Septante
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Cette page concerne une traduction de la Bible. Pour le nombre septante voir 70 (nombre).
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[modifier] Introduction
La Septante (LXX, latin : Septuaginta) est une traduction de la Torah en langue grecque, qui aurait été réalisée par 70 (ou 72 selon les traditions) personnes à Alexandrie, au IIIe siècle av. J.-C., pour les juifs qui y étaient alors relativement nombreux, à la demande des autorités grecques. Ceci est rapporté dans la Lettre du pseudo-Aristée, qui ne présente pas de garanties d'authenticité historique.
Une légende postérieure veut que ces 70 érudits aient tous traduit séparément l'intégralité du texte, et qu'au moment de comparer leurs travaux, on se soit aperçu avec émerveillement que les 70 traductions étaient identiques.
Par extension, on appelle Septante la version grecque ancienne de la totalité des Écritures bibliques (l'Ancien Testament chrétien), avant que le judaïsme ne se replie sur le texte hébreu et des traductions grecques plus proches dudit texte.
Plusieurs manuscrits de la Septante nous sont parvenus. Quelques différences existent entre ces différentes versions. Il convient de noter que quatre codices complets écrits en onciales existent :
- Le codex vaticanus
- Le codex sinaiticus
- Le codex alexandrinus
- Le codex venetus
De nombreuses autres versions en minuscules existent.
[modifier] Historique
[modifier] D'où vient la Septante ?
L'origine de la Septante tient à deux faits :
- La diaspora depuis l'exil répand des communautés juives autour de la Méditerranée ; l'installation d'une communauté à Alexandrie et en bord de mer, autour du Palais Royal, suite à la conquête de l'Égypte par Alexandre ;
- Le fait d'une part que le culte synagogal était public, et que les Juifs laissaient lire leurs textes aux païens au lieu de les réserver à leurs initiés comme le faisaient d'autres religions. Les Grecs étaient curieux des « sagesses barbares ». Quelques-uns étaient si intéressés par le judaïsme qu'ils gagnaient le statut reconnu de « craignant-Dieu » (signalés, bien plus tard, dans les Actes des Apôtres) en cela qu'ils suivaient les préceptes du judaïsme, au moins les 7 lois des fils de Noé, à l'exception de la circoncision.
[modifier] De quoi était fait le culte synagogal ?
D'une lecture tirée du Tanakh en hébreu, d'une traduction souvent paraphrastique dans la langue vernaculaire (quand la langue vernaculaire est l'araméen, on nomme cela un Targoum) parfois accompagnée d'un commentaire et d'une prédication. On pense que la traduction de la Septante fut précédée de Targoumim grecs. Nombre d'immigrants juifs ne connaissaient plus l'hébreu, et souhaitaient lire leurs textes sacrés dans la langue de leurs transactions commerciales, l'araméen demeurant leur langue quotidienne. Seul le grec pouvait être une langue sacrée à côté de l'hébreu, tant était grand le prestige des philosophies et sciences grecques. Une traduction unifiée fut probablement faite à la demande du souverain lagide Ptolémée, soucieux de connaître les règles des divers peuples qui lui étaient assujettis, dans le cadre d'une réorganisation du royaume. La Septante devint la « loi civique » du royaume d’Égypte, en un élément de sauvegarde de l'identité juive dans la culture grecque.
[modifier] Sur quels textes fut unifiée la Septante ?
D'après la Lettre du pseudo-Aristée, le Pentateuque fut traduit, à Alexandrie, sous Ptolémée II Philadelphe (285-246 avant J.-C.) et l'entreprise se poursuivit pendant deux ou trois siècles.
Une école de traducteurs s'occupa ensuite du Psautier, à Alexandrie, vers 185 avant J.-C. ; ils entreprirent ensuite Ézéchiel, les douze « petits prophètes » et Jérémie. Ils s'occupèrent alors des livres historiques (Josué, Juges, Rois), et enfin Isaïe.
Les autres livres, Daniel, Job, et Siracide furent traduits vers 150 avant J.-C. et l'on hésite sur le lieu de traduction.
On situe en Israël, au premier siècle de l'ère chrétienne, la traduction du Cantique des Cantiques, des Lamentations, du Livre de Ruth et d'Esther, puis celle de l'Ecclésiaste, probablement par Aquila.
On étendit le nom de Septante à des livres non reçus dans le judaïsme en terre d’Israël ou composés directement en grec comme la Sagesse, les compléments à Esther, à Jérémie ou à Daniel.
Les premiers traducteurs grecs disposaient de textes hébreux purement consonantiques, ce qui explique, en partie, les différences entre la Septante et le texte hébreu reçu et que très tôt, en milieu juif, on se soit préoccupé de corriger cette version Alexandrine pour l'aligner sur le texte hébreu.
[modifier] Les manuscrits de Qumrân
Mais la découverte des manuscrits hébreux et grecs de Qumrân en 1947, qui apparaissent comme les restes d'une bibliothèque ayant appartenu à une secte juive, généralement identifiée à celle des « Esséniens », attestent que la LXX (septante) était acceptée comme texte biblique, à côté des textes hébreux.
La découverte a donc obligé à réviser la conception de l'histoire des textes hébreux car ces manuscrits hébreux donnent un texte un peu différent de celui qui résultera plus tard du travail des Massorètes.
À l'inverse, Qumrân a révélé des formes qui expliquent la traduction des LXX : certains passages, jusqu'à présent considérés comme des erreurs ou des amplifications dues aux traducteurs, reçoivent désormais l'appui d'un support hébreu prémassorétique.
Des travaux de comparaison entre les textes hébreux de Qumrân et la LXX, d'autant plus que des similitudes d'interprétation sont également relevées entre certains écrits de la secte des Esséniens et la LXX. L'attention est maintenant attirée sur l'ensemble des écrits juifs post-bibliques, commodément regroupés sous le nom d'écrits intertestamentaires.
La LXX n'est plus un document isolé. Elle se situe dans l'ensemble des textes juifs produits juste avant l'ère chrétienne.
On peut remarquer que le grec utilisé dans la Septante renferme de nombreuses tournures sémitiques et présente le phénomène de l'attraction.
La Septante est donc sans doute plus proche de l'original que le texte peut-être assez tardif des Massorètes (IXe siècle après J.-C.).
Ce n'est qu'au IIe siècle de l'ère chrétienne, après l'extermination des communautés juives d'Égypte et de Cyrénaïque par Hadrien, que la Bible en grec devint exclusivement celle des chrétiens. Auparavant, cette traduction répondait aux besoins du peuple juif en diaspora autour du bassin méditerranéen, dont une communauté particulièrement hellénisée et intellectuelle, celle d'Alexandrie.
[modifier] La diversité des conceptions de Dieu
Il serait bien plus significatif de se poser des questions sur le passage d'une langue ancienne à une langue moderne, qui conduit à l'abandon d'une partie du champ sémantique ou à la recréation d'un autre champ sémantique. Les problèmes de traduction posés par le passage d'une langue sémitique à la langue grecque sont bien plus divers. Qu'on songe à la diversité des désignations du divin dans la Bible hébraïque : El, Eloah, Elohim, El Shadday, Sabaoth dont certaines ne trouvent aucune solution satisfaisante ou qui sont banalisés, lors du passage en grec par theos, le dieu, n'importe lequel, kurios, seigneur ou pantokrâtor, tout puissant. Le chaos initial, vide et désert (wa tohu wa bohu) devient la matière invisible et inorganisée des philosophes ; le souffle divin devient pneuma qui peut nommer le vent mais qui est aussi une composante de l'âme humaine (l'âme : notion inconnue du judaïsme ; nephesh est autre chose.).
[modifier] Les divergences culturelles et les difficultés du texte
Les divergences avec l'hébreu ne sont pas toutes des lectures particulières ni des fautes de traduction. Elles s'expliquent aussi :
- par la différence entre leur modèle et le texte hébreu d'aujourd'hui (la stuttgartensis, par exemple)
- par les diverses vocalisations possibles (codifiées dans la Temura)
- par les permutations de consonnes
- par l'enjambement d'une proposition sur une autre,
- par des actualisations diverses, comme l'effacement ou l'atténuation de tours jugés impropres pour parler du divin, spécialement les menaces des prophéties furent adoucies, au nom de la miséricorde divine exprimant l'espérance des communautés juives hellénistiques.
[modifier] Livres supplémentaires
Initialement la Septante était constituée des rouleaux de la Loi de Moïse (Torah ou Pentateuque du grec Pentateuchos : « cinq rouleaux ») qui furent traduits de l'hébreu au début du IIIe siècle avant Jésus-Christ.
Puis au cours des trois siècles suivants et jusqu'au début de notre ère, d'autres œuvres juives écrites directement en grec ou préservées seulement dans leur version grecque, y ont été ajoutées.
La Septante contient donc plus de livres que ceux de la liste canonique du judaïsme et du protestantisme qui ont pour référence la Bible hébraïque issue du texte massorétique et qui fut compilé, publié et distribué par un groupe de Juifs appelés les Massorètes, entre le VIIe siècle et le Xe siècle.
Cependant ces livres supplémentaires (deutérocanoniques ou Apocryphes), n'en sont pas moins importants dans l'histoire du judaïsme et utiles pour comprendre les idées juives au moment où vécut Jésus-Christ et où va naître la religion nouvelle.
En voici la liste :
- Judith (conservé dans la Bible latine)
- Tobie (conservé dans la Bible latine mais réécrit par Jérôme)
- 1er et 2e livres des Macchabées (conservés dans la Bible latine)
- Sagesse de Salomon (conservés dans la Bible latine)
- Sagesse de Sirach (Siracide ou Ecclésiastique) (conservé dans la Bible latine)
- Baruch (conservé dans la Bible latine)
- Lettre de Jérémie (conservé dans la Bible latine)
- Suzanne (Daniel 13) (conservé dans la Bible latine)
- Bel et le Dragon (Daniel 14) (conservé dans la Bible latine)
- Premier livre d'Esdras (non conservé dans la Bible latine)
- 3e et 4e livres des Macchabées (non conservés dans la Bible latine)
- Psaumes de Salomon (non conservés dans la Bible latine)
Si ces livres figuraient dans l'Ancien Testament des Bibles orthodoxes, ce n'est que depuis le concile de Trente (1545 - 1563), que l'Église catholique romaine a définitivement intégré au Canon des Écritures la plupart d'autres eux, en distinguant les livres inspirés, de ceux qui ne le sont pas.
[modifier] Voir aussi
[modifier] Liens internes
- Bible
- Bible et archéologie
- Canon (Bible)
- Exégèse biblique
- Livres deutérocanoniques
- Nouveau Testament
- Traductions de la Bible en français
[modifier] Bibliographie
- P. Geoltrain (s. dir.), Aux Origines du Christianisme, Gallimard, coll. « Folio histoire », n° 8, Paris, 2000 (articles de la revue Le Monde de la Bible repris et augmentés) ;
- M. Harl, G. Dorival et O. Munnich, La Bible grecque des Septante. Du judaïsme hellénique au christianisme ancien, éditions du Cerf & éditions du CNRS, 1994 (ISBN 2-222-04155-4) ;
- Ph. Haudebert, Le Pentateuque, débats et recherches, Le Cerf, Paris, 1992 ;
- Hubert Pernot, Observations sur la langue de la Septante (Extrait de la Revue des Etudes grecques). Paris, Les Belles Lettres, 1930, 15 pp., in-8.
- A. de Pury, Le Pentateuque en questions, Labor et Fides, Genève, 1992 ;
- J.-L. Ska, Introduction à la lecture du Pentateuque, Lessius, Bruxelles, 2000.
- Jaroslav Pelikan À qui appartient la Bible ? La Table Ronde, 2005
[modifier] Liens externes
- La place de la Septante par Marguerite Harl, agrégée des lettres classiques.
- Textes de la Septante