La Cagoule
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La Cagoule est le surnom donné par la presse à l'"Organisation secrète d'action révolutionnaire nationale" (c'est le nom donné par ses fondateurs, l'adjectif nationale disparaît assez vite) qui est connue sous le nom de "Comité secret d'action révolutionnaire" (CSAR). C'est un groupe d'extrême droite actif dans les années 1930 en France. Son principal dirigeant fut Eugène Deloncle.
Ce surnom lui a été attribué par Maurice Pujo de l'Action française. Lorsque ce terme est utilisé par son journal, c'est avec dédain et mépris. Pujo, comme Charles Maurras, le collaborateur le plus célèbre de L'Action française, ne tient pas à ce que son organisation royaliste soit un jour confondue avec cette autre organisation naissante, plus dangereuse, plus pernicieuse.
Sommaire |
[modifier] Création
Si l'Action française sait que le CSAR existe, c'est que la grande majorité des dirigeants de cette nouvelle organisation vient de ses propres rangs ou de son organisation de jeunesse, les Camelots du Roi, tels que :
- Eugène Deloncle, l'ingénieur ;
- Aristide Corre, l'homme de lettres ;
- le duc corse, Joseph Pozzo di Borgo ;
- le docteur Henri Martin ;
- Jean Filliol dit « le tueur » ;
Mais pour les membres de la Cagoule, lassés de l'attentisme de Pujo et de Maurras, l'heure est venue d'agir. En janvier 1935, Deloncle démissionne et fonde, dans le secret le plus absolu, l'organisme conspirateur.
Ami intime d’Eugène Deloncle, Eugène Schueller, fondateur de la société l'Oréal, met ses moyens personnels à disposition de la Cagoule qui organise des réunions dans son propre bureau du siège de la société.
Des jeunes gens, amis et étudiants pour la plupart, résidant à l’internat des pères maristes (au 104, rue de Vaugirard à Paris), fréquentent alors les chefs de la Cagoule. Sans tous adhérer au mouvement ou faire état publiquement d'une quelconque approbation, il y parmi cette bande d'amis Pierre Bénouville (issu de l'Action française), Claude Roy, François Mitterrand et André Bettencourt[1].
Le nom de Georges Loustaunau-Lacau, officier de l'armée française et fondateur des réseaux "Corvignoles", apparaît également.
[modifier] Action subversive
À partir de 1935, ce groupe mène des actions de déstabilisation de la République (voir Attentats ci-dessous).
Anticommuniste, antisémite et antirépublicain, ce mouvement est de tendance fasciste. Il tisse des liens avec des dirigeants fascistes du gouvernement de Benito Mussolini en Italie et acheminent des armes au général Francisco Franco en Espagne. En échange, La Cagoule obtient un appui financier. À la fin du mois de novembre 1936, Deloncle rencontre le général Henri Giraud[2]. Giraud promet son aide à Deloncle en cas de soulèvement communiste, et Deloncle lui annonce que les cagoulards se rangeraient sous ses ordres en échange. Très satisfait, Giraud « est évidemment d'accord pour travailler avec les gens de l'OSARN et souhaite la meilleure réussite à l'entreprise de Deloncle et Duseigneur... » Selon Péan, le colonel Charles de Gaulle était présent mais les biographes de Giraud ne mentionnent pas cet entretien. De Gaulle n'a jamais été accusé d'appartenir à la Cagoule hormis une évocation sans la moindre preuve par l'ancien député de Neuilly-sur-Seine[3] Henry de Kérillis[4].
Après l'échec de leur coup d’État dans la nuit du 15 au 16 novembre 1937, le complot est mis au jour. Des caches d’armes réparties sur tout le territoire sont découvertes. À La Celle-Saint-Cloud, la cave d'une maison aurait été aménagée en centre de détention par la Cagoule[5]. En 1938, plus de cent vingt membres de la Cagoule sont arrêtés.
[modifier] Pendant la Deuxième Guerre mondiale
Après l'armistice de juin 1940, plusieurs membres ou sympathisants de la Cagoule se rallièrent au gouvernement de Vichy. Parmi eux beaucoup d'adeptes de la "France seule" croient en un double jeu de Petain. Cette espoir se dissipera progressivement avec la rencontre Montoire, puis la libération de Laval le 17 décembre 1940.
- Jean Filliol
- Eugène Deloncle, fondateur du Mouvement social révolutionnaire (MSR), qui fusionne ensuite avec le Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat.
- Joseph Darnand, chef la Cagoule à Nice, il fonda le service d'Ordre Légionnaire en zone nord qui fut interdit par l'armée Allemande. Antiallemand au début de l'occupation, il tenta par deux fois d'établir des contacts avec Londres (par l'intermédiaire de Groussard, puis du gouvernement d'Alger). Par la suite il fut l'un des piliers de la collaboration. Fondateur de la Milice, il devint Obersturmführer de la SS, et Secrétaire au Maintien de l'Ordre du gouvernement de Vichy.
- Jean Bassompierre, Membre de la LVF puis de la division Charlemagne des Waffen-SS.
- Jean-Marie Bouvyer, complice du meurtre des frères Rosseli et chef du service d'enquête du Commissariat général aux questions juives à partir d'avril 1944 [2]
- le docteur Henri Martin, fasciste antiallemand il s'oppose à Laval et Darlan avant d'être incarcéré par Pucheu, il s'évadera pour rejoindre le maquis. Il participera à la libération de Lyon puis s'engagera dans la VIIe armée américaine.
- Gabriel Jeantet attaché au cabinet du Maréchal Pétain , il rejoindra plus tard la résistance et sera arreté et déporté en 1944.
- Simon Arbellot
- François Méténier
- Yves Dautun
- Eugène Schueller
- André Bettencourt dirige l'organe de propagande antisémite La Terre française, il rejoindra la résistance au début 1943.
- Jacques Corrèze Membre de la LVF
Mais beaucoup de cagoulards étaient de fervents nationalistes, antiallemand et hostile à toute compromission avec l'occupant. La lutte pour la libération de la patrie devient donc une priorité, d'autant qu'en 1940 beaucoup voient dans le régime Nazi (pacte germano-soviétique) et leurs alliés de Vichy (avec des personnalités comme le socialiste Déat ou l'ancien communiste Doriot) une aventure internationaliste, voire "de gauche". Les retournements d'alliance de juin 1941 ,viendront trop tard pour ceux qui se sont engagés contre l'occupant, d'autant que la nouvelle croisade européenne contre le bolchévisme des Nazi présentera un aspect supranational peu compatible avec l'idéologie cagoularde.
Pour ces adeptes du complot et de l'action clandestine, la Résistance est une option naturelle. Et on trouvera des anciens de la cagoule parmis les premiers résistants:
- Claude Hettier de Boislambert, qui devient dès juin 1940 un proche collaborateur du général de Gaulle,
- Maurice Duclos également l'un des premiers à rejoindre Londres, avait fait de la prison dans les années 30 suite à une affaire de traffic d'arme pour le CSAR
- Pierre Fourcaud : fondateur du réseau Brutus. A été désigné comme un ancien membre de la cagoule par Duclos, l'a nié lui même avant d'avouer à Dewarvin en avoir fait partie avant de la quitter suite à un attentat violent.
- Georges Loustaunau-Lacau : fondateur du réseau Alliance
- Marie-Madeleine Fourcade, Léon Faye, François Méténier : membres du réseau Alliance
- Pierre Bénouville,
- Corvisart.
- Paul Dungler : fondateur du réseau Septième colonne d’Alsace
- Alfred Heurteaux : fondateur du réseau Hector
- Claude Lamirault : rejoint Londres en octobre 1940, sera parachuté pour créer le réseau Jade-Fitzroy.
- Joseph Pozzo di Borgo, Aristide Corre, Michel Harispe
André Dewavrin, qui travaillait à Londre avec Duclos et Fourcaud a été accusé par André Labarthe d'avoir fait partie de la Cagoule avec la carte n°93. Cette accusation s'est avérée fausse.
Pendant la guerre le réseau d'influence de la Cagoule semble donc s'étendre à la fois au coeur de la france libre et dans le régime de Vichy. C'est ainsi par exemple que le 20 août 1940, Maurice Duclos envoyé en France par De Gaulle, peut rencontrer des proches collaborateurs du Maréchal Petain par l'intermédiaire de Gabriel Jeantet.
L'ancien cagoulard Georges Groussard fonde les groupes de protection du maréchal Pétain mais aussi le réseau de Résistance « Gilbert » alors que Jacques Lemaigre-Dubreuil, ancien financier de L'Insurgé, le journal de La Cagoule, soutient le général Giraud, quand Jacques Corrèze, après avoir combattu sur le front de l'Est rentre en France au sein d'un réseau de la résistance.
[modifier] L'après-guerre
À la Libération, Bouvyer bénéficie du témoignage en sa faveur de François Mitterrand, passé à la résistance en 1942. En effet, Bouvyer a caché chez lui du matériel et fabriqué de faux papiers pour le Mouvement national des prisonniers de guerre, le mouvement dirigé par François Mitterrand et Maurice Pinot. D'autres témoins, comme le capitaine FFI Maubois, ont également attesté de services rendus. Bouvyer a noué une amitié personnelle avec F. Mitterrand. Lors de son procès, il affirme avoir renié ses idées des années 1930, se disant prêt à dénoncer tous les dirigeants de la Cagoule qu'il connaît, et même à s'entendre avec les communistes autrefois abhorrés[6]. La mère de Jean-Marie Bouvyer devient en 1946 la marraine de Jean-Christophe Mitterrand.
Le procès de la Cagoule eut lieu en 1948.
[modifier] Attentats
- 13 février 1936: tentative d'assassinat contre Léon Blum par de futurs membres de la Cagoule.
- 23 janvier 1937 : assassinat de l'économiste soviétique Dimitri Navachine près de la porte d'Auteuil.
- 8 février 1937 : assassinat de Maurice Juif.
- 9 juin 1937 : assassinat à Bagnoles-de-l'Orne des frères Carlo et Nello Rosselli, deux intellectuels antifascistes italiens, pour le compte des services de renseignement fascistes.
- août 1937 : plasticage à l'aérodrome de Toussus-le-Noble d'avions destinés à l’Espagne républicaine.
- 16 septembre 1937 : attentat à la bombe contre la Confédération générale du patronat français, 4, rue de Presbourg et l'Union des industries métallurgiques, 45, rue Boissière, dans le but de faire accuser les communistes. Deux agents de police, en faction devant les bâtiments, sont tués par l'explosion.
- 5 juillet 1941 : assassinat de Marx Dormoy à l'hôtel du Relais de l'Empereur de Montélimar par d'anciens membres de l'organisation terroriste.
[modifier] Bibliographie
- Christian Bernadac, Dagore, les carnets secrets de la Cagoule ;
- Philippe Bourdrel, La Cagoule, éd. Albin Michel, 1998 ;
- Brigitte et Gilles Delluc, 2005 : "Jean Filliol, du Périgord à la Cagoule, de la Milice à Oradour", Pilote 24 édition ;
- Pierre Péan, Le Mystérieur Docteur Martin, éd. Fayard, 1993 .*
[modifier] Notes et références
- ↑ . En 1945, Eugène Schueller exprimera toute sa gratitude envers Mitterrand et Bettencourt pour avoir témoigné en sa faveur lors de son procès pour collaboration en nommant le premier directeur du magazine Votre Beauté puis en finançant sa campagne électorale dans la Nièvre en 1946 et le second en le nommant à la direction de son groupe de cosmétique. Schueller aura aussi contribué au lancement de la carrière de François Dalle, autre mariste de la rue de Vaugirard [1] ; Sur les relations troubles du trio Dalle, Bettencourt, Mitterrand, voir Une histoire sans fard - L'Oréal, des années sombres au boycott arabe par l'historien israélien Michel Bar-Zohar chez Fayard.
- ↑ Pierre Péan. Le Mystérieux Docteur Martin, p. 140
- ↑ Éric Roussel, Charles de Gaulle, éd. Gallimard, 2002, p. 57.
- ↑ Après avoir rejoint Londres en 1940, de Kérillis se fâche avec le général de Gaulle auquel il consacre un pamphlet en 1945 puis finit sa vie aux États-Unis.
- ↑ Selon une émission radiophonique.
- ↑ Pierre Péan, Une jeunesse française, éd. Fayard, 1994, p 540-541