Ashoka
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Ashoka, Asoka ou Ashokavardhâna (Devanāgarī: अशोक) (v. 304 av. J.-C. - 232 av. J.-C.), fils de Bindusâra, troisième empereur Maurya (273 av. J.-C. - 232 av. J.-C.). Ashoka a régné sur la majeure partie du sous-continent indien, de l'actuel Afghanistan jusqu'au Bengale et aussi loin vers le sud que l'actuelle Mysore.
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[modifier] Le conquérant, le bouddhiste
L'accession d'Ashoka au trône semble avoir posé problème car il n'est couronné que quatre ans après celle-ci. Après un début de règne très autoritaire, frappé d'horreur suite à sa conquête sanglante du Kalinga, sur la côte est de l'Inde - qui correspond aujourd'hui à l'état de l'Orissa - il aide à la diffusion du bouddhisme. Cependant aucune preuve ne peut attester de sa conversion. Il en sera toutefois un fervent propagandiste et enverra des missionnaires aussi loin que l'île de Ceylan, qui sera convertie par sa fille Sanghamita et son fils - ou frère - Mahinda, cités seulement par les chroniques cinghalaises, mais ignorés des inscriptions indiennes qui ne mentionnent que trois de ses fils, Tvara, Kunala et Jalauka.
La suite de son règne connaît une politique officielle de non-violence, l'ahimsa. Il fait alors construire des hôpitaux pour animaux et rénover les routes principales de l'Inde. Il est probablement le grand propagateur du végétarisme dans le pays.
En effet, après une sanglante conquête, le roi Asoka connaît l’éveil. Il se tourne alors vers l’AHIMSA, la compassion, la protection des animaux et le végétarisme. Malgré les 2000 ans nous séparant de lui, le message de paix d’Asoka est toujours d’actualité sur notre planète dévastée par les guerres et les dictatures.
Dans la campagne indienne, au sud du pays, s’élèvent des collines de pierres rouges. Il y a plus de 2000 ans, la guerre du Kalinga a amené ici dévastation et mort. Comme un album illustré, des fresques murales décrivent les massacres et l’histoire d’un conquérant et de son illumination. Des villages brûlés, des cours d’eau rougis par le sang des cadavres, des femmes pleurant sur la dépouille de leur fils, du bétail pourrissant le long des chemins, des vautours tournant dans le ciel à la recherche de chair fraîche. À la vue de toutes ces souffrances le guerrier Asoka est saisi selon la légende de remords.
Tout comme Krishna, Mahavira ou Bouddha avant lui, Asoka naît dans une famille royale de la caste guerrière des Kshatriya. Son grand-père Chandragupta régna sur un vaste empire qui s’étendait jusqu’à l’Afghanistan. Il établit une administration sur l’exemple des Perses et la capitale, aux proportions énormes, Pataliputra, était construite sur le modèle architectural de Persépolis. Mais le fondateur de la dynastie des Maurya se lassa des intrigues de la cour et abdiqua en faveur de son fils Bindusara. Chandragupta suivit alors les enseignements d’un maître jaïn et se retira avec lui dans un endroit isolé afin de finir ses jours dans le jeûne et la méditation. Son fils, le père d’Asoka, ne resta sur le trône que peu de temps. Lui aussi choisit la vie d’ascète et renonça à la royauté.
Lorsqu’Asoka accède au pouvoir souverain, les Maurya règnent sur une grande partie de l’Inde, ayant unifié par la force les innombrables principautés, républiques et tribus. C’est l’apogée de la puissante dynastie. Infiltrations, espionnages et déportations sont les instruments politiques du jeune despote. Sa police secrète sème la terreur. Asoka conclut des alliances avec ses voisins mais ne les respecte pas. Sa soif de conquête est grande. Il provoque des hostilités afin d’ouvrir un accès vers le sud du royaume. Cette guerre du Kalinga fait plus de 100,000 morts. Des sages jaïns et bouddhistes le supplient alors de mettre fin au conflit et de faire la paix. Ils lui expliquent la profonde signification de l’AHIMSA, mot sanskrit signifiant non-violence, refus de tuer, de nuire ou de détruire: « La vie est chère à tous les êtres, tous craignent la souffrance et redoutent leur destruction. Le respect, la compassion et la tolérance demeurent l’essence de la sagesse ».
Selon Bouddha, un des devoirs primordiaux d’un roi est de faire régner la paix, d’éviter à tout prix la guerre et toute chose impliquant violence et anéantissement de la vie. Le mauvais karma n’a aucune prise sur celui qui s’identifie avec tous les êtres, qui les considère d’un regard égal. L’AHIMSA est lié au renoncement à vouloir posséder et dominer. Les attitudes pacifistes se joignent au dharma, la loi, le devoir universel, sur le chemin pavé d’actions justes.
Que mon cœur prenne refuge aux pieds du Bouddha. À 20 ans, le voile de l’illusion s’estompe, les chaînes de l’attachement se brisent pour Asoka. C’est avec l’AHIMSA-DHARMA qu’il va désormais pacifier tous les sujets de son empire.
Sur le site de la bataille de l’Orissa, il fait graver dans la pierre : « Devanamapriya (Asoka) conquérant du Kalinga, a maintenant des remords à la pensée que la conquête n’est pas une conquête car des hommes furent assassinés, tués et exilés lors d’une telle conquête. Devanamapriya éprouve cela avec beaucoup de tristesse et de regrets. À présent, la perte du centième ou même du millième de toutes les vies qui furent tuées, qui moururent ou furent emmenées captives à l’époque où le Kalinga fut conquis, Devanamapriya le déplore. Il considère que même ceux qui lui causent du tort méritent d’être pardonnés pour les torts qui peuvent être pardonnés. Parce qu’il croit que tous les êtres doivent rester saufs, avoir le contrôle d’eux-mêmes, être traités également et mener une vie heureuse. Pour Devanamapriya, la conquête par la vertu est la plus importante conquête ».
Sous la direction d’un maître bouddhiste, Asoka fait une retraite de deux ans, puis, pour quelques douzaines d’années reprend en main les destinées de son empire. Un corps de hauts fonctionnaires est chargé de réparer les injustices commises. Sa police secrète est démantelée.
Aux quatre coins du royaume, Asoka proclame sur des parois rocheuses ou sur des colonnes son aversion pour la violence et son adhésion à l’AHIMSA. Ces stèles se retrouvent partout où le peuple peut les lire, dans les lieux sacrés, aux carrefours des villes. Elles demeureront intactes et lisibles pendant des millénaires. Souvent surmontés d’un lion, les piliers s'ornent aussi du Dharma- Chakra, la roue de la loi sacrée que Bouddha a mis en mouvement pour les tous êtres vivants, lors de son passage terrestre.
« Celui qui refuse de chasser ou de pêcher, qui ne tue point et ne veut être cause de mort pour aucune créature, faible ou puissante, voilà un homme de bien ». (Bouddha, Dhammapada)
Comprenant que tuer est toujours une abomination et que chasser et pêcher sont des manquements à l’AHIMSA, Asoka règlemente sévèrement la chasse. Il favorise le végétarisme dans tout le royaume et interdit les sacrifices rituels d’animaux. Dans ses palais, aucun animal n’est mis à mort, toute la cour royale s’abstient de chair animale. Un banquet typique du roi pouvait se composer de raisins, de dattes et de mangues, de gâteaux sucrés, de riz bouilli avec épices et de lait chaud au safran.
L’absence de toute cruauté et une attitude bienveillante doivent englober non seulement les humains mais aussi les animaux : « Ce don (le dharma) consiste à traiter équitablement esclaves et serviteurs, à obéir à la mère et au père, à user de libéralité envers les amis, connaissances, parents, prêtres et ascètes et à ne pas tuer les animaux. » (Asoka, edit 10)
L’interdépendance des vies se tisse sur le même désir de ne plus souffrir et de vivre en paix. Il ne faut ni approuver ni encourager la violence. Dans cet esprit de compassion secourable, on ne doit pas effrayer les animaux, les remplir de crainte, les tourmenter, leur infliger de la douleur, les dominer brutalement. Cette conduite éthique implique nécessairement une forme non- violente d’alimentation.
Par solidarité avec le monde animal, Asoka fonde des hôpitaux, des hospices afin de recueillir les animaux malades ou âgés. Il encourage la protection des forêts et des plantes médicinales.
Le roi se rend en pèlerinage aux lieux qu’a sanctifié la présence du Bouddha et donne généreusement aux monastères. Il nomme des contrôleurs du dharma qui effectuent des tournées d’inspection périodiques dans tout l’empire. Lui-même parcourt son royaume et propage sa vision de l’AHIMSA-DHARMA dans les villes des provinces les plus reculées. Sous son règne, aucune guerre n’éclatera dans les États pacifiés.
On attribue à Asoka l’érection de 84,000 stupa, monticules circulaires de briques ou de pierres renfermant des reliques du Bouddha ou de Bodhisattvas célèbres, ces illuminés se consacrant à sauver l’humanité souffrante. Le roi envoie aussi des missionnaires au Ceylan, en Birmanie, en Chine et des ambassades aux princes grecs du temps, Antiochus II de Syrie et Antigone Gonatas de Macédoine. Il convoque le troisième concile bouddhique dont la préoccupation majeure sera la diffusion du bouddhisme.
Asoka fonde de plus l’écriture dite brahmi servant à rédiger des documents. Après l’écriture pictographique de l’ère de l’Indus qui dura jusqu’environ 1,500 avant J.C., la plus ancienne écriture indienne déchiffrable remonte à Asoka. Dès qu’il l’utilisa, elle devint l’écriture de toute l’Inde. La majorité des écritures indiennes modernes sont de ce fait dérivés du brahmi.
L’histoire n’a guère laissé de détails sur la vie personnelle d’Asoka. On sait qu’il épousa la fille d’un banquier, qu’il eut des enfants et un palais d’été sur le site même de Kalinga. Son fils (ou son frère ?) apporta les enseignements de Bouddha hors de l’Inde. Son petit-fils Samprati se fit pour sa part un propagateur du jaïnisme.
Asoka mourut dans la quarantaine. Finit-il ses jours dans la solitude méditative comme ses ancêtres ? Nul ne sait vraiment. Après son règne, l’Empire Maurya s’effrita et connut à nouveau de graves bouleversements, des invasions meurtrières et des schismes religieux.
Dans les ruines de Kalinga, des cavernes s’ouvrent dans les rochers. Pendant des siècles, elles abritèrent des moines bouddhistes et jaïns venus là s’absorber dans l’Absolu, à l’écart des illusions humaines. Près du champ de bataille, une pagode blanche et ronde embrasse tout l’horizon. À perte de vue, des champs verts encerclent ce temple dédié à la paix. Des lions immobiles en gardent l’entrée et sur le dôme de la structure plusieurs petites coupoles touchent le ciel comme branchées au cosmos. Un Bouddha lumineux, encastré dans la pierre, médite sur les formes impermanentes, transitoires et douloureuses de ce monde. Les splendeurs de la cour d’Asoka semblent bien lointaines dans les décombres, la végétation et les cris des singes affamés. « Oui, je vous le dis : tout passe. Veillez à votre salut », aurait dit le Bouddha avant de quitter son corps. Tout passe. Mais le message de l’AHIMSA-DHARMA d’Asoka, le guerrier pacifique, est toujours vivant.
La source de la plupart de notre connaissance sur Ashoka est constituée par les nombreuses inscriptions qu'il a fait graver sur des piliers et des rochers dans tout son empire, majoritairement en langue mâgadhî (un prâkrit) dans l'écriture brâhmî (et parfois en caractères kharosthi), mais aussi en grec et en araméen. Outre que ces inscriptions représentent les premières attestations de la notation par écrit d'une langue indienne et que cette même écriture donnera naissance à tous les semi-syllabaires présents actuellement sur le sol indien (comme la devanâgarî), elles ont favorisé la propagation de l'éthique bouddhiste et ont encouragé la non-violence et l'adhésion à la doctrine du dharma, le devoir ou comportement juste. On note aussi l'importance donnée à une langue vulgaire et vernaculaire, un prâkrit, au détriment de la langue « noble » et littéraire, le sanskrit, montrant là un souci d'être compris par le peuple.
Il agrandit sa capitale Pataliputra - l'actuelle Patna - et y fait construire un palais dans le style perse. Il convoque aussi le 3e Concile bouddhique (253 av. J.-C. ou 243 av. J.-C.).
À la suite du règne éclairé d'Ashoka, la réforme de l'empire Maurya est mise à profit par des envahisseurs, et bientôt il entre en déclin et se fragmente en une multitude de principautés. Jusqu'à la colonisation britannique, environ 2000 ans plus tard, jamais une aussi grande partie du sous-continent ne sera unie sous un même gouvernement.
Reconnaissant son rôle sans précédent dans l'histoire du pays, l'Inde a fait du chapiteau des colonnes d'Ashoka ou lât, un des symboles de la république indienne.
[modifier] Deux décrets extraits des édits d'Ashoka
1er Décret : Autrefois dans les cuisines du roi Piyadassi (autre nom d'Ashoka), le Bien-aimé des Dieux, des centaines de milliers d'animaux étaient tués quotidiennement pour leur viande. Dorénavant, [?], seulement trois animaux seront tués, deux paons et un cerf et le cerf pas de façon régulière. Même ces trois animaux ne le seront plus dans l'avenir.
2e Décret : Partout dans l'empire du Bien-aimé des Dieux, le roi Piyadassi et même dans les royaumes à ses frontières, comme ceux des Chola, Pandya, Satyapoutra, Kéralapoutra aussi bien que dans celui de Ceylan et du roi grec nommé Antiochos et dans ceux des rois qui sont voisins d'Antiochos, partout les deux assistances du Bien-aimé de Dieux, le roi Piyadassi, sont fournis. Celles-ci consistent en soins médicaux pour les hommes et en attention pour les animaux. Les herbes médicinales si utiles pour l'homme ou pour la bête, sont apportées et plantées partout où elles ne poussent pas naturellement ; de la même façon, racines et fruits sont apportés et plantés partout où ils ne poussent pas naturellement. Des puits sont creusés le long de routes et des arbres plantés pour le bien des hommes et des bêtes.
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Dsharatha |
[modifier] Voir aussi
[modifier] Lien interne
- Asoka, une adaptation cinématographique de la vie d'Ashoka
- Grammaire du sanskrit prononciation et orthographe du sanskrit
[modifier] Lien externe
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