Francisco Franco
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Cet article parle du général Franco, pour le musicien congolais Franco, voir Franco Luambo.
Francisco Paulino Hermenegildo Teódulo Franco y Bahamonde Salgado Pardo de Andrade, plus couramment appelé général Franco (né le 4 décembre 1892 à Ferrol (Galice) en Espagne, décédé le 20 novembre 1975 à Madrid en Espagne) était un militaire et le chef de l'État espagnol de 1939 à 1975, présidant un gouvernement autoritaire et dictatorial avec le titre de Caudillo (guide) : « Generalísimo Francisco Franco, caudillo de España por la gracia de Dios ».
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[modifier] Biographie
[modifier] Jeunesse et formation
Franco naît à El Ferrol, un port de Galice. Véritable ghetto militaire, El Ferrol est un milieu fortement marqué par la tradition militaire et le dévouement à l'État, où la famille Franco vit depuis sept générations. Son père, Nicolás Franco Salgado-Araujo, est intendant général de la Marine. Coureur de jupons, il n'est pas à l'aise dans le milieu très conservateur de El Ferrol. Sa mère, Pilar Bahamonde y Pardo de Andrade, est une femme très pieuse, très attachée à ses enfants. Francisco est baptisé dans la paroisse San Francisco du quartier des officiers le 17 décembre 1892.
Surnommé Paquito par ses camarades à cause de sa petite taille, il est d'abord envoyé dans une école privée, puis passe deux ans au collège du Sacré-Cœur, avant d'entrer à l'École de préparation navale. Élève moyen, il se destine naturellement à la marine, comme sa tradition familiale l'y incite et comme tous les enfants de Ferrol. La fermeture de l'École navale de Ferrol en 1907 le contraint à chercher une autre voie. Le 29 août 1907, il entre alors à l'Académie d'infanterie de Tolède. La même année, son père est promu à Madrid, lassé du milieu militaire fermé de El Ferrol. Ses relations avec sa femme s'étant dégradées, il insiste pour que sa famille ne le suive pas. On apprend peu après qu'il a une maîtresse en ville : la séparation est alors définitive.
L'Académie de Tolède est de niveau médiocre : son concours d'entrée consiste en un examen de la maîtrise des quatre opérations arithmétiques et une vérification rapide de la constitution physique. Ses cours sont également assez sommaires. En 1910, Franco en sort 251e sur 312. Ces maigres performances doivent cependant être relativisée au regard de son jeune âge : il n'a que 18 ans alors que ses camarades sont plutôt âgés de 20 ou 21 ans. Le 13 juillet, il est promu segundo teniente, c'est-à-dire sous-lieutenant.
[modifier] Carrière militaire
Une fois sa formation achevée, Franco est affecté à la garnison du Ferrol. Il y mène une vie de garnison, terne et monotone. Dès février 1912, il doit partir pour le Maroc, dans le 8e Régiment d'Afrique.
[modifier] Au Maroc
Le 19 mars 1912, il essuie le premier feu ennemi. Déterminé à sortir de l'anonymat, il demande en 1913 à être affecté au régiment des réguliers indigènes, réputé pour sa bravoure mais aussi pour sa loyauté incertaine. Il participe à de nombreuses opérations et le 12 octobre, obtient la croix du mérite militaire, première classe. Dès le mois de mars 1915, il est promu capitaine. Peu à peu sa légende prend forme : les Maures le pensent invulnérable.
Cette réputation prend fin en mars 1915 : il est très grièvement blessé au ventre, au cours d'une attaque contre le fort d'El-Biutz. Il est alors promu commandant, malgré l'avis défavorable du Haut Conseil militaire. Alphonse XIII a en effet intercédé en sa faveur, à sa demande. Il reçoit le commandement d'un bataillon d'infanterie cantonné à Oviedo, aux Asturies. Franco y découvre pour la première fois le prolétariat, les ouvriers-mineurs, dont les conditions de vie sont misérables. Cette expérience marquera beaucoup ses opinions sociales. Au cours de l'été 1917, le général Burguete, gouverneur militaire de la province, décrète l'état de guerre en réponse à de violentes grèves dans les mines. Franco assiste alors à la répression.
[modifier] À la Légion
En 1919, Franco rencontre le lieutenant-colonel José Millan-Astray, dont l'ambition est de créer une unité militaire d'élite selon le modèle français de la Légion étrangère. En 1920, son projet est accepté. Millan-Astray offre à Franco le commandement de la 1re bandera (bataillon), lequel part cantonner à Ceuta en octobre. Franco impose à ses légionnaires un entraînement très strict. Parallèlement, il se montre impitoyable face aux révoltes indigènes. Après le désastre d'Anual en 1921, il autorise ses hommes à appliquer la loi du talion : les légionnaires mutilent, pillent, violent et tuent à leur tour. Suite à ce désastre, il est appelé à Melilla pour reconquérir le terrain face à Abd el-Krim.
En janvier 1922 il est de nouveau affecté à Oviedo. Il reçoit la médaille militaire et est nommé lieutenant-colonel. Il profite de sa gloire nouvelle pour demander en mariage Carmen Polo Martínez Valdés, jeune fille de la bonne bourgeoisie, rencontrée lors de sa première affectation en 1917. Le mariage est reporté suite au décès du commandant de la Légion : Franco le remplace, sur recommandation du roi. Il se marie finalement le 22 octobre 1923.
C'est à partir de cette année 1923 que l'on commence d'ailleurs à employer le terme de "caudillo" (chef de guerre lors du Moyen Âge espagnol) pour désigner Franco.
Le 13 septembre 1923, Miguel Primo de Rivera a instauré un régime dictatorial par un coup d'État. Face aux difficultés rencontrées au Maroc, il songe à un retrait. Pendant les mois de novembre et décembre 1924, Franco doit effectivement superviser l'évacuation de Xanten. Sa bonne conduite le fait nommer colonel. Peu après, Abd el-Krim s'attaque à des populations françaises. En réponse, la France s'allie à l'Espagne. Primo de Rivera approuve un plan de débarquement à Alhucemas. C'est un succès : Franco est élevé au rang de général de brigade en février 1926, ce qui fait de lui le plus jeune général d'Europe — il n'a alors que 33 ans. Quelques mois plus tard naît la fille de Franco, Maria del Carmen, surnommée Nenuca. Les honneurs se succèdent pour lui ; en 1927, il est même chargé d'accompagner le roi dans son voyage officiel en Afrique.
[modifier] L'Académie militaire de Saragosse
Le 4 janvier 1928, Primo de Rivera recrée l'Académie générale de Saragosse. Cette fois, il en fait un passage obligé pour tous les futurs officiers, et nomme Franco à sa tête. Ce dernier surveille étroitement d'abord les travaux de construction des bâtiments puis, s'inspirant de son expérience tolédane, rédige lui-même le règlement intérieur de l'Académie. Il impose ainsi des chambrées de trois cadets « pour éviter les mariages. »
Suivant leur appréciation du personnage lui-même, les historiens jugent de manière variable le travail de Franco à l'Académie. Il est certain que la nouvelle école militaire est meilleure que l'ancienne, ne serait-ce qu'en raison de l'élévation du niveau de recrutement (baccalauréat élémentaire). Franco impose l'anonymat des copies au concours d'entrée, diminue le nombre d'élèves par professeur, installe de nombreuses douches, interdit le bizutage et fait même distribuer des préservatifs aux étudiants. Il sait se faire respecter, voire apprécier : 90 % des 720 officiers formés par l'Académie rejoignent ensuite le camp franquiste pendant la guerre civile.
En juillet 1931, la Seconde République supprime par décret l'école. Comme l'ensemble du corps enseignant, Franco est placé en disponibilité forcée et surveillé. Pour Franco, qui s'était totalement impliqué dans la création de l'Académie, c'est là un mauvais coup qu'il prend très mal. Le 14 juillet il exprime son mécontentement publiquement, en prenant congé de la dernière promotion de cadets :
- « La discipline ne confère aucun mérite lorsqu'un ordre nous est agréable. La discipline revêt sa vraie valeur lorsque nos pensées nous conseillent le contraire de ce qu'il nous est ordonné, lorsque notre cœur cherche à susciter une rébellion intérieure, ou lorsqu'un ordre est arbitraire ou erroné. Telle est la discipline que nous observons. »
Franco essayera dès le lendemain de se disculper auprès de Manuel Azaña, chef du gouvernement, qui voudra bien se contenter de ces explications et éviter l'affrontement public. Il lui adressera seulement un avertissement discret par une lettre lui exprimant son « déplaisir ». Malgré la modération du propos, il est clair qu'il ne sous-estime pas la personnalité du général. Il note dans son journal qu'il est « le plus dangereux des généraux », mais il ne veut pas élargir le fossé qu'il vient de creuser entre les militaires et lui. Malgré tout, Franco ne participera pas à la Sanjurjada, tentative de coup d'État du général Sanjurjo en août 1932. Ayant suffisamment satisfait aux enquêtes de la république, il est affecté à La Corogne comme commandant de la XVe brigade d'infanterie, en février 1932. Franco gardera à Azaña, une rancune tenace de cette période de quarantaine.
[modifier] Franco face à la «sanjurjada»
Le soulèvement de la garnison de Séville le 10 août 1932, dirigé par le général Sanjurjo, bute contre la grève générale déclenchée par la CNT et le Parti communiste de Séville. Il est arrêté à Madrid et condamné à mort puis gracié, voyant sa peine commuée en détention à vie ; les autres conjurés comme le général Goded et le colonel Varela sont aussi emprisonnés. Le gouvernement républicain ne veut pas faire de martyrs.
Franco, dont on imagine mal qu'il ne soit pas tenu informé de ce que les Espagnols nomment la « sanjurjada », a eu pendant toute la préparation du complot de fréquents contacts avec Sanjurjo. Il entretenait avec ce militaire des liens d'amitié noués en Afrique, mais semble dès le départ avoir pris ses distances. Il racontera plus tard que le hasard lui avait fourni un alibi de poids : il avait pensé s'éloigner de la Corogne le jour du coup d'état pour une promenade de plaisir dans la région, mais l'officier qui était censé le remplacer étant tombé malade, il dut y renoncer. Azaña qui avait appelé la région militaire au téléphone pour vérifier sa présence, avait eu le soulagement de le trouver à son poste. De toute façon, à aucun moment il n'a adhéré ni n'a approuvé de sympathie pour ce putsch. Lorsque Sanjurjo lui demande d'assurer sa défense, après son arrestation, il a ce mot très dur :
- «Je ne vous défendrai pas. Vous méritez la peine de mort, non pas parce que vous vous êtes soulevé, mais parce que vous avez échoué. »
Il n'est pas homme à se lancer dans des aventures incertaines, ni à les approuver, mais n'en continue pas moins à lui rendre régulièrement visite à la prison où il est interné : il n'est pas homme non plus à faillir à la loyauté qu'il croit devoir à sa caste.
[modifier] La guerre civile
Voir l'article détaillé : Guerre civile espagnole
Dans le climat révolutionnaire qui règne en Espagne, Franco est observé de tous les côtés. Il paraît l'un des militaires les plus susceptibles de prendre la tête d'un soulèvement armé. Pour cette raison, il est nommé gouverneur militaire aux îles Canaries, loin de la péninsule. En fait, Franco est alors peu convaincu par l'opportunité d'un coup d'État. C'est sous la IIe République qu'il a atteint l'apogée de sa carrière. Bien que monarchiste d'éducation, il se satisfait d'une république bourgeoise, conservatrice et maintenant l'ordre. Il est peu enclin à risquer sa carrière dans une aventure mal préparée.
De fait, c'est Emilio Mola et non Franco qui est l'inspirateur et l'organisateur de la tentative de coup d'État de 1936 contre le gouvernement en place, alors mené par le Frente Popular. Certes, il est au courant depuis le début des activités des conjurés, mais il attend le 13 juillet, date de l'assassinat du chef monarchiste José Calvo Sotelo pour les rejoindre.
Franco se voit attribuer l'armée du Maroc, forte de 30 000 hommes aguerris, véritable fer de lance du complot. La mort accidentelle de Sanjurjo, chef historique de l'opposition monarchiste, et les échecs des généraux Goded et Fanjul à Barcelone et Madrid propulsent Franco sur le devant de la scène.
Le pronunciamiento échoue par manque d'adhésion de l'armée : sur 21 généraux de division, seuls 4 se rallient au soulèvement. C'est à ce moment que les milices ouvrières, qui ne croient pas en les capacités du gouvernement à faire face, entrent en scène. Elles font régner la terreur à Madrid et Barcelone, provoquant ainsi l'exil de nombreux intellectuels, comme José Ortega y Gasset. Le conflit se transforme alors en une guerre civile.
Franco se décide alors à acheter 12 avions italiens, payés par son ami le banquier Joan March, ainsi que des Junkers allemands, afin d'établir un pont aérien reliant le Maroc à Séville. Au mois d'août, il lance un convoi naval à partir de Ceuta, forçant ainsi le blocus établi par la République. Encore une fois, il est servi par la division de ses adversaires : désorganisée par les mutineries socialistes et anarchistes au sein des équipages, la flotte gouvernementale ne peut arrêter le convoi de Franco. Il réussit ainsi à transporter 23 400 hommes.
Jusqu'alors, Franco reste neutre sur la nature du régime qu'il entend donner à l'Espagne. Sa déclaration du 21 juillet 1936 s'achève même par « vive l'Espagne et vive la République » : le Mouvement est dirigé contre le Front populaire, et non la République à proprement parler. Lors de la création de la « Junte de défense nationale », le 23 juillet, on ne relève également aucune indication sur le régime souhaité, ni aucune connotation religieuse.
Très vite, les atrocités surviennent. Le 1er août, Franco confie à Juan Yagüe trois colonnes, chargées d'effectuer la jonction avec l'armée du Nord, en passant par l'Estrémadure. Yagüe est un ancien camarade de l'Académie de Tolède. Le 14 août, il s'empare de Badajoz, où il fait fusiller 2 000 prisonniers de guerre. Alors que la presse internationale se scandalise, Franco félicite Yagüe, lequel menace Madrid en septembre. Parallèlement, le cabinet Giral chute, remplacé par celui de Largo Caballero.
Alors que la guerre civile paraît devoir prendre fin rapidement, Franco décide, à l'étonnement général, de suspendre la marche sur Madrid. Il détourne l'armée d'Afrique pour porter secours aux défenseurs face au siège de l'Alcazar. De ce fait, il sacrifie un objectif militaire au profit d'un geste politique. La légende des cadets de l'Alcazar constituera l'un des éléments de la mythologie franquiste. On a pu également suggérer qu'il était de l'intérêt de Franco de faire durer la guerre, afin de mieux « nettoyer » le terrain. Il est ainsi avéré que Franco a refusé toute médiation durant la guerre, même celles émanant du Saint-Siège.
Le 21 septembre, la Junte de défense se réunit, et Franco est nommé général en chef. Le 28, la fonction de chef de l'État lui est adjointe par décret. Le 1er octobre, à Burgos, il est investi des pleins pouvoirs. L'évêque de Salamanque compare le Mouvement à une croisade, introduisant ainsi un motif religieux jusque-là absent.
Durant ce mois, les grandes puissances européennes, malgré les accords de non-intervention, s'engagent dans la guerre civile. L'URSS par ses chars (peu nombreux) et les Brigades internationales (2 000 hommes au début) appuient le Front populaire et ses défenseurs — CNT et FAI (anarchiste), POUM (marxiste), PC (staliniste), UGT (socialiste). En face, l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste se rangent dans le camp de l'insurrection militaire en envoyant d'importants contingents d'hommes et de matériels. Le 26 avril 1937, jour de marché, une centaine d'avions de la légion Condor (Luftwaffe) procède au bombardement de la ville basque de Guernica, sans motif militaire autre que celui de terroriser une population acquise au gouvernement républicain. C'est la première fois qu'une ville européenne est soumise à un tel traitement. Sur les 7 000 habitants, 1 645 sont tués et 889 blessés, selon les chiffres du Gouvernement basque.
Le 3 juin, Mola meurt dans un accident, laissant ainsi Franco sans rival. À la tête de l'armée, avec le titre de généralissime, il prend peu à peu le contrôle de l'Espagne. Un manque chronique d'effectifs le pousse à enrôler de force dans les régions qu'il contrôle. On compte également de nombreux engagements volontaires, 60 000 par exemple pour les Canaries. Il recrute également des alfereces (sous-lieutenants) provisoires : il s'agit d'étudiants ou de jeunes cadres bénéficiant d'une formation militaire accélérée. 30 000 sont ainsi recrutés pendant la Guerre civile. Sur ce chiffre, un tiers demeurera dans l'armée, le reste constituant les futurs cadres du régime franquiste.
La guerre civile se termine le 1er avril 1939, après la bataille de l'Ebre (de juillet–octobre 1938), qui sonne le glas des espoirs républicains, et la conquête de la Catalogne. Franco se retrouve seul maître de l'Espagne et il devient officiellement "chef de l'État". Il impose alors une dictature empirique sur les principes du national-catholicisme. Les démocraties ne tardent guère d'ailleurs à reconnaître le nouveau régime et la France envoie le maréchal Pétain comme premier ambassadeur dès le défilé de la victoire à Madrid.
À la fin de la guerre civile, on dénombre plus de 150 000 soldats morts durant les combats (autant de civils). Plus de 440 000 républicains espagnols se sont réfugiés en France (comptabilisés au 9 mars 1939) puis encore des dizaines de milliers d'autres les rejoignent contraints à l'exil pour échapper à la terrible répression qui s'abat alors sur l'Espagne (plus de 30 000 exécutions sommaires). Des estimations récentes donnent le chiffre de plus de 200 000 personnes fusillées ou mortes suites aux mauvais traitements dans les prisons franquistes et dans le camp de concentration de Miranda après 1939.
Conscient de son inexpérience en matière politique, Franco s'appuya sur son beau-frère, Ramón Serrano Súñer, la Phalange et l'Église catholique, ralliée à son camp après les massacres anticléricaux de 1936, sans oublier les monarchistes (carlistes, conservateurs et autres).
[modifier] La dictature de Franco
Durant la Seconde Guerre mondiale, l'Espagne reste officiellement neutre mais soutient l'Allemagne au début de la guerre : en juin 1941, Franco envoie une division sur le front de l'Est contre l'Union soviétique (cette unité appelée la "Division Azul", ou Division Bleue, qui combat sur le front de Léningrad) ; en août de la même année, il autorise le régime nazi à recruter 100 000 ouvriers espagnols « volontaires » pour aller travailler en Allemagne ; les navires de guerre allemands peuvent se ravitailler et être réparés dans les ports espagnols ; les services secrets espagnols et allemands collaborent pour recueillir des renseignements sur les Alliés ; l'Espagne fournit le tungstène indispensable à l'industrie d'armement allemande.
Mais l'Espagne ne s'engagea finalement pas militairement aux côtés de l'Allemagne en octobre 1940 comme le souhaitait Ramón Serrano Súñer, ministre des affaires étrangères jusqu'en 1942 et beau-frère de Franco. Cette non intervention est due, comme le souligne Joseph Pérez, aux exigences trop élevées et irréalistes de Franco, comme la prise de possession des colonies françaises du bassin méditerranéen. Ces exigences irréalistes étaient-elles voulues? Pour Joseph Pérez, elles ne résultent pas d'un quelconque calcul : la volonté de Franco de s'impliquer est réelle. Pour Bartolomé Bennassar, Franco gagnait du temps et laissait se faire les luttes d'influence au sein de son gouvernement. Il n'avait pas non plus les moyens d'engager l'armée au côté de l'Allemagne alors que le pays était en pleine répression.
À son retour d'Hendaye où il a rencontré Franco, Hitler exprime son mépris pour le personnage (qui l'a d'ailleurs fait attendre en gare). De plus, Hitler ne voulait pas mécontenter le maréchal Pétain, dirigeant d'un pays aux richesses abondantes, pour obtenir le maigre appui d'une Espagne exsangue. Si Franco semble avoir été aussi sensible à la théorie du « complot judéo-maçonnique », de nombreux Juifs passeront cependant la frontière pyrénéenne pour se réfugier en Espagne, avant, pour certains, de gagner d'autres pays. Mais surtout Franco fait délivrer par ses consulats, notamment en France, en Hongrie et en Grèce, des passeports espagnols aux Juifs descendants de ceux qui ont fui l'Espagne après 1492. Ainsi Franco aurait évité la déportation de 70 000 Juifs, en s'interposant auprès de Hitler. C'est à ce titre qu'il fut reconnu comme un "Juste" par l'État d'Israël.
Devant les pressions américaines (les États-Unis fournissent le pétrole à l'Espagne), les problèmes économiques soulevés par l'autarcie sur laquelle essaie de s'appuyer le régime, et la résistance victorieuse de la Grande-Bretagne, Franco reste en retrait et abandonne peu à peu son soutien aux forces de l'Axe à partir de l'été 1943. Son meilleur allié est à l'époque Antonio de Oliveira Salazar, bien que les relations personnelles entre les deux hommes soient tendues mais le dictateur Salazar est soutenu par les Britanniques.
À la fin de la guerre, le régime est très fragile : la situation économique laissée par la Guerre est désastreuse. L'autorité de Franco est condamnée quasi unanimement par la communauté internationale. Cependant, dès 1945, les britanniques épargnent et soutiennent indirectement le régime franquiste contre les français qui soutiennent l'isolement de l'Espagne (isolement approuvé lors de la conférence de Potsdam). À partir du discours sur le rideau de fer, l'Espagne va apparaître vite comme un rempart contre le communisme aux yeux des anglo-saxons et les rapports se détendent. Le régime reprend contact avec les Britanniques et les Américains via son ambassade au Portugal et postule à l'OTAN au début des années 50. Franco autorise les États-Unis à implanter 4 bases sur le territoire espagnol en septembre 1953 (traité hispano-américain).
Le régime gagne peu à peu sa légitimité. L'Espagne entre à l'ONU en 1955 puis le président américain Dwight Eisenhower, un des grands vainqueurs de la Seconde guerre mondiale, vient en Espagne en 1959 et défile triomphalement à Madrid au côté de Franco. Le régime est sauvé.
La loi sur les principes fondamentaux du Movimiento Nacional est votée le 17 mai 1958 alors que le régime évolue et quitte définitivement ses oripeaux fascistes sous l'influence de l'Opus Dei.
Le régime se libéralise peu à peu dans les années 1960 sur le plan économique, beaucoup moins sur le plan politique où le Caudillo règne sans partage.
Les infrastructures (chemins de fer et réseaux routiers) sont modernisées et un gigantesque système hydraulique (barrages et irrigation) est construit pour contrer les effets de la sécheresse. L'agriculture espagnole atteint alors un développement colossal qui fait trembler (notamment en France) à l'idée que ce pays puisse entrer dans le Marché commun. Le taux de croissance atteint alors 8% par an.
[modifier] Évolution du régime franquiste
- Voir article détaillé sur le franquisme
[modifier] La fin du régime franquiste
En 1969, c'est devant les Cortes espagnoles que Franco désigne Juan Carlos pour lui succéder à sa mort, en tant que roi d'Espagne.
Au début des années 1970, malade, Franco se résout à nommer un premier ministre pour diriger son gouvernement. Il choisit son bras droit, l'amiral Luis Carrero Blanco. Celui-ci est tué dans un attentat des Basques de l'ETA le 20 décembre 1973 à Madrid.
De plus en plus affecté par la maladie de Parkinson qui le ronge depuis 1969, Franco est victime d'un refroidissement en 1975, puis d'une hémorragie interne qui entraîne son transfert à l'hôpital de la Paz. Après une opération le 14 octobre, il est dans le coma. Il sera maintenu en vie artificiellement afin, selon certains auteurs, que le prince Juan Carlos accepte le 30 octobre d'assumer les fonctions de chef de l'État. Malgré sa maladie, il signe les dernières sentences à la peine de mort de 8 activistes de l'ETA et le FRAP, et autorise le retrait du Sahara espagnol qui sera ensuite annexé par le Maroc. La fille du dictateur agonisant persuade les médecins de le laisser mourir. Il s'éteint le 20 novembre 1975 à 5 h 20 du matin. Le bulletin officiel annonçant le décès énumère ainsi les causes de la mort :
- « Maladie de Parkinson, cardiopathie, ulcère digestif aigu et récurrent avec hémorragies abondantes et répétées, péritonite bactérienne, insuffisance rénale aiguë, thrombophlébite, broncho-pneumonie, choc endotoxique et arrêt cardiaque. »
Franco fut inhumé à la basilique Sainte-Croix del Valle de los Caìdos Comme il était prévu depuis longtemps, la monarchie fut rétablie après sa mort en la personne de Juan Carlos Ier, petit-fils du dernier roi d'Espagne (Alphonse XIII).
[modifier] Postérité franquiste
L'héritage principal de Franco est le retour de la Monarchie en Espagne mais aussi indirectement le terrorisme de l'ETA et la situation du Sahara occidental. Trois autres principes imposés par le Caudillo à son successeur ont été respectés pendant le processus de transition :
- seuls les Cortès franquistes et le Mouvement national (parti unique) peuvent décider de leur propre dissolution, qui fut achevée le 1er avril 1977
- aucune chasse aux sorcières contre des militaires ou des membres de l'administration ne serait effectuée en cas de démocratisation du régime.
- l'unité de l'Espagne ("Una, Grande et libre") doit être maintenue, ce qui signifie pas d'indépendance pour la Catalogne, ni pour le Pays basque (néanmoins, l'établissement des Communautés autonomes (Autonomias) sera inscrit dans la nouvelle Constitution de 1978).
Sur le plan culturel, le vent de liberté que l'Espagne a connu après la fin du franquisme aboutit logiquement une libération. Elle est accompagnée d'une ébullition créatrice avec l'apparition d'une nouvelle génération de créateurs et d'artistes. Ce renouveau est nommé "la Movida".
[modifier] Projet de recommandation de condamnation du régime par le Conseil de l'Europe (2006)
Le 4 novembre 2005, un projet de Recommandation émanant de la Commission des questions politiques de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe déclare la Nécessité de condamner le franquisme au niveau international [1].
Ce projet, qui devrait être débattu en mars en commission permanente de l'assemblée, soutient que "la violation des droits de l’homme n’est pas une affaire interne qui ne concerne que l'Espagne seule, raison pour laquelle le Conseil de l’Europe est prêt à engager un débat sérieux sur ce sujet au niveau international.
En outre, le projet de rapport recommande au Conseil des Ministres de déclarer le 18 juillet 2006 comme journée officielle pour condamner le régime franquiste.
[modifier] Toponymie
Franco est mort depuis 30 ans, mais son régime a laissé de nombreuses traces dans le paysage urbain espagnol.
Si beaucoup de rues au nom du Caudillo ou du Generalisimo ont été débaptisées au début des années 1980, de nombreuses artères, notamment dans les villes moyennes, continuent de célébrer Franco ou ses alliés (par exemple José Antonio Primo de Rivera, le général Mola, le Général Sanjurjo).
Ainsi León, Chinchon, Santander, Santa Cruz de Tenerife ou Puerto de la Cruz (Tenerife) ont gardé leur toponymie franquiste.
Des monuments continuent également de célébrer Franco, ses alliées et ses victoires (Arco de la Victoria à Madrid, statue à Santander, divers monuments aux morts, l'Alcazar de Tolède).
En juillet 2002, le monument équestre représentant Franco, située durant 35 années sur la place centrale de sa ville natale de Ferrol (El Ferrol del Caudillo), fut déboulonné pour être transféré à l'arsenal militaire.
En 2004, le nouveau gouvernement socialiste espagnol a proposé une loi de réparation envers les victimes de la guerre et de la dictature. Il a demandé également que la toponymie et tous les symboles franquistes subsistant soient retirés de la voie publique. Les opposants à cette dernière proposition dont Felipe Gonzalez parlent de combat d'arrière-garde et rappellent que ces monuments font partie de l'héritage espagnol, pour le meilleur et pour le pire.
Dans la nuit du 16 au 17 mars 2005, à 1h00 (GMT) sur décision du conseil des ministres, la statue équestre de Franco au centre de Madrid a été déboulonnée et transférée dans un hangar à l'abri des regards.
Le 8 novembre 2005, sa statue (inaugurée en 1977 pour commémorer son action en tant que colonel de la légion après le désastre de Annual en 1921), située dans la ville de Melilla fut déplacée de 50 mètres pour permettre la réalisation de travaux publics. Le gouvernement (conservateur) de la cité autonome de Melilla a refusé qu'elle quitte la voie publique et soit transférée au musée militaire comme le réclamait l'opposition locale.
[modifier] Monnaie et timbres
Le portrait de Franco a figuré sur de nombreuses pièces de monnaie et timbres-poste espagnols. Toutes les pièces à son effigie ont été retirées de la circulation le 1er avril 1997.
[modifier] Les Espagnols et Franco 30 ans après sa mort
Au moment du 30ème anniversaire de la mort de Franco, une enquête de l’Institut Opina (du 17 novembre 2005, voir le lien en espagnol dans la section Liens externes) est publiée pour connaître l’opinion de la société espagnole sur la figure historique de Franco, l’héritage de son régime et le risque de répeter cette période. À la question sur le jugement qu'ils portent sur la dictature de Franco, 63,7% la jugent négative, 23% sont sans opinion et 13,3% la jugent positive.
Selon un sondage de la radio Cadena SER publié le 18 novembre 2005, 55,5 % des espagnols déclarent éprouver de l'"indifférence" envers le dictateur, 29,8 % du "rejet" et 7,6 %, de la "nostalgie".
Une enquête du Centre d'enquêtes sociologiques relève que 65,9 % des Espagnols considèrent que les victimes de la guerre civile ont reçu "une reconnaissance différente selon le camp auquel ils appartenaient", mais estime à 72,9 % qu'un "hommage doit les inclure toutes".
Enfin, toujours sur le sujet, selon un autre sondage publié le 19 novembre 2005 par le quotidien conservateur El Mundo, 41,3 % des Espagnols jugent que la politique du gouvernement socialiste de M. Zapatero "rouvre des blessures du passé" plutôt qu'elle ne "favorise la réconciliation" (25,5 %).
[modifier] Sa famille
- María Carmen Polo Martinez-Valdés (1902-1988): son épouse. Après avoir rencontré Franco en 1917, elle l'épouse en 1923 et en 1926, donne naissance à leur seul enfant, María. Elle est décédée à Madrid en 1988.
- María del Carmen Ramona Felipa de la Cruz Franco Polo: sa fille. Elle a épousé Cristóbal Martínez-Bordiú, marquis de Villaverde le 10 avril 1950. Elle vit aujourd'hui surtout à Miami (Floride). Sa fille a épousé Alphonse « duc d'Anjou » et leur fils cadet est aujourd'hui le prétendant légitimiste à la couronne de France, Louis XX. elle dirige La Fondation Franco, fondée en 1977. Ses objectifs ont pour but de veiller sur la mémoire du dictateur.
- Nicolás Franco(1891-1977): le frère aîné. Ingénieur naval, fonctionnaire du ministère de la Marine, il est devenu le principal conseiller du Caudillo au début de la guerre civile. Il termine sa carrière comme Ambassadeur à Lisbonne puis comme homme d'affaires.
- Pilar Franco (1894-1989): la sœur. Membre des phalanges espagnoles, elle ne joua cependant aucun rôle politique. Ses deux livres de souvenirs personnels publiés en pleine transition démocratique ont été des best-sellers.
- Ramón Franco (1896-1938): le frère cadet. Aviateur célèbre et populaire, de conviction républicaine qui le conduise en prison sous la dictature de Miguel Primo de Rivera, il n'en rallie pas moins son frère aîné après juillet 1936. Il meurt le 28 octobre 1938 dans un accident d'avion.
- Ramón Serrano Súñer (1901-2004) : le beau- frère. Il a épousé Zita, la sœur de Carmen Polo. Impliqué dans le pronunciamiento de 1936, il est emprisonné par les républicains. Évadé en février 1937, il supplante Nicolás Franco comme conseiller et ministre du Caudillo. Proche du fascisme italien, il est éloigné à partir de 1942.
[modifier] Voir aussi
[modifier] Bibliographie
- Bartolomé Bennassar, Franco, Paris, Perrin, coll. « Tempus », 2002 (1re édition 1995) (ISBN 2262018952) ;
- Paul Preston, Franco, New Ed. edition, 1995 (ISBN 0006862101).
- Max Gallo, Histoire de l'Espagne franquiste, Robert Laffont, 1969
[modifier] Liens internes
[modifier] Liens externes
- (fr) Le Régime franquiste
- (es) Fondation Francisco Franco
- (es) Sondage opinion 30e anniversaire
- (es) Biographie de "Francisco Franco"
- (en) Biographie de Franco sur le site Spartacus
- (es) Biographe de la BBC
- (en) Biographíe détaillée
- (en) biographie
- Video
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