Coma
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Le terme « coma » signifie « sommeil profond » en grec ancien. Le coma est une abolition de la conscience et de la vigilance non réversible par la stimulation, consécutif à une lésion cérébrale traumatique ou pathologique. Il constitue toujours une urgence diagnostique et thérapeutique.
Il se distingue de la syncope, brève perte de connaissance. Il doit être surtout distingué à sa prise en charge initiale de l'arrêt cardio-circulatoire dont le traitement est totalement différent.
[modifier] Définition
Le coma est l'abolition de la conscience et de la vigilance accompagné d'insensibilité aux épreuves de stimulation. Plus précisément, il s'agit d'une abolition de la vie de relation (conscience, sensibilité) tandis que les fonctions végétatives sont plus ou moins bien conservés.
On distingue généralement quatre stades de comas:
- Coma stade 1 ou stade de l'obnubilation. Le patient est capable de répondre à des stimuli douloureux tels que le pincement en repoussant par exemple la main du médecin, voire de communiquer de manière simple (grognements).
- Coma stade 2 : c'est le stade de la disparition de la capacité d'éveil du sujet. La réaction aux stimuli douloureux peut encore être présente mais n'est pas appropriée et la communication avec le malade n'est pas possible.
- Coma stade 3 : c'est le coma profond ou coma carus. Il n'y a plus aucune réaction aux stimuli douloureux. Des troubles végétatifs peuvent apparaître à ce stade.
- Coma stade 4 ou coma dépassé : la vie n'est maintenue que par des moyens artificiels.
[modifier] Physiopathologie
Conscience et vigilance sont des fonctions cérébrales supérieures qui se manifestent, à l'état normal, par un éveil et une réactivité comportementale. Elles sont assurées par la formation réticulée activatrice ascendante (FRAA) qui est un ensemble de fibres nerveuses recevant des stimuli sensitifs et moteurs, et qui se projettent sur l'ensemble du cortex cérébral soit directement, soit via les thalamus. Le coma est ainsi consécutif soit à une lésion focale étendue de la FRAA (compression, destruction), soit (cas le plus fréquent) à une souffrance cérébrale diffuse. Les lésions de la FRAA peuvent se situer au niveau du tronc cérébral ou des hémisphères cérébraux (en particulier au cours d'un engagement cérébral, où la région mésencéphalo-diencéphalique est mécaniquement comprimée par l'hyperpression régnante dans la boîte crânienne).
[modifier] Étiologies
[modifier] Coma traumatique
C'est un diagnostic le plus souvent évident en fonction du contexte : accident de la voie publique, agression, chute, etc. Cependant, dans certains cas, le lien entre le traumatisme et le coma (ainsi que la chronologie des évènements) est plus difficile : chez l'alcoolique, le vieillard, l'enfant, le traumatisme peut passer inaperçu (des chocs minimes peuvent, dans ces populations fragiles, entrainer une hémorragie cérébrale), et il peut exister un délai entre le traumatisme et le coma. Dans tous les cas douteux, le scanner cérébral en urgence est indispensable, puis le transfert en neurochirurgie pour prise en charge thérapeutique.
L'état d'inconscience est lié à un dysfonctionnement plus ou mois profond de la substance réticulée ascendente (SRA) située dans la profondeur du cerveau et lésée par la concentration des ondes de choc traumatiques (phénomènes stéréotaxiques).
Le pronostic dépend principalement de l'importance des lésions cérébrales initiales (profondeur du coma), de l'âge et de l'état général du patient avant le traumatisme. Plus le coma est superficiel, le patient jeune et en bon état général avant l'accident, plus les chances de guérison sont grandes.
[modifier] Causes métaboliques
Ces causes sont fréquentes, entraînant un coma par perturbation aiguë et diffuse du fonctionnement cérébral. On les suspecte lorsque le coma est d'apparition progressive (souvent précédé d'un syndrome confusionnel), associé à des phénomènes moteurs (astérixis, myoclonies, hypertonie oppositionnelle, tremblements, fasciculations), sans signe focaux (sauf pour l'hypoglycémie), associé à des crises convulsives, avec réflexe photomoteur conservé.
[modifier] Hypoglycémie
Cas extrêmement fréquent et parfois mortel, alors que son traitement (le sucre) est disponible dans toutes les épiceries ! Le coma s'associe à des sueurs profuses, un signe de Babinski bilatéral, des convulsions. Ceci justifie l'injection systématique de sérum glucosé devant un coma sans cause évidente. Le retour à la conscience après re-sucrage est un très bon argument orientant vers une hypoglycémie.
[modifier] Troubles ioniques
Troubles de la natrémie, de la calcémie.
[modifier] Hypoxie cérébrale
Par choc cardiaque, insuffisance respiratoire, ou anémie aiguë.
[modifier] Encéphalopathie de Gayet-Wernicke
L'Encéphalopathie de Gayet-Wernicke est due à un déficit majeur en vitamine B1 (chez l'alcoolique dénutri le plus souvent). Un syndrome confusionnel pré-comateux est habituel, les phénomènes moteurs sont prééminents.
[modifier] Encéphalopathie hépatique
Elle est secondaire à une insuffisance hépato-cellulaire avancée, qui provoque l'accumulation de toxiques dans le sang normalement épurés par le foie.
[modifier] Encéphalopathie rénale
Dans le cadre d'une insuffisance rénale terminale.
[modifier] Causes endocrinologiques
Coma hyperosmolaire ou acidose lactique chez les diabétiques, coma myxœdémateux de l'hypothyroïdie, insuffisance surrénalienne aiguë.
[modifier] Hypothermie sévère
[modifier] Causes toxiques
[modifier] Intoxication alcoolique aiguë
Le coma survient après une dose variable, en général proche de 4 à 5 grammes d'alcool par litre de sang. On devra toujours rechercher une autre cause au coma en cas d'alcoolisation : hypoglycémie, traumatisme crânien, hémorragie méningée. Ce coma est appelé "coma éthylique".
[modifier] Intoxication médicamenteuse
Par barbituriques, benzodiazépines, lithium, antidépresseurs tricycliques, etc.
[modifier] Morphine et dérivés (héroïne en particulier)
Le coma est calme et profond, avec une insuffisance respiratoire liée à une altération du fonctionnement des centres respiratoires cérébraux. Les pupilles sont en myosis très serré. Le coma peut également être éthylique.
[modifier] Monoxyde de carbone
[modifier] Insecticides organophosphorés
Le coma est calme, profond, pupilles en myosis.
[modifier] Causes vasculaires
Par infarctus cérébral, hémorragie méningée, hémorragie intra-parenchymateuse, thrombophlébite cérébrale.
[modifier] Causes infectieuses
Par méningo-encéphalite ou abcès cérébral.
[modifier] Causes tumorales
Tumeurs bénignes ou malignes (cancer) développées aux dépens du parenchyme cérébral.
[modifier] Épilepsie
Soit par déficit post-critique (coma profond avec bradypnée succédant à une crise généralisée), soit par état de mal épileptique.
[modifier] Prise en charge immédiate
[modifier] Avant l'arrivée des secours médicalisés
Le coma est un diagnostic médical ; un témoin intervenant (premiers secours) n'a pas la possibilité de distinguer le coma d'une inconscience transitoire. L'inconscience se distingue par :
- l'absence d'action spontanée : la personne ne parle pas, ne bouge pas, n'ouvre pas les yeux ;
- l'absence de réaction à une sollicitation : la personne ne réagit pas lorsqu'on lui touche la main, lorsqu'on lui pose une question simple (« Vous m'entendez ? »), lorsqu'on lui donne un ordre simple (« Serrez-moi la main ! »).
Dès lors que l'on constate l'inconscience, il convient :
- de déserrer les vêtements pouvant gêner la respiration (foulard, cravatte, col, ceinture, premier bouton du pantalon) ;
- de s'assurer qu'il ne s'agit pas d'un arrêt cardio-circulatoire : la personne respire spontanément lorsqu'on lui bascule prudemment la tête en arrière ;
- si la personne est allongée plat dos, la mettre en position latérale de sécurité ; sinon, la laisser en place sauf nécessité d'un dégagement d'urgence ;
- avertir les secours ;
- attendre auprès du patient l'arrivée des secours ; ne plus toucher le patient jusqu'à l'arrivée des secours, maintenir les badauds à l'écart.
Note : la doctrine de l'European Ressuscitation Council est de ne jamais laisser une victime inconsciente plat-dos, la mise en PLS est donc systématique si la victime est trouvée plat-dos, même en cas de suspicion d'un traumatisme rachidien. La doctrine peut être différente selon les pays. Voir l'article sur la Libération des voies aériennes.
[modifier] Prise en charge médicale
- Évaluation de la conscience, en général avec le score de Glasgow.
- Sécurisation des voies aériennes par intubation.
- Bilan des fonctions vitales : Prise de la température, fonction respiratoire (cyanose, encombrement bronchique, fréquence respiratoire, résultats des gaz du sang), fonction cardiaque (pouls, pression artérielle, électrocardiogramme, signes de collapsus).
- Pose d'une voie veineuse périphérique et d'une sonde urinaire,
- Injection systématique de 30 cm³ de sérum glucosé à 30 % dans l'optique d'une hypoglycémie,
- Injection d'un antidote si on suspecte une intoxication aux morphiniques ou aux benzodiazépines,
- Injection de vitamine B1 si on suspecte une encéphalopathie de Gayet-Wernicke.
A l'issu de ce bilan, les fonctions vitales doivent être stabilisées (insuffisance respiratoire : oxygénothérapie, voir intubation oro-trachéale et ventilation mécanique; insuffisance circulatoire : perfusion de macromolécules et drogues vasopressives; etc.), le patient hospitalisé dans un service adapté (service de réanimation médicale).
[modifier] Bilan de première intention
- Bilan biologique : Hémogramme, plaquettes, VS, CRP, glycémie capillaire et veineuse, ionogramme sanguin, calcémie, bilan rénal (urée et créatinine sanguine), bilan hépatique, hémocultures, TP, TCA, alcoolémie, recherche de toxiques dans le sang et les urines.
- Électroencéphalogramme en cas de crise convulsive.
- Scanner cérébral voir IRM cérébrale en cas de cause traumatique, vasculaire, tumorale, de suspicion d'abcès cérébral, etc.
- Ponction lombaire en cas de suspicion de méningo-encéphalite.
- etc.
[modifier] Examen clinique
[modifier] Interrogatoire de l'entourage et/ou des secours
Afin d'orienter le diagnostic, on recherche une notion de traumatisme crânien, des antécédents évocateurs (épilepsie, maladie endocrinienne, alcoolisme, toxicomanie, etc.), les médicaments pris habituellement (en particulier les psychotropes), les circonstances de début du coma, des signes annonciateurs, d'éventuels signes d'accompagnement, la notion d'épisodes antérieurs similaires.
[modifier] Examen général
Organe par organe, appareil par appareil : il recherche des signes de traumatisme, une odeur alcoolique de l'haleine, des points de piqûre (toxicomanie), des signes infectieux, etc.
[modifier] Examen neurologique
Il doit être complet, soigneux, exhaustif, répété, ses conclusions doivent être consignées par écrit.
[modifier] Recherche d'un syndrome méningé
Il se manifeste par une raideur de la nuque (résistance à la flexion de la tête sur le tronc), et impose un bilan infectieux (hémocultures et ponction lombaire) éventuellement complété d'un scanner cérébral.
[modifier] Examen des réflexes
[modifier] Recherche de mouvements anormaux
Focaux ou generaux survenant par crise breve: evoquer une crise d'epilepsie;ou permanents ou provoques comme astérixis ou myoclonies diffuses: evoquer une affection metabolique.
[modifier] Étude des voies sensitivomotrices
Elle s'effectue en évaluant la réponse à la douleur du malade (pincement des ongles, du mamelon, friction sternale). On observe attentivement la réaction motrice et comportementale au stimulus nociceptif. Une réaction bilatérale adaptée (retrait du membre, évitement de la douleur, grognement) signe une intégrité des voies sensitivomotrices. Une réaction adaptée d'un seul côté évoque une hémiplégie. Les comas les plus sévères provoquent des réactions inadaptées à la douleur :
- Signes de décérébration : extension, adduction, et rotation interne des membres supérieurs (témoigne d'une souffrance sévère du tronc cérébral).
- Signes de décortication : flexion et adduction des membres supérieurs, extension des membres inférieurs. La décortication indique une souffrance hémisphérique étendue.
[modifier] Examen des yeux
- Paupières : Les paupières sont spontanément fermées. Si on les ouvre, elles se referment spontanément et doucement. La résistance active à l'ouverture des yeux évoque un coma psychogène (dans l'hystérie essentiellement)
- Clignement des yeux : Le clignement spontané prouve l'intégrité de la FRAA, et doit faire évoquer un locked-in syndrome (qui n'est pas un coma mais une abolition de toutes les voies sensitivomotrices, sans altération de la conscience, secondaire à une thrombose de l'artère basilaire). Le clignement à la menace témoigne d'une activité corticale préservée. Le clignement à la stimulation lumineuse témoigne de l'intégrité des voies sensitives. Enfin, on teste le réflexe cornéen (occlusion reflexe des yeux à la stimulation de la cornée), qui explore la 5e paire de nerfs crâniens et ses noyaux.
- Examen des pupilles : Des pupilles dilatées (en mydriase), aréactives, témoignent de lésions neurologiques diffuses et généralement irréversibles. Une mydriase unilatérale évoque un engagement cérébral imminent de très mauvais pronostic. Un myosis serré se retrouve dans les intoxications aux morphiniques et aux pesticides.
- Position des globes oculaires
- Mouvements oculaires : des mouvements spontanés ou provoqués témoignent de l'intégrité du tronc cérébral
- Réflexes oculaires : réflexe oculo-céphalique, réflexe oculo-vestibulaire
- Examen du fond d'œil, sans dilatation de l'iris, à la recherche d'un œdème maculaire reflet d'une hypertension intra-crânienne.
[modifier] Classification du coma
Voir l'article score de Glasgow
[modifier] Attitude thérapeutique
L'hospitalisation en service de réanimation est indispensable pour assurer une prise en charge et un suivi optimal. Le traitement étiologique, lorsqu'il est possible, est la priorité : traitement anticonvulsivant en cas d'épilepsie, re-sucrage en cas d'hypoglycémie, antibiotiques en cas de méningo-encéphalite, etc.
[modifier] Surveillance
- Examen clinique quotidien et examen neurologique plutiquotidien avec score de Glasgow, consigné par écrit, afin de suivre l'évolution des atteintes nerveuses.
- Constantes vitales (pouls, tension artérielle, fréquence respiratoire, température) toutes les deux heures initialement.
- Bilan biologique (ionogramme sanguin, hémogramme, fonction rénale, etc.) et radiologique (radios de thorax) quotidien
- Recherche régulière de complications (examen cutané, examen des yeux, de la bouche, des sites de perfusion, de l'état veineux)
- Surveillance des entrées (apports liquidiens et caloriques) et des sorties (poche à urines), état nutritionnel
- Nursing
[modifier] Traitement symptomatique
- Apports d'eau et d'ions (sodium, potassium, calcium) en fonction des ionogrammes sanguins et urinaires, et du bilan entrées/sorties
- Apports caloriques par sonde gastrique ou par voie parentérale (intra veineuse) d'environ 2000 calories par jour, à adapter à l'état nutritionnel
- Apports de vitamine B1, B6, PP, et de phosphore.
- Ventilation mécanique en cas de défaillance respiratoire avec aspirations fréquentes des sécretions bronchiques
- Matelas anti-escarres, soins de peau, surveillance des points d'appui. Le massage de ces points fragilisés est controversé.
- Soins des yeux, soins de bouche
- Kinésithérapie passive au lit afin de prévenir les rétractions tendineuses.
- Prévention des thromboses veineuses par héparinothérapie.
[modifier] Cas particulier du coma «dépassé»=mort cérébrale
L'expression désigne un état de mort cérébrale associé au maintien artificiel des fonctions vitales.
[modifier] Coma artificiel
Aussi appelé "sédation", le coma artificiel est un coma provoqué par le médecin par administration d'un sédatif ou d'un hypnotique dont la fonction est d’endormir le patient. On ajoute souvent un analgésique pour éviter la douleur. Le coma artificiel peut durer de quelques heures à quelques jours et permet de traiter un patient gravement malade, le plus souvent, lorsque le patient est sous respirateur et qu’il ne le supporte pas bien.
[modifier] Voir aussi
[modifier] Liens internes
[modifier] Liens externes
- Coma : que faire ?, Le Généraliste n°2021, 7 avril 2000
- Coma, un cas clinique encore mal connu
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