Suicide
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Le suicidé, par Édouard Manet.
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Le suicide (du latin sui caedere, se tuer soi-même) est l'acte délibéré de mettre fin à sa propre vie. Dans le domaine médical, on parle aussi d’autolyse (du grec auto-, soi même, et -lyse destruction).
Pour considérer qu'on est en présence d’un suicide, la mort doit être l’intention de l’acte et non simplement une de ses conséquences. Un attentat-suicide, par exemple, sera considéré comme relevant plus d’une action terroriste ou d'un acte de martyrologie, selon la personne qui parle, que du suicide.
Si le suicide a des conséquences légales, il doit être généralement prouvé qu’il y a eu intention et mort pour que l’acte soit qualifié de suicide selon la loi.
[modifier] Les religions face au suicide
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Il est considéré comme un péché dans beaucoup de religions et comme un crime selon certaines législations. La raison est la même dans les deux cas : on sanctionne une personne pour avoir voulu disposer de sa vie alors que cette dernière est censée appartenir à quelqu'un d’autre, Dieu ou souverain.
Dans la Bible, Saül, voulant échapper aux incirconcis, se suicide en se transperçant le cœur, et son écuyer fait de même. D'autres personnages de la Bible mettent fin à leurs jours sans que cela ne soit pour autant considéré par les exégètes comme des suicides. La mort de Samson n'est par exemple pas considérée comme un suicide mais comme une vengeance contre les Philistins. Eléazar fils de Mattathias fit quant à lui preuve de « courage » lors de son « sacrifice », lorsqu'il tua l'éléphant pour libérer son peuple[1].
[modifier] Judaïsme
Le judaïsme enseigne catégoriquement l'idée selon laquelle l’homme n’est pas habilité à porter atteinte à soi-même, par exemple en se suicidant ou en s'automutilant. En effet, l'expression "tu ne tueras point" s'applique aussi à soi-même. Néanmoins, des exemples figurent dans l'ancien testament .
[modifier] Christianisme et suicide
Selon Augustin d'Hippone, les martyrs des premiers temps de la chrétienté sont des faits historiques qui ne doivent pas être imités mais jugés[2]. Dans La Cité de Dieu, Augustin examine des cas où l'on pourrait croire que le suicide, violence faite contre soi donc contre un être humain, devrait être permis. Sa conclusion est que le suicide est formellement interdit :
- « Si donc celui qui porte faux témoignage contre soi-même n’est pas moins coupable que s’il le portait contre son prochain, bien qu’en cette défense il ne soit parlé que du prochain et qu’il puisse paraître qu’il n’est pas défendu d’être faux témoin contre soi-même, à combien plus forte raison faut-il regarder comme interdit de se donner la mort, puisque ces termes “Tu ne tueras point”, sont absolus, et que la loi n’y ajoute rien qui les limite ; d’où il suit que la défense est générale, et que celui-là même à qui il est commandé de ne pas tuer ne s’en trouve pas excepté. » (§20, livre 1).
Il y a pourtant une exception, en cas de permission divine :
- « De même, comment justifie-t-on Samson de s’être enseveli avec les ennemis sous les ruines d’un édifice ? En disant qu’il obéissait au commandement intérieur de l’Esprit, qui se servait de lui pour faire des miracles. »(§21).
On ne doit pas se tuer pour éviter un mal, qu'il soit commis par autrui (viol, torture), ou par soi-même (ce dernier cas est selon lui absurde, car pour éviter de commettre le mal, on pourrait faire la recommandation de se tuer après le baptême ; remarquons à ce sujet que Constantin Ier ne s'est fait baptiser que sur son lit de mort). Le cas du suicide (avec l'ensemble des autres maux) nous apprend comment le croyant, selon Augustin, doit faire face à la violence du monde : l'attitude chrétienne consiste à subir le mal pour être corrigé et purifié, et à le supporter en conservant son âme intacte de toute souillure. Dans le cas du suicide, le chrétien ne doit pas céder aux sentiments qui peuvent l'y pousser, ces sentiments étant en général des signes de faiblesse et de lâcheté, comme la peur et la honte. Augustin, élevé dans l'Empire fait mention du suicide romain aux motifs souvent nobles (Lucrèce, Paetus, Sénèque le Jeune, et Régulus dont l'héroïsme suicidaire était considéré comme l'un des plus hauts exemples de la Vertu romaine, et dont il avait nécessairement entendu parler) mais il les condamne, les jugeant inspirés par l'orgueil, et ne valant pas la vertu chrétienne. L'Église a toujours célébré ses martyrs, et le refus d'abjurer lorsqu'on en connaissait les conséquences avait de ce fait quelque aspect suicidaire, mais on en revenait au cas de Samson.
Thomas d'Aquin considère le suicide comme un péché mortel contre soi, contre les autres et contre Dieu. Cette condamnation se retrouve dans le Code de Droit Canon de 1917 dans l'expression de la privation de sépulture ecclésiastique à celui qui deliberato consilio mit fin à ses jours[2]. Les funérailles religieuses sont donc refusées aux personnes qui se sont suicidés sur cette base. Thomas d'Aquin confirme dans la Somme théologique (question 64, Homicide, article 5, Est-il permis de se tuer ?) : L’homicide est un péché non seulement parce qu’il s’oppose à la justice, mais parce qu’il est contraire à la charité que chacun doit avoir envers soi-même. De ce point de vue le suicide est un péché par rapport à soi-même.
[modifier] Islam
L'islam interdit le suicide, car il n'est pas permis au croyant musulman de porter atteinte à son corps (auto-mutilation comprise[réf. nécessaire]) ni de penser qu'il peut décider lui-même de la fin de sa vie, car la mort survient à une date prédéfinie divinement pour chacun.
[modifier] Différences culturelles
Le suicide est perçu assez différemment selon les cultures ; si dans les sociétés occidentales il a longtemps été considéré comme immoral et déshonorant, il est dans d'autres sociétés justement le moyen de recouvrer un honneur perdu.
En Asie, il existe des formes de suicide ritualisé comme les jauhâr et satî indiens. Le seppuku japonais quant à lui est un suicide vu comme une issue honorable face à certaines situations perçues comme trop honteuses ou sans espoir.
[modifier] Le suicide dans l'histoire
Dans l'empire romain, il était d'usage qu'un proche de l'empereur désirant mettre fin à ses jours en demande au préalable l'autorisation à ce dernier. On en trouve l'illustration par exemple dans les Mémoires d'Hadrien.
Dans l'Antiquité, le suicide était commis après une défaite dans une bataille afin d'éviter la capture et les possibles tortures, mutilations ou la mise en esclavage par l'ennemi. Ainsi, Brutus et Cassius, les assassins de Jules César, se suicidèrent suite à la défaite de la bataille de Philippes. Les Juifs de Massada offrent un autre exemple en se suicidant massivement en 74 av. J.C. pour échapper à la mise en esclavage par les Romains.
Dans la société romaine, le suicide était un moyen accepté par lequel on pouvait préserver son honneur. Ceux qui étaient jugés pour des crimes capitaux par exemple pouvaient empêcher la confiscation des biens et propriétés familiaux en se suicidant avant la condamnation par le tribunal. On soulignait alors ironiquement que Domitien, l'empereur romain, montrait sa pitié et miséricorde en permettant à un homme condamné de se suicider.
À la fin du XVIIIe siècle, Goethe publie Les Souffrances du jeune Werther (Die Leiden des jungen Werther), une histoire romantique où le jeune Werther se suicide parce que son amour est inaccessible. Le roman connaît un réel succès et cause une vague de suicides en Allemagne.
Émile Durkheim, fondateur de la sociologie, publie en 1897 son fameux livre Le Suicide où il analyse ce phénomène sous un angle social. Il distingue quatre sortes de suicide : le suicide égoïste, le suicide altruiste, le suicide anomique et le suicide fataliste. Dans chaque cas, la désintégration sociale est la cause première véritable :
- le suicide altruiste est particulièrement développé dans les sociétés où l'intégration est suffisamment forte pour nier l'individualité de ses membres ;
- le suicide égoïste est au contraire le signe d'une société trop destructurée pour fournir un motif valable d'existence à certains de ses individus ;
- le suicide anomique est dû à des changements sociaux trop rapides pour que les individus puissent adapter leurs repères moraux.
- le suicide fataliste se définit par la prise en compte par l'individu d'un destin muré, immuable. On pourra prendre comme exemple les prisonniers, ou les jeunes hommes mariés.
Le poète Alfred Alvarez publie une étude sur le suicide en littérature intitulée Le Dieu sauvage ; essai sur le suicide.
Jean Améry publie en 1976 un livre sur le suicide où il défend la thèse selon laquelle le suicide représente l'ultime liberté de l'humanité. Il se suicide deux ans plus tard.
[modifier] Philosophie et suicide
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Le suicide est vu bien différemment selon le courant philosophique l'évoquant. Il peut être considéré comme un acte suprême de liberté ou une option de faiblesse et de renoncement, voire de sacrifice. Du point de vue contraire, le suicide est mis en opposition avec l'humanité. En effet, la mort fait partie de la nature. Se donner la mort c'est donc renier la nature et s'opposer à elle. C'est s'éloigner de son humanité. Pour Platon, qui était alors croyant, la mort était la propriété des Dieux, et des Parques qui coupaient le fil de la vie. Pour Platon, se suicider c'est donc aller contre la volonté des Dieux...
[modifier] Politique et suicide
Le suicide a été utilisé dans l’histoire comme un acte politique d’opposition et de contestations. Nous ne traiterons pas de l’attentat-suicide.
Le suicide peut être un acte politique, proche du martyre. Dans le Japon médiéval toute critique du Shogun s'accompagnait d'un seppuku de l'accusateur. Plus récemment Jan Palach et de Jan Zajíc se sont immolés en 1969 pour protester contre la répression soviétique du printemps de Prague, tout comme trois membres de l'Organisation des moudjahiddines du peuple iranien l'ont fait en 2003 pour dénoncer l'arrestation de Maryam Radjavi par la police française.
[modifier] Le suicide et la loi
Il fut des États où, ironiquement, le suicide pouvait être condamné par la peine de mort.
En France, le suicide est une liberté civile, c'est-à-dire qu'il est permis au sens où la loi ne le réprime pas. En revanche, la loi entérine la réprobation sociale dont le suicide est entaché : l'aide au suicide est prohibée pour « abstention volontaire de porter assistance à personne en péril » (article 223-6 du Code pénal, concept plus connu sous le nom de « non-assistance à personne en danger »). Suite à la publication du livre Suicide, mode d'emploi, a été créé en 1987 le délit de « provocation au suicide » (art. 223-13 et 224-14), ayant pour conséquence l'interdiction de publication de l'ouvrage.
La Cour européenne des Droits de l'Homme, dans son arrêt Pretty c. Royaume-Uni du 29 avril 2002, a déclaré à l'unanimité que le suicide n'entrait dans le champ d'aucun droit de l'homme, ni de l'article 2 de la Convention protégeant le droit à la vie :
« En conséquence, la Cour estime qu’il n’est pas possible de déduire de l’article 2 de la Convention un droit à mourir, que ce soit de la main d’un tiers ou avec l’assistance d’une autorité publique. »
Le suicide assisté ou euthanasie fait l'objet de débats. En France, il est actuellement condamné comme homicide. Il est autorisé dans des pays comme les Pays-Bas et la Belgique.
[modifier] L'assistance au suicide
Dans certains pays, l'assistance au suicide est autorisée.
En Suisse, le code pénal la tolère puisque l'article 115[3] prévoit de punir l'assistance au suicide si elle est causée par des "motifs égoïstes". Une association, Exit, a été créée dans le but d'aider les personnes en phase terminale d'une maladie à mettre fin à leurs jours.
[modifier] Suicide et assurances
En France, l'article L132-7 du Code des assurances dispose :
- L'assurance en cas de décès est de nul effet si l'assuré se donne volontairement la mort au cours de la première année du contrat.
- L'assurance en cas de décès doit couvrir le risque de suicide à compter de la deuxième année du contrat. En cas d'augmentation des garanties en cours de contrat, le risque de suicide, pour les garanties supplémentaires, est couvert à compter de la deuxième année qui suit cette augmentation.
- Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables aux contrats mentionnés à l'article L. 140-1 souscrits par les organismes mentionnés au dernier alinéa de l'article L. 140-6.
- L'assurance en cas de décès doit couvrir dès la souscription, dans la limite d'un plafond qui sera défini par décret, les contrats mentionnés à l'article L. 140-1 souscrits par les organismes mentionnés à la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 140-6, pour garantir le remboursement d'un prêt contracté pour financer l'acquisition du logement principal de l'assuré.
[modifier] Le suicide pays par pays
[modifier] Généralités
Dans le monde, 815 000 personnes se sont suicidées en 2000, soit 14,5 décès pour 100 000 habitants (un décès toutes les 40 secondes) - source OMS (PDF).
Le suicide touche davantage les hommes que les femmes. En fait, le nombre de tentatives réussies est plus important chez les hommes que chez les femmes, peut-être (hypothèse) parce que les hommes choisissent plus souvent des moyens violents (pendaison ou arme à feu contre intoxication médicamenteuse). De plus, ils sont très isolés et il est donc souvent difficile d’observer leur trouble. Contrairement aux femmes, ils n’ont pas l’intention de changer leur milieu, mais ils désirent seulement mettre fin à leur souffrance. Par rapport à l'âge, si les jeunes sont particulièrement concernés par ce problème, le nombre de suicides est plus important encore plus tard et la courbe des suicides chez les hommes a la forme d'un N avec un pic vers 50-60 ans.
Le suicide touche tout le monde, sans distinction de « classe ». Il semblerait que les cultures influencent le taux de suicide. De hauts niveaux de cohésion sociale et nationale réduisent les taux de suicide. Les niveaux de suicide sont plus élevés chez les personnes à la retraite, au chômage, divorcées, sans enfants, citadines, vivant seules. Les taux augmentent dans les périodes d'incertitude économique (bien que la pauvreté ne soit pas une cause directe). La plupart des suicidés souffrent de désordres psychologiques. La dépression est une cause fréquente. Des maladies physiques graves ou des infirmités peuvent aussi être la cause de suicides.
Du point de vue de l'individu, le suicide est rarement perçu comme une fin en soi, il est plutôt considéré comme l'unique voie possible pour échapper à une situation devenue insupportable. D'autres motifs existent : rejoindre un proche décédé, faire souffrir en causant du remords... De nombreuses raisons sont possibles.
Enfin, le taux de suicide peut aussi être influencé par le tapage médiatique fait autour du suicide de célébrités, voire par le suicide fictionnel d'un personnage dans un drame populaire.
[modifier] Europe
En Europe en 2006, le pays le plus touché par le suicide est la Lituanie, suivi par la Russie et la Biélorussie.
En Belgique, 2 000 suicides sont recensés tous les ans, ce qui représente la première cause "externe" de mortalité. Le royaume se situe, avec la Finlande, la France et le Danemark, bien au-dessus de la moyenne mondiale estimée à 14,5 pour 100 000 habitants. [4]
Chaque année en Suisse, on compte 1 300 à 1 400 suicides. C'est la cause de décès la plus importante chez les hommes de 15 à 44 ans. Environ 1 000 hommes et 400 femmes se suicident chaque année en Suisse, ce qui représente quatre décès par jour, soit un taux de suicide de 19,1 pour 100 000 habitants.
En 1996, la France compte 12 000 suicides pour 160 000 tentatives (chiffres de l'Inserm) ; avec 62 millions d'habitants en France, ces nombres représentent à peu près 19 suicides pour 100 000 habitants, soit un suicide pour 5 000 personnes, et une tentative pour 400 personnes. La France est au quatrième rang des pays développés. Les chiffres sont à peu près stables depuis 1980. Le suicide est une cause de décès plus importante que les accidents de la route. Il touche particulièrement les jeunes, chez qui le suicide est la deuxième cause de décès (plus présent chez les jeunes homosexuels).
Toujours selon l'INSERM, 650 décès environ ont lieu chaque année chez les 15-24 ans en France. Parmi ces jeunes, deux tiers sont des garçons. Le taux de suicide a chuté depuis 1985, mais les tentatives de suicide des 15-19 ans ont augmenté (4,3 % en 1999).
[modifier] Chine
La Chine est un des rares pays au monde où les femmes se suicident plus que les hommes. Ce phénomène se retrouve en Inde et dans le Pacifique. Cette forme de suicide est appelée par certains « suicide vindicatif ». Ces femmes ont été « achetées » par leur mari. Elles vivent au sein de leur belle–famille, où elles sont souvent traitées comme des esclaves. La seule issue qu'elles trouvent est souvent le suicide. Enfin, toute tentative de suicide « raté » est condamnable à la peine de mort.
[modifier] Japon
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Le Japon a l'un des plus forts taux de suicide du monde industrialisé (24,1 pour 100 000 habitants). Les suicides ont atteint le nombre record de 34 427 en 2003 (+ 7,1 % par rapport à 2002, source : AFP 22/11/2004). Le taux de suicide pour 100 000 habitants était de 26,1 en 1998, légèrement inférieur à celui des trois pays baltes et de la Russie, Hongrie et Slovénie où le taux avoisine 30 personnes pour 100 000 (sources diverses).
L'individu au Japon se définit par rapport à la relation à l'autre. Lors d'un sentiment d'obligation ou de dette ne pouvant être acquittée, les sentiments de l'indignité et de la honte s'installent. La seule issue honorable est alors le suicide. C'est un suicide par auto-punition pour la dette que l'on doit à la société. Mais le taux de suicide des jeunes au Japon n'a cessé de baisser ces dernières années.
[modifier] Québec, (Canada)
En 2001, 1 334 Québécois se sont donné la mort, dont 1 055 hommes. Le taux de suicide chez les jeunes hommes est parmi les plus élevés du monde, à 30,7 pour 100 000 habitants. Les hommes se suicident huit fois plus que les femmes. Quelques rares pays dépassent le Québec à ce niveau : la Russie, la Lituanie et le Kazakhstan. La situation s'est beaucoup aggravée depuis 1965, époque de la Révolution tranquille. Les prisonniers québécois suicidés comptent pour 60 % des suicides en milieu carcéral au Canada, alors qu'ils ne devraient en représenter démographiquement que 23 %. Les jeunes Autochtones forment l'échantillon le plus gravement touché : leur taux atteint de 3,3 à 3,9 fois la moyenne nationale. Cela représente 211 Inuits du Nunavik suicidés pour 100 000 habitants.
Certains sociologues ont théorisé les facteurs urbains, la perte du cléricalisme social, la pauvreté et les dépendances psychologiques et physiques comme la drogue, l'alcool et le jeu pour expliquer toutes ces pertes de vie. Les médias ont souvent montré des reportages de jeunes Indiens inhalant du gaz, se piquant à l'héroïne ou encore abusant d'appareils de loterie vidéo de Loto-Québec.
[modifier] Amérindiens du Canada
Les Amérindiens d’Amérique du Nord ont vécu des transformations radicales, particulièrement au Canada où les différents clans nomades ou semi-nomades ont été poussés à la sédentarité. On retrouve parmi ces peuples un taux de suicide endémique : celui des Premières nations est pratiquement quatre fois plus élevé que dans le Canada en général. On pourrait le comparer avec celui d’autres peuples ayant subi des bouleversements sociaux importants apportés par la colonisation tels les indigènes des Îles Fidji, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Paraguay et du Brésil.
Le groupe le plus à risque parmi les populations des Premières nations serait celui des hommes de 15–24 ans — ce qui correspond au groupe le plus à risque dans la population en général — chez qui le taux de suicide est de 126 pour 10 000 habitants. Cela représente un taux anormalement élevé comparé à celui du même groupe dans le Canada en général qui se situe à 24 pour 10 000 habitants. Chez les jeunes femmes autochtones du même groupe d’âge, le taux de suicide se situe à 35 pour 10 000 habitants, comparé à 5 pour 10 000 dans le Canada en général pour la même catégorie (SANTÉ CANADA). Ces chiffres ne tiennent par contre pas compte des suicides non complétés. Si l’on se fie à la population en général, les femmes accomplissent des tentatives de suicide, mais utilisent des moyens moins fiables ; cela produit, finalement, moins de suicides effectifs que chez les hommes et ne traduit pas la détresse psychologique qui s’empare du groupe des femmes dans la réalité. Ajoutons tout de même que chez les Autochtones, l’homme a perdu le rôle valorisant de chasseur–pourvoyeur pour acquérir celui de chômeur et que dans cette dévalorisation se trouve probablement la clef de plusieurs suicides.
Le chiffrage des tentatives de suicide pose problème puisqu'il est effectué dans le privé et l’anonymat. On estime que : « jusqu’à 25 pour cent des morts accidentelles chez les autochtones sont en fait des suicides non-déclarés »[5]. Cette question du suicide chez les populations autochtones est fort complexe et tire ses racines dans quatre siècles d’histoire.
[modifier] Comprendre et combattre le suicide
La psychiatrie, la psychologie, la sociologie, la philosophie, la théologie et le droit s'intéressent dans leurs domaines respectifs à la question du suicide. À côté de ces études théoriques, il existe des mesures pratiques pour la prévention du suicide et l'accompagnement de ceux qui commettent une tentative de suicide.
[modifier] Terminologie
Le terme « suicidaire » désigne des pensées suicidaires (= idéation suicidaire) et/ou un comportement suicidaire. Le terme de comportement suicidaire désigne les actes auto-agressifs avec une issue fatale (suicide) ou non fatale (tentative de suicide).
La définition de la tentative de suicide est complexe car plusieurs éléments sont à prendre en compte : la plus ou moins grande gravité du dommage, le caractère létal ou non de la méthode employée, le niveau de l’intention suicidaire.
[modifier] Épidémiologie
Les femmes font deux fois plus de tentatives de suicide que les hommes, les hommes se suicident deux fois plus que les femmes. Le suicide est la première cause de mortalité chez les 15–35 ans et le risque suicidaire augmente avec l’âge. Les études longitudinales montrent que 15 % des patients déprimés décèdent par suicide. Le taux de tentative de suicide décroît avec l’âge alors que le taux de suicide augmente.
Le risque suicidaire chez le déprimé est trente fois plus élevé qu’en population générale. Il est donc fondamental de le détecter. On compte 150 000 tentatives de suicide pour 12 000 suicides par an en France.
[modifier] Causes du suicide
Malgré les efforts pour prévenir et traiter ces pathologies, le suicide demeure un problème majeur de santé publique. Le défi à propos du suicide est de mettre au point un modèle explicatif et prédictif, c‘est à dire qui repose sur une physiopathologie en grande partie à découvrir et qui intègre les facteurs de risque actuellement connus. Un suicide réussi est fréquemment précédé par un processus suicidaire qui devient manifeste à travers les propos du sujet et/ou ses tentatives de suicide. La capacité à répondre à l’adversité psychosociale et à la pathologie mentale par un comportement suicidaire traduit une prédisposition sous-jacente. La prévention du suicide pour être efficace doit prendre en compte cette prédisposition.
Le suicide peut être dû à des difficultés psychologiques, notamment une grave dépression. Les autres cas (suicide suite à un déshonneur par exemple) sont plus rares dans les cultures occidentales. On a observé des cas où un suicide s'accompagnait du meurtres d'autres personnes (souvent le compagnon, les enfants), on parle dans ces cas de suicide étendu ou élargi.
Il peut arriver que la cause du suicide soit une réflexion sur l'existence même, influencée par la philosophie nihiliste.
[modifier] Facteurs de risque du suicide
Le suicide a en général des causes multiples. On peut classer les facteurs menant au suicide en trois catégories :
[modifier] Les facteurs primaires
Les facteurs primaires sont des facteurs sur lesquels on peut agir, ils ont une valeur d'« alerte ». Ce sont les antécédents personnels (tentatives de suicide précédentes, troubles de l'humeur), les antécédents familiaux (si des proches se sont suicidés, cela peut prendre une valeur d'« exemple ») et les troubles psychiatriques avérés (schizophrénie, toxicomanie, alcoolisme, etc.). Conseiller à un dépressif de se débarrasser des armes à feu qu'il possède chez lui fait statistiquement baisser ses réussites de suicide, car l'usage d'une arme à feu est simple et rapide, ce qui peut conduire au geste fatal pendant un court moment d'égarement.
[modifier] Les facteurs secondaires
Les facteurs secondaires sont des facteurs sur lesquels on peut faiblement agir, et qui n'ont en soi qu'une faible valeur prédictive, sauf associés à des facteurs primaires. Il s'agit essentiellement de la situation sociale (isolement, solitude, chômage) et d'événements passés traumatisants (deuil, abus sexuels, séparation, maltraitance).
Les maladies chroniques sont peu suicidogènes, mise à part pour les personnes âgées.
[modifier] Les facteurs tertiaires
Ce sont des facteurs sur lesquels on ne peut pas agir, et qui n'ont de valeur prédictive qu'en présence de facteurs primaires ou secondaires. C'est par exemple l'âge (la probabilité la plus forte est entre 35 et 54 ans, et au-delà de 70 ans) ou l'appartenance au sexe masculin (cf. la section Statistiques).
- La difficulté d'accepter son orientation sexuelle et affective (faible estime de soi) :
- Xavier Pommereau, psychiatre qui dirige un centre accueillant de jeunes suicidants, constate que parmi eux, 25% des garçons et 10% des filles parlent de leur homosexualité ;
- d'après Homosexualité et suicide, d'Éric Verdier et Jean-Marie Firdion (H&O éditions, Paris, 2003), un jeune homosexuel aurait entre quatre et sept fois plus de risque d'attenter à sa vie, chiffre à augmenter de 40% pour les jeunes filles ;
- Ces dernières années des études nord américaines[6] ont apporté un élément nouveau : la bisexualité ou l'identification à une orientation homo/bisexuelle chez les jeunes hommes. Ainsi certains études dévoilent des taux de suicide entre 6 et 16 fois plus élevé que parmi les autres suicidants ;
- Ces résultats viennent d’être confirmés en France par une étude[7] qui révèle qu’ils représentent un tiers des hommes tentant de se suicider.
La nature de l’orientation sexuelle ne constitue pas directement un facteur de suicide. Plusieurs travaux mettent en évidence des liens entre l’orientation sexuelle et la faible estime de soi (ou la dépression parfois considérée comme la dépréciation de soi) et amène à penser que l'homophobie est au cœur de ce processus car elle affecte le vécu de l’orientation homo/bisexuelle.
Il faut prendre ici l'homophobie dans son acception la plus large, incluant :
- l’homophobie latente, très répandue et largement sous estimée ;
- une société fortement hétérocentriste qui renvoie une image négative (voire l'absence d'image) de soi du fait d'un orientation sexuelle non conventionnelles et pour certains une impossibilité à la vivre ;
- ainsi que l’homophobie intériorisée, qui constitue une forme d’homophobie retournée contre soi, le suicide, meurtre de soi, étant l’étape ultime.
- L'époque de l'année a également une influence. On remarque un pic de suicides durant les fêtes de Noël, peut-être en raison d'un sentiment de solitude renforcé par la vue de retrouvailles familiales, un sentiment de tristesse renforcé par les manifestations (et les publicités) de joie. On peut en partie expliquer ce facteur par les journées moins longues (voir paragraphe suivant).
- Certaines études tentent d'établir une corrélation entre le nombre de suicides et la longueur des jours pendant la période hivernale, ce qui expliquerait que les suicides soient si fréquents dans les pays les plus au nord tels que le Canada ou les pays scandinaves. En effet, la lumière a un effet antidépresseur.
[modifier] Facteurs de protection
On note plusieurs facteurs de protection qui permettent de contrebalancer certains effets négatifs des facteurs de risque associés au suicide. Voici quelques exemples :
- Stratégies de gestion du stress adéquates
- Réseau social disponible et significatif
- Ouverture à recevoir de l'aide
- Estime de soi et confiance en soi élevées
- Support des enseignants et d'autres adultes en milieu scolaire
- Vision de l'école comme un lieu d'investissement
- Confiance en ses capacités à faire face aux obstacles de la vie
[modifier] Modélisation du comportement suicidaire
« Il est très important de pouvoir modéliser le comportement suicidaire car sa prédictibilité est actuellement très faible. Bien que la majorité des sujets qui font une tentative de suicide ou se suicident ne sont pas connus comme souffrant d'un trouble psychiatrique, les enquêtes dites « d'autopsie psychologique » réalisées dans l'entourage de sujets suicidés nous montrent que 90 à 95 % des sujets décédés par suicide présentaient un trouble psychiatrique »
- (conférence de consensus, La Crise suicidaire, ANAES p. 77)
Deux modèles principaux ont été développés pour expliquer et prévoir le comportement suicidaire. Ces deux modèles se complètent plus qu’ils ne s’excluent.
[modifier] Le modèle stress-prédisposition
Les auteurs partent des constatations suivantes : 90 % des victimes de suicide souffraient d’une pathologie psychiatrique au moment de leur mort mais beaucoup de patients psychiatriques ne font pas de tentatives de suicide. Un diagnostic psychiatrique est une condition nécessaire mais non suffisante pour se suicider. Il est donc nécessaire d’identifier des facteurs de risque suicidaire en dehors du diagnostic psychiatrique. Une tentative de suicide antérieure est le meilleur prédicteur d’une tentative de suicide future mais seulement 20 à 30 % des patients qui se suicident ont fait avant une tentative de suicide. Un premier résultat important est que les patients qui font une tentative de suicide ne diffèrent pas significativement de ceux qui n’en font pas en terme de sévérité de la psychopathologie aiguë. Ceci va à l’encontre d’une idée reçue selon laquelle la gravité des symptômes prédispose au suicide.
Par contre, l’intensité de l’idéation suicidaire est un facteur de risque de passage à l’acte. Dans le risque suicidaire, la pathologie intervient par certains paramètres longitudinaux :
- le nombre d’épisodes psychopathologiques avant la tentative de suicide est un facteur pronostique,
- l’âge de début de la pathologie : la précocité de l’âge de début est un facteur de risque.
Des éléments stables du comportement sont retrouvés comme des marqueurs de prédisposition :
- la dimension d’impulsivité/agressivité ;
- un trouble de la personnalité associé ;
- des antécédents d’alcoolisme ou d’abus/ dépendance à une substance ;
- le fait de fumer ;
- un antécédent de traumatisme crânien ;
- des antécédents familiaux de tentative de suicide ou de suicide ;
- des abus et/ou violences dans l’enfance.
[modifier] Les différents types de suicides selon Émile Durkheim
Dans ses études sur le comportement suicidaire, Émile Durkheim montre que le suicide provient essentiellement d'un excès : trop entouré ou pas assez, absence ou surplus de règles. Son travail repose sur des cas véridiques qu'il s'est efforcé de classifier et d'ordonner.
Il en est ressorti quatre types principaux de suicides : altruiste, égoïste, anomique, fataliste.
[modifier] Le suicide "altruiste"
Il est provoqué par une individualisation insuffisante. L'individu est tellement absorbé dans son groupe que sa vie ne peut exister en dehors des limites de ce groupe.
Exemples de suicides "altruistes" :
- Suicide des prêtres de certaines religions orientales ;
- Suicide des veuves qui, en Inde, désirent être placées sur le bûcher où l'on doit bruler le corps de leur mari ;
- Commandant de navire qui ne peut envisager de vivre sans son bâtiment maritime et qui coule avec son bateau ;
- Suicide des militaires jeunes retraités.
[modifier] Le suicide "égoïste"
Présence ici, à l'inverse du suicide "altruiste" (voir ci-dessus), d'une individualisation démesurée et qui s'affirme au détriment du moi social, ainsi que d'une désagrégation de la société.
C'est, par exemple, le suicide de l'adolescent solitaire. La famille et la religion protègent en principe contre ce type de suicide.
[modifier] Le suicide "anomique"
Le mot "anomie" vient du grec anomia et signifie absence de règle, violation de la règle. Il a été emprunté, dans un premier temps, en philosophie par Jean-Marie Guyau (1854-1888) qui, à la différence des Grecs, l'utilisait de façon positive : l'anomie répresente l'affranchissement des limites virtuelles fixées par l'homme. Cependant le sociologue français Emile Durkheim (1858-1917), en étudiant le comportement suicidaire, l'utilise mais revient sur une vision plus sombre et négative du mot, où la rupture des règles peut être très néfaste au psychisme et conduire au suicide.
Il a été montré par des études que le suicide croît de façon proportionnelle aux dérèglements d'ordre social et d'ordre économique : qu'il s'agisse de crises boursières ou d’embellie économique, le taux de suicide augmente car l'individu perd ses repères et ses régulateurs.
[modifier] Le suicide "fataliste"
C'est le suicide du kamikaze, de celui dont l'« avenir est impitoyablement muré ». On retrouve aussi dans cette catégorie le suicide des époux trop jeunes ou celui des esclaves.
[modifier] Le modèle dit du processus suicidaire
C'est le modèle qui a été retenu par l’INSERM dans ses travaux sur le suicide. Il est possible d’observer un processus suicidaire chez l’individu avant le passage à l’acte. Les personnes suicidaires présentent une fragilité (facteurs de risque accumulés) qui les prédisposerait à réagir de façon inadaptée lors de situations stressantes. Une perte quelconque (exemple : perte d’un(e) ami(e) ou deuil d'un proche) enclenche le processus. Une période dépressive suit la perte ; puis l’étape de la crise s’installe. L’état de crise peut être accompagné d’idéations passagères qui se transformeront en rumination, puis en cristallisation (formation d’un plan précis pour passer à l'acte : où ? quand ? comment ?) pour aboutir à la tentative planifiée. Dans la majorité des cas, le suicide n’est donc pas un acte impulsif, mais plutôt un acte prémédité qui résulte d'un processus bien défini. Ceci permet de réaliser qu'une intervention spécifique est possible à chacune des étapes. La personne intervenant auprès d'un individu suicidaire doit être attentive aux signes associés à chaque phase du processus.
Le processus suicidaire est un processus qui se déroule sur quelques heures ou quelques jours. On y distingue trois étapes :
- Les pensées ou idées suicidaires (idéation suicidaire) ;
- La crise suicidaire : les pensées de suicide deviennent omniprésentes (ruminations) et le patient élabore des scénarios de passage à l’acte ;
- Le passage à l’acte suicidaire.
Les études faites sur la cognition du suicide ont trouvé les caractéristiques suivantes qui prédisposent au passage à l’acte suicidaire en situation de stress :
- Tendance à se considérer comme perdant lorsqu’il est confronté aux stress psychosociaux ;
- Incapacité à percevoir une possibilité de fuite, ce qui est à mettre en rapport avec une mémoire autobiographique remplie d’échecs et d’incapacités à résoudre les problèmes ;
- Sentiment que personne ne peut rien pour lui (sentiment de désespoir).
Cette cognition particulière semble devoir être mise en relation avec un déficit des fonctions exécutives avec en particulier des difficultés dans l’élaboration des stratégies de prise de décisions comme cela a été montré dans une étude récente. Enfin, nous dirons quelques mots de la neurobiologie du suicide. Le trait très régulièrement retrouvé est le dysfonctionnement du système sérotoninergique que celui-ci soit attesté par une diminution des métabolites urinaires de la sérotonine, ou des métabolites au niveau du liquide céphalorachidien, ou encore par une baisse de la fixation de la sérotonine au niveau préfrontal. Pour une revue détaillée, on pourra consulter The neurobiology of suicide and suicidability.
Références
- Mann JJ, Waternaux C., Haas GL., and al., Toward a clinical model of suicidal behavior in psychiatric patients, Am J Psychiatry, 1999, 156: 181-189.
- Maria A. Oquendo, Hanga Galfalvy, Stefani Russo, Steven P. Ellis, Michael F. Grunebaum, Ainsley Burke, and J. John Mann, Prospective Study of Clinical Predictors of Suicidal Acts After a Major Depressive Episode in Patients With Major Depressive Disorder or Bipolar Disorder, Am J Psychiatry, Aug 2004; 161: 1433 - 1441.
- INSERM, La Crise suicidaire, Conférence de consensus. 2001 John Libbey Eurotext.
- Keilp JG., Sackeim HA., Brodsky BS. And al., Neuropsychological dysfunction in depressed suicide attempters, Am J Psychiatry, 2001, 158: 735-741.
- Va Heeringen K. The neurobiology of suicide and suicidability. The Canadian journal of Psychiatry, juin 2003.
[modifier] Prévention du suicide
Le suicide est généralement annoncé ; beaucoup de suicidés essaient de prévenir leurs proches et laissent une lettre d'adieu afin d'expliquer leur geste. Ces pensées sont à prendre au sérieux ; s'il y a un risque de tentative de suicide, il faut en parler avec la personne ouvertement afin de pouvoir l'éviter. L'évocation de la mort avec une personne, poser la question « avez-vous pensé à la mort ? » n'est pas suicidogène, mais permet au contraire de montrer que l'on comprend la souffrance. Lorsque l'on discute, il ne faut pas porter de jugement ; on peut tenter de lui faire se remémorer d'anciens problèmes et les stratégies qu'elle avait mises en œuvre pour les résoudre.
Selon le professeur Michel Debout (extrait de dossier sur Doctissimo.fr) :
« Lorsqu’on pense qu’une personne va mal, il ne faut pas hésiter à lui dire ce que l’on ressent. Et la manière dont on lui dit est importante. Si vous lui demandez : « ça ne va pas ? », elle risque de se renfermer dans une réponse de type : « Mais si ça va très bien. » Alors que si vous dites « je te sens mal », vous vous impliquez personnellement, et vous montrez que non seulement vous offrez une écoute, mais même un véritable dialogue. À partir de là, tout dépend de la situation et de votre lien avec elle. Mais vous pouvez essayer de l’orienter vers un soutien, un spécialiste ou une association qui pourront l’aider. »
Les personnes qui ont fait une tentative de suicide sont en général prises en charge en service de soins aigus à l'hôpital (suite à un empoisonnement ou à des blessures nécessitant souvent une réanimation). Une fois l'épisode critique surmonté et l'éloignement de tout danger vital, le patient est orienté vers un service de psychiatrie. L'hospitalisation est volontaire dans la grande majorité des cas, mais certaines dépressions sévères (mélancolie, dépression délirante) peuvent entrainer une hospitalisation à la demande d'un tiers, voire une hospitalisation d'office. Dans tous les cas, les sujets ayant fait une tentative de suicide doivent être évalués par un psychiatre, et souvent orientés vers une structure adaptée à la prise en charge d'une cause curable de suicide (dépression très souvent, mais aussi psychose, alcoolisme, etc.). Dans le cas d'un séjour en psychiatrie, il est proposé un suivi ultérieur en consultation psychiatrique (hospitalière ou avec un psychiatre libéral). Malgré ces efforts de prise en charge et la possibilité d'hospitalisation contre le gré du suicidant, en France, un quart des adolescents mineurs suicidants sortent de l'hôpital sans avoir eu de consultation psychiatrique.
Cette prise en charge des personnes qui tentent de se suicider est importante car les risques d'une nouvelle tentative sont grands (75 % dans les deux ans). Il est cependant aussi nécessaire de faire une prévention du suicide en amont. Cela passe par l'explication de ce qu'est la dépression. Il serait souhaitable que médecins (60 à 70 % des suicidants consultent un médecin dans le mois qui précède le passage à l'acte, dont 36 % dans la semaine qui précède), enseignants et de manière générale toute personne en contact avec des adolescents ou des personnes en détresse sociale soient formés, des campagnes publicitaires soient menées afin de sensibiliser l'ensemble de la population à ce problème et d'aider les personnes susceptibles de se suicider à abandonner cette idée en leur ouvrant la voie à d'autres alternatives.
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L'idéal serait de convaincre la personne de consulter un médecin ou de contacter une association spécialisée. Si l'on sent que le passage à l'acte est imminent, il faut prévenir les secours (en priorité la régulation médicale, le « 15 » en France, le «112» en Europe pour les urgences diverses).
Cependant, l'écoute dans le but de faire exprimer à la personne ses difficultés ne constitue qu'un premier stade de la prévention.
[modifier] Tentatives de suicide
Un acte de suicide qui ne se termine pas par la mort de la personne est appelé « tentative de suicide ». Les tentatives de suicide sont beaucoup plus nombreuses que les suicides. Elles concernent davantage les femmes que les hommes et une tranche d'âge plus jeune : les moins de 35 ans. Dans les tentatives de suicide, on retrouve surtout des filles d’environ 15–16 ans qui vivent des problèmes psychosociaux depuis un certain temps et elles présentent une détresse apparente. Elles ne cherchent pas à mourir, mais plutôt à modifier leur milieu socio-affectif. C’est pour cette raison qu’elles choisissent généralement des moyens non-violents, comme l’« overdose » lorsqu’elles passent à l’acte. Les personnes qui tentent de se suicider ne sont généralement pas atteintes de maladies physiques graves ou de graves dépressions même si les facteurs psychologiques y sont particulièrement importants.
Les problèmes sociaux sont les causes les plus fréquentes : conflit avec la famille, enfance difficile, problème avec l'alcool, comportement violent. Les personnes devant faire face à ce type de problèmes deviennent anxieuses et déprimées ; en réaction à une nouvelle situation de crise particulière, elles craquent et tentent de se suicider. Les motivations sont assez complexes : par exemple un désir de soulager une souffrance émotionnelle trop forte, ou le besoin de communiquer ses sentiments. Les tentatives de suicide peuvent aussi résulter d'un conflit interne entre le désir d'en finir avec la vie et celui de continuer à vivre.
[modifier] Aide téléphonique
Ce premier stade est généralement pris en charge téléphoniquement par des associations de type :
- En France :
- SOS Amitié : http://www.sos-amitie.com
- Suicide Écoute : http://suicide.ecoute.free.fr
- SOS Suicide Phoenix http://www.sos-suicide-phenix.org
- En Suisse :
- La main tendue : http://www.143.ch
- En Belgique :
- Service Prévention Suicide au 0800/32 123 - secrét.: 02/640.51.56 ou http://www.guidesocial.be/_lesassociations/search.php?c=78
- Au Canada :
- http://www.cpsquebec.ca/fr/nous_joindre/index.htm
- 1-418-683-4588 (Québec).
- 514-723-4000(Montréal).
- 1-866-APPELLE = 1-866-277-3553, Centre de Prévention du suicide Québec/Canada. Cette ligne bascule l'appel vers le centre de prévention du suicide de sa région.
Tous ces services (en France et en Suisse) se cantonnent exclusivement à l'écoute et n'interviennent pas même sur demande expresse de la personne en détresse.
Si la personne est jugée en danger immédiat, les intervenants du 1-866-APPELLE retraceront l'appel et enverront des secours. C'est une ligne d'intervention.
Sauf pour les anglophones où le service de SOS Amitié spécialisé peut orienter vers un psychiatre anglophone voire appeler les pompiers à la demande expresse de la personne.
SOS Amitié a aussi un service d'écoute par courriel mais avec des délais de 48h pour les réponses.
[modifier] Aide internet
Des forums francophones affirmant procurer un soutien psychologique existent actuellement sur l'internet :
Selon certains, il convient d'aborder ces sites avec circonspection en raison de :
- l'impossibilité de contrôler la compétence des interlocuteurs : un site internet étant facile à créer, il n'apporte pas le gage d'une structure pratiquant la formation interne et l'évaluation de ses personnels ;
- le décalage culturel pouvant exister entre les personnes parlant la même langue mais pouvant être de culture très différente.
Ces deux facteurs pourraient mener à une aide inadaptée, qui pourrait même être suicidogène.
S.O.S Amitié Internet, dans le prolongement de son écoute téléphonique, offre un service d'écoute web gratuit, fonctionnant par courriel, pour donner aux personnes la possibilité de mettre des mots sur leurs difficultés et leur souffrance. Les personnes qui répondent aux messages appartiennent à l'équipe d'écoute au téléphone et ont suivi une formation spécifique à l'écoute écrite. Les messages reçus reçoivent une réponse sous 48h.
[modifier] Intervention active auprès d'une personne en état d'urgence élevée
Actuellement, il n'existe pas de graduation entre la démarche d'écoute (Aide téléphonique et Aide internet) et l'intervention des services d'urgences sur un cas déjà passé à l'acte.
La prévention des cas d'urgence élevée devant donc être effectuée par l'entourage ou le médecin traitant. Ce qui pose les problèmes suivants :
- la formation
- création de structures d'interventions à même de compenser leurs absence
[modifier] Notes et références
- ↑ (en)Eleazar Encyclopédie catholique en ligne
- ↑ 2,0 2,1 Le suicide, sur un site personnel
- ↑ article 115 du code pénal suisse
- ↑ Commission provinciale de prévention du suicide à Liège en Belgique
- ↑ http://www.parl.gc.ca/information/library/PRBpubs/mr131-f.htm
- ↑ Bagley et Tremblay (1997), Remafedi (1998), Garofalo (1999), Cochran et Mays (2000)
- ↑ Shelly et Moreau (2003), in Le Monde "Le suicide révèle la souffrance singulière des jeunes homosexuels" paru le 10/09/2005
[modifier] Voir aussi
[modifier] Bibliographie
- Pour Durkheim, le taux de suicide ne peut s'expliquer qu'à partir d'une analyse globale de la société ; il montre que celui-ci varie en proportion inverse du degré d'intégration des groupes sociaux dont fait partie l'individu.
- Jean Baechler, 1978 : Les Suicides, Calmann-Lévi. Thèse sous la direction de Raymond Aron.
- Contre-pied de l'explication durkheimienne, l'analyse part de présupposés individualistes, et pose une théorie qui annonce le système imposant que l'auteur mettra au point ultérieurement.
- Pascal Millet, Michel Debout, Michel Hanus, Jean-Jacques Chavagnat, collectif : « Le deuil après suicide », dans Études sur la mort, N° 127, 2005, Éditions : L'Esprit du temps, ISBN 2847950591.
- Pr Michel Debout, La France du suicide, éditions Stock.
- Philippe Labro, Tomber sept fois, se relever huit, éditions Albin Michel (2003).
- Gabriel Matzneff, Le Suicide chez les romains.
- Alain Meunier et Gérard Tixier, Le Grand blues, Payot (21 octobre 2000), 246 pages.
- Pierre Moron, « Le suicide », Presses Universitaires de France, Collection Que sais-je ?
- Xavier Pommereau, L’Adolescent suicidaire, Dunod, 3e édition (10 février 2005), 268 pages.
- Yves Prigent, « La Souffrance suicidaire », Desclée de Brouwer (1 octobre 1996), collection Intelligence du corps, 198 pages.
- M. de Clerc, Suicide et tentatives de suicide, Louvain Med. 117 : S502—S508, 1998.
[pdf] Version disponible en ligne.
- François Ladame : Adolescence et suicide, éditeur : EME Editions Sociales Françaises (ESF), 1980, ISBN 2710107546.
- Jean Teulé, Le magasin des suicides, Julliard (janvier 2007), 162 pages.
[modifier] Articles connexes
- Point de vue religieux sur le suicide
- Psychiatrie
- Psychanalyse des adolescents
- Liste de personnalités suicidées
- Internement psychiatrique
- Suicide et philosophie
[modifier] Liens externes
- Association internationale de prévention du suicide (www.iasp.info)
- SuicideInfo : renseignements sur le Suicide et les Situations de Crise (www.suicideinfo.org)
- Article sur le suicide chez les jeunes (citouci.free.fr)
- STOP SUICIDE : mouvement de jeunes de prévention du suicide des jeunes (www.stopsuicide.ch)
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