Marcel Mariën
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Marcel Mariën (1920-1993) est un écrivain surréaliste belge, poète, essayiste, photographe, cinéaste, créateur de collages et d'objets insolites.
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[modifier] Biographie
Marcel Mariën est né à Anvers le 29 avril 1920, d'une mère wallonne et d'un père flamand. Il entre en 1933 au lycée d'Anvers où il éprouve des difficultés d'adaptation, l'enseignement y étant entièrement donné en flamand. Le jour de ses quinze ans il est placé comme apprenti chez un photographe et s'essaie lui-même à la photographie. La même année il fréquente l'Ecole populaire supérieure pour les travailleurs et rencontre dans une exposition deux tableaux de René Magritte. En 1936 il découvre les livres et les revues surréalistes, commence à écrire des poèmes dans leur esprit. Coursier et gratte-papier chez un agent de change dont il détourne quelques sommes, il va voir en 1937 René Magritte, rencontre ainsi Paul Colinet puis Louis Scutenaire, Irène Hamoir, Paul Nougé, et participe en septembre à l'exposition surréaliste organisée par E. L. T. Mesens à Londres. Il y expose son premier objet, "L'introuvable" (titre donné par Magritte), ses lunettes, qu'il vient de casser, réduites à un seul verre et deux branches.
Faisant à partir de janvier 1939, pour dix-sept mois, son service militaire à Anvers, Mariën collabore en janvier 1940 à "L'Invention collective" de Magritte et Ubac. Lors de l'invasion de la Belgique, il soigne les blessés à l'hôpital d'Anvers avant d'être évacué en mai, transportant avec lui deux grandes valises bourrées de livres dont il réussira à ne pas se séparer. Replié sur Dunkerque et Berck, il est fait prisonnier, regagnant à pied Anvers puis traversant la Belgique en camion, mené en train à Nuremberg puis au camp de Görlitz en Haute-Silésie, affecté près de Hohenelbe (Vrchlabi, en tchèque) au déboisement et au terrassement. Après neuf mois de captivité, il est en 1941 libéré à Anvers, retrouve à Bruxelles (en bicyclette) Magritte, Nougé, Scutenaire, Ubac et rencontre Christian Dotremont. Il fonde alors les éditions "L'Aiguille aimantée" (nom donné par Nougé) qui publie notamment "Moralité du sommeil" de Paul Eluard, avec trois dessins de Magritte, et fait la connaissance d'"Elisabeth" qui sera durant dix ans l'une de ses passions les plus durables.
Mariën participe rapidement avec Scutenaire et Nougé à l'invention des titres des peintures de Magritte. A partir de 1942 il se rend fréquemment à Paris transportant clandestinement pour un commerce illégal des toiles de Renoir, Picasso, Léger, Chirico ou Magritte. "De 1942 à 1946, je vendis un nombre important de dessins et de tableaux, attribués principalement à Picasso, Braque et Chirico, tous confectionnés par Magritte", écrit-il lui-même ("Le radeau de la mémoire", p. 101). Il peut ainsi publier plusieurs ouvrages sous l'enseigne "Le Miroir infidèle". Autour de la revue La Main à plume, il rencontre à Paris Queneau, Leiris, le peintre Dominguez. En août 1943 il publie la première biographie de Magritte dont il défendra en 1947, dans "Les corrections naturelles", la "période Renoir". A Louvain il prononce avec Dotremont une conférence sur le surréalisme. En 1945 Mariën collabore à la revue "Le Ciel bleu" avec Colinet et Dotremont, commence de publier avec Magritte une série de prospectus et tracts mystificateurs et subversifs ("L'imbécile", "L'emmerdeur", "L'enculeur"), publie "La terre n'est pas une vallée de larmes" (Breton, Char, Colinet, Dominguez, Dotremont, Eluard, Irène Hamoir, Magritte, Picasso, Queneau, Scutenaire, Ubac) et, en 1946 et 1947, édite la collection "Le Miroir infidèle".
En 1948 Mariën s'installe comme bouquiniste à Bruxelles ("Au Miroir d'Elizabeth"), survivant grâce à des travaux de dactylographie. En 1951 il s'engage à Rotterdam comme garçon de mess sur le "Silver Ocean", battant pavillon suédois, cargo équipé de cales frigorifiques pour le transport des fruits. Il fait ainsi la navette entre les Antilles françaises (Fort-de-France ou Basse-Terre) et la Normandie (Rouen ou Dieppe), pratiquant la contrebande de cigarettes et de parfums. De retour à Bruxelles en 1953 il vit quelque temps avec une prostituée du quartier de la gare du Nord, écrit des articles pour le conseiller culturel soviétique, écoule sur la proposition de René Magritte, avec son frère Paul Magritte, un stock de 500 faux billets de cent francs belges qu'il assure dans ses mémoires avoir été dessinés et gravés par le peintre. Ayant rompu avec Magritte en 1954, il fonde avec Jane Graverol et Nougé la revue "Les Lèvres nues", subversive, anticléricale et staliniste, qui publie notamment les écrits poétiques et théoriques de Nougé.
Mariën raconte encore dans ses mémoires une escroquerie dont il a l'idée en 1958. Au concours organisé par la société dans laquelle il travaille et patronné par une marque de poudre de lessive, il fait gagner, ayant la connaissance de la moitié des réponses, d'importantes sommes à des comparses. Le concours est cependant rapidement suspendu comme constituant une infraction à la réglementation des jeux de hasard. Avec ses gains illicites Mariën produit et réalise en 1959 le film "L'Imitation du cinéma", auquel participe Tom Gutt, farce érotico-freudienne contre l'Eglise, qui provoque un scandale suivi d'une plainte déposée au parquet de Bruxelles. Le film est encore projeté à Liège, à Anvers dans une salle des fêtes et à Paris au Musée de l'Homme puis, la demande d'autorisation repoussée, interdit en France. En 1962 Mariën confectionne contre Magritte le tract "Grande baisse", illustré d'un billet de cent francs à l'effigie du peintre, qui présente un barême définitif de ses œuvres à des prix dérisoires et mystifie jusqu'à André Breton. Il part à ce moment aux États-Unis tenter de rejoindre, en vain, une jeune nièce d'"Elizabeth". Il s'embarque l'année suivante pour le Japon puis Saigon, non sans participer au passage à un trafic de lingots d'or, Singapour et Hong-Kong. A partir de septembre il travaille durant seize mois à Pékin comme correcteur du journal de propagande "La Chine en construction", croise Chou En-laï, Tchen Yi et Teng Siao-ping, prenant rapidement une conscience "horrifiée", écrira-t-il, de "la supercherie monumentale du pseudo communisme chinois" et de "la condition authentiquement faite à l'homme" sous son régime.
Rentré en Belgique, il publie de très nombreux textes inédits des surréalistes belges dans "Les Lèvres nues" puis, de 1968 à 1975, dans la collection "Le Fait accompli" (135 numéros), notamment les écrits de Magritte et le "Journal" de Nougé. Une première exposition présente en 1967 ses collages, de caractère érotique pour les uns, pornographique pour les autres, et ses objets, composés à partir de 1966. A la préface provocante qu'écrit alors Scutenaire Mariën répond en 1972 par une satire féroce de l'auteur des "Inscriptions". Mariën se marie en 1969 puis divorce. Il compose et publie en 1979 l'ouvrage de référence sur l'histoire du surréalisme en Belgique. En 1983 Georgette Magritte lui intente un procès à la suite de la publication du "Radeau de la mémoire" et en 1988 Irène Hamoir après l'édition d'éléments de la correspondance de Scutenaire (à propos de l'exclusion du groupe d'André Souris). Mariën, qui chaque fois répond par des tracts, n'en édite pas moins en 1990 l'ensemble des lettres que Scutenaire lui a adressées entre 1936 et 1976. Tout ceci incitera son adepte Jan Bucquoy a brûler une peinture de Magritte lors d'un happening en 1991.
[modifier] Bibliographie sélective
- Malgré la nuit, L'Aiguille aimantée, Anvers 1940.
- La Chaise de sable, L'Invention collective, Bruxelles, 1940.
- L'Oiseau qui n'a qu'une aile, illustré de reproductions de Magritte, Ça ira, Anvers, 1941.
- Magritte, Les Auteurs associés, Bruxelles, 1943.
- Les Poids et les mesures, Les Auteurs associés, Bruxelles, 1943.
- Les Corrections naturelles, Librairie Sélection, Bruxelles, 1947.
- Quand l'acier fut rompu, Les Lèvres nues, Bruxelles, 1957.
- Théorie de la révolution mondiale immédiate, Les Lèvres Nues, Bruxelles, 1958.
- A l'ombre de la proie, Daily-Bûl, La Louvière, 1968.
- Tout reste à dire, un entretien avec Christian Bussy, Didier Devillez Editeur, Bruxelles, 1970.
- L'Ancre jetée dans le doute, Les Lèvres nues, Bruxelles, 1972.
- Le Beau rôle, Isy Brachot et Tom Gutt, Bruxelles, 1977.
- Démêloir, Les Lèvres nues, Bruxelles, 1978.
- Héraclitorismes, Les Lèvres nues, Bruxelles, 1979.
- L'activité surréaliste en Belgique (1924-1950), Bruxelles, Lebeer-Hossmann, 1979.
- Figures de poupe, nouvelles brèves, Jean-Claude Simoën, Paris, 1979, 294 p.; Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1996.
- Bruxelles et Gomorrhe, Les Lèvres Nues, Bruxelles, 1980.
- Les Fantômes du Château de cartes, Julliard, Paris, 1981.
- La Marche palière, Le Temps qu'il fait, Cognac, 1982.
- Le Radeau de la mémoire (souvenirs déterminés), Le-Pré-aux-Clercs, Paris, 1983, 220 p. (ISBN 2714415571); Editions de l'auteur, Bruxelles, 1988.
- Le Radeau au radoub, Les Lèvres Nues, Bruxelles, 1983.
- Le Néné de Cléopâtre, Les Lèvres Nues, Bruxelles, 1984.
- Le Pont aux ânes, Lebeer-Hossmann/Les Lèvres Nues, Bruxelles, 1987.
- Apologies de Magritte, Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1994.
- Tout reste à dire, entretien avec Christian Bussy, Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1997.
[modifier] Réédition de revues
- Les lèvres nues, n° 1-12 [1954 à 1958], Paris, Allia, 1995, 12 vol. [réédition sous la forme de 10 fascicules, accompagnés d'un volume de tracts et documents, et d'un index].
[modifier] Sur Mariën
- Marcel Mariën, rétrospective & nouveautés, 1937-1967, préface de Louis Scutenaire, texte de Mariën ("Étrécissements"), Galerie Defacqz, Bruxelles, 1967.
- Christian Bussy, Anthologie du surréalisme en Belgique, Paris, Gallimard,1972.
- Marcel Mariën, Resucées et Dissemblances, préface de Tom Gutt, Galerie La Marée, Bruxelles, 1975.
- René Magritte et le surréalisme en Belgique, Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles, 1982.
- Le surréalisme en Belgique,I, textes de Louis Scutenaire, Irine et André Blavier, Paris, galerie Isy Brachot, 1986.
- Le mouvement surréaliste à Bruxelles et en Wallonie (1924-1947), Paris, Centre Culturel Wallonie Bruxelles, 1988.
- Irène, Scut, Magritte & C°, Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, 1996, 558 p.
- Ne faites pas attention à la photographie, France LeJeune Fine Art, 2007.
[modifier] Citation
"J'ai nommé 'étrécissements' les résultats d'un procédé que j'ai expérimenté pour la première fois au cours de l'été 1964. Manoeuvrant à l'estime une paire de ciseaux, je découpais une image de magazine (...) Cette altération complète du sens primitif, cette sorte d'opération césarienne extrayant d'une image existante une image qui lui est totalement opposée dans son aspect et sa signification, cette vie occulte brusquement étalée au grand jour par le simple jeu d'une paire de ciseaux- tout cela ne me fut pas indifférent(...) L'arbitraire esthétique intervenait de façon inattendue - à mes yeux, hautement opportune - pour sauver de l'insignifiance et de la banalité des images particulièrement ingrates à l'état brut, soit qu'elles émanassent de simples prospectus publicitaires trouvés dans ma boîte à lettres, soit d'images sorties de magazines galants dont on sait combien l'efficacité instantanée cède rapidement le pas à la monotonie."
- Marcel Mariën, dans "Marcel Mariën", Galerie Defacqz, Bruxelles, 1967 (p. 18).
[modifier] Lien interne
[modifier] Liens externes
- Texte en anglais sur Marcel Mariën France Lejeune Fine Art
- Œuvres de Mariën aux Musées royaux de Bruxelles [1]
- Lien rencontré sur l'article concernant Mariën sur Wikipédia en anglais : images de 141 dessins et collages (1968-1991) - fréquents détournements d'images à caractère pornographique [2].
- Mariën, note sur les "Étrécissements" (1967) [3].
- "Le Bordel imaginable", tract contre la censure d'une oeuvre de Mariën au Musée d'Epinal en 1996 [4].
- Sur "Le Radeau de la mémoire Mariën ou la subversion poétique
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