Démocrite d'Abdère
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Démocrite (en grec Δημόκριτος / Dêmókritos), né vers -470 - -460 à Abdère et mort vers -370 - -360, était un philosophe grec souvent considéré comme un Présocratique.
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[modifier] Biographie
Démocrite, troisième fils d'Hégésistrate, d'Athénacrite ou de Damasippe, est né à Abdère, ou peut-être à Milet, dans la 80e olympiade (460–457) ou, selon d'autres, dans la 77e (en 470 - 469). Il serait mort à l'âge de 103 ans (entre 366 et 356)
Selon Diogène Laërce, il fut éduqué par des mages du roi Xerxès Ier, qui lui apprirent la théologie et l'astronomie. Il devint le compagnon de Leucippe, qui était de 40 ans son aîné. D'après Antisthène de Rhodes (Diogène Laërce, IX, 34), Démocrite apprit la géométrie auprès des prêtres d'Égypte, et l'astrologie en Perse. Il aurait également voyagé en Inde, où il aurait rencontré les gymnosophistes, en Éthiopie et en Babylonie. Il semble donc avoir beaucoup voyagé, peut-être après avoir hérité d'une grande somme d'argent de son père. Il serait même allé à Athènes, rencontrant Socrate sans être connu de lui, car il ne désirait pas se faire connaître par mépris pour la gloire. Diogène Laërce nous dit ainsi que le personnage inconnu des Rivaux (dialogue apocryphe de Platon) qui discute de philosophie avec Socrate était peut-être Démocrite. Mais ce passage à Athènes était déjà considéré comme douteux dans l'Antiquité.
D'après Démétrios (Diogène Laërce, IX, 36), Démocrite, passionné de connaissances, s'enferma dans une maison pour étudier. Il connaissait la physique, l'éthique, les mathématiques, les arts, et possédait une vaste culture générale. Il semble avoir été un partisan des pythagoriciens, et il admirait Pythagore (un des ouvrages que l'on lui attribue a pour titre Pythagore, ou de l’état de la sagesse). Peut-être même fut-il en rapport avec Philolaos de Crotone.
Le savoir de Démocrite était donc immense :
« De tous mes contemporains j'ai parcouru la plus grande partie de la terre, en étudiant les sujets les plus grands. J'ai vu le plus de climats et de pays. J'ai entendu la plupart des hommes doctes, et personne encore ne m'a surpassé dans l'art de combiner les lignes et d'en démontrer les propriétés, pas mêmes les arpenteurs d'Égypte, avec qui j'ai passé cinq ans en terre étrangère. »
(Cité par Clément d'Alexandrie, Stromates, I, 15, 69)
Cette polymathie le fit surnommé la science (sophia).
De retour de ses voyages, ayant dilapidé sa fortune, il vécut dans la pauvreté, et fut entretenu par Damaste, son frère. Mais, après une lecture publique du Grand ordre du monde (par lui ou par un de ses parents), il fut récompensé de 500 talents.
D'autre part, Pline,(dans Histoire naturelle) lui prête (la même anecdote est attribuée à Thalès, en des termes légèrement différents) d'avoir prouvé à ses concitoyens qui « dénigraient les études auxquelles il se livrait » qu'il était capable de s'enrichir, mais que cela ne l'intéressait pas. Il le fit de la façon suivante : sur des considérations astrologiques, il prédit la hausse du cours de l'huile, acheta la plupart des stocks. Quand le cours remonta, les notables ne purent que constater son intelligence et, lorsqu'il rendit la marchandise sans demander le fruit de sa spéculation, sa sagesse.
Ses dons d'observations étonnaient ses contemporains, et plusieurs anecdotes sont rapportées à ce propos :
« On dit qu’une jeune fille accompagnait Hippocrate, et que le premier jour Démocrite lui dit « bonjour, vierge », et le lendemain « bonjour, femme ». Et en effet, la jeune fille avait perdu sa virginité pendant la nuit. »
Son caractère rieur devint légendaire et on l'opposa au caractère irritable d'Héraclite :
« Toute rencontre avec les hommes fournissait à Démocrite matière à rire. »
(Juvénal, Satires, X, V, vers 47)
Il devint aveugle, sans que l'on connaisse la cause exacte de sa cécité qui a pris, elle aussi, un tour légendaire :
« (...) Démocrite s'est volontairement privé de la lumière des yeux, parce qu'il estimait qu'en méditant sur les causes naturelles, ses pensées et ses réflexions auraient plus de vigueur et de justesse s'il les délivrait des entraves apportés par les charmes séducteurs de la vue. »
(Aulu-Gelle, Nuits attiques, X, 17)
Mais ce point est nié par Plutarque (De la curiosité, 12, 521).
Il mourut vers l'âge de 103 ans, et fut enterré aux frais de l'État. Il semble s'être laissé mourir (cf. Lucrèce, III, v. 1039), en mangeant de moins en moins, pour quitter la vieillesse qui affaiblissait sa mémoire, et mourut d'épuisement.
Sa renommée était immense et suscita la jalousie. Timon de Phlionte, très critique à l'égard de presque tous les philosophes, le célèbre ainsi :
« Ô le très sage Démocrite, maître du discours,
Parleur avisé, parmi les meilleurs que j'ai lus. »
[modifier] Physique
[modifier] Principes de la nature
Pour Démocrite, comme pour Leucippe, la nature est composée dans son ensemble de deux principes : les atomes (ce qui est plein) et le vide (ou néant). L'existence des atomes peut être déduite de ce principe : « Rien ne vient du néant, et rien, après avoir été détruit, n'y retourne. » Il y a ainsi toujours du plein, i.e. de l'être, et le non-être est le vide.
Les atomes sont des corpuscules solides et indivisibles, séparés par des intervalles vides, et dont la taille fait qu'ils échappent à nos sens. Décrits comme lisses ou rudes, crochus, recourbés ou ronds (ils sont infinis par leur forme, figure et grandeur), ils ne peuvent être affectés ou modifiés à cause de leur dureté.
Les atomes se déplacent de manière tourbillonaire dans tout l'univers, et sont à l'origine de tous les composés (du soleil à l'âme), ce qui comprend également tous les éléments (feu, eau, air et terre). Les atomes se meuvent éternellement dans le vide infini. Ils entrent parfois en collision et rebondissent au hasard ou s'associent selon leurs formes, mais ne se confondent jamais. La génération est alors une réunion d'atome, et la destruction, une séparation, les atomes se maintenant ensemble jusqu'à ce que une force plus forte vienne les disperser de l'extérieur. C'est sous l'action des atomes et du vide que les choses s'accroîssent ou se désagrègent : ces mouvements constituent les modifications des choses sensibles. Ces agglomérations et ces enchevêtrements d'atomes constituent ainsi le devenir. L'être n'est donc pas un, mais est composé de corpuscules.
Le vide est le non-être dans lequel se meuvent les atomes : il y a du vide non seulement dans le monde (intervalle entre les atomes), mais en dehors de lui. Ainsi, l'être et le non-être sont tout autant réels.
Les choses formées par les atomes présentent trois sortes de différences qui les constituent :
- le type > forme
- le contact mutuel > ordre
- la direction > position
[modifier] Cosmologie
Les mondes existent dans le vide et sont en nombre infini, de différentes grandeurs et disposés de différentes manières dans l'espace : ils sont plus ou moins rapprochés, et, dans certains endroits, il y a plus ou moins de mondes. Certains de ces univers sont entièrement identiques. Ces univers sont engendrés et périssables : certains sont dans des phases d'accroissement, d'autres disparaissent, ou bien encore ils entrent en collision les uns avec les autres et se détruisent. Les mondes sont ainsi gouvernés par des forces créatrices aveugles, et il n'y a pas de providence.
Dans certains de ces univers, on trouve des êtres vivants (animaux, plantes), d'autres en sont privés et sont privés d'eau (d'humidité).
Selon Démocrite, dans certains de ces univers, il n'y a ni soleil ni lune, et dans ceux qui en possèdent, ils sont de tailles différentes.
L'univers dans son ensemble se développe jusqu'à ce qu'il ne puisse plus rien englober.
[modifier] Psychologie
[modifier] Les dieux
[modifier] Biologie
Il exposa une hypothèse de génération spontanée des espèces vivantes.
Il inspira Lucrèce pour son ouvrage De la nature.
[modifier] Théorie de la connaissance
[modifier] La perception
Puisqu'il n'y a dans la nature que des atomes et du vide, les qualités sensibles sont des conventions. Les choses visibles, tout ce qui est perceptible par les sens, est constitué de corpuscules.
[modifier] La connaissance
Démocrite distingue deux formes de connaissance : la connaissance par les sens, qu'il critique et appelle bâtarde et obscure, et la connaissance par l'intellect, qu'il appelle légitime et véritable. C'est la raison qui est le critère de la connaissance légitime
Toutes nos sensations sont des conventions, i.e. des choses déterminées par nos opinions et nos affections. Sont donc vrais et intelligibles les seuls éléments dont est composée toute la nature, les atomes et le vide, i.e. quelque chose qui n'est pas sensible. La position, la forme et l'ordre ne sont alors que des accidents.
Mais il faut ajouter plusieurs considérations sur nos capacités de connaître au moyen des sens :
- nous n'avons pas connaissance de toutes nos sensations : un grand nombre reste inaperçu.
- les impressions sensibles varient selon les animaux, d'un individu à un autre, et même pour un seul individu. Mais, dans ce cas, il est impossible de savoir quelles impressions sont vraies ; toutes sont également vraies : la vérité et l'apparence sont identiques : tout ce qui apparaît à un individu et qui lui semble exister est vrai.
- Démocrite en conclut également que soit la vérité n'existe pas, soit elle nous est cachée.
- « Nous ne connaissons en réalité rien de certain, mais seulement ce qui change selon la disposition de notre corps, et selon ce qui pénètre en lui ou ce qui lui résiste. [...] Il a été démontré qu'en réalité nous ne savons pas ce que chaque chose est ou n'est pas. [...] Il est impossible de connaître la nature réelle de chaque chose. » (Cité par Sextus Empiricus, Contre les professeurs, VII, 135)
- « En réalité, nous ne savons rien, car la vérité est au fond du puits. »
[modifier] Le langage
[modifier] Éthique
[modifier] L'art
[modifier] Œuvres
[modifier] Éthique
- Pythagore, ou de l’état de la sagesse
- Des Enfers
- La Tritogénie
- Du Courage
- De la Vertu
- De la Corne d’abondance
- Du Bonheur
- Commentaires de morale
- La Bonne Humeur
[modifier] Mathématiques
[modifier] Musique
- Des Rythmes et de l’Harmonie
- De la Poésie
- De la Beauté épique
- De la Consonance et de la Dissonance
- Des lettres d’Homère ou de la justesse des vers et des termes
- Du Chant
- De la Diction
- Dictionnaire
[modifier] Art
- De la Prévision médicale
- Du Régime de vie ou le Diététique, ou de la Médecine
- Causes des choses qui sont de saison et de celles qui sont hors de saison
- De l’Agriculture ou le Géorgique
- De la Peinture
- Tactique ou de l’emploi des armes
[modifier] Autres
[modifier] Sources
- Diogène Laërce, Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres [détail des éditions] [lire en ligne], IX.
[modifier] Bibliographie
- Victor Brochard, Études de philosophie ancienne et moderne, Vrin, Paris, 1930 ;
- Friedrich Nietzsche, Sur Démocrite, Métailié, Paris, 1990.
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