épreuves : la mort du père, la guerre, la débâcle. Mobilisé en juin 40, Cadou échoue dans la retraite, à Navarrenx puis à Oloron-Sainte-Marie où, malade, il est hospitalisé. Réformé le 23 octobre, il regagne la région nantaise où le hasard de ses nominations en tant qu'instituteur suppléant le conduit aux quatre coins du département (Bourgneuf notamment en 1941 où un buste de lui sera érigé, ...). La poésie des premiers recueils est sans doute dominée par l’influence de Pierre Reverdy. L’expérience de la guerre l’orientera vers une expression beaucoup plus poignante et personnelle face à l’horreur : « Pleine Poitrine » marquera cette rupture avec le ton plus abstrait et reverdien des premiers recueils.
Le 22 octobre 1941 trois camions bâchés roulent vers la Sablière de Châteaubriant, transportant les 27 otages qui seront fusillés quelques instants plus tard : l’instituteur Cadou rejoint alors en vélo l’école de village où il enseigne et croise le chemin des otages. Les poèmes de « Pleine Poitrine » s’ancreront sur cet épisode terrible de la barbarie nazie, pour revendiquer dans ce ton si personnel de la poésie de Cadou, la liberté, l’amour, la fraternité des hommes…
C’est à Rochefort-sur-Loire, dans l’arrière boutique de la pharmacie de Jean Bouhier, que se retrouveront un groupe de jeunes poètes, en rupture avec le conformisme littéraire du régime de Vichy, et qui revendiqueront le droit de chanter l’amour de la vie. On y comptera René Guy Cadou, Jean Rousselot, Jean Bouhier, Luc Bérimont qui fera plus tard comme écrivain et journaliste littéraire, tant pour faire connaître les poètes et la chanson poétique à texte, Marcel Béalu, Michel Manoll… Rochefort, une école littéraire ? Cadou avait l’habitude de répondre « tout juste une cour de récréation ».
Le 17 juin 1943, il rencontre une jeune fille à Nantes native de La Bernerie, Hélène Laurent, elle-même poète qu'il devait épouser en 1946 et qu'il célébra dans "Hélène ou le règne végétal". Nommé instituteur titulaire à Louisfert en octobre 1945, Cadou s'y installe et mène avec les gens du village, la vie simple du maître d'école en sabots et pélerine; et c'est la kyrielle des copains, "Les Amis de haut bord" qui, la classe terminée viennent saluer le poète. C’est après la classe que l’instituteur-poète pose la blouse grise et monte dans la chambre de veille : Cadou sait que le temps lui est compté, c’est dans cette petite chambre, qui s’avance telle la proue d’une navire sur « la grande ruée des terres » qu’il écrira en cinq ans une œuvre lyrique de première importance.
Mais bientôt la maladie va faire son œuvre inéluctable : interventions chirurgicales en janvier et mai 1950 suivies d'une période de rémission qui ne durera que le temps d'un été. Quelques jours après avoir signé Les Biens de ce Monde, René Guy Cadou meurt dans la nuit du 20 mars 1951, entouré d'Hélène et de Jean Rousselot qui était venu le voir par hasard. Il dit à ceux qu'il aime, continuez... "Le temps qui m'est donné que l'amour le prolonge."
[modifier] Œuvres de René Guy Cadou
- Brancardiers de l'aube (Les feuillets de l'Ilôt - 1937)
- Forges du vent (Sagesse - 1938)
- Retour de flamme (Les Cahiers de la Pipe en écume - 1940)
- Années-lumière (Cahiers de Rochefort - 1941)
- Morte-saison (Robert Debresse - 1941)
- Porte d'écume (Proses - Cahiers de Rochefort - 1941)
- Bruits du cœur (Les Amis de Rochefort - 1942)
- Lilas du soir (Les Amis de Rochefort - 1942)
- Amis les Anges (Cahiers de Rochefort - 1943)
- Grand élan (Les Amis de Rochefort - 1943)
- La vie rêvée (Robert Laffont 1944)
- Testament d'Apollinaire (Robert Debresse - 1945)
- Pleine poitrine (P. Fanlac - 1946)
- Les visages de solitude (Les Amis de Rochefort - 1947)
- Lettre à Jules Supervielle (Sylvain Chiffoleau - Nantes 1947)
- Quatre poèmes d'amour à Hélène (Les Bibliophiles alésiens - 1948)
- Guillaume Apollinaire ou l'artilleur de Metz (Sylvain Chiffoleau - 1948)
- Saint-Antoine et Cie (Sylvain Chiffoleau - 1948)
- Les sept péchés capitaux (1949)
- Roger Toulouse (P.A.B Alès - 1949)
- Guy Bigot (Sylvain Chiffoleau - 1949)
- Art poétique (Sylvain Chiffoleau - 1949)
- Le Diable et son train (Chez l'auteur - 1949)
- Cornet d'adieu (Sylvain Chiffoleau - 1949)
- Poèmes choisis 1949-1950 (Sylvain Chiffoleau - 1950)
- Moineaux de l'an 1920 (Sylvain Chiffoleau - 1950)
- Avant-printemps (P.A.B. Alès - janvier 1951)
- Les biens de ce monde (Pierre Seghers - février 1951)
- Usage interne (Les Amis de Rochefort - 1951)
Les poèmes de René Guy Cadou ont, après sa mort, fait l'objet de nombreuses réimpressions chez différents éditeurs, notamment aux éditions Seghers qui ont repris son œuvre poétique complète sous le titre "Poésie, la vie entière".
Son unique roman "La maison d'été" a été publié pour la première fois en 1955 par les Nouvelles éditions Debresse, réédité par la suite chez d'autres éditeurs. Durant sa brève carrière, René Guy Cadou aura également collaboré à de nombreuses revues, anthologies, émissions radiophoniques...
Mise en musique des textes de Cadou:
La poésie de Cadou a une rythmique, une musique des mots, un rappel de rimes ou d’assonances qui permet naturellement un travail de mise en musique. Dans la poésie contemporaine on peut dire qu’il n’y a qu’un seul auteur, dont la parole se chante spontanément, qui ait poussé des auteurs compositeurs interprètes célèbres à écrire de la musique sur ses vers, c’est Louis Aragon. Cadou a suscité un engouement identique de la part de chanteurs poètes, les uns connus comme Servat ou Douai, d’autres qui n’ont pas fait ou n’ont pas pu faire de la chanson un métier et qui sont moins ou pas du tout connus. Parmi tous les interprètes de René Guy Cadou, nous avons recensé : Gilles Servat, Julos Beaucarne, Maurice Bénin, Martine Caplanne, Marc Robine, Jacques Douai, Eric Hollande, Robert Duguet, Michèle Bernard, Manu Lann Huel… Sans doute d’autres voix ne nous sont pas parvenues. Nous venons de trouver sur le web un projet musical pour 2007 de Paul Dirmeikis.
Le travail de mise en musique des textes de Cadou requiert une grande exigence. Nous sommes d’accord avec Paul Dirmeikis lorsqu’il écrit sur son site de présentation de son projet musical : « La tâche est ardue : mettre en musique la poésie de quelqu'un d'autre demande d'être en symbiose avec l'auteur, exige de l'humilité, ainsi qu'une certaine volonté d'abandonner ses propres "tics", son propre style afin de servir au mieux le texte, sa métrique, ses couleurs, ses élans. » Quelques sites sur la mise en musique de Cadou :
http://pdirmeikis.free.fr/Pages/entreparentheses.htm
http://perso.orange.fr/rduguet/index.htm
[modifier] Poèmes de René Guy Cadou
LOUISFERT
- Pieds nus dans la campagne bleue, comme un bon père
- Qui tient sa mule par le cou et qui dit des prières
- Je vais je ne sais rien de ma vie je vais
- Au bout de tout sans me soucier du temps qu'il fait
- Les gens d'aujourd'hui sont comme des orchidées
- Drôle de tête et les deux mains cadenassées
- Je marche dans le jour épais d'avant midi
- Pauvre fils de garce qui n'en a pas fini
- De mener ses chevaux sur la route sans ombre
- Qu'a grand'hâte et soif et ne salue personne
- Car j'aime ce village emmuré de forêts
- Et ses très vieilles gens comme des pots de grès
- Qui tendent leur oreille aux carrefours des routes
- Avec des mouvements qui font croire qu'ils doutent
- J'ai choisi mon pays à des lieues de la ville
- Pour ses nids sous le toit et ses volubilis
- Je vais loin dans le ciel et dans la nuit des temps
- Je merche les pieds nus comme un petit enfant
Automne
- Odeur des pluies de mon enfance
- Derniers soleils de la saison !
- A sept ans comme il faisait bon,
- Après d'ennuyeuses vacances,
- Se retrouver dans sa maison !
- La vieille classe de mon père,
- Pleine de guêpes écrasées,
- Sentait l'encre, le bois, la craie
- Et ces merveilleuses poussières
- Amassées par tout un été.
- O temps charmant des brumes douces,
- Des gibiers, des longs vols d'oiseaux,
- Le vent souffle sous le préau,
- Mais je tiens entre paume et pouce
- Une rouge pomme à couteau.
Pourquoi n'allez-vous pas à Paris ?
- - Pourquoi n'allez-vous pas à Paris?
- - Mais l'odeur des lys! Mais l'odeur des lys!
- - Les rives de la Seine ont aussi leurs fleuristes
- - Mais pas assez tristes oh! pas assez tristes!
- Je suis malade du vert des feuilles et des chevaux
- Des servantes bousculées dans les remises du château
- - Mais les rues de Paris ont aussi leurs servantes
- - Que le diable tente ! que le diable tente !
- Mais moi seul dans la grande nuit mouillée
- L'odeur des lys et la campagne agenouillée
- Cette amère montée du sol qui m'environne
- Le désespoir et le bonheur de ne plaire à personne
- - Tu Périras d'oubli et dévoré d'orgueil
- - Oui mais l'odeur des lys la liberté des feuilles !
Je t’attendais…
- Je t'attendais ainsi qu'on attend les navires
- Dans les années de sécheresse quand le blé
- Ne monte pas plus haut qu'une oreille dans l'herbe
- Qui écoute apeurée la grande voix du temps
- Je t'attendais et tous les quais toutes les routes
- Ont retenti du pas brûlant qui s'en allait
- Vers toi que je portais déjà sur mes épaules
- Comme une douce pluie qui ne sèche jamais
- Tu ne remuais encore que par quelques paupières
- Quelques pattes d'oiseaux dans les vitres gelées
- Je ne voyais en toi que cette solitude
- Qui posait ses deux mains de feuille sur mon cou
- Et pourtant c'était toi dans le clair de ma vie
- Ce grand tapage matinal qui m'éveillait
- Tous mes oiseaux tous mes vaisseaux tous mes pays
- Ces astres ces millions d'astres qui se levaient
- Ah que tu parlais bien quand toutes les fenêtres
- Pétillaient dans le soir ainsi qu'un vin nouveau
- Quand les portes s'ouvraient sur des villes légères
- Où nous allions tous deux enlacés par les rues
- Tu venais de si loin derrière ton visage
- Que je ne savais plus à chaque battement
- Si mon coeur durerait jusqu'au temps de toi-même
- Où tu serais en moi plus forte que mon sang.
- In Hélène ou le règne végétal (Seghers 1952)
[modifier] Liens externes
- Site de l'Académie de Rennes - Lettre de Bretagne René Guy Cadou
- Site Bretagne.com - Biographie de René Guy Cadou
- Site esprits nomades - Poème de Cadou
- Guy CADOU-a-Louisfert-en.html Site terres d'écrivains - Cadou à Louisfert-en-Poésie
- Hommage de Gilles Servat
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