Origine du peuple roumain
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La controverse sur les origines du peuple roumain est née au XVIIIe siècle, lorsque les élites roumaines de Transylvanie ont réclamé des droits civils et religieux qui leur étaient refusés depuis le Moyen Âge.
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[modifier] Le contexte historique de la controverse
Avant la création de l'État Roumain moderne au milieu du XIXe siècle à partir des principautés historiques de Valachie et de Moldavie, sous la houlette des puissances européennes du moment, la France, l'Autriche-Hongrie, la Russie et l'Empire ottoman, le terme "Valaques" constituait un exonyme, tandis que les Roumains eux-mêmes se nommaient Roumains en "Valaquie" et Moldaves ou Roumains en "Moldavie".
Le nom de la Valachie, en Roumain est Ţara Românească (anciennement aussi Ţara Rumânească), ce qui signifie en Roumain pays Roumain.
Les nationalistes Valaques et Moldaves du siècle dernier ont cherché à légitimer l'État naissant dans la prestigieuse descendance de Rome et de son empereur Trajan, ainsi que de leurs prédécesseurs, les Daces, pour renforcer l'image d'un peuple Roumain qui aurait existé depuis le Moyen Âge, grâce à une population bien différenciée et qui aurait gardé son caractère unique jusqu'aujourd'hui.
D'autre part, la Transylvanie, possession de la double monarchie austro-hongroise des Habsbourg, et historiquement héritière de la principauté médiévale de Transylvanie, longtemps vassale du royaume de Hongrie, a été attribuée à la Roumanie à la fin de la Première Guerre mondiale, alors qu'elle était habitée majoritairement par une population roumaine, une importante minorité hongroise ainsi que par une d'autres minorités dont la plus significative était celle saxonne.
Les théories suivantes, émises par les deux parties en présence, sont avancées pour expliquer leur émergence en tant que peuple différencié au milieu du premier millénaire :
- une continuité daco-romaine au nord du Danube (similaire à la continuité gallo-romaine)
- le résultat de la migration de "Valaques" venus du sud du Danube
La région exacte de formation du peuple roumain et de leur langue n'est pas seulement un puzzle scientifique, mais aussi le sujet d'une vive controverse politique. En effet, les historiens hongrois du XIXe siècle soutiennent majoritairement la thèse migratoire, ce qui leur permet d'affirmer que la Transylvanie n'est plus habitée par des Roumains lorsque les Magyars arrivent en Europe centrale au Xe siècle. La plupart des historiens roumains défendent pour leur part la théorie de la continuité daco-romaine, ce qui leur permet d'affirmer que la Transylvanie est habitée de façon continue par les ancêtres des Roumains actuels.
[modifier] La théorie de la romanisation sur place (thèse roumaine)
Après la conquête romaine de la Dacie en 106, un processus de romanisation intense a lieu.
Les Daces auraient donc adopté la langue des conquérants, les colons romains, soit un latin vulgaire, vecteur de promotion sociale dans l'administration romaine, de la même façon que les Gaulois romanisés sont devenus gallo-romains pour les mêmes raisons.
Les arguments en faveur de cette théorie sont :
- L'importante colonisation des Romains de la Dacie
- Les colons romains proviennent de différentes parties de l'Empire, et le latin vulgaire seul peut leur servir de langue véhiculaire, de la même façon que l'anglais s'est imposé aux États-Unis.
- les toponymes daces ont été conservés, par exemple le nom de certaines rivières (Samus - Someş, Marisia - Mureş, Porata - Prut), et le nom de certaines cités (Petrodava - Piatra Neamţ, Abruttum - Abrud).
- la ressemblance entre les habits traditionnels roumains et les vêtements daces, comme le montre la Colonne Trajane.
- Constantin le Grand a porté le titre de Dacicus Maximus en 336 exactement comme Trajan en 106, ce qui suggère la présence de Daces en Dacie même avant le retrait d'Aurélien en 270-275.
- les nombreux sites archéologiques prouvent la continuité de colonies latines au nord du Danube après l'évacuation de 271, y compris de nombreuses inscriptions en latin (par exemple, "EGO ZENOVIUS VOTUM POSUI").
Les arguments contre cette théorie sont :
- la courte période d'occupation (juste 165 ans), et encore sans tenir compte du fait que, dans les derniers temps, cette occupation est surtout théorique.
- Les Romains ont conquis juste une petite partie de la Dacie (la Transylvanie, l'Olténie, le Banat, des parties de la Munténie, la Moldavie du sud, la Serbie orientale et la Bulgarie septentrionale). En outre, beaucoup de Daces vivent dans des régions reculées montagneuses, avec peu de contact avec les Romains. Le processus de romanisation peut s'être étendu à d'autres régions que les seuls centres urbains.
- La plupart des colons viennent des provinces éloignées, et ne peuvent pas parler seulement un latin vulgaire, bien éloigné du latin littéraire dont le roumain semble proche.
- Après le retrait des Romains, la tribu dace des Carpes, vivant en Moldavie, conquiert les zones abandonnées, mais sans imposer son langage ou renverser le processus de romanisation, si ce processus de romanisation a existé.
- Très peu de documents écrits confirment que des peuples romans vivent en Dacie durant la période intermédiaire entre le retrait romain et le Xe siècle. Les documents écrits de cette époque relatent prioritairement, ou exclusivement, les faits relatifs aux zones où ils sont compilés.
- Il n'existe aucune trace évidente d'influence germanique dans la langue roumaine, alors que, aux Ve et VIe siècles, la Dacie est habitée par des tribus d'origine germanique. Par contre, le passage des populations nomades n'a pas beaucoup d'influence durable sur les populations autochtones.
- Selon Eutrope (livre IX, 15), Aurélien abandonne la Dacia Traiana, et réorganise une nouvelle Dacia Aureliana à l'intérieur de l'ancienne Mésie Supérieure, en 270-275, en la colonisant avec des Romains arrivant de l'ancienne Dacia Traiana.
[modifier] Une migration venant du sud (thèse hongroise)
Selon cette théorie, une population romane serait arrivée au Moyen Âge du sud du Danube, en provenance des zones de peuplement Aroumain ou "Valaque", et aurait, à l'appel des rois de Hongrie, (re)peuplé le territoire actuel de la Roumanie, dévasté par la grande invasion mongole de 1241. Cette théorie suppose que tous les Daces auraient disparu après le retrait des Romains en 271-274.
Cette théorie à été niée dès son apparition par la plupart des historiens roumains et occidentaux, sans que le sujet soit completmment fermé. Cette théorie était génerallement soutenue au XIXe siècle et début XXe siècle par des historiens hongrois pour justifier des prétentions territoriale sur la région de Transylvanie, produisant même de nos jours une mise à l'écart de cette théorie par de nombreux historiens.
Les arguments en faveur de cette théorie sont :
- Il existe des mots communs au roumain et à l'albanais, ce dernier étant considéré comme ayant des origines thraces ou illyriennes (voir aussi Origine des Albanais. Malgré tout, selon les spécialistes du thrace, les langues proto-albanaise et dace étaient probablement apparentées, et les mots communs pourraient venir du dace. [4]
- Des "Vlahi" ou Valaques vivaient aussi au sud du Danube et parlaient des langues romanes orientales : l'aroumain, le mégléno-roumain et l'istro-roumain (en Bulgarie, en Grèce, en Albanie, en République de Macédoine,en Serbie et en Croatie). Leur présence est mentionnée dans ces zones depuis le début du Moyen Âge.
- Il n'y a pas de trace évidente d'influence germanique dans la langue roumaine, alors qu'on sait qu'au Ve et VIe siècles la Dacie a été habitée par des tribus d'origine germanique.[5]
- Il n'existe pas de documents écrits qui confirment que les peuples romans vivaient en Dacie dans la période intermédiaire entre l'évacuation de la Dacie par les Romains et le Xe siècle. Les détracteurs indiquent qu'il y a fort peu de documents sur cette région à cette époque, mais beaucoup de sources médiévales mentionnent la présence de Valaques dans les zones au sud du Danube.
- Il y a des toponymes roumains en Albanie et en Bulgarie. [6]
- Les bergers Vlahi migraient vers le nord avec leurs troupeaux pour chercher de meilleurs paturages. Par exemple, ils se sont déplacés le long des Carpates jusqu'en Pologne actuelle, et même jusqu'en République tchèque d'aujourd'hui. Ils ont influencé de façon significative la culture et le langage des montagnards polonais et ukrainiens.
- Eutropius mentionne la réinstallation de citoyens romains depuis la Dacia Traiana dans le sud du Danube en 270-275.
- Il y a beaucoup moins de mots slaves en aroumain qu'en roumain. Selon les linguistes, le proto-roumain s'est séparé après l'installation slave dans la péninsule balkanique. Cela vient en faveur de la théorie selon laquelle la plus grande influence slavonne sur le roumain apparut après la migration des Vlahi et leur installation dans les territoires peuplés par les Slaves au nord du Danube.

Les arguments contre cette théorie sont :
- les rares emprunts au grec comme termes religieux entrèrent probablement via le latin vulgaire, et non pas directement via le grec (ex: en roumain bisericǎ <latin *basilica <grec basilike). Les termes religieux importants du roumain vinrent directement du latin, ce qui suggère que les Daco-Romanians ont été convertis au christianisme en latin. Plus tard, au Moyen Âge, les Roumains utilisent le slavon d'église comme langage liturgique, et la religion orthodoxe est probablement amenée par les Slaves bulgares. Cela semble indiquer la présence d'une zone tampon slave entre les Grecs et les Roumains [7]. Malgré tout cet argument ne saurait confimer la théorie sur la migration à partir du sud qu'après 890 av JC. Les immigrants Vlahi du sud pourraient avoir commencé à l'utiliser après leur arrivée dans ce qui est la Roumanie actuelle, qui a été habitée largement par des tribus slaves, sous contrôle des Tsars bulgares, et influencés par l'Église orthodoxe bulgare. Et leur conversion au christianisme se serait effectuée sur les territoires faisant partie actuellement de la Serbie et du nord de la Bulgarie, au sud du Danube.
- les toponymes daces ont été conservés, par exemple le nom de certaines rivières (Samus - Someş, Marisia - Mureş, Porata - Prut), et le nom de certaines cités (Petrodava - Piatra Neamţ, Abruttum - Abrud). La conservation des toponymes atteste d'un habitat continu, mais pas forcément par les mêmes populations.
- une chronique hongroise du XIIe siècle, la Gesta Hungarorum, affirme que, quand les Magyars arrivèrent dans la plaine de Pannonie, les zones avoisinantes étaient habités par des Valaques. Mais cette chronique a été écrite 250 ans après le déroulement des évènements qu'elle évoque. [8]
- une chronique du Vénérable Nestor (1056 - 1136 av JC) mentionne des Valaques qui combattaient les Magyars au nord du Danube en 898. [9] Cette chronique a été aussi écrite 150 ans après les faits.
- il n'existe pas de mention d'une migration à grande échelle de peuple roman depuis les Balkans vers la Roumanie actuelle; tout au contraire, une chronique indique même un mouvement inverse, du nord vers le sud : le Strategicon de Kékaumène (1066), les Valaques d'Epire et de Thessalie arrivèrent du nord du Danube et des bords de la Save. [10] Les détracteurs indiquent qu'il y a très peu de traces dans cette région et qu'il est possible que les Vlahi soient arrivés du nord, mais pas forcément du nord du Danube ; peut-être de Mésie, de ce qui est aujourd'hui la Serbie et le nord de la Bulgarie.
[modifier] Bibliographie
- Mihnea Berindei et Gilles Veinstein : L'empire Ottoman et les pays roumains. EHESS, Paris, 1987
- Dimitrie Cantemir : Chronique de l'ancienneté des Romano-Moldo-Valaques (1708, réédité Bucarest 1901).
- Georges Castellan : Histoire des Balkans. Fayard, Paris 1991.
- Georges Castellan : Histoire des Roumains. P.U.F., Paris (plusieurs rééditions).
- Dejan Dimitrijevic : Les Valaques et la serbité. CNRS-IDEMEC, Aix-en-Provence, 2003.
- Neagu Djuvara : Les pays roumains entre orient et Occident. P.U.F., Paris, 1989.
- Catherine Durandin : Histoire des Roumains. Fayard, Paris. ISBN 2-213-59425-2.
- Jean-François Gossiaux : Valaques et/ou Aroumains en Bulgarie. CNRS-IDEMEC, Aix, 2003.
- Nicolae Iorga : Histoire des Roumains et de la romanité orientale. Université de Bucarest, 1945.
- Nicolae Iorga : Histoire des (A)roumains de la péninsule des Balkans. Université de Bucarest, 1919.
- Claude Karnoouh: L'invention du peuple, chroniques de la Roumanie. Arcantère, paris, 1990.
- Jules Michelet : Légendes démocratiques du nord. P.U.F. Paris, 1968.
- Gilles de Rapper et Pierre Sintès : Valaques, Aroumains, Sarakatsanes. CNRS-IDEMEC, Aix, 2003.
- Karl Sanfeld : Linguistique balkanique. Klincksieck, Paris, 1930.
- Nicolae Trifon : Les Aroumains. Un peuple qui s'en va. Paris. ISBN 2-909899-26-8.
- Alexandre Xenopol : Histoire des roumains de la dacie Trajane. Cartea Româneasca, Bucarest 1925.
[modifier] Voir aussi
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