Prophétie de saint Malachie
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La prophétie de saint Malachie ou prophétie des papes est un texte mystérieux, qu'on attribue parfois à saint Malachie, et qui aurait été découvert vers 1590. Ce document de 5 pages a été publié pour la première fois en 1595, dans un ouvrage d'un moine bénédictin de Venise, Arnold de Wyon.
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[modifier] Origine du texte
Arnold de Wyon fit publier en 1595 un volumineux ouvrage, intitulé « Lignum vitae, Ornamentum et decus Ecclesiae », dont un des passages, dénommé « Prophetia S. Malachiae, Archiepiscopi, de Summis Pontificibus », est la prophétie des papes. Ce passage du texte a été soumis aux commentaires d'Alphonse Ciaconi, spécialiste de la vie des papes et de l'héraldique ecclésiastique.
Ange Manrique, qui a possédé les papiers de Malachie après la mort de ce dernier, affirme qu'il n'a trouvé aucune trace de prophétie. Par ailleurs, Jean de Salisbury et Pierre le Vénérable ont travaillé sur l'œuvre de Malachie et n'évoquent aucune prophétie. Saint Bernard, contemporain et ami de Malachie, a publié la biographie de ce dernier peu de temps après sa mort, sans jamais évoquer les prétendues prophéties qu'il aurait écrites. Enfin, le texte laisse transparaître des connaissances alchimiques et cabalistiques que Malachie ne possédait pas.
Le fait que les erreurs sur certaines devises de papes ayant régné avant 1595 se retrouvent dans les textes de cette époque laisse supposer que les « prophéties » concernant la période antérieure à 1595 seraient un apocryphe du XVIe siècle. Prenons l'exemple d'une erreur commise une cinquantaine d'années plus tôt par Panvinio, professeur de théologie, qui affirmait que le pape Eugène IV appartenait à l'ordre des Célestins. Cette mauvaise information se retrouve dans la devise qui lui est attribuée: « Lupa Caelestina » (Louve Celestine), alors que ce pape était Augustinien.
Certains supposent que ces prophéties auraient été rédigées pour le conclave de 1590 afin d'en influencer le résultat. D'autres prétendent que les prophéties auraient été écrites par Nostradamus, le célèbre astrologue. Cette dernière assertion est très critiquée; on lui reproche son manque de fondement sérieux.
[modifier] Forme antérieure de la prophétie dite des papes
En revanche, il n'est pas impossible que le texte de Wyon puisse avoir été conçu dans un but électoraliste car il faut savoir qu'avant même l'apparition de son propre texte, des "roues" avec des gravures et des devises énigmatiques ont circulé qui servirent à influencer plusieurs conclaves. On en trouvera la description dans un ouvrage de Roger Duguet (Abbé Paul Boulin) intitulé Autour de la Tiare, paru chez Sorlot. Cet ouvrage montre du reste à quel point cette pure "propagande" a pu continuer d'enfiévrer les esprits au moment de la dernière guerre mondiale.
[modifier] Structure du texte
C'est une liste en latin qui énumère 111 devises, attribuées aux papes successeurs de Célestin II (1143-1144) et prétendant annoncer la fin du monde, celle-ci arrivant avec le dernier pape annoncé. Pour chaque pape, une devise latine est donnée qui a suscité des interprétations prophétiques. Suivant la date à laquelle ce document a été rédigé, se pose le problème de la prise en compte ou non des antipapes. L'énumération des devises se termine par un texte :
- « In persecutione extrema romanae ecclesiae sedebit Petrus Romanus, qui pascet oves in multis tribulationibus; quibus transactis, civitas septis collis diruetur, et Judex tremendus judicabit populum suum. Amen »
- "Pierre le Romain aura son siège dans l’ultime persécution de la Sainte église romaine, lui qui fera paître ses brebis lors de ses nombreuses tribulations, après lesquelles, la cité aux sept collines sera détruite et le Juge redoutable le proclamera à son peuple."
Dont l'interprétation est controversée, annonce du dernier pape «Pierre le Romain» durant le règne duquel Rome et la chrétienté seraient détruite, ou annonce d'un nouveau prophète ?
La fonction de prophétie s'attacherait évidemment aux papes postérieurs à 1595 dont la devise correspondrait plus ou moins à un caractère de leur pontificat ou de leur vie. La 78e devise, qui correspondrait au pape Léon XI élu en 1605, entame donc la partie prophétique du document. Le 110e pape de la liste correspondrait au pape Jean-Paul II et la devise est « De Labore Solis » (du travail du soleil) ce qui a été interprété de plusieurs façons :
- Ce pape est originaire d'un pays à l'Est de Rome, là où le soleil se lève.
- Sous son pontificat s'est dégelée la situation du bloc soviétique, ainsi que la "guerre froide", comme neige au soleil.
- Il est né le 18 mai 1920, jour d'éclipse partielle de soleil, et enterré le 8 avril 2005, jour d'une éclipse annulaire-totale de soleil.
- Il a parcouru toute la planète, en faisant le tour d'une manière infatigable, comme le soleil.
L'élection de Benoît XVI auquel la liste attribuerait la 111e devise « Gloria Oliviae» (de la gloire de l'olivier) serait aussi la dernière étape avant la « fin du monde » ou l'arrivée d'un nouveau prophète.
[modifier] Liste des devises données aux 19 derniers papes
Leur interprétation est variable suivant les sources et plus ou moins pertinente. Comme pour les prophéties de Nostradamus, on s'apercevra qu'en cherchant tous azimuts dans la vie d'une personne, presque n'importe quelle formule peut trouver un sens. Cependant, quelques devises ont fait l'objet d'une interprétation troublante car elles s'appliquent à l'aspect le plus proéminent du pontificat auquel elles correspondent.
- 94. Rosa Umbriae (La Rose de l'Ombrie) Clément XIII (1758-1769). Il fut gouverneur de Rieti, ville de l'Ombrie connue pour les roses qui la parfument.
- 95. Visus velox (la vue perçante) (et non pas Ursus velox (l'ours véloce) comme le donnent par erreur la plupart des sources) Clément XIV (1769-1774). La maison paternelle de ce pape avait comme enseigne un ours à la course. La devise « modifiée » tombe ici bien mieux que l'originale...
- 96. Peregrinus apostolicus (Le voyageur apostolique) Pie VI (1775-1799). Ce pape fit deux voyages à l'étranger, c'était la première fois, depuis des siècles, qu'un pape quittait l'Italie.
- 97. Aquila rapax (L'aigle rapace ou l'aigle ravisseur) Pie VII (1800-1823). Il fut emprisonné à Savone puis à Fontainebleau par Napoléon Ier, le 19 juin 1812, l'aigle rapace, qui le séquestra et l'obligea de signer le Concordat le 25 janvier 1813.
- 98. Canis et Coluber (Le chien et la couleuvre) Léon XII (1823-1829). Ce pontificat est marqué par l'efflorescence des sociétés secrètes, caractérisées par le cynisme et la traîtrise.
- 99. Vir religiosus (L'homme religieux) Pie VIII (1829-1830). Ce pontificat très court est signalé par une seule encyclique, et elle attaque les erreurs et l'indifférence moderne en matière de religion.
- 100. De balneis Etruriae (De Balnes en Etrurie) Grégoire XVI (1831-1846). Ce pape appartenait à l'ordre des Camaldules, fondé par Saint Romuald à Balnes en Etrurie, et créa le musée étrusque au Vatican.
- 101. Crux de cruce (La croix (venant) de la croix) Pie IX (1846-1878). Ce pape eut à supporter la croix de la persécution lors de la révolution italienne (le Risorgimento) et cette révolution était dirigée par la Maison de Savoie qui porte une croix dans ses armoiries.
- 102. Lumen in caelo (La lumière dans le ciel) Léon XIII (1878-1903). Ce pape appartenait à la famille des Pecci dont les armes représentent une comète dans un ciel d'azur.
- 103. Ignis ardens (Le feu ardent) Pie X (1903-1914). Élu en la fête de St Dominique (4 Août) dont l'ordre porte en chef une torche ardente et il était cardinal du titre de St Bernard-aux-Thermes.
- 104. Religio depopulata (La religion dépeuplée) Benoît XV (1914-1922). Il fut pape pendant la guerre mondiale 1914-18, la grippe espagnole et la révolution communiste, qui dépeuplèrent vraiment les temples de la chrétienté.
- 105. Fides intrepida (La foi intrépide) Pie XI (1922-1939). Le pape des missions et de l'action catholique, preuves d'une foi intrépide.
- 106. Pastor angelicus (Le pasteur angélique) Pie XII (1939-1958). Eugenio Pacelli, pasteur angélique, nom justifié par une piété incandescente, mystique, et une allure éthérée, diaphane, détachée des réalités terrestres.
- 107. Pastor et nauta (Le pasteur et nautonnier) Jean XXIII (1958-1963). Il fut patriarche de Venise, qui est la ville des navigateurs. Il fut, tel un pasteur, à la source de la grande étape du Concile Vatican II.
- 108. Flos florum (La fleur des fleurs) Paul VI (1963-1978). Le lys, surnommé « la fleur des fleurs », est le symbole de la ville de Florence dont ce pape était originaire. De plus, ses armes étaient formées de trois lys.
- 109. De mediate lunae (de la moitié de la lune ou du temps moyen d'une lune) Jean-Paul Ier (1978-1978). Élu lors de la demi-lune, Jean-Paul Ier mourut 33 jours plus tard lors de la demi-lune suivante.
- 110. De labore Solis (de l'éclipse solaire, du labeur du soleil) Jean-Paul II (1978-2005). Né le jour d'une éclipse solaire et aussi enterré le jour d'une éclipse solaire, ce pape a visité (tout comme le soleil) tous les continents lors de ses nombreux voyages.
- 111. Gloria olivae (la gloire de l'olive). Benoît XVI (2005-). Les branches d'olivier sont le symbole des olivétains, une branche de l'ordre de saint Benoît, mais ce n'est aucunement le symbole des bénédictins en général et le cardinal Ratzinger n'avait aucun lien avec les olivétains. L'olivier est aussi le symbole de la paix : Benoît XVI prône un rapprochement avec le judaïsme (on considère parfois la branche d'olivier comme symbole d'Israël) ; mais si c'est là le sens de cette devis, elle peut s'appliquer indifféremment à tous les papes depuis Jean XXIII. Le pape est membre associé étranger, depuis 1992, de l'Académie des Sciences morales et politiques, dont l'uniforme - l'habit vert - est orné de feuilles d'olivier ; cependant ni les membres associés étrangers, ni les académiciens ecclésiastiques en général (y compris les membres titulaires, tel le cardinal Roger Etchegaray) ne portent l'habit vert, et le cardinal Ratzinger n'a jamais porté cet habit.
- 112. Petrus Romanus (Pierre le Romain). Cette dernière prophétie ne faisait pas partie du manuscrit d'origine, mais a apparemment été rajoutée au XIXe siècle, probablement par l'ordre de Saint Benoît afin de se distancer du dernier pape qui pourrait être « la bête ». Cette dernière prophétie est ainsi rédigée :
- In psecutione. extrema S.R.E. sedebit. / Petrus Romanus, qui pascet oues in multis tribulationibus : / quibus transactis ciuitas septicollis diruetur,/ & Iudex tremêdus indicabit populum suum. Finis.
Il a été d'usage de la traduire ainsi : "Dans la dernière persécution de la sainte Église romaine siègera Pierre Romain, qui paîtra ses brebis au milieu de nombreuses tribulations. Ces tribulations passées, la ville aux sept collines sera détruite et le juge redoutable jugera son peuple.", traduction laissant à penser que Petrus Romanus succèderait immédiatement à Gloria Olivae, autrement dit à Benoît XVI, élu en 2005.
Aujourd'hui, des exégètes modernes estiment que le mot "psecutione" ne doit pas être lu comme "persecutione" mais comme "prosecutione" (dans la suite des temps…), ce qui signifie que, si Pierre le Romain doit être un successeur de Benoît XVI et être le dernier pape, il ne serait pas son successeur immédiat : d'autres papes pourraient s'intercaler entre ces deux pontifes.
Il est à noter qu'en tant que doyen des cardinaux, Joseph Ratzinger avait le moyen de choisir la date de funérailles de son prédécesseur (de labore solis)...à savoir un jour d'éclipse solaire. Serait-il en train de satisfaire artificiellement la prophétie de Malachie ?
[modifier] Liens externes
- Interprétation de l'ensemble des devises, arguments de la controverse développée au XIXe siècle sur l'origine de la prophétie