Extension quadratique
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En mathématiques, et plus précisément en algèbre dans le cadre de la théorie de Galois, une extension quadratique est une extension de corps de dimension deux. Si K est un corps commutatif, souvent celui des nombres rationnels. alors une extension quadratique L est un corps contenant K et un espace vectoriel sur K de dimension deux.
Une extension quadratique est le cas le plus simple d'extension de corps. Elle possède de nombreuses propriétés, c'est une extension simple algébrique et un corps de décomposition si le corps n'est pas de caractéristique deux. L'extension est séparable, normale et donc galoisienne et même abélienne.
La notion d'extension quadratique possèdent de nombreuses applications, on peut citer la Théorie de Kummer ou la notion de tour d'extension quadratique utilisée pour la démonstration du Théorème de Gauss-Wantzel ou la résolution de l'équation cyclotomique dans le cas ou d'une racine primitive n-ième de l'unité où n est un nombre premier de Fermat.
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[modifier] Motivations
Une extension quadratique correspond au cas le plus simple d'extension algébrique. Il correspond au cas ou l'extension est réalisée à partir d'un unique élément dont le carré est combinaison de lui même et d'un élément du corps de base.
De plus, à la condition que le corps soit commutatif et ne soit pas de caractéristique 2, c'est à dire si la somme de l'unité avec lui-même n'est pas égale à zéro, alors une telle extension possède toutes les bonnes propriétés des extensions de Galois. Il est possible d'établir tous les résultats principaux de la théorie avec des démonstrations largement plus simples. Cette théorie dépasse donc le cadre des extensions sur le corps des nombres rationnels ou réels.
Une première application a été trouvé par Carl Friedrich Gauss (1777 1855) en 1801 pour l'étude des polygones constructible à la règle et au compas. Les propriétés des extensions quadratiques permettent de déterminer un algorithme pour chaque polygone constructible (cf Polynôme cyclotomique). Les propriétés des extensions quadratiques sont utilisées alors dans un cas particulier, celui de la tour d'extension quadratique.
Cette théorie possède de plus de nombreuses applications en théorie des nombres comme par exemple la théorie de Kummer. Dans ce domaine, il existe encore des problèmes ouverts qui font l'objet de recherche.
Dans la suite de l'article le corps de base est noté K, il ne possède que deux propriétés spécifiques, il est commutatif et sauf indication contraire, il n'est pas de caractéristique deux.
[modifier] Définition
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- Soit K un corps, L une extension de corps de K. L'extension L est dite quadratique si et seulement si la dimension de L comme espace vectoriel sur K est égal à deux. Si α est un élément de L qui n'est pas élément de K, alors l'extension est souvent noté K(α).
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- Un élément d'une extension L sur K est dit quadratique s'il est inclu dans une extension quadratique de K.
Remarque: K(α) désigne le plus petit corps contenant α, il est donc engendré par les puissances de α. Dans le cas d'une extension quadratique, tout élément de L est combinaison linéaire de 1 et α, car l'espace est de dimension deux et que 1 et α forment une famille libre car α n'est pas élément de K.
Remarque: Toute extension de corps est un espace vectoriel sur son corps de base. Cette propriété n'est pas spécifique aux extensions quadratiques.'
[modifier] Exemples
L'exemple le plus connu est probablement l'extension quadratique des nombres réels égale au corps des nombres complexes.
L'ensemble des combinaisons linéaires de l'unité et de la racine de deux sur le corps des nombres rationnels est une extension quadratique. Cet exemple est étudié dans l'article sur les extensions algébriques.
Soit K le corps . Considérons alors le polynôme
. Il est alors aisé de vérifier que ce polynôme n'admet pas de racine dans K. En effet, les classes de un et de deux ont pour carré un et zéro a pour carré zéro, le polynôme est donc irréductible. Considérons alors le quotient de l'anneau des polynômes K[X] avec son idéal engendré par P[X]. C'est un anneau, cet anneau est non seulement un corps mais aussi une extension quadratique de K.
Pour le vérifier il suffit alors de vérifier que tout élément de cet anneau est inversible. La preuve est alors donnée dans la première proposition du paragraphe Extension algébrique et polynôme.
Le raisonnement est le suivant, si l'image de X dans l'anneau quotient est noté r. Soit l un élément quelconque de l'anneau, il existe un polynôme A[X] tel que A(r) soit dans la classe de l. La division euclidienne de A[X] par P[X] assure l'existence de deux polynômes Q[X] et R[X] tel que A[X] = P[X].Q[X] + R[X] ou R[X] est un polynôme de degré strictement inférieur à 2. On en déduit que l = A(r) = P(r).Q(r) + R(r). Or par définition du quotient, P(r) est égal à 0. Donc il existe a et b deux éléments de K tel que l = a + b.r
On remarque alors que a2 - 2.b2 est nul si et seulement si a et b sont nuls. Dans le cas contraire a/b serait une racine de P[X], or il n'en existe pas. Il suffit alors de vérifier que (a2 - 2.b2)-1.(a - b.r) est bien l'inverse de l. Cette technique permet de construire un corps à neuf éléments.
[modifier] Propriétés
[modifier] Extension quadratique et extension algébrique
Article détaillé: Extension algébrique
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- Une extension quadratique L sur un corps K est une extension finie algébrique. Le polynôme minimal d'un élément de L est de degré un si l'élément est dans l'ensemble K et deux sinon.
Une extension est dite finie si et seulement si L en tant que sous-espace vectoriel sur K est de dimension finie. Par définition elle est de dimension deux, elle est donc finie. Le polynôme minimal d'un élément l est le polynôme de plus petit degré à coefficients dans K qui possède l pour racine. Si l est dans K alors le polynôme minimal est X - l, il est bien de degré un. Dans le cas contraire la famille composée des éléments l2, l et 1 est lié car elle contient trois éléments dans un espace de dimension deux. Il existe donc une combinaison linéaire qui définit un polynôme de degré deux. Une extension est dite algébrique si tout élément possède un polynôme minimal, c'est effectivement le cas ici.
[modifier] Extension quadratique et séparation
Article détaillé: Extension séparable
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- L'extension L est séparable.
Si dans un corps, on additionne plusieurs fois de suite l'unité, il est possible de trouver zéro. C'est par exemple toujours le cas si le corps est de cardinal fini. Dans le cas où les sommes successives de l'unité ne sont jamais nulles alors on parle de caractéristique 0. C'est par exemple le cas pour les corps des nombres rationnels, réel ou complexes.
Dire que l'extension L est séparable, c'est dire que les polynômes minimaux n'ont jamais de racines multiples. Cette propriété est importante dans la théorie de Galois. Elle apparaîtra dans la suite de l'analyse des propriétés des extensions quadratiques.
Soit l un élément de L et P[X] son polynôme minimal à coefficient dans K. On suppose que l n'est pas élément de K car sinon son polynôme est de degré 1 est il n'existe évidemment pas de racine multiple. Alors P[X] est de degré deux. Sa dérivée est de degré un à coefficient dans K car P[X] est à coefficient dans K. Comme l n'est pas élément de K, l ne peut être racine de la dérivée. Or une racine est multiple si et seulement si elle est aussi racine du polynôme dérivée.
Ce raisonnement ne s'applique pas en caractéristique deux. considérons en effet un polynôme de la forme X2 - c, ou c est un élément de K, sa dérivé est toujours nulle donc toute racine carrée possède un polynôme minimal non séparable. Cette spécificité invalide les raisonnements de la suite de cet article
[modifier] Extension quadratique et clôture algébrique
Article détaillé: Clôture algébrique
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- Il existe exactement deux morphismes de corps de l'extension quadratique L dans la clôture algébrique Ω de K.
La clôture algébrique Ω est le sur-corps de K tel que tout les polynômes soit scindés sur Ω, c'est à dire que tous les polynômes s'écrivent comme un produit de polynômes du premier degré. Sous reserve d'admettre l'axiome du choix une clôture existe toujours. Dans le cas des nombres rationnels ou réels une clôture algébrique est le corps des nombres complexes. Ce résultat est connu sous le nom du théorème de d'Alembert-Gauss. Il est à noter que la caractéristique de K est celle de Ω. En effet, l'équation n.1=0 dans Ω est la même que dans K car n.1 est un élément de K sous-ensemble de Ω.
Un morphisme de corps est injectif ou l'image de tout les éléments sont nuls. En effet soit m un morphisme non injectif alors il existe a et b éléments du corps tel que m(a) = m(b). Et l'image par m de a - b est nulle. En conséquence l'image du produit de a - b et de son inverse est nulle. L'image de un est donc nulle et l'image d'un élément quelconque l est égale à l'image de l.1 est aussi nulle. Le morphisme est donc nul. Par définition, on ne considère pas que l'application qui à un corps associe toujours 0 soit un morphisme et tout morphisme est injectif. S'il existe un morphisme alors il existe un isomorphisme entre le corps de départ et un sous-corps du corps d'arrivé. Il est donc possible de réaliser une identification.
Une extension se construit souvent comme un quotient sur l'anneau des polynômes, comme le troisième exemple de l'article. Il est alors naturel de se poser la question de l'identification entre une extension et un sous-corps de la clôture algébrique. Par exemple, une extension des nombres rationnels contenant une racine du polynôme X2 - 2 est-elle isomorphe à un sous-corps des nombres complexes? La proposition nous assure que oui. Il existe exactement deux manières de plonger l'extension dans la clôture.
Démontrons alors l'existence des deux morphismes. Soit l un élément de L non élément de K et P[X] le polynôme minimal de l. Soit r une des deux racines de l'équation P[X] = 0 dans Ω. Comme P[X] est de degré deux et admet deux racines distinctes, r existe toujours. Considérons alors l'application linéaire de L dans Ω, qui, à tout élément a + b.l associe a + b.r ou a et b sont des éléments de K. Cette application est bien définie sur K car 1 et l forment une base de L. Il est simple de vérifier que l'application est un morphisme de corps. Il existe donc bien deux morphismes.
Il n'en existe pas d'autre, l'image par m de l est nécessairement une racine de l'équation P[X] = 0 car m est un morphisme de corps et P(m(l)) = m(P(l)) = m(0) = 0.
[modifier] Extension quadratique et extension de Galois
Article détaillé: Extension de Galois
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- Les deux morphismes de L dans Ω de la proposition précédente ont même image.
Il suffit pour cela de vérifier que si r1 et r2 sont les deux racines alors les familles (1, r1) et (1, r2) engendrent le même sous-espace vectoriel dans Ω. Pour cela, il suffit de trouver une combinaison linéaire de la deuxième racine dans la première base. Or la somme des deux racines est égal à l'inverse du coefficient du monôme de degré un du polynôme minimal.
En conséquence il n'existe qu'un unique sous-corps de Ω isomorphe à L. Il est donc possible d'identifier toute exension quadratique à un unique sous-corps de la clôture algébrique. Si l'on étudie par exemple les extensions quadratiques des nombres rationnels, il est suffisant de ne considérer que les extensions quadratiques dans le corps des nombres complexes. C'est la raison pour laquelle on identifie en général les extensions quadratiques avec les sous-corps de la clôture de dimension deux.
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- L'extension est normale donc galoisienne.
Dans le cas où L est identifié à un sous-corps de la clôture algébrique, alors tout morphisme de corps de L laissant invariant K laisse L stable d'après le dernier paragraphe. Une extension ayant cette propriété est dite normale.
Une extension de Galois est une extension normale et séparable. C'est donc le cas pour les extensions quadratiques.
[modifier] Extension quadratique et extension abélienne
Article détaillé: Extension abélienne
Il est aisé de vérifier que l'ensemble des automorphismes de corps de L laissant stable K forment dans le cas général un groupe s'il est muni de la loi de composition des applications. Ce groupe est appelé groupe de Galois. Dans le cas des extensions quadratiques séparables ce groupe contient deux éléments et est donc isomorphe au groupe cyclique d'ordre deux, Il est donc commutatif. Dans le cas général, si le groupe de Galois est commutatif, on parle d'extension abélienne, c'est le cas de toute extension quadratique.
Dans ce cas, alors tous les éléments de L s'expriment comme une combinaison linéraire d'éléments de K et de radicaux, ici un élément dont le carré est un élément de K. Si le cas général est un peu technique, la démonstration pour les extensions quadratiques est relativement simple. Il est néanmoins nécessaire d'établir une proposition préalable. Cette propriété est importante, car elle est au cœur de la question de la résolution d'une équation algébrique par radicaux.
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- Le seul corps laissé invariant par tout les membres du groupe de Galois est K.
Remarquons tout d'abord que le seul sous-corps strict de L contenant K est K. En effet, si un sous-corps de L contient K et un autre élément, alors il est de dimension au moins deux comme espace vectoriel sur K, il est donc égal à L car L est de dimension deux.
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- Tout élément de L s'exprime comme combinaison linéaire de 1 et d'un élément r tel que le carré de r est élément de K.
Si K est le corps des nombres rationnels, il suffit de résoudre l'équation donnée par le polynôme minimal. Dans le cas général, considérons un élément l de L qui n'est pas dans K. Notons m le morphisme différent de l'identité, alors l et m(l) sont deux éléments distincts. Soit r = l - m(l). L'image de r par m est égal à son opposé car m2 est égal à l'identité. Donc r n'est pas élément de K car il n'est pas invariant par m. Il suffit alors de remarquer que le carré de r est invariant par m pour conclure qu'il est élément de K. Il existe donc un élément de L dont le carré est élément de K et qui n'est pas élément de K. La famille (1, r) est alors génératrice car libre et de cardinal la dimension de L.
En conclusion, toute équation du second degré dans un corps K est résoluble par radicaux.
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