École nationale d'administration
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École nationale d'administration | |
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Fondation | 1945 |
Type | Établissement public de l’État à caractère administratif |
Localisation | Strasbourg et Paris, France |
Fondateur | Charles de Gaulle, Maurice Thorez, Michel Debré |
Directeur | Antoine Durrleman |
Personnel | 232 |
Enseignants | 2 professeurs permanents (sport et FLE) et un millier d'intervenants externes par an |
Étudiants | 533 en 2005 |
Site web | www.ena.eu |
L'École nationale d'administration (ENA), une des plus prestigieuses grandes écoles françaises, a été créée en 1945 pour démocratiser l'accès aux grands corps administratifs. Elle est aujourd'hui chargée d'assurer la formation initiale et continue de hauts fonctionnaires français et internationaux.
L'ENA accueille chaque année à Strasbourg entre 90 et 120 élèves en formation initiale sur concours, une centaine d'élèves de masters et mastère spécialisé et 120 élèves étrangers. A cela s'ajoute plus de 2500 fonctionnaires et cadres dirigeants formés à Paris pour des sessions courtes de formations continue. Les anciens élèves de l'école sont appelés énarques.
Sommaire |
[modifier] Histoire
[modifier] Création de l'ENA
L'École nationale d'administration (ENA) a été créée par l'ordonnance du 9 octobre 1945 par le Gouvernement provisoire de la République française, alors présidé par le Général de Gaulle. Cette décision, qui devait profondément bouleverser la structure même de l'administration publique française, avait été préparée par la Mission provisoire de réforme de l'administration, placée auprès du chef du gouvernement et dirigée par Maurice Thorez, vice-président du Conseil et secrétaire général du Parti communiste. Après la démission du Général de Gaulle de la présidence du Conseil le 20 janvier 1946, c'est Maurice Thorez qui va réussir à mener à bien la réforme administrative et l'élaboration du statut de la fonction publique en se préoccupant d'assurer d'abord la naissance de l'École nationale d'administration créée avant son entrée au Conseil. Michel Debré, maître des requêtes au Conseil d'État et commissaire de la République à Angers, animait cette mission de création de l'école. Il a assuré provisoirement les fonctions de directeur de l'école.
L'ENA doit beaucoup aux circonstances historiques de ses commencements, et à l'esprit des femmes et des hommes, issus de la Résistance pour la plupart, qui ont pris en charge la reconstruction du pays. Avant 1945, l'État n'assurait pas lui-même une formation unique pour les fonctionnaires responsables de sa haute administration. En effet, si le système du concours - considéré alors comme la seule garantie d'un recrutement impartial et fondé sur le mérite - était déjà bien généralisé, chaque corps ou ministère organisait son propre concours, sans considération pour l'homogénéité de la haute fonction publique. Certains risques de corporatisme ou de népotisme en résultaient, auxquels L'ENA avait pour objectif de remédier ; l'ENA est donc vite devenue un symbole de l’élitisme méritocratique républicain.
[modifier] Déménagement à Strasbourg
L'École s'est établie à Paris, d'abord au 56, rue des Saint-Pères puis dans l'hôtel particulier du 13, rue de l'Université, auparavant occupé par le Service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM) et décentralisé à Brest en 1978. Sous l'impulsion d'Édith Cresson, il a été décidé en 1992 de déménager l'école à Strasbourg. Pendant 10 ans, les activités de l'école se sont organisées sur deux sites parisiens (rue des Saint Pères et rue de l'Université) et un site strasbourgeois (rue Saine Marguerite). En 2002, l'ENA a absorbé l'Institut international d’administration publique (IIAP), issu de l'École nationale de la France d'outre-mer, et s'est depuis installé dans les anciens locaux de l'IIAP au 2, avenue de l'Observatoire (VIe arrondissement).
Actuellement, la plupart des services de l'école, dont le cycle principal de la scolarité, sont concentrés à Strasbourg, tandis que le nouveau site de l'avenue de l'Observatoire accueille depuis fin janvier 2007 toutes les activités parisiennes de l'ENA (le service des cycles courts et la direction des relations internationales). Les cours des élèves en formation permanente dans des cycles pédagogiques de moins d'un mois ont donc encore lieu à Paris.
Depuis son déménagement à Strasbourg, l'ENA se fait également appeler école européenne de gouvernance.
[modifier] Missions
[modifier] La recherche
L'ENA assume également une mission de recherche en sciences administratives :
- en développant toute une série de colloques sur les grands enjeux de la fonction publique ;
- en encourageant les travaux de recherche de ses élèves sur des questions d'actualité ;
- en multipliant les comparaisons des différents systèmes administratifs étrangers.
[modifier] Une école tournée vers l'international
Depuis sa création, en 1945, l'ENA a formé plus de 2000 élèves étrangers, provenant d'une centaine de pays, dans le cadre de ses deux cycles internationaux. Chaque promotion compte une quarantaine d'élèves étrangers représentant une trentaine de nationalités pour une centaine d'élèves français, tous suivent là une formation identique.
Par ailleurs, l'école entretient une active coopération administrative avec de nombreux partenaires étrangers, pour le transfert d'ingénierie éducative et administrative, à travers l'organisation de nombreux séminaires avec des institutions partenaires.
Soucieuse de conforter la place de l'administration française dans le monde, l'ENA a encore intensifié sa politique d'échanges internationaux depuis l'intégration des services de l'Institut international d'administration publique en son sein, début 2002.
[modifier] Eventail de formations
[modifier] Formation initiale sur concours
Le mode d'accès à l'ENA s'appuie sur trois concours (externe, interne et troisième concours ouverts aux candidats ayant une expérience professionnelle en dehors de la fonction publique). Le taux de sélectivité est assez élevé puisque 7.9% des candidats présents à la première épreuve ont été reçu. En 2005, 44% des reçus étaient des femmes. Il est à noter que les aides de l'école à la préparation des concours représentent près du quart de son budget.
L'ENA a pour mission de dispenser à une centaine d'élèves français et 40 élèves étrangers une formation interministérielle d'une durée de 27 mois. La nouvelle scolarité, entrée en vigueur le 1er janvier 2006, comporte de manière alternée des périodes de stages et d'études. La promotion Simone Veil est la première à effectuer toute sa scolarité à Strasbourg.
La scolarité est divisée en trois modules et une option d'approfondissement :
- Module Europe ; 7 mois dont un stage de 17 semaines dans le monde des institutions européennes et internationales
- Module Territoire ; 8 mois dont un stage de 22 semaines dans une préfecture ou une administration territoriale
- Module Gestion et management publics ; 6 mois dont un stage de 10 semaines en entreprise et un autre de 4 semaines en administration centrale
- Option d'approfondissement ; travail de 3 mois par groupe de 5 à 6 élèves ayant pour but de placer les élèves en situation d'autogestion.
Les élèves de l'ENA intègrent à leur sortie de l'école différents corps de la fonction publique d'État, en fonction de leur classement. Les premiers (dont on dit qu'ils sortent "dans la botte") choisissent généralement les grands corps, à savoir la Cour des comptes (5 élèves en 2006), l'Inspection générale des Finances (5 élèves en 2006) et le Conseil d'État (5 élèves en 2006).
Près de la moitié de la promotion intègre le corps des administrateurs civils (55 élèves en 2006) ; parmi ceux là, certains sont directement placés en position de détachement dans le corps des sous-préfets. D'autres élèves rejoignent les corps des conseillers des affaires étrangères (7 élèves en 2006), de l'inspection générale de l'administration (un élève en 2006), de l'Inspection générale des affaires sociales (3 élèves en 2006), des conseillers de tribunal administratif et de Cour administrative d'appel (13 élèves en 2006) ou celui des Chambres régionales des Comptes (3 élèves en 2006). Par exception, quelques élèves rejoignent la fonction publique territoriale en tant qu'administrateurs de la Ville de Paris (4 élèves en 2006).
[modifier] Mastère spécialisé et masters
L'ENA organise également des formations diplômantes de l'enseignement supérieur, en partenariat avec d'autres grandes écoles ou universités. Une centaine d'élèves était concerné par ces formations en 2006 :
- Mastère spécialisé en gestion des risques sur les territoires (MGR) [1] : cette formation de 15 mois s’adresse à un public d'étudiants et de professionnels évoluant dans un environnement de communication et de gestion des risques.
- Master européen de gouvernance et d'administration / Master für europäische Regierung und Verwaltung (MEGA) [2] : ce master bilingue est ouvert à trente jeunes responsables français, allemands et ressortissants des pays membres de l’Union européenne.
- Master professionnel en gestion publique [3] : ce master s’adresse aux étudiants, fonctionnaires et cadres du secteur privé confrontés à la problématique de la gestion publique
- Master en Administration Publique [4] : accessible aux anciens élèves des cycles internationaux de longue durée, l'objectif de ce master est de permettre aux élèves étrangers de valoriser leur cursus à l'ENA par un approfondissement de leurs connaissances.
[modifier] Cycles internationaux
- Cycle international d'administration publique (CIAP - 7 mois) : ce cycle offre la possibilité à une cinquantaine de hauts fonctionnaires confirmés de suivre un cycle de perfectionnement dans leur spécialité pendant 6 mois et demi.
- Cycle international court (CIC - 9 mois) : le CIC permet à une trentaine de hauts fonctionnaires étrangers d’acquérir des savoir-faire utiles pour entrer en contact avec l’administration française.
- Cycle international long (CIL - 18 mois) : ce cycle réunit une quarantaine de fonctionnaires étrangers s'apprêtant à prendre des postes de haut fonctionnaires dans leurs pays d'origine.
- Cycle des Hautes Études Européennes (CHEE - 7 mois) : ce cycle qui devrait voir le jour en 2007 est ouvert à des hauts fonctionnaires, parlementaires, journalistes, universitaires, syndicalistes, dirigeants et cadres d’entreprises souhaitant se familiariser avec les questions européennes et et plus spécifiquement avec les positions françaises sur ces questions.
[modifier] Formation permanente
Destinées aux cadres supérieurs de la fonction publique, les sessions de formation permanente concernent 2500 personnes par an. Elles se sont diversifiées et visent à privilégier l'interministérialité par la confrontation d'expériences différentes et la mise en commun de savoir-faire utiles à la modernisation de la fonction publique.
- Cycle d'accompagnement à la mobilité professionnelle (destiné aux administrateurs civils et aux assistants parlementaires)
- Cycle d'intégration des officiers (CIO) : l'école organise un cycle de formation de deux mois spécifique à l'attention d'une dizaine officiers admis à occuper des emplois vacants au sein des administrations de l'État.
- Cycle de perfectionnement des collaborateurs parlementaires : les assistants parlementaires de l’Assemblée nationale, du Sénat, et du Parlement européen ont la possibilité de se former à l’ENA, grâce à un cycle de perfectionnement extensif de 6 mois qui leur est réservé.
- Séminaires de gestion publique (16 demi-journées par séminaire) : ces séminaires s’adressent aux responsables des services de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics, aux cadres des entreprises publiques et organismes privés en relation avec l’administration centrale et les collectivités territoriales et aux diplomates étrangers en poste à Paris.
- Formations thématiques : Action publique et institutions, pratique de l'interministérialité, gestion et management publics, développer ses compétences, union européenne, relations internationales, économie et finances publiques, gestion des risques etc.
[modifier] Anciens élèves
Depuis sa création il y a 60 ans, l'ENA a formé 5600 hauts fonctionnaires français et 2600 étrangers. Les différentes promotions de l'ENA portent un nom spécifique en hommage à un personnage, un évènement ou un concept.
[modifier] Hommes politiques
- Premiers ministres français : Jacques Chirac (1974, 1986), Laurent Fabius (1984), Michel Rocard (1988), Édouard Balladur (1993), Alain Juppé (1995), Lionel Jospin (1997) et Dominique de Villepin (2005)
- Députés actuels français : Laurent Wauquiez, Ségolène Royal, François Hollande, Gilles Carrez, Valérie Pécresse, Charles de Courson, Hervé Gaymard
- Hommes politiques africains : Edem Kodjo (ancien premier ministre du Togo), Nicéphore Soglo (ancien président du Bénin)
[modifier] Président directeur général d'entreprises du CAC 40
- Henri de Castries (AXA), Gérard Mestrallet (Suez), Jean-François Cirelli (GDF), Serge Weinberg (Accor), Baudouin Prot (BNP Paribas), Paul Hermelin (Cap Gemini), Bruno Lafont (Lafarge), Daniel Bouton (Société Générale), Louis Gallois (co-président d'EADS), Yves-Thibault de Silguy (Vinci).
[modifier] Fonctionnaires internationaux
- Pascal Lamy, directeur général de l'Organisation mondiale du commerce
- Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque centrale européenne
- Michel Camdessus, ancien directeur général du Fonds monétaire international et gouverneur honoraire de la Banque de France
- Jacques de Larosière, ancien directeur général du Fonds monétaire international (1978–1987) et ancien président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (1993-1998)
[modifier] Intellectuels
- Jacques Attali, intellectuel socialiste, proche conseiller de François Mitterrand
- Françoise Chandernagor, écrivain
- Gabriel de Broglie, historien, membre de l'Académie française.
[modifier] Critique de l'ENA
[modifier] L'ENA et les « élites » françaises
Depuis les années 60, il est reproché aux anciens élèves de l'ENA une attitude technocratique. L'école a fait l'objet de critiques de la part même de ses élèves, tel Jean-Pierre Chevènement, dans son livre L'énarchie ou les mandarins de la société bourgeoise (publié sous le pseudonyme de Jacques Mandrin en 1967).
La critique de l'ENA focalise et résume d'autres questions posées à la société française, qui sont celles de la sélection et de la reproduction des élites, de la bureaucratie, de la centralisation et des relations entre l'État et les citoyens. Une forte proportion de ceux qui contrôlent la vie politique et économique en France sont en effet issus de ses rangs ; ce phénomène a d'ailleurs été étudié par Pierre Bourdieu.
[modifier] Classement
Le classement de sortie fait l'objet de critiques récurrentes. Il a notamment été mis en cause par les élèves de la promotion Sédar-Senghor (2002-2004), qui ont rédigé un rapport intitulé "l'ENA, l'urgence d'une réforme". Ce document, signé par 132 étudiants sur 134, reprochait à l'ENA de "dispenser une scolarité au rabais, qui n'est que l'alibi d'un concours de beauté organisé par les divers corps de l'État".
Les élèves avaient même voté une motion de défiance contre la direction de l'école, ce qui leur avait valu un rappel à l'ordre du ministre de la fonction publique de l'époque, Renaud Dutreil.
Dans un arrêt du 10 janvier 2007, le conseil d'État a donné raison aux élèves de la promotion contestant le déroulement de l'examen de fin d'études (ces derniers n'acceptaient pas la présence d'un professeur de l'école au jury final de l'épreuve de questions européennes, ni le choix des sujets des épreuves de gestion publique). La haute juridiction administrative a annulé le classement de sortie de la promotion 2004 de l'ENA, estimant que l'école n'avait pas organisé le concours dans des conditions respectant l'égalité entre élèves. Cette décision restera toutefois sans influence, puisque des élèves ont uniquement contesté le classement, et non l'arrêté d'affectation dans les différents corps de l'administration[1].
[modifier] Direction
- Michel Debré : 1945
- Henri Bourdeau de Fontenay : 1945-1963
- François Gazier : 1963-1969
- Pierre Racine : 1969-1975
- Pierre-Louis Blanc : 1975-1982
- Simon Nora : 1982-1986
- Roger Fauroux : 1986-1988
- René Lenoir : 1988-1992
- Jean Coussirou : 1992-1995
- Raymond-François Le Bris : 1995-2000
- Marie-Françoise Bechtel : 2000-2002
- Antoine Durrleman : depuis 2002
[modifier] Anecdotes
- En 1999 et 2005, des anciens élèves de l'ENA ont remplacé les journalistes rédacteurs du quotidien Les Échos.
[modifier] Bibliographie
- L'ENA hors les murs, créée en 1946, revue mensuelle des anciens élèves de l'ENA.
- « L'ENA », Pouvoirs n° 80 (mars 1997), Seuil.
- Jean-Michel Eymeri, La fabrique des énarques, Paris, Economica, juin 2001.
- Jean-Michel de Forges, L'École nationale d'administration, Presses universitaires de France, Paris, 1989.
- Jean-Michel Gaillard, L'ENA, miroir de l'État, de 1945 à nos jours, Complexe, coll. « Questions du XXe siècle », 1999.
- Guy Jacquemelle, Le grand oral de l'ENA, Éditions du Mécène, 2005.
- Jacques Mandrin (pseudonyme de Jean-Pierre Chevènement, Didier Motchane et Alain Gomez), L'énarchie ou les mandarins de la société bourgeoise, La Table Ronde, 1967.
[modifier] Liens externes
- Le site officiel de l'ENA
- L'ENA hors les murs, revue mensuelle des anciens élèves de l'ENA]
- Le site de l'association du Troisième concours de l'ENA
- Le site officiel de l'Association québécoise des anciens de l'ÉNA
- La préparation au concours d'entrée de l'ENA de Sciences Po
[modifier] Notes
- ↑ Journal Le Monde du 19 janvier 2007
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